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What did you eat yesterday ? de Fumi Yoshinaga

Titre : What did you eat yesterday ?

Auteur : Fumi Yoshinaga

Traduction : Guillaume Mistrot

Éditeur vf : Soleil (Gourmet)

Année de parution vf : Depuis 2024

Nombre de tomes vf : 2 (en cours)  – tomes doubles

Histoire : Shirô Kakei est avocat et pressé de rentrer chaque soir pour préparer de savoureux petits plats à son compagnon de longue date, Kenji Yabuki, coiffeur. Venez découvrir la délicatesse de la cuisine japonaise de tous les jours à travers de nombreuses recettes détaillées et partagez les espoirs et les tracas d’un couple gay dans le Japon d’aujourd’hui !

Mon avis :

 Tome 1

Découverte il y a bien longtemps sur le superbe oneshot familial : All My Darling Daughters (qu’il serait bien de rééditer au passage ;)), Fumi Yoshinaga est une écrivaine de l’intime que j’affectionne tout particulièrement. Elle a frappé un grand coup ces dernières années avec la passionnante uchronie Le Pavillon des hommesqui fut un coup de coeur pour moi, et revient le plus simple mais tout aussi délicat What did you eat yesterday ?

Succès au Japon, cette série mettant en scène le quotidien d’un couple de quadra gay, qui compte à ce jour plus de 22 tomes au Japon – pas de panique Soleil nous en propose une édition avec des tomes doubles 😉 – , a même eu droit à sa version en drama, c’est dire ! Avec une recette simple mais efficace : de bons petits plats et le récit de leur journée au boulot ou avec leur famille et amis, l’autrice frappe fort et on savoure.

What did you eat yesterday ? est vraiment l’archétype de la série tranche de vie. Chaque chapitre est quasi indépendant du précédent et pourrait voir la série se conclure. Avec un schéma assez semblable, on y retrouve nos deux héros : un couple gay qui a la quarantaine, qui s’installe autour d’une table et déguste les bons petits plats concoctés par l’un d’eux : Shiro, le cuisinier et avocat des deux. A tour de rôle, ils évoquent leur journée au boulot, son partenaire Kenji étant coiffeur, mais aussi leur famille ou leurs amis. C’est simple, c’est tendre, c’est reposant.

Il ne faut cependant pas chercher la moindre tension dramatique ou romantique. Aucune scène de romance en vue, juste le plaisir de partager un quotidien et une vie à deux. Des petits soucis du quotidien sur l’importance de communiquer, des petites jalousies et c’est tout. C’est extrêmement simple et on pourrait croire pauvre, mais c’est justement tout ce qui en fait la saveur. On se repose à découvrir et suivre nos deux héros. On rit du caractère en apparence froid et posé de Shiro, qui se révèle un avocat très à l’écoute qui ne peut s’empêcher d’aider son prochain. On s’amuse aussi de la jalousie de Kenji envers ses clients alors qu’il n’y a aucune raison. Chacun a un passé et ils l’évoquent facilement mais ils se sont bien trouvés et ont su composer un couple équilibré, qui s’épaule et partage les tâches du quotidien, ce qui n’a pas toujours été le cas dans leurs précédentes relations.

Ainsi, on se retrouve avec une série qui parle énormément vie de tous les jours. Sont mis sur le tapis, toujours avec un humour débonnaire et un peu grinçant, leur coming-out auprès de leur famille ou leurs collègues, le soin à prendre de leur santé et leur physique à leur âge, la calvitie, leur relation à leur famille dont ils doivent prendre soin mais aussi leurs amitiés, etc. Au centre des chapitres, cependant, c’est la cuisine qu’on retrouve et on ne peut que se délecter devant les plats que mitonne quotidiennement avec amour et frugalité (pour ne pas dire avarice parfois xD), le sérieux Shiro. Cela donne énormément d’idées de recettes et en plus l’autrice en détaille bien la préparation, ce qui nous donne une sorte de tuto de cuisine en manga. J’en raffole et pour moi, pour qui la cuisine est une plaie, ça me donne envie de tester ! (le plus dur étant de trouver les ingrédients chez nous bien sûr ><)

Amoureux de tranche de vie, de cuisine, de quotidien, de couple gay et de simplicité, venez découvrir What did you eat yesterday, la version salary man soignée de La cantine de minuit avec un beau dessin très fin, un humour grinçant et des recettes du quotidien simples mais savoureuses, autour d’une table chaleureuse comme si vous y étiez. Moi, je signe et resigne !

