Livres - Romance

Les caprices de miss Mary de Colleen McCullough

Titre : Les caprices de miss Mary

Auteur : Colleen McCullough

Traduction : Céline Véron Voetelink

Éditeur vf : Archipoche

Date de parution vf : 2011

Nombre de pages vf  : 472

Histoire : Au décès de sa mère, Mary, la troisième des cinq soeurs Bennet, découvre la liberté. A trente-sept ans, elle qui n’a vécu que pour les autres est bien décidée à ne plus accepter d’entrave à la réalisation de ses rêves. Et surtout pas le triste chaperon que ses beaux-frères souhaitent lui imposer. Sa décision est prise : comme le journaliste dont elle dévore les articles incendiaires, elle enquêtera sur les conditions de vie misérables des ouvriers du Nord. Alors que sa famille craint qu’elle y perde sa réputation, Mary se lance avec fougue dans l’aventure. Mais son enthousiasme se heurte à la réalité de l’Angleterre en ce début de XIXe siècle. Vingt ans après la fin d’Orgueil et Préjugés, ce roman – une suite du chef-d’oeuvre de Jane Austen – brosse le portrait d’une femme à l’esprit libre, féministe avant l’heure, qui n’hésite pas à braver les interdits pour faire triompher ses convictions.

Mon avis :  

Encore une roman à dominante historique qui traînait dans ma PAL depuis plus de 10 ans, soit à peu près depuis sa sortie, alors qu’avec pour sujet une suite fictive d’Orgueil et préjugés, j’aurais dû l’en sortir depuis longtemps. Il a malheureusement, je pense, un peu souffert de ce délai.

J’ai découvert par le plus grand des hasards en débutant ma lecture, que l’autrice était en fait celle des Oiseaux se cachent pour mourir, ce roman adapté en téléfilm, avec succès, quand j’étais enfant et qui symbolisait un peu le romanesque romantique à l’époque. Malheureusement, c’était autrefois et ça a pas mal vieilli, c’est aussi le cas des Caprices de Miss Mary, titre français que je déteste tant il est misogyne alors que le titre vo était The Independance of Miss Mary, tellement plus représentatif.

Ce long roman plante le décor 20 ans après la fin d’Orgueil et Préjugés, alors que la mère des filles Bennett meure et que Mary, la dernière de ses filles à s’occuper d’elle, voit enfin la lumière au bout du tunnel et espère un peu de liberté. Mais l’autrice ne l’entend pas de cette oreille et va mettre bien des obstacles sur sa route, notamment sa propre famille.

Javoue que je trouve le résumé de l’éditeur un peu trompeur, car, je pensais vraiment tomber sur un roman d’émancipation avec une héroïne dont j’allais suivre la quête d’indépendance et notamment l’enquête que j’imaginais des conditions de vie des ouvriers du Nord. Or, le roman se focalise surtout sur les relations qui ont évolué et se sont distendues entre les membres de la famille Bennett élargie et il est fort peu question de cette dimension sociale que j’attendais. L’émancipation de Mary est fort succinte dans l’oeuvre et j’ai plutôt eu l’impression de suivre une thérapie conjugale de Darcy et Elizabeth…

De plus, la plume de Colleen McCullough est fort datée, non pas dans sa narration, fort fluide et parfaitement rythmée, se laissant très facilement lire, mais plutôt dans les thèmes abordés et la façon dont ils sont traités. Tout d’abord, et je sais que ça tient de moi, mais nous n’avons pas du tout la même vision du futur de la famille Darcy et j’ai détesté ce qu’elle a fait de ce couple, effaçant tous les progrès qu’il y avait eu au fil du roman de Jane Austen pour retrouver une Elizabeth mesquine et jugeante, et un Darcy hautain, froid et pédant. Ensuite, elle propose une vision de leur couple très sombre, avec un éloignement important, des ambitions dévorantes, un mauvais regard porté sur leur aîné, etc. C’était très triste. J’ai eu l’impression que l’autrice forçait le trait et enlevait toute la modernité de Jane Austen pour apposer dessus la chape caricaturale de sa propre vision dramatique du romanesque, très peu pour moi.

