Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Peuple Invisible de Shohei Kusunoki

Titre : Peuple Invisible

Auteur :  Shohei Kusunoki

Traduction : Satoko Fujimoto et Eric Cordier

Éditeur vf : Cornélius

Année de parution vf : 2020

Nombre de pages  : 342

Résumé : L’auteur s’attache ici à décrire la vie quotidienne du peuple, tout en y insufflant une dimension plus épique. À travers des genres aussi variés que le conte japonais traditionnel, la chronique urbaine ou le récit de samouraï, il décortique l’ambiguïté des rapports humains. Mettant à nu les sentiments qui unissent les êtres, les raisons pour lesquelles ils s’attirent et les malentendus qui les séparent, Kusunoki parvient, à travers un style limpide, à exprimer ce qui ne l’est pas…
Les nouvelles réunies dans ce volume ont toutes été publiées dans la légendaire revue Garo. Cette publication d’avant-garde, sur les traces du gekiga, le mouvement fondé en 1957 par Yoshihiro Tatsumi pour rompre avec la tradition enfantine du manga, ouvrait le genre à l’âge adulte. Fondée en 1964, elle accompagna tout au long des années 60 et 70 la jeunesse protestataire qui voyait en elle une forme de contestation de l’establishment. Ses nouvelles parviennent à créer un lien entre le Japon traditionnel et la société d’après-guerre marquée par la censure, le culte du travail, l’érosion des traditions et un anti-américanisme virulent.

Mon avis :

Depuis quelques temps, il me prend l’envie de découvrir un peu plus les oeuvres mangas passées, celles des années avant ma naissance, autres que celles d’Osamu Tezuka dont on nous a souvent abreuvées et que je commence à connaître. Bien sûr, j’aimerais lire celles de mangakas féminines malheureusement en France, ce sont avant tout les mangakas hommes que l’on retrouve sur nos étagères. Tant pis, c’est quand même l’occasion de s’instruire et de voir à quoi ressemblaient les oeuvres qui ont inspiré les générations de mangakas conduisant à ceux qu’on lit aujourd’hui.

C’est donc dans cette optique patrimoniale que je me suis naturellement dirigée vers les éditions Cornélius qui est pour moi l’éditeur spécialisé dans le domaine et qui en plus offre de très beaux objets. Pas de reliure cette fois, juste une édition brochée, mais une couverture et un papier épais et de qualité, un vrai travail éditorial avec une explication sur la difficulté à récupérer des pages exploitables pour éditer cette oeuvre ancienne et quelques mots pour resituer l’auteur et son oeuvre. Pile ce dont j’avais besoin.

Qui est Shohei Kusunoki ? Né en 1944 à Tokyo, de santé fragile, il profite de ses absences à l’école pour lire, des bandes dessinées en prêt notamment. Ses premiers coups de coeur vont vers SHIRATÔ Sanpei (Kamui-den), HIRATA Hiroshi (L’âme de kyudo), SAITÔ Takao (Golgo 13). Il projette déjà de devenir auteur-dessinateur et crée une petite association de jeunes qui comme lui aspirent à la même carrière, avec lesquels il réalise un fanzine.Il commence à être publié en 1969 par la maison Sanyôsha puis travaille également comme assistant de SHIRATÔ. Si nombre de ses histoires se situent dans le passé avec des guerriers pour personnages, ce qui le distingue dans l’ensemble, c’est sa sensibilité toute personnelle à la fragilité de la vie. Il s’éteint en 1974, à l’âge de 30 ans.

Avec cet auteur ayant été publié dans le fameux Garo, je continue de découvrir cette branche du manga qui bascule vers ce qui deviendra les seinen qu’on lit de nos jours, passant des histoires légères et amusantes pour enfants à des récits plus mûrs et plus sombres pour adultes. Je suis pour le moment assez novice dans le genre n’ayant lu dans le style que des oeuvres de Tezuka, Kamimura, Lone Wolf and cub et Une vie dans les marges, mais je compte continuer à réparer cela.

Pourtant je dois avouer que ce n’est pas forcément le type d’oeuvre que je préfère et qui me fait vibrer. C’est avant tout pour le côté historique et patrimonial que j’ai apprécié cette lecture. On y découvre le regard acéré de l’auteur sur la vie passée des japonais. Il nous conte dans des chapitres indépendants, telles des nouvelles, le quotidien difficile mais heureux de ceux-ci malgré les drames. C’est un quotidien ancien et âpre, fait de devoir, de combats de samouraï, de mélancolie de la perte, une vie simple quoi. Même dans le dernier tiers du livre où l’on suit le même personnage sur plusieurs chapitres, un mendiant aveugle, je n’ai pas trouvé de trait saillant me permettant de garder le titre en mémoire. C’est assez lisse pour moi avec juste le portrait de ce Japon d’autrefois.

C’est plus du côté de la composition des planches et des dessins que j’ai pris du plaisir. En effet, avec un dessin assez daté, l’auteur m’a fait voyager dans le passé. J’ai beaucoup aimé ses compositions remplies de petits traits, un peu comme l’a fait Oshimi sur certains titres. J’ai beaucoup aimé sa peinture crue de cette vie rurale passée. L’auteur a parfois même des fulgurances lors de certaines mises en scène comme en avait Tezuka, le maître en la matière, car lui osait vraiment tester des choses, ce qui n’était pas le cas de tous.

Peuple invisible est vraiment un ensemble de récits qui dépeignent un quotidien passé qui peut sembler anecdotique mais on y retrouve toute la sensibilité de l’auteur pour l’éphémère et la dureté de la vie déjà par le passé. Ce n’est pas le genre de lecture que je préfère, ce ne fut pas une lecture marquante, mais ce fut une lecture enrichissante pour mon bagage de lectrice aimant découvrir les origines et les évolutions des arts qu’elle apprécie.

>> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : …, Vous ?

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2 commentaires sur “Peuple Invisible de Shohei Kusunoki

  1. Je ne suis pas certaine que ma médiathèque le propose, mais si c’est le cas, je l’emprunterai volontiers, toujours curieuse d’en apprendre un peu plus sur le Japon présent et passé, que ce soit par la porte de grandes épopées ou comme ici des instants de vie…

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