Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Moriarty de Ryôsuke Takeuchi et Hikaru Miyoshi

Titre : Moriarty

Auteurs : Ryôsuke Takeuchi (histoire) et Hikaru Miyoshi (dessins)

Éditeur vf : Kana (shonen)

Années de parution vf : Depuis 2018

Nombre de tomes vf : 18 (en cours)

Histoire : Deux frères orphelins sont accueillis dans la famille Moriarty, grâce aux ambitions cachées du fils aîné Moriarty, Albert. Ce dernier abhorre l’aristocratie à laquelle il appartient et le système social qui régit la société britannique. Albert a vu en l’aîné l’intelligence et le charisme dont il avait besoin pour accomplir son rêve de nettoyer la société de ces « êtres inutiles et sales ». Albert propose de leur offrir sa richesse et son influence à condition que les garçons mettent leur intelligence au service de son rêve. 13 ans plus tard, à côté de leurs activités officielles, les frères Moriarty sont devenus des « conseillers privés ». Avec William à leur tête, ils aident les gens du peuple, victimes d’injustices, à se venger des riches qui les ont fait souffrir.

Mes avis :

Tome 1

Moriarty est la dernière grosse licence de Kana que beaucoup attendait depuis des mois et qui est sorti à grand renfort de pub un peu partout sur les réseaux sociaux qui avait de quoi en faire baver plus d’un ^^ Le pitch, découvrir l’homme derrière le personnage que l’on croise dans Sherlock Holmes. Les auteurs cherchent à répondre de façon originale à la question : « Mais qui est dont Moriarty ? » Et je dois l’avouer, la réponse m’a plu.

En effet, le duo de mangaka nous présente une version dépoussiérée du personnage de Conan Doyle. Ils lui donnent une dimension humaine et sociale absente de l’oeuvre originale qui si elle ne m’a pas surprise m’a séduite. Ainsi dès le premier chapitre, on revient longuement sur l’enfance de Moriarty et les événements fondateurs du personnage. Ici, les auteurs utilisent des grosses ficèles mais c’est bien fait. Le récit est dynamique, prenant, joue bien sur les clichés du genre et rend parfaitement bien l’ambiance de l’Angleterre du XIXe. Le décor est donc rapidement et très bien planté. On sait qu’on va suivre Moriarty dans sa quête de justice avec les proches qu’il aura amassé au fil de ses aventures. Les chapitres suivants présentent un format : 1 chapitre = 1 affaire. J’espère juste qu’on ne conservera pas ce format tout du long, ce serait dommage.

Pour en revenir à Moriarty, c’est un personnage très charismatique dont le dessinateur rend à merveille l’aura de génie à l’intellect supérieur. Même si ses intentions de départ sont bonnes, lutter contre la société de classes, on sent quand même chez lui de grosses prédispositions à la folie. Sa façon de parvenir à ses fins étant quand même très extrême. Le seul couac pour moi, c’est que ce n’est absolument pas crédible d’avoir un enfant comme lui, ce qui m’a moins gênée une fois adulte toutefois.

Il s’entoure rapidement de personnages aussi haut en couleurs que lui, à savoir son frère adoptif Albert et ses compagnons de crime Molan et Fred, qui ont tous une classe incroyable et un caractère bien distinct parce que les auteurs ont parfaitement défini les critères de chacun. Le seul qui est un peu en retrait, un peu fade, c’est Louis, le frère de Moriarty, un peu trop dévoué à mon goût, ce qui le rend falot par rapport aux autres. Ce qui donne au final, une équipe soudée où chacun agit en fonction de ses spécificités mais dans un but commun qui les relie.

Ainsi le titre propose une revisite assez moderne et dans l’air du temps du personnage de Moriarty avec au passage une critique de la société de classes du XIXe siècle, qui peut faire écho à des situations actuelles, le tout dans un habillage très séduisant grâce à des dessins léchés et dynamiques et des personnages charismatiques et énigmatiques. Ce premier tome est une mise en bouche pour nous présenter l’univers auquel on va se frotter, nulle doute que cela va se corser par la suite. Une très bonne découverte.

Tome 2

La bonne découverte aura malheureusement été de courte durée. Avec ce tome, on tombe dans les travers du genre, à savoir une surenchère fort peu originale autour du mythe de Sherlock.

Avec Sherlock en couverture, j’étais assez emballée à l’idée de lire ce tome. Malheureusement, ce fut une petite déception. Tout d’abord la vision du personnage choisie par les auteurs est assez fade à mon goût. Ils reprennent la désinvolture de celle de Moffat sans son côté british si charmant. Ici, on a juste un gamin qui aime étaler sa science et jouer des tours. Bof bof. Ça en fera vibrer certains mais pas moi.

Et surtout, le gros point noir, c’est qu’il commence déjà à voler la vedette à Moriarty dans ce tome. Ainsi toute la première partie n’est là que pour introduire ce personnage et sa future « rivalité » avec Moriarty que celui-ci compte bien mettre en scène. C’est peut-être la seule chose que j’ai trouvé de positif dans l’intrigue. J’ai beaucoup aimé voir l’envers des coulisses de ce qui plus tard tiendra lieu de jeu du chat et de la souris. Parce que sinon Sherlock vole complètement la vedette à Moriarty, qui passe alors pour un personnage très froid et figé dans ses idéaux aussi bien que dans sa posture générale. C’est dommage parce que sa révolte contre la noblesse et les injustices subies par le peuple est tout à fait légitime. La mise en scène qu’il souhaite opérer est originale également et pourrait être prenante à suivre. Mais ici, je vois déjà s’annoncer une simple redite de ce que je connais de Sherlock et je ne suis pas sûre d’avoir envie d’en suivre une énième version…

Tome 3

Troisième tome et je ne suis toujours pas bien convaincue. En fait, je ne retrouve pas dans cette série ce que j’aimerais vraiment voir à savoir uniquement l’histoire du côté de Moriarty. J’ai encore trop de Sherlock et surtout on s’appuie trop sur les histoires les plus connues de celui-ci alors que j’aimerais plutôt découvrir les moins portées à l’écran. Je sais que c’est moi qui suis difficile et que ce sont mes attentes que je projette sur l’oeuvre qui m’empêchent de l’apprécier.

