Livres - Romance

Nos âmes tourmentées de Morgane Moncomble

Titre : Nos âmes tourmentées

Auteur : Morgane Moncomble

Éditeur : Hugo Poche

Année de parution : 2020

Nombre de pages  : 533

Histoire : Lorsqu’Azalea revient à Charleston, sa ville natale, ce n’est pas de gaîté de coeur. Elle a préféré partir quelques années auparavant pour échapper à des souvenirs pénibles et pour mettre le plus de distance possible entre elle et ceux qui lui ont fait du mal. Sa mère, avec qui elle n’avait plus aucun lien, vient de mourir lui laissant sa maison et une succession à régler. Là voilà de nouveau dans la maison familiale, pour un temps qu’elle espère le plus bref possible.
Jusqu’à ce qu’elle fasse la connaissance d’Eden, son nouveau voisin. Il est charmant, amusant, différent des hommes qu’elle a rencontrés jusqu’alors. Il lui donne envie de changer, de bousculer le fragile équilibre qu’elle avait trouvé loin d’ici. Peut-être même de céder à son attirance. De vivre heureuse à nouveau tout simplement. Mais cela impliquerait de rester à Charleston. Est-elle capable de faire table rase du passé, d’oublier tout ce qui s’est passé ici ? Eden a ses propres fêlures mais il est prêt à l’aider.
Azalea a un long chemin à parcourir mais il pourrait la conduire vers l’amour et le bonheur.

Mon avis :

Chaque roman de Morgane Moncomble que je lis est différent et pourtant dans chaque, je découvre de petits bijoux. C’est une autrice qui me touche avec de belles histoires et des personnages marquants. Mais là où j’avais pu noter des défauts dans son écriture auparavant, tout m’a plu dans Nos âmes tourmentées alors que l’histoire me faisait terriblement peur.

Histoire profondément féministe, chaque chapitre débute pour un extrait du podcast que l’héroïne tient « Dear Patriarchy » et cela donne le ton. Nous sommes ici avec un récit émouvant et un récit coup de poing qui va mettre à mal cette société patriarcale dans laquelle on vit. Mais l’autrice ne le fait pas en y allant bille en tête, elle le fait avec conviction et cela se sent car malgré la noirceur des drames vécus, le titre est lumineux et positif, proposant autant de solution et voies de sortie que de critique. Une excellente approche !

Le féminisme, c’est accepter toutes les femmes telles qu’elles sont, couleur, genre, forme, orientation sexuelle et handicap confondus.

Dans ce but, l’autrice utilise l’histoire d’Azalée, une jeune femme qui revient dans sa ville natale après la mort de sa mère. Or, elle avait quitté ou plutôt fuit celle-ci pour fuir ce qu‘elle y avait vécu de tragique : un viol qu’elle n’avait pas pu dénoncer et une attitude destructrice qui l’avait conduite à se perdre dans les bras de nombreux garçons, lui valant la réputation de « Putain de la ville« … Elle revient sans trop savoir ce qu’elle va faire mais de fil en aiguille, en retrouvant certains de ses anciens meilleurs amis, en faisant la connaissance de son voisin terriblement pénible mais sexy, et en retrouvant une certaine sécurité affective, elle va pouvoir se mettre à imaginer combattre les démons de son passé, mais cela n’aura rien de facile.

J‘ai adoré la justesse du ton de ce roman. Ce fut déchirant de découvrir Azalée, la belle personne passionnée et chaleureuse qu’elle est, et la personne détruite que son viol et ses drames ont fait d’elle. J’ai beaucoup aimé le récit de son parcours sous la plume de Morgane, qui n’en fait jamais trop et sait se montrer très subtile. Elle nous décrit avec force et justesse le trauma de ce qu’elle a vécu, sa lutte au quotidien, ses moments de dépression et rechute, la difficulté de vivre avec le poids de ce secret, mais également ses combats de femme pour qu’on arrête de culpabiliser celles-ci aussi bien en tant que victimes ou que femmes libérées à l’aise avec leur corps et leur sexualité. Ses podcasts en disent long sur elle et l’autrice y glisse plein de messages positifs pour ses lectrices afin qu’elles apprennent elles aussi à s’aimer et se respecter.

Arrêtez de vous tenir responsable de ce que quelqu’un d’autre vous a fait. Arrêtez de vous tenir responsable de ce que quelqu’un d’autre vous a dit. Arrêtez de vous tenir responsable lorsque quelqu’un d’autre vous fait du mal. Ce n’est pas votre faute.

