Titre : Anaïs Nin : Sur la mer des mensonges
Auteur : Léonie Bischoff
Editeur vf : Casterman
Année de parution : 2020
Nombre de pages : 190
Histoire : Début des années 30. Anaïs Nin vit en banlieue parisienne et lutte contre l’angoisse de sa vie d’épouse de banquier. Plusieurs fois déracinée, elle a grandi entre 2 continents, 3 langues, et peine à trouver sa place dans une société qui relègue les femmes à des seconds rôles. Elle veut être écrivain, et s’est inventé, depuis l’enfance, une échappatoire : son journal. Il est sa drogue, son compagnon, son double, celui qui lui permet d’explorer la complexité de ses sentiments et de percevoir la sensualité qui couve en elle. C’est alors qu’elle rencontre Henry Miller, une révélation qui s’avère la 1re étape vers de grands bouleversements.
Mon avis :
Anaïs Nin est une écrivaine américaine née en France de parents originaires de Cuba, qui est connue pour la publication de journaux intimes qui s’étalent sur plusieurs décennies et offrent une vision profonde de sa vie privée et de ses relations. Elle est aussi l’une des premières femmes à écrire des ouvrages érotiques. Je l’ai découverte, ou du moins j’en ai entendu parler, il y a des années de cela via la dessinatrice Diglee (clic) qui en parlait régulièrement dans ses posts sur son blog et sur les réseaux sociaux. Alors en voyant qu’un roman graphique biographique lui était consacré, j’ai sauté le pas !
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Parlons d’abord de l’objet. Cet ouvrage édité par Casterman est juste magnifique ! Avec sa couverture cansonnée épaisse, son papier épais et un peu lisse, et surtout les dessins de Léonie Bischoff qui semblent fait aux crayons de couleur, c’est une petite bombe ! J’adore l’objet-livre. Je le trouve superbe et rien que pour ça, même sans connaitre le sujet, je pense que j’aurais craqué.
Le sujet, lui, c’est des moments de la vie d’Anaïs Nin qui permettent de mieux cerner le personnage. Sans aller jusqu’à une biographie complète et linéaire, je pense que l’autrice livre suffisamment de clés de compréhension pour donner envie de pousser et découvrir et les écrits et le récit de vie complet de l’écrivaine américaine. C’est dense mais jamais lourd. Je pense toutefois que si j’avais mieux connu Anaïs Nin j’aurais plus apprécié le voyage.
On découvre sous la plume et le crayon de Léonie Bischoff, la femme qu’était Anaïs Nin. A travers une narration classique et efficace qui se permet de jouer sur les rythmes et les temporalités au fur et à mesure de l’analyse que l’écrivaine fait d’elle-même, nous découvrons sa vie de femme mariée, sa vie d’écrivaine, son enfance, ses relations aux hommes de sa vie ainsi son rapport à la sexualité et à son corps, ce qui correspond bien à ce que j’avais lu sur elle via Diglee.
Anaïs est un personnage fascinant. Elle a l’air d’une femme banale mais sa passion pour la compréhension de la psyché humaine et en particulier la sienne est fascinante. Elle tient un journal depuis toujours et continue encore et encore. On découvre vite qu’il y a deux versions de ce journal, celle censurée connue de son mari et celle non censurée qu’elle garde pour elle-même. Elle s’y livre pleinement, sans fard, y fait son introspection et décrit ses émotions tumultueuses et ses fantasmes. J’ai beaucoup aimé ce que cela dit de la femme Anaïs. J’ai cependant été gênée à plusieurs reprises, moralement parlant, par ses désirs qui contreviennent à ma morale personnelle, surtout quand elle passe à l’acte, mais cela est présenté par l’autrice de ce livre sans voyeurisme, sans jugement, de manière à ce que chacun se fasse son opinion et surtout juste pour qu’on comprenne mieux Anaïs.
L’autre facette de sa personnalité qui m’a énormément intéressée, c’est bien sûr l’écrivaine. J’ai beaucoup aimé la voir écrire, chercher l’inspiration, côtoyer des auteurs, en particulier Henry Miller (et sa femme) avec qui elle entretiendra une très longue relation enrichissante des deux côtés. C’est chouette de voir une femme écrivaine reconnue dans un certain milieu pour ce qu’elle fait même si elle n’est pas encore publiée. C’est également passionnant de voir à quel point elle réfléchit sur elle-même et sur la notion d’oeuvre. Elle cherche à se trouver et à trouver la liberté à laquelle elle aspire. Elle se confronte à d’autres artistes pour cela, mais également à des « scientifiques » comme des psychanalystes puisque cette méthode la fascine.
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Pour évoquer tout cela, Léonie Bischoff a souvent mis en scène son héroïne en pleine mise en abyme avec son double, presque démoniaque mais surtout passionnée, toute droite inspirée de la Grèce antique. C’est poétique et sublime !
Ça ne plaira pas à tout le monde, mais de mon côté, j’ai adoré le parti pris graphique. J’ai trouvé la composition des pages à l’image de l’héroïne de l’histoire, douce et torturée à la fois, psychédélique même parfois. L’utilisation de crayons de couleur à la mine multicolore rend magnifiquement. Cela donne une vraie lumière au récit et aux propos, ainsi qu’une richesse de couleurs rare, illustrant les multiples facettes d’Anaïs. C’est varié et très expressif. Il y a une vraie recherche dans la composition des scènes, le choix des couleurs, de l’angle de vue, de l’éclairage de la lumière. C’est extrêmement poétique, plein de métaphores, la dessinatrice aimant jouer avec les symboles. Ça fait très Art Nouveau !
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Léonie Bischoff a ainsi réussi à croquer à merveille la personnalité complexe et foisonnante d’Anaïs Nin. En moins de 200 pages, elle a évoqué son rapport à l’art, au corps, à l’amour et à la sensualité, sa bisexualité, ses rapports troubles avec les hommes et l’engagement, sa quête de la compréhension d’elle-même, etc. C’est extrêmement riche et cela donne autant de clés pour donner envie d’en savoir encore plus sur cette écrivaine, le tout avec un graphisme onirique qui m’a emportée dès les premières pages. Mission réussie !
Ma note : 16 / 20
© Casterman 2020
Pour en savoir plus sur la richesse de cette oeuvre, voici une petite vidéo de Léonie Bischoff :
Un ouvrage graphique qui me fait très envie car je ne connais Anaïs NIN que de nom…
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Tu partiras un peu sur les mêmes bases que moi alors, mais je pense que rien que pour les voyage graphique ça vaut le coup 😉
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Il a l’air superbe !
Bises et bises,
Maeve
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Oui, oui, il l’est ! Il faut craquer ! xD
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Si je ne connais pas Anaïs Nin, elle semble fascinante, inspirante et posséder une belle capacité d’introspection ! Quant au style graphique, il me plaît beaucoup.
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Je pense effectivement que le titre pourrait te plaire justement pour tout ça 😉
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On en a déjà parlé mais je sais que tu apprécies que je vienne commenter 🙂
J’espère avoir l’occasion de le lire
Je ne connais pas du tout Anais Nin, la première fois que je l’ai vu c’est dans tes tentations.
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Merci ^-^
Je pense vraiment en plus que graphiquement le titre a tout pour te plaire. J’ai un peu plus peur pour les valeurs morales qui risquent de te titiller comme moi ><
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J’adore le style de dessins ! *w* C’est superbe !
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Ce fut aussi un coup de coeur pour moi de ce côté-là 😉
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