En soit, le titre est agréable à lire, on passe un bon moment à chaque fois. Les histoires reprennent les nouvelles connues de Sherlock dans les grandes lignes. Cependant, je ne peux pas m’empêcher de ressentir parfois une certaine facilité, comme lors de la résolution de l’Étude en rouge où tout est beaucoup trop téléphoné pour que ce soit crédible. Du coup, je n’arrive pas à ressentir la puissante aura de déduction de Sherlock. C’est encore beaucoup trop léger pour moi et quand les auteurs essaient de noircir le tableau, ça fait toc… Alors certes les récits sont rythmés, dynamiques, les personnages bien définis et bien campés mais il me manque le petit truc en plus.

Dans la seconde histoire de ce tome, on s’éloigne enfin de Sherlock et ça fait du bien, mais ce qu’on revit avec le Chien de Baskerville fait effectivement redite. On voit juste les garçons partir en mission commando, c’est tout. Ça manque d’ampleur même si ça permet de creuser la personnalité de Moriarty et de montrer qu’il n’est pas juste un révolutionnaire mais aussi quelqu’un d’attacher à la justice à tous les niveaux.

Moriarty reste donc une lecture sympathique mais pas le coup de coeur annoncé, ni le super shonen que certains clament sur le net. C’est un titre assez banal en soit, qui reprend des recettes éculées et qui ne parvient pas à se détacher de son modèle, Sherlock Holmes, malgré les promesses des débuts.

Tome 4

Enfin un tome de Moriarty qui m’a vraiment emballée. C’est paradoxal parce que ça doit être celui où l’on voit le moins le héros et celui où l’histoire est la plus éloignée de « son plan ». Mais au moins, j’ai senti un vrai souffle et de vraies bonnes idées.

J’ai beaucoup aimé qu’on se centre sur Moran, mon personnage préféré dans l’équipe de Moriarty, et qu’ainsi on parle de politique britannique et même de géopolitique. On se retrouve avec une histoire d’espionnage et de vengeance délicieusement sombre, où le duo que Moran forme avec MerryPenny (pas sûre du nom) est savoureux. Le ton est à la fois léger, plein d’humour et de petite pique comme dans les romances victoriennes que j’apprécie tant, et plus sombre puisqu’on revient sur le passé du Colonel. Ça parle de la politique colonialiste et expansionniste des anglais, de leurs relations avec leurs colonies mais aussi avec les pays jouxtant, et pas seulement on en apprend plus aussi sur le traitement fait aux soldats britanniques là-bas. L’ensemble est très dynamique et se lit avec grand plaisir. J’ai enfin eu le sentiment de lire quelque chose de neuf.

Cependant, les auteurs n’oublient pas pour autant la trame originelle et rattachent cette sombre affaire au grand plan de Moriarty. Celui-ci en effet compte maintenant sur la totale dévotion de Moran, désormais qu’il a réglé sa vengeance. Du coup, on rebascule un peu brutalement dans le dernier quart du tome sur ce dernier et sa relation avec Sherlock, et là ce fut un peu la douche froide pour moi. J’ai vraiment du mal avec l’interprétation du personnage faite par les mangakas. Je le trouve bien trop léger et frivole, il m’agace. Sa rencontre avec Moriarty dans le train et nulle de tension, alors que je comptais vraiment dessus. Je ne sais, je trouve qu’il manque vraiment quelque chose entre eux pour le moment. J’ai longtemps réclamé une vraie opposition franche entre eux. En fait, je crois que je préfèrerais qu’ils se jaugent et se défient de loin finalement. Je veux voir la mise en place des sombres plans de Moriarty pour mettre Sherlock en difficulté, point. Le reste très superflu pour moi pour le moment.

Tome 5

Quand les auteurs évacuent le blabla inutile et artificiel sur la dénonciation des différences de classes sociales, on se retrouve avec une histoire bien plus passionnante et intéressante à suivre. C’est le cas dans ce nouveau tome.

Ce nouvel opus se partage entre deux histoires. La fin de celle entamée dans le volume précédent se passait dans un train et avec ses airs d’Orient Express d’Agatha Christie, il m’a beaucoup plu parce qu’il faisait travailler Moriarty et Sherlock en parallèle. C’était classique mais efficace et assez amusant. Ça a presque fini trop vite au final.

La seconde histoire se centre sur Sherlock, ce que je regrette, mais elle concerne un personnage que j’ai toujours beaucoup aimé dans la mythologie de la série : Irène Adler. C’est assez amusant de la voir manipuler Sherlock à sa guise. Ce dernier me déçoit assez, je ne le trouve pas du tout charismatique. C’est plus une grande gigue qui fait le pitre qu’autre chose. Il manque un peu de tout, de jugeote, de charisme, de virilité, bref j’ai beaucoup de mal avec cette interprétation du personnage. A l’inverse, son frère Mycroft m’a bien amusé et l’Irène qui apparait ici est parfaite ! Maligne, impitoyable mais avec des idéaux. J’aime beaucoup. Comme cette histoire semble aussi de loin mêler la famille Moriary, j’attends de voir ce qu’elle va donner dans le prochain tome.

J’ai donc pris du plaisir à lire ce 5e tome. Je préfère quand on ne part pas dans de grandes diatribes contre la noblesse et qu’on s’attaque à de vraies affaires. Mais ici, je regrette une fois de plus que Moriarty se fasse si discret au profit d’un Sherlock bien fade.

Tome 6

Je continue à avoir un avis partagé sur cette série dont certains aspects me plaisent énormément et dont d’autres me laissent assez dubitative. Quand j’ai commencé la saga, je m’attendais à ce que les auteurs suivent quand même le canon de Conan Doyle mais plus le temps passe plus ils s’en éloignent et ici de manière tellement grotesque que ça m’ vraiment agacé. A force de vouloir faire des effets de manches pour impressionner certains lecteurs, d’autres comme moi finissent par trouver ça franchement ridicule !