Mais je n’aurais pas autant aimé le parcours d’Azalée sans sa rencontre avec Eden, son beau voisin tatoué très irritant avec qui elle débute d’emblée une relation électrique tant il se met en tête de percer sa carapace de sarcasme et mauvaise humeur, lui qui a aussi vécu pas mal de choses, venant de l’aide à l’enfance et ayant été père très tôt. Mais il a su se reprendre, s’en sortir et surmonter ses traumas, du moins en être conscience et a travaillé notamment sur cette colère qui parfois le ronge. Il va donc former un roc pour elle. Cet homme d’abord très taquin va prendre le temps de l’apprivoiser, de la laisser l’approcher. Il ne va jamais s’imposer, il saura l’attendre et prendre son temps. Il sera aussi là pour l’accompagner et la défendre mais jamais à la manière d’un homme qui cherche ainsi à asseoir son autorité de mâle. Non, il se place à ses côtés, au même niveau qu’elle et a un grand respect des femmes, ce que j’ai trouvé superbement écrit. Ayant une fille qu’il chérit plus que tout, il ne veut pas qu’elle aussi subisse les ravages de ce que notre société patriarcale a fait depuis des lustres et il projette aussi ce sentiment sur Azalée.

J‘ai donc adoré suivre leur histoire qui m’a déchiré le coeur à bien des reprises avec de le reprise en mode chamallow. Ce fut d’abord drôle et tendre de les voir se tourner autour en se montrant les dents, se lançant des piques, se cherchant l’un l’autre. Ce fut ensuite émouvant de les voir peu à peu baisser leurs barrières, Eden le premier, puis plus douloureusement et péniblement Azalée. Mais à partir du moment où ils ont formé un tout ce fut évident que c’était pour toujours, tellement il y avait une évidence à les voir ensemble. Pas besoin d’une tension érotique de fou pour cela, mais plutôt l’émotion de voir un couple équilibré où chacun pouvait compter sur l’autre dans les moments difficiles mais aussi pour apporter de la joie à l’autre. Azalée a su soutenir Eden avec sa fille et a su trouver sa place à leur côté à l’aide de sa musique et ses pâtisseries. Eden a su lui donner assez confiance pour qu’elle ose se confier et avouer ce qui lui était arrivée pour ensuite débuter sa lutte. C’était magnifique.

S’il vous plaît, souvenez-vous que les gens combattent des démons intérieurs que vous ne pouvez voir, vivent des choses que vous ne pouvez savoir. Soyez gentils.

Cette lutte contre un prédateur pédophile mais aussi contre une société qui dénigre bien trop facilement les femmes fut le point d’orgue de l’histoire. Ce fut dur, quoique l’autrice n’en a jamais fait trop et est restée sobre et juste, mais ce fut libérateur de suivre Azalée dans sa démarche. J’ai aimé que l’autrice dénonce les violences intrafamiliales. Les statistiques montrent que la plupart des victimes le sont au sein de leur foyer. J’ai aimé qu’elle dénonce aussi les violences morales subies par les calomnies de la société, certaines personnes hommes ou femmes, jugeant les femmes libres en les traitant de putes, mais se comportant eux-mêmes de manière bien plus terrible, ou encore jugeant les victimes comme des menteuses ou des femmes l’ayant « mérité », ce qui est horrible. L’autrice a su démonter cela avec une force implacable et une belle justesse, car rien ne fut facile, il y a eu beaucoup de nuances dans ses propos avec des personnages parfois commettant des erreurs d’appréciation et s’en excusant ensuite (je pense à Josh). J’ai donc été bien malmenée.

Mais la lumière est toujours là au bout du tunnel. L’histoire a beau être sombre et nous plonger dans des recoins de l’âme de l’héroïne assez terribles, il y a toujours de l’espoir. L’espoir d’aider une autre victime. L’espoir de s’aider soi-même. Et les deux furent magiques ! L’histoire est également remplie de petites touches lumineuses comme la passion d’Azalée pour la musique qu’elle écrit et compose, son amour pour la pâtisserie, la jolie famille à trois qu’ils font former avec Eden et Faith et les moments de vie que cela va donner. Je salue aussi, la figure du policier qui aidera Azalée et qui saura lui dire ce qu’elle avait besoin d’entendre, tout comme Eden. Ce furent pour moi les deux plus belles figures de l’histoire.

J’ai toujours peur avec ce genre d’histoire que les auteurs aillent trop loin et qu’on perde en justesse. Morgane Moncomble a su trouver le parfait équilibre ici pour un récit entre ombre et lumière particulièrement puissant et marquant. Le parcours d’Azalée est une bombe d’émotion et toutes les petites graines féministes qu’elle sème sont autant d’espoirs pour le futur. Ainsi si vous devez lire une romance sur une victime de viol et sa reconstruction, lisez celui-ci, il est le plus juste, le plus fort et le plus positif aussi que j’ai pu lire jusqu’à présent !

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Saiwhisper, Millina, Des mots aux livres, Plume volage, Phénix littéraire, Alexiane, Petite étagère, Vous ?

8 commentaires sur “Nos âmes tourmentées de Morgane Moncomble

  1. La justesse que tu décris me rappelle celle que je ressens avec les œuvres de Colleen Hoover et il est vrai qu’elle n’est pas donnée à tout le monde.
    Il serait peut-être temps que je me retourne vers ce genre malgré une frénésie de fantasy de mon côté.

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