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Live Forever de Raul Trevino

Titre : Live Forever

Auteur : Raul Trevino

Éditeur vf : Kotoon

Année de parution vf : 2023

Nombre de tomes vf  : 2 (série terminée)

Résumé : Jouer avec la vie et la mort n’est pas sans risque…Sarah vient de perdre sa mère. Le deuil et la douleur sont tellement trop difficiles à vivre qu’elle part à la recherche d’un antidote qui offrirait à ses proches la vie éternelle. Elle décide alors de croire les rumeurs selon lesquelles son voisin serait un vampire.

Mon avis :

Tome 1

Les mythes, la mort, l’adolescence, des thèmes qui a priori n’ont pas grand-chose à voir. Et pourtant ici, dans ce remake du mythe vampirique à la Buffy, sous la plume d’un auteur mexicain reconnu, cela fait sens.

Kotoon continue leur politique de publication de webtoon à l’identité marquée. Cette fois, c’est au tour de Live Forever, une série en 2 tomes et 52 épisodes, qui a eu son petit succès sur la plateforme vo avec plus e 9,4 millions de vues. Avec son habillage sobre et son onirisme macabre la série a fait son bonhomme de chemin en moi au fil des chapitres.

Ceux-ci, très court, nous entraînent à la rencontre de Sarah, une ado gothique, qui n’arrive pas à gérer le décès de sa mère. Bercée par les contes à dormir debout de ses amis sur un potentiel voisin vampire, elle va se laisser entraîner dans une drôle de quête aux frontières du réalisme, tandis que dans le présent elle sombre tous les jours un peu plus, n’arrivant pas à faire son deuil.

J’ai toujours beaucoup aimé le thème de la mort, que je trouve d’une rare puissance. Ici, l’auteur joue sur plusieurs registres, celui très concret du deuil et celui plus fantastique du vampirisme et de la vie éternelle, le tout, pour se faire écho l’un l’autre dans une belle fable adolescente. Les dessins participent à merveille de cette ambiance avec ce noir et blanc saisissant grâce aux subtiles touches apportées par le rouge disséminé de-ci de-là et une composition parfois frappante, très inspirée des comics américains et me rappelant notamment l’univers tant chéri de Buffy quand elle perd à son tour sa mère.

Le titre n’échappe pas aux clichés du genre. On est dans un webtoon adapté en version papier, toutes les dynamiques entre les cases ne passent pas super bien. Le dessin, en hors de ses compo, a un trait assez simple avec un vampire qui fait très vampire, des ado gothiques qui font très gothiques et d’autres typiquement américains qui le font bien également. On parlera soit de marqueur soit de clichés, ce sera selon les goûts. La définition des personnages, en tout cas, manque un peu de nuances, alors que le discours sur le deuil lui est touchant dans sa maladresse et sa justesse, notamment avec ce père déphasé.

J’ai trouvé l’aventure peu originale malgré ce qu’elle propose et pourtant entraînante. Je l’aurais sûrement encore plus aimé sans ce transitions parfois abruptes et cette écriture à la truelle où on veut vraiment nous faire sentir qu’on est en Amérique… Cependant, ça se lit très bien. On enchaîne les pages. On est curieux du mystère qui point au fil des pages à cause de ces liquides très étranges et de leurs conséquences sur certains êtes. On a envie de percer à jour ce voisin mais aussi le duo d’ado / jeunes adultes qui semble enquêter sur des phénomènes. On est également émue par l’héroïne qu’on a envie d’aider dans sa quête d’immortalité qu’elle met en pendant de la perte de sa mère et de sa perte de repère à elle. Adolescence + deuil, ce n’est pas le meilleur des combo pour grandir.

Titre à la fois sensible et fort classique dans son mythe du vampire moderne qu’il reprend, Live Forever touche par la quête de sa jeune héroïne qui refuse de se laisser dominer par la mort. C’est un webtoon aux jolies influences américaines avec des airs de comics et des airs de Buffy. Avec ses deux tomes seulement de prévus, j’ai peur que ça fasse un peu court mais ça n’enlève rien à sa sombre poésie, ni à mon envie de découvrir la suite.

Tome 2 – Fin

Cette fort jolie surprise est probablement mon titré préféré chez Kotoon. Offrant une vraie maestria graphique, elle plonge aussi dans les racines du mal… être et le fait avec brio et sincérité.

Les séries fantastiques ne sont jamais des choses faciles à écrire. Le mythe du vampire, on l’a tellement éculé que c’est dur de se renouveler avec. Et pourtant, tout en restant classique Raul Trevino y réussit dans ce court titre, déjà terminé en 2 tomes, où il allie expérience littéraire et expérience personnelle. Ayant perdu son frère au début de la publication de l’oeuvre, il y a mis ensuite énormément de lui-même, en faisant une oeuvre cathartique et cela se sent.