Même souci du côté des aventures, nous suivons une suite de rebondissements rocambolesques qui n’ont presque ni queue ni tête, et qui viennent régulièrement tuer la moindre petite logique installée. Quand on voit le sale caractère de Darcy, les horribles mots qu’il prononce, ce qu’il pousse tout le monde à faire, on ne le reconnaît pas. Quand on voit la bêtise de certains choix de Mary, alors qu’au contraire c’est quelqu’un d’intelligent et censé, c’est à n’y plus rien comprendre. Quand on suit, Ned, l’homme de main de Darcy, il commet des actes impardonnables qui sortent de nulle part et tordent le récit au point de le rendre ridicule. Même la dimension qui se veut « sociale » est ratée tant elle est caricaturale et bancale, reposant juste sur un besoin de faire du rocambolesque parce que c’est ce qu’on attend de l’autrice. Je n’aime pas cette façon d’écrire des romans historiques, en tout cas, plus à l’heure actuelle.

Je reconnais cependant que ça se lit bien, qu’on se plaît à détester les personnages et à espérer qu’ils vont tous crever l’abcès et changer, ce qui arrive. Le final offre un dénouement des plus agréables où on a enfin les discussions qu’on attendait sur la vie de couple des hommes et femmes du XIXe qui souhaitent un peu d’égalité, de compréhension et d’entente mutuelle. Ça parle aussi assez justement de prostitution, de travail des enfants ou encore de désir et « devoir » conjugal, mais aussi de relation parents-enfants. Tout n’est donc pas à jeter loin de là. Mary est un personnage plaisant à suivre, fonceur, frondeur, qui ose s’affirmer et qui trouve fort joliment chaussure à son pied sans le chercher, en démarrant par une belle histoire d’amitié d’égal à égal. Darcy connaît une belle remise en question. Son fils Charlie est touchant dans sa manière de se construire malgré les reproches injustifiés de son père. Il faut juste passer sur un sacré nombre de pages et d’aventures plus que moyens pour en arriver là et c’est dommage.

Déception dans un premier temps que cette lecture qui ne partage pas du tout ma vision de ce que devrait être une suite d’Orgueil et Préjugés tant l’autrice nie tant le travail que Jane Austen a pu faire pour faire grandir ses personnages. Colleen McCullough s’enferme trop dans la façon d’alors d’écrire les romances historiques à succès et propose du rocambolesque sans fondement qui gâche un peu la matière première du récit. Heureusement, elle se reprend dans le dernier quart de son histoire et propose enfin le récit critique souhaité sur la société du XIXe mais plutôt côté couple que familles ouvrières comme je m’y attendais. Ce n’était peut-être pas une lecture pour moi ou alors le texte a sacrément mal vieilli ^^!

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Lady That, Liseuse hyperfertile, Lucy, Mel, Vous ?

11 commentaires sur “Les caprices de miss Mary de Colleen McCullough

  1. J’ai eu peur, je m’attendais à faire face à une forte tentation en ouvrant cet article qui s’avère bien plus modéré et modéré. De quoi me laisser penser qu’il y a mieux comme austeneries même si, à l’époque, je ne suis pas certain que l’auteure connaissait ce genre littéraire 😉

    Merci pour ton retour !

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  2. Je ne savais pas du tout que Colleen McCullough avait écrit une suite à Orgueil et Préjugés 😯 En tout cas, ça ne donne pas très envie de la découvrir, d’autant que je suis partagée vis-à-vis de l’auteur. Si j’adore Les oiseaux se cachent pour mourir, je garde un affreux souvenir des Quatre filles du révérend Latimer.

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  3. L’idée était louable mais le traitement du couple Darcy/Elizabeth me donne des sueurs froides d’avance… Je t’avoue que je préfère rester avec mon image idéalisée de leur « après ». Je te remercie de ton avis qui m’a permis d’éviter une déception tout en étant, comme toujours, assez nuancé pour offrir l’opportunité à d’autres lecteurs de peut-être s’y plonger.

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    1. C’est exactement ce que j’ai ressenti. J’étais dégoûtée qu’on me gâche un couple dont j’avais tellement aimé l’évolution et je ne comprenais pas pourquoi un tel acharnement T.T
      Merci pour le compliment sur mes nuances 🙂

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