Pourtant il y a également des qualités dans cette histoire. Même si c’est complètement abracadabrantesque et que ça montre la méconnaissance complète de notre Histoire européenne, ce que cachaient les papiers volés par Irène est assez surprenant. J’ai aimé la façon dont est mise en scène cette affaire, comment elle implique au final tous les personnages clés de l’histoire pour mettre en place les rouages de la suite afin de retomber, je l’espère, sur la relation qu’on connait entre Moriarty et Sherlock. C’est assez bien pensé, même si la propension au verbiage et à l’explication à outrance peut agacer sur bien des passages, pouvant faire penser que l’auteur se croit obligé de tout expliquer par le menu à son lecteur trop bête pour comprendre autrement…

Non, ce qui m’a vraiment agacé au final, c’est le final. J’ai trouvé tout cela beaucoup trop GROS, complètement irréaliste – oui, on est dans Moriarty, je sais, mais là ça dépasse tout ! – et pas crédible. J’ai eu l’impression que les auteurs voulaient trop impressionner les lecteurs en faisant intervenir de façon surprenante – forcément puisque c’est totalement improbable et illogique – des personnages ultra connus de par ailleurs. Et je crains que ça ne s’arrange pas ensuite… Alors dans un sens, le « complot » mis en place par les frères Moriarty et l’aide qu’ils trouvent forment un tout cohérent et ce n’est pas déconnant de voir ceci se mettre en place pour secouer l’ordre établi comme ils le souhaitent, mais dans l’autre pourquoi tous ces effets de manches spectaculairement ridicules ?

J’ai vraiment du mal à trancher dans un sens ou dans l’autre avec cette série. J’aimerais beaucoup l’aimer parce qu’elle se passe dans un univers qui me plait avec des personnages qui ont des idéaux auxquels je peux être sensible. Mais la mise en forme de tout cela est vraiment à revoir.

Tome 7

Un nouveau tome avec Sherlock en retrait égal un tome où je revis en peu. J’avoue que je trouve la série bien meilleure sans cet énergumène et que je préfère largement la dynamique du groupe de Moriarty lui-même que celle entre Moriarty et Sherlock. Alors ça me soulage d’assister à une histoire où on ne le voit pas le moment.

L’histoire en question, c’est d’abord celle de l’intégration d’Irène Adler, transformée en James Bond, à l’équipe de Moriarty, le temps d’un vol dans une banque assez amusant tant il sent la mise en scène par le chef de la bande. Mais surtout l’histoire principale, c’est la revisite de celle de Jack l’éventreur par les auteurs de ce manga. Pour cela, ils imaginent une troupe d’hommes prenant le surnom de Jack l’éventreur pour commettre des crimes dans Whitechapel et réveiller les tendances à la rébellion de ces populations afin de secouer le pouvoir. Sauf que Jack l’éventreur, c’était déjà le surnom du mentor des frères Moriarty et qu’ils sont bien décidés à découvrir qui se cache derrière toute cette histoire.

Nous voilà alors lancés dans une ambiance de thriller et de course poursuite dans les sombres rues tortueuses de Whitechapel. C’est un moment bien mis en scène avec juste ce qu’il faut de menace pour nous donner quelques palpitations, mais il y a quand même beaucoup de verbiages inutiles, freinant la narration, avant d’en arriver là et c’est bien dommage. Parce que ce rythme percutant que l’on retrouve à la fin, il faudrait l’avoir plus souvent. Les grands discours auxquels on a droit depuis le début manquent d’impact s’ils ne sont pas suivis de plus d’action que ce que l’on a eu jusqu’à présent.

Ainsi ce tome est meilleur parce qu’il n’y a pas Sherlock mais les défauts inhérents au style que les auteurs ont voulu donner au titre persistent et continuent à l’empêcher de donner sa pleine mesure. C’est frustrant.

Tome 8

Les auteurs poursuivent sur la bonne lancée de la dernière fois, avec à nouveau un tome plus sérieux, qui commence à bien articuler les différents éléments mis en place par le clan Moriarty. Ça fait plaisir à voir.

Première aventure à laquelle nous assistons, la mise au jour par Moriarty de l’organisation derrière la figure de Jack l’éventreur. Je craignais un peu l’utilisation de ce mythe, au final je suis assez satisfaite de ce que Moriarty en a fait, c’est-à-dire un instrument pour tester Sherlock. C’est astucieux et cruel à la fois, comme le personnage et cela en dit long également sur les extrémités où il est prêt à aller pour atteindre son but.

L’histoire suivante est d’ailleurs en lien direct car pour couvrir tout cela Scotland Yard va arrêter un innocent à l’aide de fausse preuves. Moriarty y voit une nouvelle occasion de tester notre cher Sherlock et ce dernier y voit une seconde chance dans cette affaire hautement sensible. J’ai beaucoup aimé la tension et le jeu de dupes de cette affaire, chacun plaçant ses pions. Sherlock était beaucoup plus calme, ce qui m’a plu. Il sent bien que quelqu’un le manipule dans l’ombre mais il ne sait pas encore dans quel but, c’est peut-être ce qui l’assagit. En tout cas, les méandres de cette affaire était fort plaisantes à suivre et pour une fois les personnages secondaires valaient vraiment le coup. Seul bémol, c’est bien trop bref, cela aurait mérité d’être vraiment creusé notamment au niveau des implications politiques.

Enfin, nous concluons le tome par une rencontre au sommet entre nos deux génies. Sherlock va demander « conseil » à William. Le lecteur en profite pour voir William dans son habit de prof et pour assister à une résolution assez simple d’un mystère par Sherlock. C’est un petit chapitre qui ne paie pas de mine mais qui en dit long sur la relation entre les deux antagonistes qui en fait ne sont pas si éloignés que ça dans leurs échelles de valeurs et leur envie de voir la société évoluer. Ce sont juste leurs manières d’y parvenir qui diffèrent.

