Livres - Jeunesse / Young Adult

Un jour, je te mangerai de Géraldine Barbe

Titre : Un jour, je te mangerai

Auteur : Géraldine Barbe

Editeur : École des Loisirs (Médium +)

Date de parution : 20 janvier 2021

Nombre de pages : 140

Histoire : Alexia ne se trouve pas belle, pas comme elle voudrait. Ses fesses, ses cuisses, ses genoux, son ventre, ses seins… Rien ne va. Elle est trop grosse, elle se déteste. À l’entendre, on dirait un monstre. Elle n’aime plus le chocolat, ni les frites, ni les pâtes, ni le poulet rôti, ni les spaghettis, ni le fromage. Chloé, sa petite sœur de 12 ans, n’y comprend rien : Alexia a beaucoup de défauts mais elle est jolie et vraiment pas grosse. De quoi parle-t-elle ? Et pourquoi Chloé a-t-elle le sentiment que sa grande sœur lui en veut autant ?

Mon avis :

L’École des Loisirs est une maison d’édition que j’apprécie car elle propose aux plus jeunes des ouvrages adaptés pour leur parler de sujets qui peuvent les toucher et les concerner. Alors quand j’ai vu qu’en ce mois de janvier, ils sortaient un court roman sur le thème de l’anorexie, j’ai de suite eu envie de le découvrir.

Géraldine Barbe, l’autrice, a été comédienne avant de changer de vie, il y a quinze ans, à la suite de l’incendie de son appartement. Elle s’est alors autorisée à écrire. Des romans pour adultes et pour la jeunesse. Dans Un jour je te mangerai, inspiré de son histoire personnelle, elle raconte l’anorexie d’une adolescente à hauteur des yeux de sa petite sœur.

Ma première approche de l’oeuvre a été via cette couverture signée Hülya Özdémir que j’ai trouvée très poétique et vraiment parlante avec cette belle adolescente qui est sur le point de croquer une pomme, telle Eve, mais qui est surtout envahie à l’intérieur d’elle par des plantes qui semblent coloniser son organisme sans qu’elle puisse rien y faire. Alors ce beau regard et ce sourire, on sent de suite que quelque chose cloche et cela m’a rappelé le nénuphar qui grandit dans le coeur de Chloé dans l’Ecume des jours.

Le roman proposé ici est court, seulement 144 pages mais il laisse son empreinte une fois refermé. La narration n’est pas sans faiblesse avec son rythme un peu saccadé et sa fin un peu précipitée et survolée où j’aurais aimé qu’on s’attarde sur cette soeur malade. Mais le propos est tellement fort qu’on lui pardonne.

J’ai été frappée pendant toute ma lecture par la violence de ce que subit la jeune héroïne, la petite soeur d’Alexia, qui s’appelle Chloé justement. Avec son regard d’enfant encore, même si elle est au collège, elle subit toute la rage, le mal être et la violence de sa soeur, c’est terrible. Être adulte et lire ça, cela retourne franchement l’estomac et cela révolte. J’ai été révolté face à ces parents qui laissent une jeune enfant subir à ce point les problèmes de son aînée sans en être vraiment protégée et surtout j’ai été révolté face à ces parents qui n’ont pas fait assez à mon goût alors que tous les signes étaient là et connus.

La plongée dans la vie d’une famille avec une enfant anorexique est très bien écrite. On voit le basculement de celle-ci à travers les yeux de sa soeur. On suit sa relation d’amour/haine avec la nourriture mais aussi avec ses parents, sa détestation de son corps, ses colères irrationnelles contre tout et n’importe quoi et l’impuissance de son entourage, voire la démission de certains…

Mais plus que ça, la force du titre c’est de nous le montrer à travers les yeux de Chloé, la petite soeur, également victime dans l’histoire. Elle se fait sans cesse malmener par son aînée, qui l’affuble d’un terrible surnom « petite merde », qui la violente sans cesse et lui fait sentir qu’elle ne veut pas d’elle. L’autrice évoque ainsi le terrible problème qui survient parfois avec l’arrivée d’un second enfant dans une famille : la jalousie. Si celle-ci est normale dans un premier temps, elle devient vraiment inquiétante au niveau d’Alexia, pour ne pas dire dangereuse. Alors certes l’autrice fait passer cela sur le compte de l’anorexie dont elle souffre, mais je m’interroge sur la part de l’éducation des parents et de ses manques. Ont-ils bien préparé leur aînée à l’arrivée d’une petite soeur ? Les ont-ils accompagnées tout du long comme il le fallait ? C’est une zone d’ombre que je regrette un peu ici parce que je trouvais également la violence de ce sujet assez intéressante pour être développée.

Cependant, rien que le récit d’une famille confrontée à l’anorexie vu de l’intérieur fut frappant. Je regrette peut-être que l’ensemble manque parfois un peu de liant d’un chapitre à l’autre. Je regrette également une certaine répétition quelque fois et surtout une fin rapide et un peu abrupte qui donne l’impression de survoler le sujet au moment où ça devient intéressant et important, car au final le mot anorexie est posé très tard même si on comprend vite ce qui se passe et j’aurais aimé que l’autrice développe les aides apportées dans ce cas-là, cela aurait été une belle aide pour les jeunes lisant ce roman.

Un jour, je te mangerai est un roman qui n’est pas parfait et qui aurait sûrement mérité quelques pages de plus, mais l’importance des thèmes qu’il évoque, qui sont trop souvent poussés sous le tapis, fait oublier tout cela et me pousse vraiment à le recommander aux jeunes adolescents qui pourraient être confrontés personnellement ou par ricochet par ces sujets.

Je remercie L’école des Loisirs pour leur confiance et cet envoi !

10 commentaires sur “Un jour, je te mangerai de Géraldine Barbe

  1. Je n’ai lu qu’un roman jeunesse sur le sujet alors que vu son importance, il mériterait que je lui porte plus d’attention. Je note donc ce titre d’autant qu’en plus de l’anorexie, une forme de violence tournée vers soi, il semble y avoir une forme de violence orientée vers une tiers personne, la petite sœur. Cette double approche me semble assez rare et montre qu’une victime peut fort bien être à son tour, bourreau, ce qu’on a trop tendance à oublier…

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    1. Merci pour ton commentaire, tu confirmes mon impression que c’est un sujet qu’il faudrait mettre plus en avant.
      Je trouve aussi que c’est très bien de montrer différentes facettes des personnages croisés ici même si c’est dur.
      C’est vraiment une belle lecture et en plus le texte est court ce qui ne gâche rien ^^

      Aimé par 1 personne

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