Livres - Science-Fiction

Xenogenesis d’Octavia E. Butler

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Titre : Xenogenesis d’Octavia E. Butler

Auteur : Xenogenesis d’Octavia E. Butler

Traduction : Jessica Shapiro

Éditeur vf : Au Diable Vauvert

Années de parution vf : 2022-2024

Nombre de tomes vf  : 3 (série terminée)

Histoire : La Terre a été dévastée par une guerre nucléaire. Les humains ont été sauvés par un peuple extraterrestre, les Oankali, qui les ont emmenés dans leur vaisseau spatial. Parmi les survivants se trouve Lilith Lyapo, endormie depuis plusieurs siècles et qui se réveille à peine.
Les Oankali acceptent de faire revenir les humains sur Terre à condition qu’ils conçoivent un enfant hybride.

Mon avis :  

Tome 1 : L’Aube

Plusieurs fois vu citée sur vos blogs, il m’a fallu une émission éclairante et passionnante sur Octavia E. Butler sur France Culture pour enfin me décider à découvrir cette autrice emblématique de la SF afro-américaine que j’avais totalement ignorée jusque là. Excellente idée que j’ai car elle m’a retourné la tête !

Octavia E. Butler est une autrice afro-américaine décédée en 2006 à même pas 60 ans qui avait cependant eu le temps auparavant de publier 12 romans et 2 recueils de nouvelles tous très intenses que le Diable Vauvert a entrepris de traduire depuis quelques années. Nous avons ainsi la chance, ici, d’avoir sa dernière trilogie : Xenogenesis, qui semble reprendre énormément de ses obsessions dans une plume assurée de femme au fait de son art.

Ce premier tome, L’Aube, reprend plusieurs tropes de la SF dont je suis particulièrement friande : la rencontre avec une population extraterrestre, des questionnements sur l’eugénisme et le transhumaniste et un huis clos spatial dans un vaisseau « vivant ». A partir de là, il m’était impossible de ne pas adorer ma lecture, surtout quand est venu s’ajouter la patte de l’autrice avec ses questions insidieuses que sont l’esclavagisme et le rapport maître/esclave qu’elle traite avec beaucoup de finesse et d’âpreté ouvrant la porte à beaucoup de questionnement intérieur pour le lecteur.

L’Aube se veut ainsi un récit étrange, presque étouffant et malaisant, où nous sommes sans cesse sur une corde raide aux côtés d’une héroïne qui, elle-même, ne sait pas trop qui elle est, ce qu’elle ressent, ce qui vient d’elle. Lilith se réveille à bord d’un monde étrange où des créatures vont littéralement la transformer pour la mouler à leurs désirs tout en lui faisant miroiter l’espoir de retourner un jour sur la Terre qu’ils ont conquise et qui a bien changé depuis que l’humanité n’y est plus. Nous allons vivre à ses côtés une quête étrange, entêtante, lente et insidieuse où ses nombreux questionnements vont également nous pénétrer et nous fasciner autant que nous mettre mal à l’aise.

Malgré une gestion du tempo parfois un peu trop lente et molle pour moi, Octavia E. Butler imagine ici un récit fascinant et envoûtant où elle donne littéralement corps à une autre civilisation qui entre en contact avec la nôtre par le biais d’une unique représente. C’est étrange, fascinant et incroyable comme l’autrice petit à petit fait vivre cet échange. J’ai beaucoup aimé sa conceptualisation de cette civilisation extraterrestre qui redéfinit les concepts de mâle et femelle mais aussi de couple et de parents. J’ai été glacée et fascinée par leur apparence telle qu’elle la décrit, qui représente à peu près tout ce qui me dégoûte et me met mal à l’aise. Pourtant, en les faisant parler par la voix de Nikanj, « le gardien » de Lilith, elle leur donne corps et vie et les rend presque proche de nous. Une singulière dynamique naît sur laquelle on a envie de calquer notre vision de la relation maître/esclave que la colonisation nous a inculquée mais qui est bien plus fine ici, revisitée et différente du fait de l’étrangeté de cette civilisation, ce fut ainsi fascinant.

L’autrice nous invite alors à vivre cette rencontre, ce lent rapprochement et cette métamorphose forcée de Lilith par son geôlier qui tente de lui faire croire qu’elle le veut. Le récit est lent, insidieux, mais l’autrice parvient à le raviver à plusieurs reprises en l’enrichissant d’autres personnalités, qui vont venir complexifier les questionnement sur ce que l’humanité est prête à accepter pour survivre, ou sur son attachement à sa Terre première. Elle va aussi élargir notre horizon, passant d’une cellule à un vaisseau vivant fascinant dans sa relation et façon de fonctionner par le touché uniquement de certains individus modifiés et accordés. Elle va même recréer un monde primitif dans lequel les tensions vont renaître et faire exploser cette petite bulle de tension qui planait au-dessus du groupe, ce qui fait que jamais on ne s’ennuie, toujours on se questionne, et rien n’est acquis.

Octavia E. Butler a su ainsi me fasciner aussi bien par sa SF aux concepts vertigineux que la dimension psychologique, philosophique et historique qu’elle y a introduit insidieusement et qui me pousse à me questionner sur tout ce que je viens de lire. Mon coeur a été touchée par la singulière relation Lilith-Nikanj. Mon âme a frissonné devant les horreurs qu’il m’a semblé décoder derrière. Mon cerveau lui a été fasciné par ce vaisseau-univers mis en scène ici et les descriptions de cette nouvelle race et ses mécanismes de survie. Le tout donne un récit positivement fascinant où il me tarde de replonger dans les prochains tomes : L’Initiation qui se passe quelques décennies plus tard et Imago qui semble nous conduire encore plus loin dans les relations entre ces deux espèces en sursit.

Découverte 100% validée d’une autrice engagée qui sait mettre au service de ses obsessions des tropes fascinants de la SF. Huis clos spatial et rencontre du troisième type en mode Roland Barthes dans L’Empire des signes qui tente de comprendre maladroitement une culture, ici, une civilisation qui lui échappe. C’est étrange, fascinant, malaisant et surtout très cru. Une réflexion tourneboulante sur notre rapport à notre humanité, à l’autre, à notre liberté.

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Le Nocher des livres, Le Chroniqueur, L’Epaule d’Orion, Geekosophe, La dent dure, Outrelivres, Quoi de neuf dans ma pile, Lutin Rêveur, Vous ?

12 commentaires sur “Xenogenesis d’Octavia E. Butler

    1. Merci, tu me fais très plaisir.
      J’ai vraiment hâte de poursuivre ma découverte et d’aller acheter la suite !
      Il faudra aussi que je regarde par quoi continuer après cette saga, car elle semble avoir plein de textes intéressants, mais il faut que je trouve un fil rouge.

      Aimé par 1 personne

  1. J’entends beaucoup parler de cette autrice et je suis vraiment curieuse de la découvrir, mais j’avoue que j’ai une certaine appréhension à le faire, parce que si je fais abstraction de l’autrice, je n’ai pas encore trouvé un pitch qui me donne réellement envie…

    Aimé par 1 personne

  2. Je pense découvrir l’autrice à travers un autre livre mais si j’accroche à son style, je tenterai ce roman dont tu parles très bien. Je suis très curieuse de découvrir cette civilisation et les questions soulevées par l’intrigue qui me fera clairement sortir de ma zone de confort…

    Aimé par 1 personne

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