Les auteurs sont parvenus dans ce tome à calmer le jeu au niveau des personnalités excentriques et trop bruyantes pour moi qu’ils avaient attribué à certains personnages. Cela a permis de donner des intrigues plus posées mais également plus tendues, et de mieux voir se dessiner le projet de Moriarty et les attentes qu’il place en Sherlock ainsi que les problèmes qu’il lui pose. J’aime beaucoup cette facette de l’oeuvre où on assiste à un duel entre deux génies.

Tome 9

Les tomes de Moriarty ne sont jamais aussi bon que quand ils se concentrent justement sur le héros et sa famille !

Avec ce nouveau tome sans Sherlock, les auteurs se centrent sur la famille Moriarty et son projet, ce qui fait un bien fou. On retrouve alors l’essence du titre, plutôt que de vouloir à tout prix satisfaire un certain public amateur de Sherlockeries.

Le titre reste cependant classique, un brin tape à l’oeil mais efficace car les auteurs ont compris quelles recettes fonctionnaient et lesquelles ils pouvaient utiliser pour leurs propos. Ça roule donc tout seul. Je me demande juste pourquoi Kana a mis un avertissement « Pour public averti » sur ce tome, alors que franchement cela n’a pas lieu d’être par rapport à d’autres titres de la même collection qui en sont dépourvus… Bref.

Après un premier chapitre léger et caricatural sur la foire aux mariages où nos frères organisent une Tea Party des plus drôle et cocasse mais un peu grinçante, on entre dans le vif du sujet : le nouvel ennemi qui fourbi ses armes contre eux.

En effet, notre joli trio a attiré l’attention d’un magnat de la presse un brin frappé : Milverton, qui est bien décidé à enquêter sur eux pour prouver qu’ils sont « Le prince du crime ». Pour cela, on revient sur un épisode clé de leur passé, qui fait parfaitement le lien avec leur combat présent.

J’ai beaucoup aimé cette suite plus enlevée. Le passé des deux frères est fascinant. On les découvre enfants et ils sont déjà très murs pour leur âge. Habitants alors dans un orphelinat, ils y occupent une place clé. Ils ont déjà une vive intelligence et une haine certaine de la noblesse contre laquelle ils vont se battre de façon surprenante le temps d’un procès qui restera dans les esprits. Cet épisode a tout le charme d’une mise en scène d’un épisode de Sherlock. C’est extrêmement bien joué, un peu comme dans une scène de théâtre où chaque acte se termine par un rebondissement. Excellent !

L’affaire suivante révèle un politicien duquel nos frères pourraient se sentir proches, puisque c’est un ardent défenseur de l’ouverture du droit de vote à l’ensemble du peuple. Personnage fictif inventé pour l’occasion, il va être le pion parfait pour faire le lien entre les aspirations sociétales des frères Moriarty et la chasse dans laquelle s’est lancée leur nouvel ennemi Milverton. Cependant ne le découvrant que dans l’ultime chapitre de ce volume, je ne peux que dire que je sens que cette histoire sera prometteuse, car on n’en voit pas bien plus.

Jouant toujours sur les codes des histoires de Conan Doyle et sur l’ambiance britannique de ce XIXe siècle sociétalement agité, Moriarty confirme son statu de série bien agréable à lire quand elle ne cherche pas à en faire trop pour plaire aux fans de la série d’origine. A vouloir copier l’original, ils se trompent, mais en insufflant leur propre identité, ils sont convaincants !

Tome 10

C’est avec cette couverture collector un peu décevante puisqu’elle cache celle de cette chère Miss Hudson de l’autre côté, que nous retrouvons les aventures de notre cher Prince du crime, des aventures qui depuis 2 tomes environs reviennent aux canons de cette version manga, ce qui me plaît beaucoup.

Dans ce tome, nous assistons à une longue mise en scène autour du personnage du député Whiteley, qui se bat sur le terrain légal pour faire aboutir une égalité de fait dans ce pays pourtant très inégalitaire. Il offre ainsi aux frères Moriarty la vitrine dont ils avaient besoin pour faire aboutir leurs idées, ce dont ils comptent bien se servir. Mais c’était sans compter un sacré coup du sort !

J’ai beaucoup aimé la mise en scène de ce tome. Dans un premier temps, nous entrons dans l’intimité de Whiteley et nous découvrons l’homme derrière le député. C’est fait certes un peu rapidement mais c’est le tempo donné depuis le début dans cette saga et cela permet de vite cerner le personnage. Le jeu qui s’instaure ensuite entre les différents grandes figures du crime en coulisses est assez fascinant. Ils tirent tour à tour les ficelles autour de ce député emblématique pour tirer le meilleur profit des actions qu’il pourrait mettre en branle. Ce n’est ensuite qu’une question de vitesse pour que le clan des gentils ou des méchants l’emporte.

Le coup de théâtre qui intervient m’a surpris je l’avoue. Il recomplexifie l’histoire qui était en passe de devenir peut-être un peu trop simple et facile. Whiteley devient alors le pion majeur de cette redistribution du jeu et cela nous amène tranquillement, nous lecteurs, au portrait de Moriarty, Prince du crime, tel qu’on le connait dans le canon de Sherlock. Les auteurs proposent ainsi un joli tour de passe passe pour faire se corréler le costume qu’ils ont fait endosser à leur Moriarty, un homme pétri d’ambitions égalitaires pour son pays, et le costume que l’on connait depuis toujours à ce rival sans pitié de Sherlock. C’est extrêmement bien joué.

Ainsi la critique de la société inégalitaire anglaise d’autrefois est bien utilisée dans cette intrigue pour développer les personnages, apporter de l’action, des rebondissements et du suspens, tout en dénonçant quelque chose de scandaleux. Le lieu et les acteurs de la politique anglaise ne sont pas épargnés non plus et c’est justifié. Cela donne un cadre crédible aux aventures qui se déroulent et cela donne véritablement corps aux personnages. Bien vu.

