Livres - Science-Fiction

Terra Ignota – Trop semblable à l’éclair d’Ada Palmer

Titre : Terra Ignota – Trop semblable à l’éclair

Auteur : Ada Palmer

Éditeur vf : Le Bélial’

Année de parution vf : 2019

Nombre de pages : 647

Histoire : Année 2454. Trois siècles après des évènements meurtriers ayant remodelé la société, les concepts d’État-nation et de religion organisée ont disparu. Dix milliards d’êtres humains se répartissent ainsi par affinités, au sein de sept Ruches aux ambitions distinctes. Paix, loisirs, prospérité et abondance définissent ce XXVe siècle radieux aux atours d’utopie. Qui repose toutefois sur un équilibre fragile. Et Mycroft Canner le sait mieux que personne… Coupable de crimes atroces, condamné à une servitude perpétuelle mais confident des puissants, il lui faut enquêter sur le vol d’un document crucial : la liste des dix principaux influenceurs mondiaux, dont la publication annuelle ajuste les rapports de force entre les Ruches. Surtout, Mycroft protège un secret propre à tout ébranler : un garçonnet aux pouvoirs uniques, quasi divins. Or, dans un monde ayant banni l’idée même de Dieu, comment accepter la survenue d’un miracle ?

Mon avis :

Tome 1 : Trop semblable à l’éclair

Terra Ignota est LE titre de SF de cet automne dont tout le monde parle. Il a été très bien vendu sur les réseaux sociaux et dans les librairie où des auteurs phares comme Ken Liu et Robert Charles Wilson en faisaient l’éloge. Alors forcément, j’ai craqué, surtout que l’autrice est également une historienne et comme c’est ma formation d’origine, ça m’a vraiment attirée. Malheureusement, contrairement à l’enthousiasme général, je ressors assez mitigée de ma lecture.

Ada Palmer démarre sur les chapeaux de roues en nous plongeant tête la première dans un monde tel qu’on n’en a jamais lu. Elle a l’excellente idée d’imaginer un univers où les Etats-nations ont disparu suite à l’invention d’une voiture volante réduisant à presque rien les distances entre chacune, et la philosophie des Lumières est maintenant le socle commun de cette nouvelle humanité. Les gens vivent donc dans des « Ruches » qu’ils choisissent par affinité et non à cause de leur lieu de naissance, sexe, religion, couleur de peau, etc. Dans ce nouveau monde, les termes genrés ont également été en grande partie abolis et la religion est quelque chose qui relève de la sphère très privée. Parlez-en dans un groupe de plus de 2 personnes et vous aurez commis un délit ! C’est dans cet univers que nous allons suivre deux intrigues en parallèle : la découverte d’un enfant qui pourrait faire basculer « les croyances » de ce nouveau monde, et l’enquête sur le vol de la liste des 10 principaux influenceurs dont la publication joue énormément sur les rapports de force entre les Ruches.

En tant que lectrice, j’ai donc eu pendant un long moment, le sentiment d’être complètement perdue dans cet univers complexe et surtout totalement inédit. Terra Ignota est une lecture ardue qui nécessite de s’y consacrer entièrement. C’est agréable de découvrir un système aussi innovant et inventif qui change de tout ce qu’on connait, mais ici, j’ai trouvé que sa présentation manquait de subtilité. J’ai vraiment eu le sentiment au cours de ma lecture d’être étouffée par cet univers, au détriment de l’intrigue, qui était bien effacée. Celle-ci m’a plus semblé être un prétexte que l’élément moteur de l’histoire et je le regrette vraiment. Ce sentiment ne s’est effacé que dans le dernier quart du roman et vu son épaisseur, ce fut trop tard pour me convaincre. J’aime être surprise mais j’aime aussi avoir une trame narrative suffisamment dense pour adhérer aux personnages et à ce qui leur arrive. Découvrir comment fonctionne un monde que je ne connais pas ne me suffit pas.

