Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Gourmet Détective d’Akiko Higashimura

Titre : Gourmet Détective

Auteur : Akiko Higashimura

Traduction : Miyako Slocombe

Éditeur vf : Delcourt-Tonkam (josei)

Année de parution vf :  Depuis 2023

Nombre de tomes vf : 4 (en cours)

Résumé : Goro Akechi est un célèbre détective privé qui a un petit bureau à Omotesando. Il aime la bonne cuisine et se retrouve souvent à résoudre des affaires mystérieuses. Akechi implique également dans ses aventures Ichigo Kobayashi, une vendeuse de bentos, faisant d’elle son assistante.

Mon avis :

Tome 1

APRÈS LA MODE, L’HISTOIRE, LES TRENTENAIRES, LE DÉTECTIVE AMATEUR DE BONNE BOUFFE !

Akiko Higashimura est une autrice singulière qui a une carrière très riche et qui explore des univers très variés. Elle a été un peu maltraitée chez nous au début avec sa Princesse Jellyfish dont Delcourt a failli ne pas nous délivrer la suite et qui est actuellement difficilement trouvable en entier en neuf… Heureusement, le Lézard noir, lui, a cru en elle et en publiant avec succès coup sur coup deux de ses titres très différents, il l’a remise en avant. Ayant le vent en poupe, la revoici chez Delcourt !

Opportuniste vous dites-vous ? Oui, l’éditeur l’est un peu mais quel plaisir de retrouver le ton et les ambiances de cette autrice polyvalente qui est capable d’écrire aussi bien une fresque historique, une histoire sur une bande de marginaux fans de mode, un sex and the city à la japonaise qu’un polar serré. Voilà tout son talent et je suis bien contente de la retrouver chez nous avec Gourmet Détective, une série toujours en cours de plus de 10 tomes, qui en plus nous est délivré à un format plus petit et accessible que les titres du Lézard Noir.

Avec ce titre, Akiko Higashimura s’essaie à un genre qu’on avait pas encore rencontré chez elle, le polar et elle y brille tout comme dans les autres récits auxquels elle s’était essayée auparavant. Avec détachement et humour, elle met en scène des personnages décalés et classes dans des situations classiques avec un détective courant après une meurtrière rusée et manipulatrice qu’il connaît, le tout sur fond de bonne cuisine. Des éléments qui semblent n’avoir rien à voir et qui pourtant offre une très belle atmosphère ici, notamment grâce au ton particulier de l’autrice qui rend ceci assez drôle et cocasse. 

J’ai beaucoup aimé la vivacité d’esprit de l’autrice qui crée ici des personnages charismatiques qui portent très bien cette histoire reposant pourtant sur des bases classiques. Notre détective Akechi porte une cravate à la texane, a une permanente et est un fin gastronome. Il va prendre comme acolyte la patronne du food truck du coin chez qui il se rend tous les jours ou presque. Normal, non ? xD Et on va le suivre dans plusieurs enquêtes qui auront toutes un lien avec la meurtrière découverte dans le prologue de la série, celle-ci jouant les mastermind en manipulant de faibles femmes pour les pousser à tuer en utilisant… la nourriture ! La boucle est bouclée.

L’ensemble est entraînant, inattendu, avec cette ambiance calme et classe d’adultes stylés qui aiment prendre des verres dans les bars et resto chics le soir. Je ne sais pas si vous voyez. On a l’impression qu’on est en train de boire un bon whisky avec eux en savourant ces histoires qui se dévoilent à nous. L’autrice emprunte pour cela énormément à des titres classiques comme Détective Conan pour raconter et mettre en scène les affaires dans lesquelles Akechi va irrémédiablement se retrouver entraîner. Il y a aussi du Hitchcock dans leur mise en scène et découpage ensuite grâce à cette aura rétro et adulte que ça dégage. 

