La Bibliothèque des rêves secrets de Michiko Aoyama

Titre : La Bibliothèque des rêves secrets

Auteur : Michiko Aoyama

Traduction : Alice Hureau

Éditeur vf : J’ai Lu

Année de parution vf : 2023

Nombre de pages vf : 346

Histoire : Homme ou femme, jeune ou vieux, salarié ou retraité… ils sont cinq à franchir le pas de la petite bibliothèque tenue par Sayuri Komachi en plein coeur de Tokyo. Leur point commun: ils sont au croisement de leur vie. A chacun Sayuri Komachi, énigmatique bibliothécaire attentive aux autres, proposera un ouvrage totalement inattendu, bien loin de celui qu’ils croyaient être venus chercher.
Mais ce choix ne relève pas du hasard, ce livre se révèle comme le jalon qui leur permettra de changer de vie.
Sayuri Komachi dévoile à chaque lecteur le pouvoir de la lecture et l’importance qu’une personne attentive et à l’écoute peut avoir sur le destin de chacun d’entre nous.
Mon avis :

Sans le vouloir, j’ai lu coup sur coup deux romans japonais de la même veine : du fantastique feel good, un genre que je trouve parfait pour cette littérature si touche qui aime toucher à l’intimité de nos âmes en peine. Alors après Tant que le café est encore chaud, laissez-moi vous parler de La Bibliothèque des rêves secrets.

Premier roman de Michiko Aoyama, il se présente comme un roman choral donnant la voix à cinq personnages d’âges, de sexes et de situations diverses qui sont à un moment clé dans leur vie : celui où ils en ont marre, mais grâce à une rencontre surprenante dans un lieu à la fois familier et hors du temps, leur vie va changer. Je rapprochais ce texte de celui de Toshikazu Kawaguchi dans mon introduction, pourtant la plume de Michiko Aoyama m’a semblé bien moins poétique, plus franche et réaliste. Elle s’attaque en effet à des personnages et des situations plus terre à terre, plus universelles, mais ce n’est pas pour autant que ça ne nous touche pas.

Il y aura toujours des personnes pour qui les livres sont une nécessité et des rencontres importantes en librairies entre un livre et un lecteur.

Les cinq personnages qu’elle nous offre de rencontrer sont : une jeune active qui ne trouve pas son boulot épanouissant, un employé qui rêverait de faire autre chose mais n’ose pas se lancer, une femme qui a repris le travail après son accouchement mais qui a perdu le super poste qu’elle avait lutté pour avoir, un chômeur au parcours artistique qui se cherche et un retraité pour qui la transition n’est pas simple à faire après une vie très active mais au final un peu vide. Ce sont des situations dans lesquelles on pourrait tous se retrouver, peu importe notre âge, notre sexe, notre pays. J’ai aimé cela.

Mais l’autrice ne se contente pas de nous raconter ce qui va mal chez eux, elle leur offre, à travers une incursion aux limites du fantastique, une voie pour aller mieux et cette voie – ô comble du bonheur pour la bibliophile que je suis – passe par la rencontre avec une bibliothécaire et un titre personnalisé qu’elle leur recommande à chaque fois. C’est magique ! Avec un travail sobre et tout en finesse, l’autrice rend ainsi ses lettres de noblesse à la littérature et au pouvoir des livres. Elle nous montre comment, dans des moments compliqués, on peut y trouver du réconfort et des réponses. Cependant, il ne faut pas s’attendre à une réponse toute faite et l’autrice le montre bien, c’est aussi une ode au courage personnel, au courage de se reprendre en main et d’oser !

Chacun trouve un sens qui lui est propre au petit plus. De même pour les livres. Le lecteur associe des phrases à sa propre vie et en retire quelque chose de personnel, sans lien avec l’objectif initial de l’auteur.

Ce roman est donc pétri de bonnes intentions et c’est un vrai bonheur de le lire pour ça. Il débute à chaque fois par des rencontres un peu moroses où on comprend bien le vague à l’âme des personnages. Mais il évolue à chaque fois vers de très beaux et puissants cheminements de vie, qui pourraient n’avoir l’air de rien, mais qui sont tout, car il faut oser faire ce qu’ils font : s’ouvrir aux autres, reconnaître ses fautes et ses failles, demander de l’aide, changer de voie, poser cartes sur table à son conjoint, se remettre en question alors qu’on est âgé, etc. Ainsi, chaque personnage qui pouvait sembler soit un peu déprimant, soit un peu agaçant au début de son histoire, devient émouvant et lumineux au fil des pages et ceci grâce au pouvoir de cette bibliothécaire – magicienne.

Fil rouge de l’histoire, celle-ci fut mon petit coup de coeur sous la plume de Michiko Aoyama. Je me suis beaucoup amusée de la façon un peu brute de décoffrage dont elle la dépeint dans son relationnel aux autres, alors qu’elle fait preuve d’une telle sensibilité dans ses choix de conseil de livre. D’ailleurs, le lieu où se déroule l’histoire, cette bibliothèque de quartier rattachée à une école et ouverte à tous les habitants, elle a un je ne sais quoi d’artefact fantastique, comme le Tardis de Docteur Who, l’armoire de Narnia, la gare d’Harry Potter, et ça m’a fascinée. C’était un lieu parfaitement mis en scène par l’autrice, à la fois lieu de vie familier pour nous et lieu mystérieux dès qu’on s’approchait de ses profondeurs par aller à la rencontre de Mme Komachi.

J’ai pensé du fond du cœur que la poésie était un art magnifique. La vérité, seul l’auteur la connaissait. Mais chaque lecteur interprétait le texte à sa manière, et c’était là tout l’intérêt.

Nouvelle très belle histoire feel good, je commence à me dire que j’aime beaucoup cette veine de la littérature japonaise et sa touche fantastique. Je la trouve humaine, sensible, universelle avec des messages simples et puissants pourtant. C’est le genre de lecture qui fait un bien fou au coeur, que celui-ci soit en peine ou non, car elle nous montre des voies, des opportunités pour avancer si ça va mal dans nos vies, nous empêchant de craindre que rien n’est possible. C’est le genre de lecture curative que je recommanderais à tout le monde !

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