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Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary W. Shelley

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Titre : Frankenstein ou le Prométhée moderne

Auteur : Mary W. Shelley

Editeur : Pocket Classique (poche)

Année de parution originale : 1818

Nombre de pages : 304

Histoire : Victor Frankenstein ! C’est l’inventeur, le savant maudit ! À quinze ans, il est témoin d’un violent orage foudre, traînée de feu, destruction d’un chêne… Son destin est tracé. Après des années de labeur, il apprend à maîtriser les éléments ; l’alchimie est pour lui une seconde nature. Bientôt il détient le pouvoir de conférer la vie à la matière inerte. Nuit terrible qui voit la naissance de l’horrible créature faite d’un assemblage de cadavres ! L’oeuvre de Frankenstein. Un monstre ! Repoussant, inachevé mais doté, d’une force surhumaine et conscient de sa solitude. Echappé des ténèbres, il va, dans sa détresse, semer autour de lui crimes et désolation. D’esclave qu’il aurait dû être, il devient alors le maître, harcelant son créateur. Il lui faut une compagne semblable à lui… Pour Frankenstein, l’enfer est à venir…

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Mon avis :

Avec En tournant les pages, nous nous sommes lancées le défi de découvrir ce classique de la littérature fantastique à la période phare pour cela. Nous pensions le connaitre par coeur à force d’en entendre parler dans tout plein d’oeuvres mais nous avons été surprises par notre méconnaissance de l’oeuvre d’origine et nous avons pu ainsi vivre un très beau moment de lecture.

La première surprise que nous avons eu, c’est de trouver la plume de Mary Shelley tout a fait abordable. En effet, son roman se lit tout seul. Malgré les digressions assez nombreuses de l’autrice qui aime bien mélanger conte philosophique fantastique et guide touristique façon Grand Tour, nous avons dévoré ce classique, moi en une journée, ma collègue sur deux jours. Les pages filaient toutes seules.

L’autre surprise est donc venue de l’histoire elle-même. Depuis toujours quand on parle de Frankenstein, on parle de la créature du docteur et du moment de sa création, or c’est tout sauf le sujet central de l’histoire. Nous suivons surtout un homme dépassé par sa création, d’où le sous-titre de Prométhée moderne et c’est lui qui sera vraiment le personnage central au point que parfois la créature a même totalement disparu pendant de longues pages. Nous avons donc été surprises par l’histoire que nous avons lue.

L’aspect fantastique que nous attendions était bien au rendez-vous. Nous suivons un personnage de son temps, chantre du romantisme à la Werther, me rappelant un peu aussi les personnages de l’effroyable Musset. Dans un premier temps, j’ai adoré sa passion pour les sciences et les expériences, mais très vite sa morosité naturelle le pousse à s’isoler et basculer et nous avec dans une ambiance à la Dorian Gray et Dr Jekyll et Mr Hyde. Ses expériences deviennent rapidement étranges avec son obsession pour l’électricité et la vie qu’elle pourrait transmettre. Puis lorsque la créature née, nous ne faisons plus que le suivre, comme elle, tel un brouillard poursuivant sa victime.

L’écriture de Mary Shelley est en cela fascinante. Elle démarre façon échange de lettres entre un marin en expédition dans le Grand Nord, pour basculer dans un roman façon journal intime relatant les moments phares de la vie de Frankenstein, pour revenir parfois à ce genre épistolaire de manière plus ponctuelle. Elle mélange aussi récit fantastique, conte philosophique, guide touristique, récit scientifique et même polar/thriller. C’est très éclectique. L’autrice, de plus, a une plume très visuelle et poétique à la fois, associant volontiers le caractère de ses personnages au décor où la scène se joue, ce qui est assez fascinant.