De plus, je n’ai pas accroché, non plus, à certains aspects de la plume de l’autrice. Oui, elle est agréable à lire dans le sens où elle est très vivante et dynamique. Mais bon sang, a-t-on besoin de tant d’effets de styles totalement pompeux et artificiels. J’ai trouvé ridicule les moments où l’un des héros pensait en ancien français. Les longs passages philosophiques m’ont ennuyée au possible et faisait beaucoup trop « cours de lycée » pour moi. Si j’ai envie d’apprendre des choses sur les philosophes des Lumières, je prends un bouquin de Philosophie ou d’Histoire mais pas un titre de SF. Oui, je sais que certains d’entre vous ne seront pas d’accord et seront content de trouver ça ici, mais pour moi cela manquait trop de subtilité, c’était trop plaqué par paragraphes entiers en plein milieu de l’intrigue, cassant le rythme de celle-ci. Je n’ai vraiment pas aimé et pourtant le siècle des Lumières est mon sujet préféré avec la Révolution française… Et je ne parle pas de la volonté d’effacer toute notion de genre, remplaçant les il/elle par « on » et ils/elles par « ons », mais pas tout le temps. C’est certainement un engagement personnel mais je ne vois pas l’intérêt de le faire disparaitre pour des personnes se considérant ouvertement comme homme ou femme. Ça fait à nouveau très artificiel.

Tout cela est vraiment dommage, parce que quand on fait le tri, qu’on évacue tous ces passages redondants et superflus, il se dégage une intrigue vraiment passionnante faite de ramifications bien vues et avec de bons rebondissements. J’ai beaucoup aimé suivre l’enquête sur la liste, les rivalités entre les différentes Ruches, les magouilles que chacune orchestre en douce et ce vers quoi tout ça nous mène. C’est assez évident mais non moins intéressant à voir se mettre en place. J’ai trouvé le personnage de Mycroft Canner aussi terrifiant que fascinant, tout comme le système qui l’a amené là. Celui de J.E.D.D. Maçon l’est tout autant et il a un gros potentiel pour la suite. La façon dont leur histoire s’imbrique avec d’autres que l’on découvre au fil du tome pour former une vaste trame concernant tout le monde et visant à renverser tout est fascinant. C’est simple mais terriblement efficace, on voit que l’autrice est historienne ici. J’ai moins accroché à l’aspect religieux qui entoure Carlyle et sa découverte, mais c’est mon côté athée.

Pour conclure, j’ai trouvé ma lecture des 647 pages de ce roman fort longue, surtout au début. Certes l’univers est fascinant mais ça ne suffit pas à en faire une bonne lecture pour moi. Il manque un équilibre certain entre worldbuilding et trame narrative, cette dernière ne devenant intéressante que dans la fin de ma lecture. Trop d’effets également de la part de l’autrice ont eu raison de moi parfois. Certes c’est une lecture ardue, mais plus par la forme que par le fond. L’histoire, elle, est simple et prévisible pour toute personne un peu passionnée par l’Histoire ou attentive à ce qui se passe dans notre monde. Je pense donc avoir déjà deviné une bonne partie de la suite et compte m’arrêter là. Ce n’est pas le genre d’univers et de saga qui me passionne en SF.

9 commentaires sur “Terra Ignota – Trop semblable à l’éclair d’Ada Palmer

  1. J’ai jeté l’éponge au bout de 380 pages, pour ma part, en grande partie pour les défauts que tu relèves. Notamment l’immersion sans arrêt cassée par des effets de manche stylistiques (voire typographiques) et l’impression persistante d’être dans tout autre chose qu’un roman (un essai, une pièce de théâtre, une fable mythologique, un cours magistral, un pamphlet politique, etc). Donc non, l’enthousiasme n’est pas général, si ça peut te rassurer.

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    1. Tu me rassures totalement parce qu’à force de lire tant d’avis positifs j’avais l’impression d’être vraiment passée à côté de quelque chose, mais je vois que ce n’est pas que moi, toi aussi tu as remarqué ces défauts ^^ Ouf !

      Aimé par 1 personne

    1. Honnêtement, je ne pense pas que ça joue. Ce qui m’a dérangé se place ailleurs. Après, c’est vrai que j’aurais apprécié d’avoir la suite sous la main pour enchainer et peut-être changer d’avis ^^
      Je t’en souhaite une bonne découverte !

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