Tome 2

Les tranches de vie et moi on s’entend plutôt bien. J’éprouve un grand plaisir à me détendre en les lisant. Et si je ne pourrais pas les lire de la même façon qu’une aventure ou une romance, c’est avec bonheur que j’ai retrouvé 4 mois plus tard le couple de What did you eat yesterday.

Le format est pourtant fort simple, limite répétitif et accentué dans le choix de cette édition en double volume, mais ça fonctionne très bien avec moi. Fumi Yoshinaga nous concocte à chaque chapitre de bons petits plats pour évoquer une question du quotidien de nos deux héros gays vivant ensemble, la cuisine devenant le vecteur et le moyen d’évacuer les petits tracas de la vie de tous les jours.

Pour l’autrice, c’est un biais des plus savoureux pour questionner la société dans laquelle vivent Shiro et Kenji. Il est ainsi question de leur travail respectif : des affaires de Shiro et des client(e)s de Kenji. On parle aussi de leur famille, enfin surtout celle de Shiro, avec ses parents qui vieillissent et ont des soucis de santé ou d’argent. L’occasion pour aborder les changements de l’économie japonaise dans les années où ont été écrits ces histoires (2009-2010) où déjà les prix grimpaient. La confection de bons petits plats au quotidien est donc parfait pour aborder une question qui nous préoccupe nous beaucoup en ce moment : les prix dans les supermarchés et comment faire des économies. C’est vraiment une bible ici pour qui cherche des recettes simples et pas chères ^^

J’aime donc énormément ce mélange de questions personnelles, de couples, de famille mais aussi de société. C’est un vrai melting-pot qui se fait très naturellement. Se côtoient ainsi des lignes engagées sur le harcèlement sexuel au travail, sur le sur-judiciarisation de certaines affaires, aussi bien que des questions sur le désir d’enfants dans les couples gays et le désirs de petits-enfants chez leurs parents, ou encore sur l’héritage entre membres de couple du même sexe, le tout entre deux recettes de riz et poulet accommodés à la japonaise.

Je ne suis pas une grande cuisinière mais j’avoue que chaque histoire a su me donner faim et me toucher, et pas que le ventre ! Je trouve chez l’autrice un réel talent pour décrire et mettre en scène chaque recette, variant sans cesse les plaisirs avec pourtant des ingrédients assez communs et récurrents. Elle démontre la variété simple et sobre de la cuisine japonaise, son plaisir dans les petites choses du quotidien, le culte presque rendu à certains aliments qu’on révère, ce qui est accentué ici par les désirs économes de Shiro. C’est beau et bon, et ça donne presque envie de se mettre aux fourneaux pour l’imiter et découvrir nous aussi ce pouvoir thérapeutique de la cuisine.

A raison d’une rencontre chaque trimestre, nous devrions avoir un jolie catalogue de recettes de cuisine à la fin de l’année grâce aux garçons de ce tranche de vie gay tellement appétissant. Fumi Yoshinaga sait combler aussi bien nos ventres que nos coeurs avec ses histoires d’un quotidien terriblement actuel dans ses préoccupations et toujours juste dans sa mise en scène et ses propos. Qui d’autre parlerait ainsi aussi bien de crise économique, d’enfants, de parents âgés, de sur-judiciarisation ou de harcèlement sexuel dans les entreprises, autour d’un bon petit mijoté ? Je vous le demande 😉

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6 commentaires sur “What did you eat yesterday ? de Fumi Yoshinaga

    1. Après ce sont des tomes doubles mais le petit format n’aide pas à accepter le prix. En grand, je pense qu’on aurait été moins réfractaires mais ça aurait coûté plus cher à l’éditeur qui doit vouloir amortir.
      J’ai été très surprise de le voir chez eux d’ailleurs. Je ne pensais pas qu’ils prendraient ce risque.

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      1. Apparemment un grand format augmente les coûts de l’éditeur mais pas tant que ça par rapport à un petit format et ce qui me dérange c’est le prix pour la pagination qui est peu élevée (300 pages), on est loin de la justification d’un tome double qui en ferait 400.
        Après je te rejoins je suis déjà très surpris et heureux de pouvoir lire ce manga!

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      2. Dans ce cas-là c’est dommage de ne pas avoir eu un format plus grand.
        Par contre, il me semble qu’on est bien sur du tome double ici. Sûrement que les simples doivent avoir la pagination du Chat qui rendait l’homme heureux ou de Ice Guy 😉

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