Livres - Jeunesse / Young Adult

Calpurnia de Jacqueline Kelly

Titre : Calpurnia,

Auteur : Jacqueline Kelly

Editeur : Ecole des Loisirs

Année de parution : 2022 (pour la présente édition)

Nombre de pages : 421

Histoire : Calpurnia Tate a onze ans. Dans la chaleur de l’été, elle s’interroge sur le comportement des animaux autour d’elle. Elle étudie les sauterelles, les lucioles, les fourmis, les opossums. Aidée de son grand-père, un naturaliste fantasque et imprévisible, elle note dans son carnet d’observation tout ce qu’elle voit et se pose mille questions. Pourquoi, par exemple, les chiens ont-ils des sourcils ? Comment se fait-il que les grandes sauterelles soient jaunes, et les petites, vertes ? Et à quoi sert une bibliothèque si on n’y prête pas de livres ? On est dans le comté de Caldwell, au Texas, en 1899. Tout en développant son esprit scientifique, Calpurnia partage avec son grand-père les enthousiasmes et les doutes quant à ses découvertes, elle affirme sa personnalité au milieu de ses six frères et se confronte aux difficultés d’être une jeune fille à l’aube du XXe siècle. Apprendre la cuisine, la couture et les bonnes manières, comme il se doit, ou se laisser porter par sa curiosité insatiable ? Et si la science pouvait ouvrir un chemin vers la liberté ?

Mon avis :

Découverte lors de son adaptation en BD par Daphné Colignon, j’ai été tellement séduite par le personnage de cette charmante naturaliste en herbe, que j’ai sauté sur l’occasion de la réédition du premier roman dont elle est issue dans cette belle édition pour découvrir l’histoire originale et je ne suis nullement déçue.

Calpurnia est à l’origine deux romans, écrits dans les années 2000-2010 par Jacqueline Kelly. Celle-ci a su insuffler en eux le souffle des romans d’apprentissage pour enfants du XIXe – début XXe. C’est donc avec une certaine nostalgie que j’ai replongé dans cette ambiance me rappelant les aventures de la Comtesse de Ségur ou encore des Quatre filles du Dr March et même d’Anne de Green Gable. J’aime énormément cela. Pourtant, ici, la plume est fort simple, pas du tout travaillée comme ses aînées. Elle ne cherche pas à être poétique et pourtant elle va droit au but et nous touche.

Si le texte fonctionne si bien c’est parce que l’on suit une jeune fille de bonne famille hyper attachante dans son désir de briser les codes pour être elle-même et ainsi être heureuse. Non, elle ne veut pas qu’on l’enferme dans le carcan qu’on veut imposer aux jeunes filles alors. Non, elle ne veut pas apprendre à coudre, tricoter, cuisiner ou s’occuper d’enfants et d’une maison. Ce qu’elle aime et désire, elle, c’est observer le monde qui l’entoure et apprendre toujours plus sur lui avec son grand-père amateur de sciences. C’est donc l’histoire d’une douce rebelle que nous allons suivre.

J’ai adoré suivre les déchirements de cette enfant, jeune adolescente, qui a un côté vraiment passionné et une insatiable curiosité. C’est enchanteur de la voir se balader dans la forêt seule ou avec son grand-père à la recherche de nouvelles espèces en tout genre. Son grand-père est une superbe figure tutélaire et on adore leur relation complice. Celui-ci n’a que faire que ce soit une fille et lui ouvre bien des horizons. Il râle même à cause de la façon dont on éduque les filles et des carences qui en ressortent. Car en effet, au-delà de la passion pour les sciences et la nature qu’on nous transmet, il y a également un combat criant dans ce livre : celui de la libération et de l’instruction des femmes qui ne devraient pas être cantonnée à leur rôle de mère et de maîtresse de maison.