La première chose qui m’a frappée ici, c’est le travail sur l’ambiance qui est fait. A travers des dessins au noir somptueux, il nous plonge dans les maux de l’âme. C’est sombre, c’est écharpé, c’est tranchant et son trait retranscrit tout cela avec clarté et force. Le mal être de Sarah suite à la mort de sa mère et la relation bancale qu’elle a avec son père, elle suinte des pages. La profonde tristesse de Samuel le vampire, qui ne se remet pas de la mort de sa femme, elle nous transperce aussi. L’auteur se livre à de vraies expériences graphiques avec eux pour transposer sur papier les vagues de leur âme et il y réussit brillamment avec des compositions souvent expérimentales, très métaphoriques mais où les jeux de couleur, de graphisme et de texture frappent !

L’histoire est tout aussi réussie avec ce voile étrange qui la recouvre et qui fait des merveilles dans une oeuvre fantastique. Elle nous entraîne dans les méandres des âmes cabossées de chacun. Avec cet effet « groupe », les 6 personnages qui vivent cette histoire sont hyper entraînants, rappelant de vieilles séries d’autrefois. On s’embarque avec eux dans leur lutte contre la noirceur qui les pénètre que le fantastique permet de matérialiser et de fonder comme ennemi commun à combattre. C’est ce qu’il y a de chouette dans ce genre, nos peurs, nos troubles, prennent vie. L’auteur a magnifiquement exploité cela, nous permettant de passer ainsi des problèmes de Sarah à Samuel, en touchant également leurs amis et leur famille. Les pouvoirs de Lilac et Oliver étant de parfait mediums pour aller combattre le mal et faire le lien avec notre réel.

Aventure, thérapie et amitié sont donc au rendez-vous de ce dernier tome dans lequel on ne s’ennuie pas un instant. Alors oui, il y a quelques carences au milieu, cela va un peu vite. Il y a des sauts et des coupes qui sont fait dans la narration qui se sentent un peu trop. Cela a aussi un côté un trop classique et déjà vu, c’est également assez facile au final et bien des éléments des passés de chacun auraient mérité d’être creusés. Mais pour une oeuvre courte, c’est intéressant et efficace avec de bien belles idées sur le deuil et la solitude très joliment mis en scène et en images par l’auteur, ce que je tiens à saluer.

Avant tout oeuvre graphique marquante pour moi, Live Forever m’a montré la belle combinaison de l’art du comics américain avec l’art du séquençage à la japonaise, pour un artiste mexicain vivant au Japon. Ce fut un récit bouleversant sur la difficulté à gérer un deuil et une transition familiale complexe, mais un récit lumineux porté par de belles rencontres et retrouvailles soulignant l’importance de l’amitié dans la vie. Le tout porté par des expérimentations graphiques sur fond de noir et rouge juste saisissantes, symbolisant à merveille le trouble des pensées des personnages. J’espère qu’on nous permettra de continuer à suivre l’oeuvre de cet auteur fort prometteur.

(Merci à Kotoon pour cette singulière découverte)

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4 commentaires sur “Live Forever de Raul Trevino

  1. La couverture a quelque chose de malaisant mais d’intrigant à la fois. Je t’avoue que ta référence à Buffy titille ma curiosité et que malgré le côté stéréotypé des personnages et le manque de subtilité de la plume, je suis intriguée. Je vais peut-être d’abord lire quelques chapitres en ligne si le webtoon est toujours disponible sous cette forme pour me faire une idée 🙂

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    1. C’est cette ambivalence de la couverture qui m’a attirée aussi. Le côté Buffy c’est par rapport à un évènement qui survient assez tard dans la série et l’aspect quotidien américain. Enfin tu verras si tu trouves les chapitres en ligne ><

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  2. J’aime bien les illustrations noirs et blanc très marquées, avec des petites note de rouges. Le style visuel me plait bien. Mais je suis un peu plus refroidie par le côté « cliché » du vampire qui fait trop vampire, des gothiques qui font trop gothique et des américains qui font très américains. Ca, plus les transitions trop abruptes, les cases qui ne s’accordent pas toujours du au format d’origine. Même si le sujet est sensible et intéressant, je ne suis pas certaine d’adhérer totalement au final. Merci pour ton retour en tout cas ! 🙂

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    1. Et je te comprends car sans l’envoi de l’éditeur je ne sais pas si je me serais laissée tenter. Le format webtoon est cher même si la qualité est au rdv. Ici le point fort, ce sont clairement les dessins et l’ambiance même si c’est très classique comme tu l’as noté.

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