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Elin : La charmeuse de Bêtes d’Itoe Takemoto et Nahoko Uehashi

Titre : Elin : La charmeuse de Bêtes

Auteurs : Itoe Takemoto (dessin) et Nahoko Uehashi (histoire)

Éditeur vf : Pika (seinen)

Année de parution vf : 2019-2020

Nombre de tomes : 11 (série terminée)

Histoire : Elin vit dans un village du royaume divin de Ryoza avec sa mère soigneuse de Tôda, des dragons-serpents dressés pour la guerre. Toutes deux sont liées au “peuple de la brume”, craint pour son savoir secret sur les Bêtes Sacrées. Un jour, sa mère, jugée responsable de la mort d’un troupeau de Tôda, est sauvagement exécutée. Elin, dépositaire d’un grand pouvoir, connaît alors un destin tumultueux, qui la conduira au cœur d’un terrible conflit…

Mon avis :

Tome 1

Sur les conseils de mon amie Ly (dont vous pouvez aller lire la chronique), je découvre cette semaine ce nouveau titre fantastique mâtiné de mythes asiatiques desservi par des dessins parfois enchanteurs.

Elin, La charmeuse de bêtes, est l’adaptation en manga (il y aura 11 tomes au total) d’une saga de romans parue il y a quelques années chez feu Milan dont j’avais aperçue la couverture mais point plus. On s’y retrouve plongé dans une histoire qui flirte avec la fantasy orientale où un clan élève des bêtes sacrées mais guerrières, les Tôda, qui ont tout du dragon, le tout dans des paysages entre Japon et Chine moyenâgeux.

Comme dans tout shonen, l’histoire se centre sur un jeune héros, ici une héroïne, ce qui déjà me plaît. Elin est la fille de la femme qui soigne les Tôda les plus précieux de son village. On découvre à travers ses yeux ces magnifiques créatures qui ont été réduites en esclavage, mais également la vie dans son village où sa mère et elle souffrent d’une certaine ostracisation du fait de leurs origines. C’est un décor qui m’a de suite enchantée. J’ai beaucoup aimé cette ambiance d’un autre temps, le fait que ce soit en pleine campagne, autour de créatures fortes et mystérieuses qui pourraient bien faire des dégâts un jour, avec des clans protégeant des secrets. J’ai vraiment eu l’impression de plonger dans un récit ancien autour d’une mythologie que je ne connaissais pas et j’ai aimé le dépaysement.

Il faut dire que les dessins y ont grandement participé. Je m’en doutais déjà en voyant la couverture et notamment la 4e avec son superbe Tôda aquatique. Les passages avec ces derniers tout en tons gris sont superbes. Ils emportent vraiment le lecteur dans un autre monde. Je regrette du coup que le restant des dessins soit plus banal. J’ai du mal avec le côté trop rondouillard des visages que je trouve plus quelconque. Dommage.

Pour en revenir à ce premier tome, c’est une vaste introduction à l’univers. La première partie, les 3/4 du tomes, présente l’univers de la série. La seconde, par contre, est beaucoup plus fade. Elle présente ce que devient Elin après un certain incident et c’est assez banal. Il y a un côté « bons sentiments » qui m’agace parce que je le trouve un peu superficiel. Je ne vois pas pourquoi quelqu’un qui la connait à peine voudrait déjà tout faire pour lui redonner le sourire… J’ai donc largement préféré la première partie, plus sombre, plus mature où l’univers est riche et prometteur avec les Tôda et les différents peuples avec chacun leurs mystères.

Elin est donc une belle surprise. S’il n’y avait pas eu ces derniers chapitres un peu en-dessous, j’aurais sûrement même pu parler de coup de coeur.

Tome 2

Après la lecture de ce deuxième tome, je suis à nouveau un peu mitigée. Il y a vraiment des éléments de la mythologie qui me plaisent énormément et en même temps je m’ennuie un peu avec notre héroïne et la tournure qu’a pris sa vie.

Commençons par le négatif. Quand on suit Elin qui a été recueillie par une espèce d’ours des bois, c’est très monotone. C’est une petite vie tranquille (ou presque) à la campagne et ce n’est pas ce que je recherche dans ce titre. Du coup, ça me laisse sur ma faim. Leur relation est mignonne et se développe bien, mais je souhaite quelque chose de plus. Heureusement, les autrices semblent le remarquer et déjà vers la moitié du tome, elles commencent à réintroduire des éléments en rapport avec sa vie d’avant qui vont pousser l’intrigue plus loin. Ouf.

