Livres - Science-Fiction

Quitter les Monts d’Automne d’Émilie Querbalec

Titre : Quitter les Monts d’Automne

Auteur : Émilie Querbalec

Éditeur : Albin Michel Imaginaire

Années de parution : 2020

Nombre de pages  : 440

Histoire : Recueillie par sa grand-mère après la mort de ses parents, la jeune Kaori vit dans les monts d’Automne où elle se destine à être conteuse. Sur Tasai, comme partout dans les mondes du Flux, l’écriture est interdite. Seule la tradition du « Dit » fait vivre la mémoire de l’humanité. Mais le Dit se refuse à Kaori et la jeune fille se voit dirigée vers une carrière de danseuse.
Lorsque sa grand-mère meurt, Kaori hérite d’un rouleau de calligraphie, objet tabou par excellence, dont la seule détention pourrait lui valoir une condamnation à mort. Pour percer les secrets de cet objet, mais aussi le mystère qui entoure la disparition de ses parents, elle devra quitter les monts d’Automne et rejoindre la capitale.Sa quête de vérité la mènera encore plus loin, très loin de chez elle.
Débutant comme un roman initiatique d’inspiration japonaise, Quitter les monts d’Automne s’impose vite comme un récit d’aventure qui frappe d’abord par sa beauté et sa poésie, puis par sa cruauté et son érotisme subtil.

Mon avis :

Deuxième titre de la rentrée littéraire que j’ai la chance de pouvoir lire grâce à l’aimable envoi d’Albin Michel Imaginaire, merci ! Le titre est disponible dans les bonnes librairies depuis le 2 septembre.

Dès son annonce et l’aperçu de sa couverture poétique signée Manchu, moi la grande fan du Japon, j’ai eu envie de découvrir ce titre qui semblait promettre une intrigue spatiale dans un univers japonisant loin des ambiances sombres à la Blade Runner. Alors juste avec cette idée en tête et un résumé assez vague en tête, je l’ai demandé à Gilles Dumay. Merci d’avoir accepté ma demande.

Émilie Querbalec est une jeune autrice qui a déjà publié un précédent roman aux éditions Nats, Les Oubliés d’Ushtâr, qui a été finaliste au prix Rosny aîné. Mais surtout, l’autrice est née au Japon et s’est entourée de toute une équipe assez pointue pour l’épauler dans la rédaction de ce roman de science-fiction japonisant, elle a pu ainsi demander de l’aide à une connaisseuse du Dit de Genji, texte japonais fondateur, mais aussi à des scientifiques, chercheur en biologie, biophysicien et autre connaisseur en culture et langue japonaise. Et tout ce sérieux se ressent à la lecture d’un roman à la très belle plume mais également à l’intrigue solide.

Pour un deuxième roman, j’ai trouvé Quitter les Monts d’Automne extrêmement bien écrit. L’autrice m’a d’emblée plongée dans son univers étrange et décalé où passé et futur se mélangent, grâce à une écriture simple mais très imaginée, douce et jamais poussive, qui propose un très beau voyage. Pour les amateurs chevronnés de SF, l’aventure n’aura peut-être rien de dépaysant mais pour ma part, c’est plus le voyage que son résultat qui m’ont intéressée et quel voyage !

Tout commence sur la planète Tasai, où nous découvrons une civilisation très proche de celle du Japon traditionnel avec ces conteuses, chanteuses, danseuses, qui forcément font penser aux Geishas. Sauf que nous sommes censés être dans le futur, en 13 111. Comment une civilisation aussi proche de la nôtre où la technologie ne semble pas intervenir peut-elle exister se demande-t-on ? On a presque l’impression qu’elle est même un cran en retard par rapport à nous dans le présent, alors que c’est bien une civilisation humaine occupant une autre planète. Ce mystère sera au coeur du récit.

Celui-ci est mené par la jeune Kaoru, petite-fille d’une célèbre conteuse, chez qui le « Don » ne s’est pas manifesté comme on l’espérait. Elle est donc cantonnée à des tâches subalternes dans la vie de la troupe et se voit petit à petit dirigée vers une carrière de danseuse. Mais lorsque sa grand-père meurt, elle hérite de celle-ci un objet interdit chez eux : un rouleau rempli d’écrits mystérieux qu’elle serait bien en peine de lire puis qu’il est interdit de savoir lire et écrire dans leur monde. Kaoru va alors partir en quête de réponses. Que dit ce mystérieux rouleau ? Pourquoi sa grand-mère lui a remis ? Qui était vraiment cette dernière ? etc.