Cependant, Calpurnia est une fille de son temps. Certes grâce à son grand-père, elle a accès à tout un monde plein de mystères et de sciences, mais elle fait aussi partie d’une famille classique américaine et ne peut que courber l’échine… On aime la voir évoluer dans sa famille avec ses nombreux frères, le grand qu’elle adore, ceux proches d’elle qui tournent autour de sa meilleure amie, et avec ses parents avec qui elle a des relations assez distantes. C’est un portrait assez juste de l’époque, je pense, avec ses défauts et ses qualités.

Jacqueline Kelly ne fait pas concession. Elle a un discours assez âpre dans les deux sens. Elle ose critiquer le modèle d’éducation des enfants, le rôle qu’on attribue par défaut aux femmes, mais en même temps, elle ne propose pas un happy end à ses lecteurs. Elle est honnête et montre le poids de la société, de la famille, auquel doit se résoudre, bon gré mal gré, son héroïne.

Cette famille n’est d’ailleurs pas toujours un poids pour l’héroïne. On sent aussi combien elle l’aime. C’est ainsi charmant de suivre en parallèle ses avancées scientifiques et ses observations du monde avec son grand-mère et ses aventures en tant que seule soeur de cette fratrie. On s’amuse de ces garçons qui l’entourent et l’embêtent sans cesse, que ce soit avec cette liberté qu’ils ont et dont elle rêve, avec leurs amourettes qui viennent la gêner dans sa relation avec sa meilleure amie Luna, ou avec la proximité qu’elle a avec eux finalement, qui nous fait sentir combien c’est une famille aimante et soudée. J’ai beaucoup aimé cela car ça m’a rappelé à sa façon ce que j’avais pu lire dans les Quatre filles du Dr March et ses suites. Là où, la suite d’Anne de Green Gables n’a pas su transformer cela avec la nouvelle génération, je retrouve ici la fougue des débuts de celle-ci et la variété des histoires de Jo March également, une fois qu’elle a créé son école. C’est hyper entraînant.

Quant à l’édition ici proposée avec sa reliure en dur (hardback) et toilée, elle rappelle les belles éditions des classiques de la littérature qu’on trouve désormais chez des éditeurs comme Hauteville. C’est beau, c’est soigné, avec un joli papier bien épais et une illustration de couverture avec la silhouette de Calpurnia, très douce et poétique avec cette nature qui se détache auteur. J’aime beaucoup.

Tout comme j’avais adoré la version BD, la version originelle du texte m’a totalement séduite. Je découvre à quel point Daphné Collignon a fait un bon travail d’adaptation tant sa version est fidèle à l’originelle. J’ai aimé y retrouver la même héroïne attachante, le même discours percutant sur la place de la femme et l’éducation des enfants, avec en prime peut-être une ambiance familiale et une fratrie encore plus chaleureuse, entourant bien Calpurnia et offrant plein de petites aventures du quotidien. C’est définitivement charmant et j’espère que le second roman aura droit lui aussi à une aussi belle édition.

(Merci à L’école des loisirs pour cette lecture et leur confiance)

> N’hésitez pas à lire aussi les avis bien plus pointus de : Lady That, Psylook, Takoubook, Dame de Pique, Bianca, Vous ?

 

 

8 commentaires sur “Calpurnia de Jacqueline Kelly

  1. J’ai failli craquer en croisant cette belle édition mais je voulais d’abord sortir de ma PAL l’adaptation BD. Calpurnia a l’air d’être une héroïne comme je les aime et si je préfère les happy end, j’aime aussi quand un.e auteur.e fait montre d’un certain réalisme…

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    1. Je comprends ton envie de d’abord faire baisser ta PAL lol surtout que la BD étant assez fidèle, ce sera un bon indicateur pour voir si le roman te tente ou pas, mais clairement c’est un superbe objet à avoir, dans la lignée de la réédition de Anne, je trouve 😉

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    1. Franchement c’est une belle simplicité, de celle qui montre que même sans plume poétique on peut ressentir toute l’émotion et la belle atmosphère qu’elle a voulu créer pour raconter cette enfance d’une autre époque. Personnellement j’aime beaucoup.
      Après, tu as aussi l’adaptation en BD si vraiment le style t’inquiète 😉

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