En revanche, je serai plus perplexe quant à l’idée de déjà faire revenir Sherlock dans le jeu et d’introduire de nouveaux éléments de ses histoires que l’on connait tous : les allusions de son frères à sa mort face à Moriarty tandis qu’il le traque, ou encore les fiançailles de John avec Mary. Ce sont des éléments que je ne voyais pas arriver si tôt. Le premier à la limite peut-être parce que comme le dit Mycroft, le temps est compté désormais maintenant que Le Prince du Crime est devenu l’ennemi n°1 d’Angleterre, mais le second n’a que peu d’intérêt à ce stade et dans cette histoire.

Ce dixième tome fut donc à nouveau une bonne surprise grâce à des auteurs qui ont su, dans la majeure partie de ce tome, faire le lien astucieusement entre leur vision de Moriarty et celle du canon de Conan Doyle, le tout avec une intrigue rythmée et avec un fond. J’espère qu’ils vont poursuivre sur cette lancée.

Tome 11

Décidément la série reste en dent de scie pour moi avec ce nouveau tome où une fois de plus on s’éloigne un peu trop, à mon goût, du coeur de celle-ci pour flirter avec la légende trop connue de Sherlock. J’aimerais tellement que les auteurs parviennent à s’en émanciper.

Un tome entier sans les Moriarty avec seulement Sherlock et Watson, c’est rude. On était bien lancé dans les tomes précédents mais ça n’a pas suffit, il a fallu que les auteurs reviennent à quelque chose de plus rassurant pour eux. Je le regrette un peu même si ce n’était pas désagréable à suivre.

En effet, ils ont fait le choix de reprendre une des aventures de Conan Doyle, celle mettant en scène l’arrivée de Mary, la fiancée de John, dont le père a disparu et qui reçoit une mystérieuse perle chaque année. Il n’en faut pas plus pour faire douter notre détective de choc et le mettre sur la piste d’un trésor qui aura de nombreuses ramifications.

La narration est archi classique mais efficace. On suit une enquête telle qu’on peut le faire dans le canon d’origine et dans sa version manga très remaniée : Détective Conan. Sherlock, qui doute de cette Mary sortie de nulle part, se laisse conduire vers l’enquête qu’elle lui propose de mener pour elle afin d’en apprendre plus. C’est sympathique à suivre car l’enquête est bien menée, avec son lot de surprises et de rebondissements. Il y est question d’histoires de famille, de trésor, d’exotisme et de vengeance, ce que la rend agréable à suivre. Il est amusant de plus de lire les commentaires de la clique de Moriarty lors de petites scènes entre les chapitres.

Cependant, l’ensemble manque une nouvelle fois de vie. C’est plat et sans imagination. Ça ne décolle pas. On n’est pas pris dans un souffle épique et on ne développe pas d’attachement particulier envers les personnages. Tout est extrêmement lisse, jusqu’aux dialogues et pensées, comme si les auteurs déroulaient une mécanique maintes fois huilée.

Oui, ce fut un bon moment de lecture, agréable de part une enquête facile à suivre, la découverte d’un nouveau personnage et un brin d’exotisme avec ce trésor et les morts qu’il sème sur son passage. Mais pour qui a vu la série télé britannique, par exemple, les personnages manquent cruellement de charisme ici et il est regrettable de retomber dans les bras de Conan Doyle au lieu d’inventer quelque chose d’inédit autour des Moriarty. J’espère que la suite avec l’intervention de Milverton saura plus me divertir et me faire vibrer.

Tome 12

Alors que je ne misais pas grand-chose sur ce tome pendant la première moitié de celui-ci, j’ai été totalement surprise et emballée par la fin que les auteurs ont su proposer et qui rejoint enfin ce que j’attendais de la série !

Depuis un moment, je peste parce que la série qui a beau s’appeler Moriarty, met surtout Sherlock en avant. Alors forcément quand j’ai vu que nous étions en plein dans les histoires de Mary, John, Sherlock et Milverton au début, j’ai un peu levé les yeux au ciel. Pas que ce soit désagréable à lire mais ce n’était pas ce que je cherchais ici. Si j’avais eu envie de replonger dans les histoires de notre détective londonien j’avais pour ça les romans originels ou la série de Moffat. Cependant, les auteurs du manga ont su agréablement me surprendre par la suite, ce qui me fait totalement revoir mon avis.

En effet, cette histoire avec Milverton, qui est un magnat de la presse en apparence, mais surtout un vrai psychopathe qui se délecte du malheur et de la détresse qu’il fait tomber sur les gens, est en fait un superbe élément déclencheur dans notre saga. Certes, il vient un peu tard, au bout de 12 tomes, mais il a le mérite d’être là. Grâce à lui, nous suivons d’abord de manière assez drôle et cocasse face film policier humoristique, un Sherlock et un Watson qui vont tenter de se venger de Milverton qui fait chanter la fiancée de ce dernier. La première confrontation est un modèle de ridicule et de caricature poussé à l’extrême. Puis le mouvement suivant de Sherlock visant à s’introduire chez lui est plus de drôlerie avec un joli de dupes. Mais c’est surtout après que cela prend une autre dimension.

En effet, dans la dernière partie du tome, toutes les pièces s’assemblent et alors, la vraie toile se révèle de manière percutante. On réalise que Milverton est effectivement un génie, il est parvenu à réunir les deux figures centrales de l’histoire pour que le voile tombe pour chacun. Ainsi, ce génie de la manipulation met face à face Sherlock et Moriarty à visage découvert pour la première fois et c’est jouissif. Assister devant nos yeux à la réunion de toutes ces intelligences après avoir élaboré un plan aussi complexe et diabolique est excellent ! J’ai adoré la mise en scène classique mais percutante avec ce moment où ils sont tous entre quatre yeux arme au point en pleine tempête dans une demeure esseulée battue par les vents. Cela dégage une pression dingue dont la bulle vient éclater par la réalisation que fait Sherlock sur ce qu’il savait, réalise et devine de la suite. Non, c’est vraiment excellent. Le point d’orgue de la série jusqu’à présent.

