Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Ningyo de Mr Tan et Mato

Titre : Ningyo

Auteurs : Mr Tan et Mato

Éditeur vf : Glénat (seinen)

Années de parution vf : 2022

Nombre de pages : 208

Histoire : La forêt d’Aokigahara au Japon, autrement appelée “la mer d’arbres” ou “la forêt des suicidés”… Un homme y perd la vie, comme guidé par de mystérieuses créatures. Quelque temps après, Kai, son petit frère, arrive sur place, bien décidé à découvrir les raisons de sa disparition. Mais au fur et à mesure qu’il s’enfonce au cœur de cette forêt, le lieu semble se transformer… Et si la rencontre d’un humain et d’une sirène pouvait influencer l’avenir du monde ?

Mon avis :

Paru en 2020, je n’ai pas eu la chance de lire le premier global manga du duo Mato et Mr Tan : Jizo. Je me rattrape donc avec leur nouveau oneshot : Ningyo, qui lui aussi propose une plongée dans le folklore japonais à travers un lieu célèbre : la forêt des suicidés d’Aokigahara.

L’autrice, Mato, est originaire de Yokohama. Elle dit elle-même avoir pour source d’inspiration de grands artistes comme Tim Burton (cinéaste), Yuichi Kumakura (mangaka), Daisuke Igarashi (mangaka), Takako Hirai (illustratrice) ou les artistes de l’âge d’or de l’illustration. Elle a pour sa part vu sa carrière décoller en 2012 avec Mes amis les Popumomos sa première ouvre publiée, après une carrière en auto-éditée. Cependant, ici, elle ne se charge que scénario et confie les dessins à Mr Tan, un dessinateur français de la même génération qu’elle. Le résultat des deux est singulier.

J’ai beaucoup aimé l’ambiance fantastique à la japonaise que propose le duo. Aux côtés d’un héros dont le frère vient de se suicider dans cette fameuse forêt, nous allons remonter aux sources des mythes fondateurs de celle-ci. La plongée dans la fantastique se fait progressivement, rendant le récit vraiment immersif, malgré sa brièveté. On prend plaisir à se caler dans les pas de Kai, tandis qu’il se rend dans cette étrange forêt et tombe sur celles qui la peuplent et y attirent des hommes malheureux pour commettre le pire.

Les auteurs se servent pour cela de légendes et mythes urbains connus au Japon. Il y a d’abord cette forêt : Aokigahara, qui est réellement connue comme spot à succès pour les suicidés. Mais surtout, ils exploitent à merveille celui des sirènes, mélangeant à la fois la vision européenne de celle-ci avec une touche bien plus terrifiante et glauque qu’on doit aux légendes japonaises, telles qu’on peut les voir dans Mermaid Saga de Rumiko Takahashi qui est reparu récemment. C’est fascinant.

Le ton est pour cela volontiers mélancolique et dramatique. On parle quand même de mort, de suicide, de déliquescence de la Terre, de perte de valeurs, etc. Mais en même temps, cela a quelque chose de poignant et poétique, avec ce jeune garçon cherchant à comprendre ce qui est arrivé à son frère et cette jeune sirène cherchant à lui expliquer pourquoi son peuple va mal et ce qu’elle attend de lui. C’est sombre et déchirant.

Malheureusement tout va un peu trop vite. On enchaîne les scènes bien trop vite pour que l’émotion prenne pleinement. Et il faut avouer que, pour ma part, le dessin très enfantin de Mr Tan, tout droit inspiré de magazines japonais pour jeunes lectrices comme le Ribon, est assez déstabilisant ici. J’ai du mal avec ce trait tout en rondeur pour parler de mal être bien plus coupant et sanglant. C’est un décalage qui a du mal à passer chez moi…

J’ai ainsi eu du mal à vibrer pour le dessin de Mr Tan, qu’en plus de trouver enfantin, je trouve aussi maladroit parfois, pour ne pas dire naïf et inabouti. Il y a de réels problèmes de proportion par moment qui m’ont sortie de l’histoire tant je bloquais dessus parce que ça me sautait aux yeux, notamment du côté des cheveux qui faisaient perruque ou des corps aux poses maladroites, ou encore de ce trait de contours beaucoup trop épais au niveau des personnages tout comme des décors. C’est dommage parce qu’il se dégage pourtant quelque chose de l’ambiance donnée à cette forêt.