Cela n’a pourtant rien de flamboyant, c’est plutôt assez posé et tranquille, mais le décalage que l’autrice insère par petites touches est savoureux. On se plaît de ce détective improbable qui se la joue beau gosse intouchable mais qui est obsédé par la nourriture et réfléchit avant d’aller quelque part s’il n’y a pas une bonne adresse dans le coin. On s’amuse de sa relation chien-chat avec sa cuisinière attitrée, la patronne du food truck, qu’il va embarquer contre sa volonté dans ses histoires. Ils forment un duo détonnant. Même ses connaissances et amis ont tendance à gentiment se moquer de lui, c’est dire ^^

Et pourtant, c’est classique, posé, archi sympa à suivre. J’adore le trait de l’autrice dans ces ambiances, ça rend très bien. Le design des personnages est vraiment bien pensé pour nous rester en mémoire et avoir une belle présence. Le découpage est très cinématographique et tout cela contribue à une belle atmosphère adulte. C’est parfait car les thématiques le sont tout autant. On parle d’amours déçus, de femmes trompées qui cherchent à se venger. 

Explorer la suite du catalogue d’Akiko Higashimura est un vrai plaisir. Elle semble à l’aise dans tout type d’histoire. Ici, le polar convient à merveille à son humour cocasse et décalé, ainsi qu’à son trait percutant et classe où les personnages prennent vraiment vie sous son pinceau. Elle reprend à merveille les marqueurs du genre pour des histoires classiques mais prenantes et profondes où la touche culinaire et le tandem détective-meurtrière en font vraiment la marque de fabrique pour sortir du lot. Une très chouette expérience !

> N’hésitez pas à lire aussi l’avis de : L’Apprenti Otaku, Vous ?

Tome 2

Ils sont de retour pour nous jouer un mauvais tour ! Voici déjà l’heure d’une nouvelle aventure détectivo-culinaire comme seule Akiko Higashimura sait en concocter !

J’avais pris grand plaisir à découvrir le concept un brin barré du nouveau manga de l’autrice publié chez Delcourt-Tonkam. Je suis heureuse de voir qu’elle le prolonge dans ce nouveau tome consacré à un nouveau crime où notre détective par meurtrier opposé va continuer à affronter sa némésis.

C’est vraiment une idée originale que d’assortir à chaque histoire une aventure culinaire et un meurtre. Dans ce tome, il s’agit de faire la lumière sur un critique culinaire amateur mort en s’étouffant avec du pain dans un chic restaurant français à Tokyo. A travers lui, l’autrice critique notre manie actuelle de tout tout commenter sur le net même quand on ne s’y connaît et ici, surtout, le côté très pingre des gens qui préfère un restaurant pas cher et correct à un très bon restaurant pour lequel il faut mettre le prix afin d’avoir de la grande cuisine. Étant moi-même amatrice de bons petits plats, j’ai parfaitement entendu sa critique et trouvé son regard acéré assez juste sous la caricature brossée jusqu’à l’extrême où on voit des gens adorer un restaurant concept où on mange debout parce que c’est hype et pas cher lol

L’aventure se lit d’un trait et occupe l’ensemble du tome. On y retrouve notre dandy détective toujours aussi classe et clinquant mais également sec et manipulateur. J’adore le duo étrange et décalé qu’il forme avec Kobayashi, la vendeuse / cuisinière du food truck voisin. Ils sont tordant ensemble, elle avec son naturel, lui avec ses grands airs. L’autrice s’amuse comme une petite folle avec eux et nous aussi, faisant d’eux des Lupin modernes quand ils s’agit d’enquêter et se déguiser. Tout est pimpant dans ce titre. On saute d’une page à l’autre au cours de l’enquête car c’est frais et pétillant. L’autrice dose juste comme il faut l’humour grinçant qu’on lui connaît et ses envies de douces moqueries, comme avec la police qu’elle ridiculise à chaque fois. C’est très drôle.

Cerise sur le gâteau, au fil des chapitres, un peu comme dans Killing Eve, elle mitonne une relation très ambiguë entre notre détective et une ancienne cliente à lui devenue une tueuse manipulatrice, utilisant des hommes et femmes à distance pour commettre ses méfaits et alléger leur conscience, fabriquant par là-même de nouveaux meurtriers. Cette mante-religieuse est fascinante à suivre et j’ai adoré le parallèle fait entre elle et la Mona Lisa mystérieuse de Da Vinci dans ce tome. L’atmosphère française so chic parisienne est d’ailleurs superbe, clinquante à souhait et bien clichée, presque comme dans du Woody Allen ^^

Savoureux divertissement gastro-chic et énigmatique, ce policier culinaire est aussi savoureux que les cuisines qu’on y croise. Amateur de crimes à la Agatha Christie avec ce petit côté chic, humoristique et grinçant, venez déguster les plats toujours savoureux et épicés de la chef Higashimura, vous aurez envie de vous resservir !