Oui, j’avais trouvé Milverton et son histoire archi caricaturale, mais je ne regrette pas de l’avoir suivi pour arriver à ce stade de l’intrigue, qui relance enfin vraiment l’histoire dans la direction que j’attendais depuis le début : la véritable confrontation en connaissance de cause des deux génies que sont Moriarty et Sherlock. Cela promet énormément pour la suite et encore plus avec les dernières paroles de Liam.

Moriarty a toujours été une série ambivalente pour moi, avec une dimension policière et criminelle qui me plaît, mais souvent une forme un peu trop légère et déjà vue qui m’agaçait, me donnant le sentiment de perdre mon temps malgré son potentiel. Les derniers moments de ce tome ont enfin révélé celui-ci et je croise fort les doigts que les auteurs poursuivent désormais sur cette ligne pour nous offrir le duel d’intelligences qu’on attend depuis le début dans ce décor de dénonciation des abus des puissants. Je n’ai jamais eu aussi hâte.

Tome 13

Mon regain d’intérêt pour la série se confirme avec ce tome, qui certes repose sur des bases classiques classiques, mais offre aussi enfin LE duel qu’on attendait tous, je pense.

Le précédent tome se terminait sur un gros climax entre Moriarty et Sherlock avec leur meurtre en commun et le basculement de chacun du côté sombre. Le voile était tombé et le temps du cache-cache aussi. L’auteur passe encore à la vitesse supérieure dans ce tome qui ne peut être abordé sans spoiler, puisqu’il repose sur la révélation à toute l’Angleterre de l’identité du Roi du crime, à savoir Moriarty. Une fois cela fait, la dynamique ne peut que changer.

J’ai d’abord eu peur dans les premières pages d’un focus malvenu sur Sherlock avec tout le mélodrame de sa relation avec Watson, qui trouve « pas bien » d’avoir tué quelqu’un même pour lui. Franchement, il y a longtemps que j’ai dépassé ça et j’ai vraiment trouvé ça culcul, même si oui, moralement il n’a pas tort.

J’ai largement préféré, comme toujours, le versant Moriarty parce qu’en se révélant, William prend tout le poids de ce qu’ils ont fait jusqu’à présent, sauvant les autres et se condamnant. Cet ange de la mort est donc terriblement déchirant, car oui, il va au bout de ses idéaux, mais pour cela il sacrifie tellement. La mise en scène des auteurs renforcent superbement ce sentiment aussi bien graphiquement que scénaristiquement. Je me suis plu, du coup, ici à voir ses proches avoir peur pour lui, avoir envie de le sauver et tenter de contrecarrer l’issue finale pour lui, tout en le suivant dans son plan. C’est un vrai jeu d’équilibriste.

Cela donne grâce à cela, à la fois un tome plein d’émotion, mais également un tome racé où on prend plaisir à voir Moriarty passer à l’acte, comme on le connaît dans le canon de Sherlock, le tout au vu et au su de tous, ce qui met une belle pression à la police, tout comme à la presse et à la population, ce qui est très bien rendu. La téléspectatrice du Club Dorothée que je suis n’a pas pu s’empêcher de remarquer les ressemblances avec les filles de Cat’s Eyes puisque Hojo s’était directement inspiré de Sherlock. La boucle est bouclée ainsi et j’ai pris grand plaisir à retrouver cette ambiance de course-poursuite, de jeu du chat et de la souris, même s’il y a mort à la clé.

Enfin, les auteurs de Moriary nous ont conduit là où on les entendait et cela fait un bien fou. Quel bonheur d’avoir LE duel tant attendu et que celui-ci se révèle à la hauteur. Certes, il y a un mélo mal dosé du côté de Sherlock, mais du côté de Moriarty, c’est poignant et énergique à la fois, avec une belle ambiance de meurtre et de chasse de l’assassin par Scotland Yard. J’ai adoré !

Tome 14

Avec cette belle couverture réversible où l’on voit Sherlock et Moriarty s’affronter et se chercher le sourire aux lèvres, les auteurs signent la fin d’un des axes principaux de l’histoire, quitte pour cela à prolonger un peu le plaisir en ajoutant un chapitre inhabituel. On les remercie !

L’affrontement entre Moriarty et Sherlock nous tient déjà depuis un moment. Je ne suis donc pas fâchée de le voir se terminer ici pour voir ensuite l’intrigue se relancer. Ça fera un bien fou à la série. Pour autant, cela ne doit pas se faire n’importe comment et les auteurs le sentent bien. Ils prennent donc un temps infini ici à placer leurs pions et à écouter tout le monde afin de préparer le grand final.

Si j’ai aimé l’attention qu’ils prêtent aux sentiments de chacun, notamment à l’amitié que Sherlock ressent pour Moriarty ou à l’amour de tous les proches de ce dernier pour lui, j’ai trouvé que narrativement cela rendait la lecture assez molle. En effet, on place plus de temps en palabre que face à de l’action et parfois cela se répète même, ce rend la lecture assez particulière. L’action n’intervient que brutalement qu’au milieu du tome et elle a tout d’une pièce de théâtre montée à la dernière minute, ce qui enlève toute crédibilité. C’est dommage.

En revanche, j’ai beaucoup aimé la façon dont les auteurs utilisent ici une véritable histoire de Conan Doyle qu’ils réinterprètent à leur sauce, changeant le lieu et les caractères des personnages. C’est futé ! J’ai aimé voir un Sherlock qui comprend et approuve d’une certaine façon les actions et idéaux de Moriarty, car ceux-ci sont parfaitement justifiés. C’était donc plaisant de le voir chercher une solution pour l’épargner. De la même façon, l’aspect politique de l’histoire est parfaitement géré, ainsi que l’après de cette terrible affaire, avec des répercutions bien dosées et de nouveaux rôles endossés qui rendent curieux de la suite.