Ningyo fut donc une merveilleuse lecture en ce qui concerne les thèmes défendus et développés par les auteurs, avec cette dénonciation de mythes passés en voix d’extinction et de gens terriblement malheureux au point de commettre le pire sans qu’on comprenne pourquoi. Cependant, j’ai eu l’impression qu’on oubliait le frère du héros en court de route pour trop se concentrer sur la dimension fantastique et le dessin maladroit de Mr Tan avec son décalage entre un propos dur et un trait rond et enfantin m’a perturbée. Je suis donc partagée.

(Merci à Glénat et Sanctuary pour cette lecture.)

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©Editions Glénat, 2022

 

13 commentaires sur “Ningyo de Mr Tan et Mato

    1. C’est ça c’est prometteur mais ça ne va pas jusqu’au bout de son intention de départ.
      Sinon sur les sirènes, si tu ne l’as pas lu, je te conseille le très bon Mermaid Saga, de l’autrice de Juliette je t’aime et Ranma 😉

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  1. Je suis contente d’avoir pu le lire et tenir l’objet livre
    L’ambiance est bien assurée, les idées super, le tout sans doute perfectible. Comme toi c’est une bonne lecture, non je n’ai pas été sortie de l’histoire par contre
    Mon avis sera sur Lireka 🙂
    Et je suis contente d’avoir lu Jizô aussi dont l’avis est sur le blog

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  2. Un manga que j’ai hâte de découvrir, il fera parti de ma prochaine commande et je donnerais donc mon avis à ce moment là. En tout cas je garderais en tête les points que tu relève car cela me semble important. Personnellement j’avais apprécié Jizo, je ne sais pas si tu avais lu mon avis le concernant ( https://www.facebook.com/page/1775186006027290/search/?q=jizo ) , mais j’avais trouvé qu’il manquait d’explications concernant certaines choses, j’espère que celui là présentera plus d’explications pour le lecteur novice. Bon concernant la forêt d’Aokigahara elle m’intéresse beaucoup depuis un certain temps, je ne devrais pas être perdu.

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    1. Non je ne t’ai pas lu sur Jizo, n’étant pas sur Facebook (au passage le lien ne m’affiche pas la page de la critique), mais j’ai l’impression que c’est un peu pareil qu’ici vu ce que tu dis. J’espère que l’auteur finira par réussir à approfondir ses histoires car il a quand même un truc !

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      1. Ho ce n’est pas grâce, c’est aussi sur insta mais la flemme de chercher à vrai dire lol. Mais donc tu me conforte par rapport à l’impression que j’ai lu en lisant ton article et effectivement je trouve cela un peu dommage. Après, l’on peut se dire au final que c’est peut être normal, cela fait sans doute parti de sa culture et ça coule de source… comme si moi j’allais parler de Saint Nicolas en oubliant que tout le monde ne le connais pas. Maintenant je pense que l’éditeur aurait peut être dû approfondir cela avec des notes, une postface pour expliquer au lecteur certaines notions. Après certains ne lisent pas ces « trucs » lol. C’est le cas de Cyril alors que moi j’aime m’instruire, donc les notes je les lis toujours et j’en redemande. Combien de fois mes critiques se concluent par « J’aurais aimé un mot de l’auteur pour comprendre pourquoi ce sujet ». (Le lien : https://www.instagram.com/p/CVTVzUHM8f4/ )

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      2. Pour ma part, ce n’est pas seulement un manque du côté du lieu dont il est question, car comme tu le dis on peut chercher même si ç’aurait plus agréable que Glénat nous le fournisse. Non, c’est vraiment que j’ai eu l’impression qu’il partait d’un postulat qu’il laissait totalement tomber en cours de route pour partir sur totalement autre chose et là ça m’embête vraiment.
        Merci pour le lien ! Apparemment, j’avais bien lu ton avis mais oublié… *mode boulet*

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  3. Un livre sur cette forêt singulière, voilà qui m’intrigue ! Dommage que les traits utilisés ici ne t’ai pas emballée pour ce sujet si particulier. C’était peut être une façon d’adoucir le récit au vu du sujet difficile ? Quoi que, tu parles d’effet perruque ou de posture mal proportionnées, c’est vrai que ça peut gâcher le plaisir de la lecture du coup… Je me le note, on ne sait jamais, car le thème m’intéresse mais je garde en tête les bémols que tu soulignes. Merci pour la découverte 🙂

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    1. On sent vraiment un auteur en construction, donc on pardonne car c’est fort prometteur et que les ambiances sont belles. Après, j’avoue que si un auteur plus confirmé proposait la même chose, j’adorerais !
      Avec plaisir 😉

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