Tome 3

Un Gourmet Détective très détective dans ce tome et terriblement peu gourmet avec cette nouvelle affaire si peu ragoûtante mais pourtant hautement grinçante.

L’autrice a toujours le don pour mettre en scène des critiques acerbes de notre société dans cette série. Elle s’attaque cette fois avec l’affaire du tome au portrait des femmes battues et plus particulièrement des femmes au foyer japonaises bien trop souvent sous la domination de leur mari. Tout y passe, du mari qui n’arrive pas à se détacher de sa mère, en passant par l’humiliation de la femme par son mari et la place qu’elle n’arrive pas à avoir dans le couple, sans oublier les couples avec différences d’âge où l’homme en profite pour asseoir une autorité factice par ce biais. C’est lourd, c’est douloureux mais avec le ton caustique de l’autrice toujours sombrement drôle et grinçant.

Cette fois, pas besoin d’avoir deux-trois affaires dans le volume, une seule occupe le haut du pavé et c’est assez agréable. On suit de près la criminelle et l’aide que lui apporte la mante religieuse derrière son passage à l’acte. On assiste à tout, des humiliations qui précèdent, à la prise de contact, au passage à l’acte, en passant pour l’élimination du corps. Cela ressemble d’ailleurs à un vrai vau-de-ville à partir de ce moment-là avec un jeu de chat de et de souris entre eux et notre détective qui est sur leur piste, parce que bien sûr par le plus grand des hasards il connaissait la victime. C’est truculent de voir comme l’une l’évite et l’autre en déduit ce qui se passe. C’est gros, très gros, mais terriblement caustique et donc amusant malgré le glauque de la situation. 

Mon seul regret est qu’à suivre cette affaire d’aussi près, on perd un peu la dimension gourmet de la série, ainsi que la relation si amusante entre notre Détective et sa charmante voisine cuisinière. On voit à peine celle-ci, tellement que l’autrice se sent obligée de lui consacrer un chapitre bonus qui n’a rien à voir à la fin du volume pour qu’on ait notre dose. Il y a cependant une dimension culinaire mais pas celle attendue. Cette fois, il est question du plaisir qu’on prend à cuisiner pour celui/celle qu’on aime. Ça parle aussi des modes sur les réseaux sociaux comme celle de montrer un frigo super bien organisé, le tout avec un regard critique et décalé. C’est nouveau.

Toujours aussi surprenant, ce mélange de thriller et de cuisine, sur fond de critiques de la société japonaise est toujours aussi efficace et prenant, porté par des personnages décalés et un duo détective-criminelle à distance qui fascine. C’est un peu répétitif mais ça me régale toujours, surtout avec une mise en scène aussi grinçante et tendue que ce que nous offre Akiko Higashimura.

Tome 4

J’adore Akiko Higashimura, ses histoires, ses ambiances, ses dessins arty, son ton grinçant, mais je ne peux m’empêcher de ressentir un coup de mou quand même dans ce tome qui se répète avec les précédents sans rien apporter de neuf et avec des personnages bien plus fades.

Alors que le schéma des précédents volumes était sensiblement le même, j’avais accroché aux histoires de vengeances mises en scène et aux méfaits accomplis par cette empoisonneuse deluxe que notre Gourmet détective recherche sans parvenir à l’attraper. Il n’y avait pas de raison qu’il n’en soit pas de même ici et pourtant ce ne fut pas le cas.

