Livres - Fantasy / Fantastique

Calame de Paul Beorn

 

Titre : Calame

Auteur : Paul Beorn

Éditeurs : Bragelonne

Année de parution : 2018-2021 (2020-2022 pour les poches)

Nombre de tomes : 2 (série terminée)

Histoire : Au royaume de Westalie, une rébellion principalement composée de femmes a fait trembler le trône du tyran, la Roi-Lumière, qui avait décrété que seuls les hommes avaient une âme. Au cours de la dernière bataille, Darran Dahl, le chef légendaire des rebelles, est tué et ses partisans jetés au cachot. Mais l’église dépêche dans la prison royale un célèbre conteur, d’Arterac, et lui donne pour mission d’entendre les derniers témoins du passé de Darran Dahl, cet ancien soldat surgi de nulle part, qui avait pris fait et cause pour la rébellion. La très jeune Maura, ancienne lieutenante et confidente de Darran Dahl, autrefois sa domestique, se voit proposer un marché : un sursis à son exécution en échange de son témoignage. Elle accepte de raconter leur histoire, depuis le village qui les a vu naître jusqu’à la bataille finale, mais elle se jure d’employer chaque minute de ce sursis pour mettre au point son évasion et reprendre la lutte.

Mon avis :

Suite aux bons échos sur la toile de cette duologie et toujours curieuse de découvrir de nouvelles plumes, je suis partie confiante à la découverte de l’univers et des personnages de Paul Beorn. Si ce fut un bon moment de lecture, il m’a cependant manqué quelque chose pour en faire une histoire mémorable et c’est ballot quand le procédé repose justement sur la construction d’une mémoire collective.

Paul Beorn nous propose ici une fantasy assez classique avec des thématiques un peu déjà rebattues mais fort bien esquissées. Il nous invite à aller à la découverte d’une rébellion qui a eu lieu mais qui a mal fini puisque ses membres sont sous les verrous et c’est à travers le récit de l’un d’eux que l’on va découvrir avec intérêt ce qui les a mené ici. Un procédé qui a l’art et la manière de me plaire car il participe à la construction des récits héroïques et historiques d’autrefois et pose le thème de l’écriture de l’Histoire par les vainqueurs, un thème qui m’est cher.

Pour se faire, nous faisons la connaissance de Maura, une jeune fille qui a participé à la rébellion et qui était très proche de son meneur, un certain Darran Dahl, qui aurait disparu sans livrer tous ses mystères, ce que le conteur D’Arterac cherche à percer pour le compte à la fois de la royauté et de l’église, une double allégeance dangereuse. Avec Maura, j’ai aimé partir des tous débuts de l’histoire, de la jeunesse de son mentor jusqu’à ce qui les a amené ici. C’était riche et bien écrit car dynamique et touchant à la fois, l’auteur ayant bien sûr doté ses personnages de certaines failles et noirceurs. Un grand classique mais efficacement utilisé ici. Il nous fait partir d’un petit village comme les autres en plein coeur de la contrée du Roi Lumière. On y découvre les codes, les relations entre les habitants, la place de misanthrope de Darran Dahl, celle de rebus de Maura, etc. Puis un élément déclencheur inattendu vient les faire basculer et on découvre non pas une grande épopée menant à la rébellion mais malheureusement un fait anodin qui va attiser la colère de ses pauvres bougres et de fil en aiguille les conduire malgré eux à quelque chose qui les dépasse.

J’ai apprécié l’âpreté du monde où on évolue. Dans cet univers d’inspiration moyenâgeuse, les femmes sont des « biens meubles », propriétés de leur père, mari, maître. Les gens qui sortent un peu du lot sont vite pointés du doigt, parfois positivement quand on croit qu’ils ont une forme de magie guerrière ou non, parfois négativement quand ce sont des femmes, on les traite alors de sorcières et cela fini mal parfois. J’ai aimé que ce soit sale, rude, pauvre. J’ai aimé qu’on ait des campagnards qui n’hésite pas mettre de côté ceux qui les dérangent, c’est classique mais cela a un côté plus réaliste que cette mode des utopies qui parfois peuvent m’agacer. Au moins, on comprend pourquoi au bout d’un moment la colère gronde entre ses laissés pour compte et le pouvoir.

Même si c’est véritablement qu’esquissé, j’ai senti un certain potentiel de fascination dans la magie qui circule dans cet univers. Moins frontal que ce qui est décrit dans un premier temps et dans lequel le peuple croit, on découvre une manière bien plus subtile chez celle-ci pour se manifester. Contrairement aux croyances, ce n’est pas réservé à une élite et toute l’élite n’en dispose pas, ni tout ceux qui sont marqués. La magie est plus insidieuse et nécessite qu’on croit en son porteur ou sa porteuse : c’est le calame, et plus la croyance est forte, plus le pouvoir l’est. J’ai beaucoup aimé cette subtilité. Cependant, je me suis aussi parfois perdue dans les termes des différents pratiquants et ce qui définit la magie en eux. Je n’ai pas trouvé tout cela très clair, surtout après les révélations sur le calame qui venait en contraction avec certaines choses présentées comme des évidences auparavant.

Le problème que j’ai eu cependant face à cette lecture, c’est que malgré son cadre rude, j’ai trouvé celle-ci très lisse. Le procédé de narration est intéressant. La subtilité du calame est original et intéressant. Mais c’est à peu près tout. Je n’ai pas trouvé les personnages particulièrement marquants. Il leur manque à tous quelque chose pour moi, notamment du temps d’exposition pour Darran qu’on ne voit toujours que brièvement à travers le regard des autres. Maura est une gamine banale en quête de reconnaissance. Même les entourloupes que je vois poindre entre les différents pouvoirs sont au final peu convaincants car à peine esquissés en marge. Ce n’est pas suffisant pour moi qui aime les récits plus fouillés et complexes. Ici, j’ai l’impression à chaque que l’auteur pose l’idée mais ne la développe pas. C’est dommage parce qu’il y a du potentiel.

J’ai passé un bon moment aux côtés de Maura et les habitants de son village. J’ai aimé voir comment se mettait en branle ce qu’on allait appeler une rébellion contre le pouvoir en place alors que c’est loin d’en être une à la base. J’ai surtout aimé la dénonciation de la place des femmes dans ce royaume tyrannique et patriarcal, la base de toute l’histoire. J’ai trouvé le mode d’expression de la magie original. Mais l’ensemble a manqué de consistance pour moi. Malgré ses près de 600 pages, j’ai eu l’impression d’un sujet survolé et de personnages manquants de corps. Alors je suis partagée… Mais il ne reste qu’un tome. Que faire ? Je ne sais pas encore ^^

>> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Sometimes, Yuyine, Lianne, Elhyandra, Laure, Ramettes, Plumes de Lune, Kellen, Carolivre, Vous ?

9 commentaires sur “Calame de Paul Beorn

  1. Le premier tome est dans ma PAL mais le roman ne me tente plus autant qu’à son arrivée, manque de vif attrait que ton avis renforce. J’aime aussi beaucoup quand on aborde la question de l’écriture de l’Histoire par les vainqueurs, mais c’est un peu dommage que le tout soit lisse alors que le monde dépeint aurait pu permettre quelque chose de plus fort…

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