Maintenant parlons du positif, c’est-à-dire toute la seconde partie de ce tome. On y apprend plein de choses sur la formation des pays entourant notre héroïne, sur leurs dirigeants, les liens avec les Todas et d’autres créatures : les Ôjus. C’est passionnant et j’aime beaucoup l’ambiance mythique que cela confère. On se sent vraiment pris dans une histoire d’un autre temps. Même si très vite, les autrices rattachent tout ça à la politique actuelle pour commencer à nous brosser un tableau assez complexe qui devrait nous tenir en haleine dans les prochains tomes.

J’ai donc encore eu, avec ce tome, la sensation d’être dans l’introduction de l’histoire, ce qui commence à faire un peu long. Certes, on nous donne des pistes pour la suite mais l’histoire à du mal encore à décoller et c’est un vrai regret tant je la sens prometteuse.

Tome 3

Ce tome était pour moi celui de l’heure du choix. Selon la direction prise, j’avais prévu d’abandonner la série, mais les auteurs ont su, non me surprendre, mais me réembarquer dans l’histoire et j’en suis ravie.

Le tome se découpe en deux parties, qui sont celles constituant l’histoire pour le moment : la politique autour de Yojeh et des Ôjû, et la destinée de l’héroïne.

La première partie me passionne depuis le début et cela ne se dément pas ici malgré un rythme assez calme. On sent bien toutes les tensions sous-jacente entre le pouvoir religieux et le pouvoir militaire dans ce pays, avec les créatures au milieu en prime. Les personnages intervenants sont pour le moment un peu dans l’attente. L’autrice leur attribue un rôle et les y conforte, apportant de plus en plus d’éléments définissant leur personnalité mais il faudrait voir à les faire passer à l’action maintenant.

La seconde partie est celle que je craignais le plus, mais elle prend un virage qui me plaît beaucoup. Elin grandit et ne peut plus rester avec Johun. Ils doivent tous deux faire un choix. C’est l’occasion de découvrir le passé de Johun, un passé dur mais touchant comme bien souvent. Ses mots sur le métier d’enseignant m’ont plu mais par certains côtés, mais je ne partage pas toutes ses réflexions, notamment sa culpabilité. Cependant, c’est un homme vraiment intéressant et que j’espère recroiser. Elin, elle, décide enfin de son avenir et c’est un choix logique qui lui correspond bien. C’est surtout l’occasion pour nous de sortir des montagnes et de découvrir un nouveau lieu, de nouveaux personnages, une nouvelle réalité, qui sont à peine esquissés pour l’instant mais qui devraient être développés ensuite. Et pour l’autrice, c’est l’occasion de reparler très joliment de racisme mais aussi d’ouverture d’esprit et de bienveillance pour contrer celui-ci.

Ce troisième tome m’a donc convaincue de poursuivre la série. J’y ai ressenti de l’émotion et surtout de la curiosité pour l’univers, les personnages et les relations qui s’établissent entre eux. J’ai envie de lire la suite !

Tome 4

Voilà le tome que j’attendais ! Il n’y a pas de politique ou si peu et pourtant, j’ai adoré ce tome. Pourquoi ? Parce qu’il se focalise sur Elin et sa passion pour les bêtes, les ôjû en l’occurrence et du coup, on a droit à des moments plein d’émotions.

Elin est désormais élève à l’école de formation des soigneurs d’ôjû. La directrice lui lance un défi en lui demandant son aide pour soigner un bébé ôjû qui va mal et refuse de s’alimenter. Les chapitres qui suivent montrent toute la force et l’ingéniosité d’Elin pour répondre à ce défi, ainsi que son amour pour les animaux. C’est très beau et l’autrice décrypte bien les sentiments qui sont à l’oeuvre ici ainsi que le cheminement d’Elin pour trouver comment aider ce petit ôjû. J’ai aimé le discours sur le parallèle entre les bêtes et les hommes. J’ai aimé la façon dont l’héroïne se gagne la sympathie de tout le monde également, en dépit de ses origines, dépassant celles-ci. C’est un très joli discours fort en émotions.

Un cap a été passé avec ce tome pour l’histoire mais aussi pour l’héroïne. La politique n’est cependant jamais bien loin et je sens qu’elle va vite nous rattraper dans les prochains tomes où ce qui s’est joué ici aura son importance.

Tome 5

J’ai trouvé que ce tome commençait tout doucement avec une histoire terriblement humaine, avec les bêtes toujours présentes mais un peu au second plan, mais petit à petit l’autrice a fait monter la sauce jusqu’à arriver à un dernier chapitre sous forme de coup de poing. Excellent !

Le tome s’ouvre joliment sur la directrice de l’école d’Elin qui cherche à les protéger elle et Lilan du gouvernement de leur pays. Ce sera d’ailleurs une menace sourde tout au long de cet opus. On découvre que la façon de faire d’Elin est vraiment unique mais surtout que sans le savoir elle fait écho à des pratiques oubliées et surtout cachées, que certains ont cherché à faire disparaitre. C’est là que le génie de l’autrice et sa maitrise de son univers se fait sentir. Tous les petits éléments qu’elle dépose au fil des chapitres prennent sens peu à peu jusqu’à éclater dans le dernier et c’est saisissant.