Ainsi malgré la peur des auteurs de ne plus avoir de lecteurs ensuite parce qu’ils clôturaient ici tout un pan de l’histoire, moi, je serai au rendez-vous, car au contraire tout ce qui a été minutieusement mis en place ici visant la rédemption de chacun m’intrigue beaucoup. Alors c’était un tome longuet à lire mais avec une belle densité et des idées riches et bien tournées, montrant qu’on peut faire du neuf avec du vieux tant qu’on a une intention en tête.

Tome 15

Poursuite de ce nouvel arc sans le héros de l’histoire, c’est bizarre, c’est étrange, c’est poussif… Ça se laisse lire, c’est plein de plan, d’aventure, mais cela donne aussi le sentiment de rallonger inutilement l’histoire et de partir dans une drôle de direction contradictoire. Je demande à voir.

Dans ce nouveau tome, nous continuons à suivre l’ancienne équipe de Moriarty désormais aux ordres du frère de Sherlock cherchant à mettre fin à des fuites de documents confidentiels dans un contexte politique compliqué entre Grande Bretagne et Russie. Cela donne un classique récit d’espionnage / contre-espionnage, avec déguisements, pièges, camouflages, etc, pour récupérer ces documents et découvrir les coupables. Quand on aime ce type de récit, on doit apprécier car tous les codes du genre sont respectés. Il y a cependant le gros sentiment de suivre ici quelque chose de fade et saveur car sans la folie inventive de Moriarty. C’est donc un peu plat…

Il est cependant intéressant grâce à ce procédé d’assister enfin à la mise en lumière de celui qui était dans l’ombre, le frère de William : Louis. On le découvre, lui qui était toujours écrasé par la présence de son frère. C’est un peu la même chose pour les autres. Bond a ainsi aussi son moment de gloire, tout comme Penny. De plus, on découvre au détour de cette affaire, l’implication de Moran et cela va induire une nouvelle intrigue autour de lui pour le débusquer et l’arrêter. Le hic, c’est qu’après avoir tout fait pour défaire l’ordre établi, nos héros donnent un peu trop le sentiment de le suivre désormais et semble être passés de rebelles contre la royauté à ses plus grands soutiens, ce qui ne sonne pas juste pour moi.

Heureusement, pour les fans de la première heure, un petit bonus a lieu dans les dernières pages avec le retour attendu d’un personnage pour qui connaît le canon sherlockien. Il nous révèle ce qui s’est vraiment passé entre Moriarty et Sherlock et propose une revisite du roman de Conan Doyle faisant état de cette affaire dans un nouveau cadre géographique que j’ai trouvé pertinent, tout comme le cadre historique était bien respecté dans la première partie avec cette tension britanico-russe. Les auteurs font vraiment des efforts de ce côté-là même si parfois ça tombe à côté.

Tome un peu hybride, tome un peu bancal, il m’interroge sur la direction prise par l’histoire qui sans son moteur semble devenue encore plus classique et tomber dans les récits d’espionnage vus et revus. Cependant la surprise finale me donne envie de croire que ce n’est qu’un piège pour les lecteurs et que très vite le récit va retomber sur ses pieds et redevenir la critique sociale qu’on avait autrefois. J’espère ne pas me tromper car pour l’instant c’est terriblement fade…

Tome 16

Moriarty continue sur la voie de la rédemption et après un début provocateur tombe dans une suite des plus consensuel qui personnellement ne me satisfait pas du tout…

Alors que la lecture se fait facilement, que l’on plonge avec délice dans le passé des personnages et qu’on prend plaisir à en retrouver d’autres, les intentions derrière ces manoeuvres, elles, ne me plaisent pas du tout. Nous avions au début de l’histoire un personnage rebelle, révolutionnaire même, qu’on est en train de totalement travestir et dévoyer pour qu’il retombe dans de la bien pensance. Beurk beurk. Je comprends qu’on ne veuille pas choquer ou véhiculer de « mauvaise » pensée où on se fait justice soi-même, mais dans ce cas à quoi bon avoir prétendu le contraire. Je suis déçue, c’est lisse, c’est fade, c’est consensuel. Les valeurs des auteurs ne m’intéressent pas, moi, je lisais le titre pour être secouée et non réconfortée.

C’est donc en ayant en tête cette grosse déception du revirement des valeurs de la série pour tomber sur quelque chose qui ne dérangera pas trop le plus grand nombre et la bonne morale, que j’ai assisté aux révélations de Sherlock et Albert. Je ne peux pas dire que ce soit mal fait, c’est même plutôt assez plaisant à lire. On s’amuse du piège tendu à Moran, malgré les grosses ficelles et facilités devant son revirement. On prend surtout plaisir à découvrir l’homme derrière Albert, lui, qui a toujours été très effacé. Cela permet de revivre la jeunesse du trio Moriarty et de voir comment ils en sont arrivés à commettre leur premier crime. La critique d’une société bouffie d’injustices est toujours là. C’est juste la forme prise pour lutter contre qui change, à la vengeance froide, on préfère désormais la justice. Je demande à voir comment cela va fonctionner car on sait combien la justice est elle aussi imparfaite. Je sais qu’on ne peut prôner la violence et la vengeance mais c’était quand même un exutoire plus plaisant que cette fade justice qu’on connaît au quotidien…

Série sympathique à lire car jolie et maîtrisée dans ses ressorts par ses hauteurs, Moriarty déçoit cependant par les choix simplistes fait venant casser la dynamique révolutionnaire du titre qui avait attiré les lecteurs dans un premier temps. A tomber sur quelque chose de plus lisse et consensuel, on perd l’originalité du titre pour avoir quelque chose de sympathique à lire mais d’extrêmement fade et bateau. J’espère que la série va bientôt se terminer pour limiter le naufrage.

Tome 17

Je vais être franche, je ne peux pas dire que ce soit mauvais, c’est juste moi qui n’aime pas la tournure prise par la série. Les auteurs ont fait le choix d’emmener leurs personnages sur la voie de la rédemption, là où je voulais quelque chose de bien plus sombre et terrible. Je me sens trahie mais leur écriture est depuis cohérente avec leurs choix. Ce ne sont juste pas les miens.