J’ai beaucoup aimé suivre la quête de la jeune fille que l’autrice découpe en plusieurs temps fort qui s’enchaînent bien les uns avec les autres et la font grandir petit à petit au fur et à mesure de ses découvertes et de ses aventures. L’ensemble est classique, déjà vu, mais l’ambiance particulière du titre en font quelque chose d’à part, entre récit de vie japonisant et quête de réponses science-fictives. J’ai beaucoup aimé l’ambiance. J’avais l’impression d’être dans un terrain familier et réconfortant, moi l’amatrice du Japon. Tout était fait pour m’y sentir à l’aise. J’étais totalement immergée dans cette culture que je connais si bien, ce qui a donné un côté très cocooning à ma lecture étrangement quand on voit ce qui arrive à l’héroïne.

En effet, les aventures de celles-ci n’ont rien de reposantes. On suit une Kaoru qui est sans cesse déracinée, ballottée, abîmée par la vie. Elle doit d’abord quitter ces chers Monts d’Automne à la mort de sa grand-mère pour aller dans une autre troupe, puis elle doit quitter celle-ci au fait de sa gloire pour aller dans une plus grande ville pour chercher de nouvelles réponses. Celles qu’elle y trouve seront dramatiques pour sa personne mais la pousseront vers une aventure encore plus grande et lointaine. Elle s’embarque alors dans un voyage lointain et sans retour vers l’ultime réponse, passant d’un récit très terre à terre à une aventure spatiale aux dimensions vertigineuses.

Les influences que l’ont ressent à la lecture sont multiples au fil des aventures vécues et des personnages croisés. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser par exemple aux grands classiques que sont 2001 l’Odyssée de l’Espace et Fondation d’Asimov dans la seconde partie du roman. Les thèmes soulevés sont également intéressants. On parle ici de mémoire, de souvenir, de transmission ainsi que de conservation, mais également de traumatisme et de développement personnel et civilisationnel. Tout cela est imbriqué subtilement dans la quête initiatique d’une héroïne en recherche d’elle-même aussi bien sur le plan de son identité familiale que de son identité sexuelle. Cela donne quelques pages pleines de poésie, de sensualité et de subtilité qui m’ont vraiment plu esthétiquement.

Cependant même si j’ai adoré le voyage que m’a offert ce récit, je ne peux en cacher les défauts. Tout d’abord, j’ai trouvé les personnages très faiblement construits en dehors de l’héroïne. Pendant longtemps, elle est la seule à exister entre ces pages, tandis que les autres ne servent que de décor provisoire. Il faut attendre longtemps pour que d’autres prennent vie également et ce n’est pas forcément ceux qu’on attend qui ont le plus de présence, l’héroïne étant quand même terriblement passive. Elle se laisse porter par tout ce qui lui arrive et au final cela donne un récit plus porté par son message que par ses personnages, ce qui est fort dommage. Ensuite, le final est clairement un peu abrupt et bref, pour ne pas dire utopique sur certains points, mais je ne veux pas vous spoiler.

Mais sur le fond Quitter les Monts d’Automne fut une excellente lecture pour moi. J’ai été plus que séduite par le style simple mais poétique et évocateur de l’autrice. J’ai aimé être surprise par l’aventure de l’héroïne qui m’a emmenée vers des recoins insoupçonnés au début. J’ai surtout été emportée par l’ambiance et le ton fortement japonisant et les thèmes autour de la mémoire m’ont plu. Pour ceux qui souhaitent lire de la SF agréable, avec des concepts solides mais facilement compréhensibles et qui n’empiètent pas sur l’histoire, foncez !

A nouveau, merci à Albin Michel Imaginaire, pour cette lecture.

Ma note : 16 / 20

D’autres avis, avec notamment certains plus développés sur la question SF ou Fantasy ? : Apophis, L’épaule d’Orion, Au pays des cave trolls, Lullaby, Yuyine, Elwyn

13 commentaires sur “Quitter les Monts d’Automne d’Émilie Querbalec

      1. Oups pardon, j’avoue que le masculin qu’on utilise pour les bébés me met souvent à mal pour deviner/me rappeler du sexe en question xD
        Excellente idée avec Roald Dahl, j’aimerais bien le faire en classe une année, de mon côté ^^

        J’aime

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