En parallèle, Elin se met à comprendre ce qu’a pu ressentir sa mère dans son travail de soigneuse. Elle subit également une lourde perte encore une fois ainsi qu’une blessure peu de temps après mais qui ne l’affaiblissent pas au contraire. C’est vraiment un personnage solide qui ne se laisse pas abattre pas facilement et j’aime ça.

A l’opposé, j’ai un peu de mal, pour le moment, avec l’intrigue politique qu’on cherche à glisser parfois dans l’histoire. On n’en voit les personnages que trop brièvement et trop peu de fois pour vraiment s’y attacher et du coup, pour le moment, leur histoire ne prend pas vraiment avec moi. C’est dommage parce qu’on sent que c’est lié avec tout ce qui se joue autour.

Pour terminer, le bond dans le temps dans les dernières pages est très bien vu. Ça permet de laisser le temps à Lilan et Elin de grandir et murir. Les retrouver quelques années plus tard rend leur relation encore plus forte. Et ce que l’on découvre sur les progrès de celle-ci avec son Oju est saisissant. J’ai d’ailleurs beaucoup aimé les discours sur les animaux qui vivent en captivité, ainsi que sur la façon de s’en occuper, ou encore sur la construction d’un langage et sa transmission. Ce sont plein de pistes qui donnent à réfléchir !

Tome 6

Vraiment, que je suis contente de ne pas avoir lâché cette série malgré ses débuts un peu faiblards. Elle communique un message très beau et puissant sur notre relation aux autres, aux animaux et à ceux qu’on considère à tort comme « inférieurs ».

Ce nouveau est source de bien des chamboulements. Dans le dernier Lilan était enfin parvenue à voler comme les ôjus sauvages, mais on apprend ici que ce n’est pas sans risque. Le souci, c’est que l’information vient d’un Ahlyo qui refuse d’en dire plus ce qui est très frustrant. On ne peut donc pas s’attendre à voir quelqu’un obéir et arrêter quelque chose qu’il trouve sous un prétexte aussi vague et fallacieux. L’obéissance aveugle, ça suffit !

Du coup, on assiste plutôt encore une fois au développement de la très belle relation entre Elin et les ôjus qu’elle croise. Un nouveau camarade, un ôju sauvage, va d’ailleurs rejoindre le centre de soins et formation et bouleverser un peu tout le monde. C’est chouette, ça continue à rendre la lecture dynamique. On se pose de nouvelles questions avec lui parce qu’il est sauvage mais également parce qu’il est un mâle. On en apprend ou plutôt devine encore plus sur eux et l’univers continue de s’enrichir.

De plus, l’autrice développe à merveille les relations entre Elin et sa directrice. Celles-ci sont vraiment très proches et c’est beau à voir. Elles comprennent chacune l’importance à donner à ces créatures qu’il ne faut pas enfermer dans un modèle inique. Cela amène peu à peu l’histoire à faire le lien avec son aspect politique, toujours présent en filigrane, qui ressurgit en force à la fin du tome pour de futurs grands bouleversements, je n’en doute pas.

L’autrice a placé les échelons pour une suite enlevée avec de vraies questions autour du passé des pays dont il est question ici et de leurs relations aux ôjus et aux tôdas. C’est une belle métaphore sur notre société aussi et nos relations aux bêtes qui me touche. La bienveillance et la recherche de compréhension d’Elin sont un modèle du genre !

Tome 7

Comme j’en discutais avec une amie, ce titre est vraiment trop méconnu et c’est bien dommage. L’autrice nous y livre une superbe fresque sur la condition animale, le pacifisme, les relations hommes-bêtes et plein d’autres choses encore qui me touchent en plein coeur.

L’histoire a pris un vrai tournant depuis 2-3 tomes avec l’arrivée de Lilan. Cette fois, nous oscillons entre crainte, soulagement et grande peur nous chamboulant encore une fois. Le tome s’ouvre par la suite de la visite de Yojeh dans l’école où travaille Elin. Cette dernière a commis une gaffe qu’il lui faut rattraper ce qui semble bien se passer finalement, même si certains propos de la Yojeh intriguent et font réfléchir sur des révélations auxquelles on a eu accès. On souffle donc un peu même si Elin a attiré une attention dont elle se serait bien passée et qui donne lieu d’ailleurs à une scène particulièrement malaisante. Mais elle fait aussi une rencontre décisive pour elle.