J’ai été très déçue au début quand j’ai vu la direction que prenait désormais la série. Heureusement les auteurs nous laissent le temps de nous habituer et je fais peu à peu mon deuil même si ce n’est pas simple. Depuis le début, j’ai l’impression qu’on m’a trompé avec cette série, me promettant une version sombre des écrits de Conan Doyle pour me retrouver au final avec quelque chose de très lisse et gentillet. Mais c’est juste mon sentiment à moi.

En attendant, ce tome est une douce transition entre les deux séquences de l’oeuvre, nous emmenant sur les chemins de la rédemption de la team Moriary. Les auteurs ont choisi de leur faire racheter leurs mauvaises actions, pas surprenant alors de les voir faire le point sur là où ils en sont et de suivre leurs retrouvailles avec leur chef ici. C’est avec émotion qu’on y assiste également tant on sent l’attachement de tous pour William et ça fait plaisir à voir. Cela donne un tome plutôt calme, limite tranche de vie, ou calme après la tempête où on les voit reprendre leurs marques et refaire connaissance. C’est mignon et touchant.

Nous avons droit également à l’habituelle séquence souvenir, permettant de combler les années manquantes et de découvrir la nouvelle relation Sherlock – William. C’est émouvant là aussi. Les auteurs essaient de rendre crédible cette prise de conscience de William ce qu’il a fait et les conséquences de ses actes. J’avoue trouver cela un peu trop facile, trop fleur bleue et je n’aime pas que le vecteur de ce changement soit Sherlock, car je n’avais pas adhéré à la dynamique du duo dans cette série. Je trouve cela un peu factice. Mais les intentions sont là et le discours de William sur les erreurs qu’on doit assumer et non pas effacer touche sa cible. Je prends donc un certain plaisir, bien qu’un peu lisse, à découvrir ce nouveau William et ce qu’il a vécu lors de sa « rééducation ».

L’occasion est ainsi parfaite pour le lecteur d’enfin voyager un peu. C’est direction les Etats-Unis avec Sherlock et William, dont on découvre les premiers temps avec Billy the Kid avec qui ils se sont associés. Idéal pour découvrir ce nouveau pays, ses lois et ses moeurs, et mettre en lumière celles de l’Angleterre. Là-bas, c’est le nouveau rôle de Louis qu’on découvre avec saveur. Que ça fait plaisir de le voir mener son monde à la baguette et de ne pas plus rester dans l’ombre. Après, je suis curieuse de savoir où ce nouveau mélange va nous mener parce que ça reste assez flou pour le moment. On prend son temps pour reposer de nouvelles bases mais la direction n’est pas encore claire.

Tome de transition au rythme lent et tranquille, ce 17e tome déjà repose les bases et relance l’intrigue, on ne sait juste pas encore vers où. Si on adhère au principe du récit rédempteur c’est plutôt bien écrit et mené, avec une belle émotion et des promesses. Si on reste fidèle au concept d’origine de la série, on peut trouver cela fade et contradictoire dans l’esprit. A vous de voir où vous vous placer. Personnellement j’aurais presque préféré qu’elle s’arrête à la mort des deux adversaires plutôt que de continuer ainsi…

Tome 18

Ce tome aura eu au moins le mérite de m’aider à prendre une décision, celle d’arrêter la série et potentiellement de la revendre, car trop c’est trop, je n’aime vraiment pas la direction prise et j’ai l’impression de tomber de plus en plus dans de la caricature peu inspirée…

Nous avions découvert précédemment que Sherlock et William étaient en vie et qu’ils s’étaient reconstruit à New York avant de revenir à Londres. Les auteurs décident de revenir sur leurs années là-bas le temps d’une aventure où ils empruntent un personnage culte de la culture western : Billy the Kid.

Si vous aussi vous trouvez que ça sort de nulle part, que c’est foutraque et excessif, vous êtes en plein dans ce qu’ils proposent : une version mal digérée, bas de gamme et caricaturale du western et des thèmes qu’il y a derrière. Vous l’aurez compris, je n’ai pas du tout aimé. Je n’ai rien de crédible ici. On sent les auteurs qui se font leur petit kif et tentent d’y insérer des revendications sociétales maladroites avec en prime de belles incohérences, le tout avec des duos d’amis qui se déchirent. Bof bof.

Après si ça ne vous gêne pas de voir un mauvais western vu par des japonais, vous trouverez peut-être votre plaisir dans ces échanges de coups de feu avec un génie de la gâchette, avec cette lutte pour sauver les habitants d’un village perdu de l’ouest américain des griffes d’accapareurs de terre, le tout avec des amitiés portées aux nues et un William qui réalise son « amour » (?!) pour Sherlock et veut aller le sauver du piège dans lequel il est tombé. (Je veux pas dire mais il ne sert pas à grand-chose pour le moment le Sherlock…)

Pour moi, c’est le tome de trop. Je n’aimais déjà pas la direction que la série prenait, cela se confirme, ce n’est pas pour moi, ce n’est pas ce que j’attendais de la série. Du subversif du début, on tombe dans un gloubi-goulba convenu avec plein de fan service mais sans ligne claire ou ambition qui se dégage. A oublier.

20 commentaires sur “Moriarty de Ryôsuke Takeuchi et Hikaru Miyoshi

  1. J’ai préféré la narration dans le 2, moins « un crime=un chapitre ». Oui, Sherlock est bcp présent mais j’ai bon espoir que ce n’était que pour faire de parallèle entre lui et Moriarty. Parce qu’au final ils sont fêlés les deux hein ^^’

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    1. Effectivement, la narration est meilleure ainsi, c’est plus fluide et moins répétitif. Je comprends que tu aies pu préférer, mais perso j’attendais un peu autre chose. Au final, Sherlock arrive peut-être trop tôt pour moi ^^!

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