L’ambiance me plaît toujours autant, j’aime ce côté bien film, vieux polar classe. Je suis fascinée par Mary Magdalene et ses méfaits. J’ai beaucoup aimé le chapitre d’ouverture en ce sens où à l’ancienne, elle se joue d’un mari frivole qui ne s’assume pas. Ça faisait très hitchcockien, très zweigien aussi, et cela avait une classe folle. J’ai aussi aimé retrouvé son humour grinçant qui tourne en ridicule bien des situations ou personnages qui se voulaient classes. Je partage aussi toujours son appétence pour la nourriture et les petits plats qu’elle fait mitonner à ses personnages m’ont à nouveau donné l’eau à la bouche malgré parfois leur dangerosité. Je ne regarderai plus la salade niçoise de la même façon.

Cependant quel tome fade par rapport aux précédents ! L’histoire du début n’a pas de réelle conséquence et n’est qu’une parenthèse qu’on oubliera vite. L’affaire qui lui fait suite met en scène une jeune idol indie harcelée par un fan et qui cherche à s’en protéger. Je ne lui ai trouvé aucun intérêt car c’est un thème mainte fois écrit et bien mieux écrit qu’ici où c’est totalement plat, malgré les efforts de l’autrice pour la relier à notre détective et son amie cuisinière, puis à notre fameuse tueuse. Non, j’ai cherché mais je n’ai pas trouvé l’étincelle grinçante et dérangeante des autres.

Heureusement du coup que le tome se termine par un petit tour sortant du chapeau et remettant en scène, sur la même scène, Mary Magdalène et tous ceux qu’elle a aidé précédemment, pour un nouveau plan machiavélique et so classe, so arty, impliquant notre Détective qui ne se doute de rien. Je le répète mais c’est tellement hitchcokien jusque dans la mise en scène sur le toit en mode voyeur. J’adore ! Et la référence biblique est là une fois de plus. Bien joué 😉

Dans ce tome Gourmet Detective est une lecture où j’ai plus pris plaisir à voire Akiko Higashimura faire du Akiko Higashimura que réellement à suivre les intrigues que j’ai trouvées un peu plates et un peu vaines. J’attendais plus, j’attendais autre chose que cet adultère (un thème qui semble préoccuper l’autrice) et cette idol en danger (vu et revu). Heureusement le final vient nous réveiller et apporter la dose de tension et crainte qu’on était en droit d’attendre et c’est le principal dans ce polar arty tellement plein de références occidentales chics et classes.

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9 commentaires sur “Gourmet Détective d’Akiko Higashimura

  1. Merci beaucoup pour la mention !

    Je ne suis pas aussi emballé que toi, ayant trouvé ce premier tome correct mais pas spécialement enthousiasmant. Mais la figure féminine du mal m’a vraiment beaucoup plu et l’ouverture finale du récit me donne envie de continuer, en espérant que ça décolle vraiment ensuite pour moi.

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    1. Je suis faible quand je suis devant une autrice que j’adore. Je crois que tu connais ça avec un certain Mashima, si je ne me trompe ^^
      Mais clairement, il y a un petit côté addictif, plaisir coupable, face à ce personnage qui rappelle certains bons polars. C’est du divertissement pur jus !

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      1. Oh ne crois pas ça ! Dis toi que ça fait un an et demie que j’essaie de lire Rave de Mashima, et je trouve ça d’une nullité, mein Gott ! J’essaie vraiment de me motiver pour aller au bout, mais c’est au-dessus de mes forces… J’ai lu plus de 20 tomes sur les 35, je trouve ça nul mais nul ! Et moche ! Mais moche !

        Donc tu vois, faut pas croire, je fais preuve d’un peu de recul quand même XD

        (oui, ceci est un cri du cœur tant ma déception est phénoménale)

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  2. Ce manga me tente, étant fan de l’autrice c’est tout naturellement que je me tourne vers cette nouveauté, mais je reste hésitant car effectivement même si le manga semble bon, L’Apprenti Otaku m’a un peu refroidit, j’attends donc la sortie du tome 2 pour avoir de nouveaux avis, mais je me ferais malgré tout mon avis à ce moment-là en m’achetant les tomes 1&2 à la suite, en numérique je pense pour payer moins cher à moins de les trouver à la bibliothèque.

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    1. Si tu aimes l’autrice (ce qui n’est pas le cas le L’Apprenti de mémoire 😉), tu connais son style, tu peux donc lui faire confiance, mais je comprends ton envie de confirmer avec le tome 2 ^^

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