En revanche, l’écriture de son héros est bien plus monolithique malheureusement et je n’ai pas du tout été fan du jeune homme. Il est passé d’un peu gentillet et fade au début, façon héros romantique – dont je ne suis pas fan – à franchement agaçant au fil de ses aventures. Car Frankenstein, c’est le style de héros qui passe son temps à se plaindre sans vraiment agir ni réagir et reproche aux autres ce sont il est lui-même coupable. J’ai donc eu beaucoup de mal à lui trouver des côtés sympathiques… Ce qui n’est pas du tout le cas avec sa créature et leur relation qui, elles, m’ont fascinée. Même si elle n’est pas assez présente à mon goût, c’est celle-ci le vrai personnage phare du récit pour moi et je comprends que ce soit elle souvent qu’on ait retenu. Elle a une très belle histoire dramatique, celle d’une création abandonnée par son créateur et ne sachant pas définir elle-même les codes et limites de la vie en société. Elle est dépassée par ce qu’elle vit et par les émotions qu’elle ressent ou pense ressentir en miroir de son créateur, qui n’est pas un modèle de vertu, et bien sûr ça tourne mal.

Nous avons ainsi eu à la fois un récit fantastique, un récit d’aventure et de voyage et un récit fascinant sur l’âme humaine et sa noirceur. J’ai beaucoup aimé le flou entretenu entre réel et fantastique, un peu à la façon d’un Lovecraft, qui je suis sûr s’en inspirera plus tard. J’ai aussi beaucoup aimé voir ce héros se passionner pour son projet avant de s’isoler et basculer dans une forme de folie douce. La fatuité de son destin était fascinant et y assister d’un regard extérieur en suivant ses nombreuses pérégrinations à travers l’Europe vaut carrément le coup. Mary Shelley a une écriture du fantastique qui me parle totalement, cachant beaucoup et montrant peu à part aux moments clés, dont un qui m’a scotchée. C’est vraiment un titre d’ambiance, un peu à la façon des soeurs Brontë dans leurs chefs d’oeuvre. Cependant, je n’ai vraiment pas adhéré au héros et ce fut assez pénible de le suivre. Heureusement que la plume était belle et l’anti-héros émouvant à sa façon.

Je remercie donc beaucoup En tournant les pages de m’avoir accompagnée dans cette découverte fascinante. Nos nombreux échanges ont vraiment nourri cette chronique et m’ont permis d’enrichir ma réflexion. C’est quand tu veux pour une prochaine LC 😉

> N’hésitez pas à lire aussi les avis bien plus pointus de : En tournant les pages, Maven Litterae, Des livres mon univers, La valse des pages, Le monde du revelecteur, The Cannibal Lecteur, Vous ?

14 commentaires sur “Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary W. Shelley

  1. Je retrouve tous nos échanges dans ta chronique très complète 🙂 J’ai oublié de parler des ressemblances que l’on a ressenti avec Dr Jekyll et Mr Hyde et Dorian Gray, tant pis ^^
    C’est vrai que Frankenstein a été un personnage plus détestable qu’on ne le pensait, ce qui t’aura plus gênée que moi apparemment. J’ai pris finalement le parti de me dire que ça plaçait encore davantage la créature dans le « beau » rôle (ce qui rend le tout d’autant plus tragique).
    Hâte de commencer bientôt notre prochaine LC !

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    1. Oui, je m’en suis inspirée pour écrire et ne rien oublier. C’était de bonnes notes 😉
      Effectivement, on dirait que j’ai plus de mal à me détacher que toi quand je n’aime pas un personnage lol Mais je vois ce que tu veux dire pour la créature, c’est si vrai.
      Hâte de commencer la prochaine aussi !

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  2. Content de voir que malgré ton ‘aversion’ pour le héros de ce classique – mais l’est-il réellement ? – tu as apprécié ta lecture, source de voyages et de frissons !
    Il est vraiment surprenant de constater que nous avons pour beaucoup une fausse image de ce roman du fait des nombreuses adaptations connues du grand public bien loin de l’oeuvre originale.

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