La surprise vient ensuite quand se produit un événement que personne n’attendait et auquel il faut vite réagir quitte à prendre ce qu’on peut penser être une mauvaise décision. J’ai été frappée par le sang froid et l’abnégation d’Elin qui fait le choix de tout sacrifier pour sauver des vies parce qu’elle pense que c’est ce qu’il y a de plus jeune à faire. C’est bluffant. La scène est brutale et violente. Les réactions le sont également. Je n’aurais pas dû être surprise parce que c’était quelque chose qui se préparait depuis un moment et qui n’attendait que d’éclater, mais la surprise fut tout de même là. Je comprends la réaction d’Elin et les questions qu’elle se pose ensuite. C’est terrible quand elle réalise ce qu’elle a fait et ne peut défaire, quand elle revoit également le regard que les autres vont poser sur elle désormais. Ça redessine beaucoup de chose et nous encore une fois matière à réfléchir sur ce que nous faisons aux animaux et aux autres en général.

J’ai tout de même de l’espoir, notamment grâce aux nouvelles relations qu’elle a noué dans ce tome. Des relations attendues quand on se rappelle le chemin fait pour ce récit, l’autrice nous y ayant préparé depuis un moment. Cela n’en reste pas moins très intéressant du point de vue de la dynamique que ça installe entre les différents peuples, pays, castes. Je suis très impatiente de lire la suite et de voir les conséquences de tout ça dans les prochains tomes.

Elin continue donc d’être un très bon shonen plein d’aventure avec une héroïne forte et fidèle à ses idéaux, un univers riche, des créatures fascinantes et des messages importants. Il tient très bien la route et gagne même en puissance au fil des tomes. Une série à découvrir !

Tome 8

Nouveau tome, nouveau coup de coeur ! Il faut dire que les autrices placent la barre de plus en plus haut niveau émotions et intrigues.

Après l’intervention d’Elin et Lilan la dernière fois, on savait que rien ne serait plus pareil, ce tome le confirme. Un chape de plomb pèse sur ce tome. L’ambiance est pesante comme le calme avec une tempête inévitable. On tremble et on frémit pendant l’ensemble de la lecture, en ayant également une boule au ventre comme l’héroïne. Mais que de courage chez celle-ci. Elle affronte tous ceux qui se posent devant elle, ne faisant aucune concession vs-à-vis de ce en quoi elle croit. Ça force le respect ! Parce que cela n’a rien de simple. Elle doit revenir sur son passé, confier ses secrets, s’opposer à des gens très puissants et risquer sa vie, mais son amour pour les animaux est plus fort que tout. Je l’admire !

Grâce à elle, on découvre également la force de certains des membres du palais, avec en tête Ialu, ce soldat qui a tout sacrifié pour sa maîtresse et dont l’abnégation ressemble tellement à celle d’Elin. Ils sont magnifiques tous les deux malgré la tragédie qu’ils vivent. Ialu comprend et accepte ce que lui dit Elin et la soutient à sa façon. L’autre personnage que j’ai aimé découvrir plus intimement, c’est la vieille Yojeh, cette pauvre femme marquée par la tragédie et qui devra apprendre à la fin de sa vie qu’on lui a caché bien des choses. Elle m’a vraiment attristée.

Mais le titre ne serait pas ce qu’il est, s’il n’y avait également les intrigues politiques qui sont de plus en plus au coeur de l’histoire. En effet, celles-ci se déploient tragiquement devant nos yeux désormais et forcent les personnages à bouger et se dévoiler. C’est terrible de deviner qui est derrière l’attaque et pourquoi il a fait ça, puis de le voir continuer à agir impuni pour le moment. Il blesse tout le monde, et pour quoi au final ? J’ai détesté ce personnage. Mais je dois reconnaitre que par contre, il y a une grande richesse et une vraie force dramatique dans les tensions que cela crée entre les 2 puissances du royaume : la Yojeh et ses croyances d’un côté, et les Arhan et leur puissance militaire de l’autre. C’est très bien joué et très bien mis en scène. On sent bien chacune des puissances se déchirer et les mots échanger sont bien rudes. Tout ça laissera des traces.

Ainsi Itoe Takemoto et Nahoko Uehashi démontrent de plus en plus leur talent à bâtir une histoire solide qui aura pris le temps de se dévoiler mais n’en est que plus forte de tome en tome. Elle frappe par les émotions qu’elle suscite et le drame qu’elle laisse pressentir. Un excellent shonen !

Tome 9

Nous rapprochant du final de la série, celle-ci, naturellement, se complexifie et ce tome en est un bel exemple. Pas simple d’enchaîner après les gros événements qui ont eu lieu dans les précédents et qui ont chamboulé l’univers d’Elin et de ses ôju, mais les auteurs y réussissent dans la douleur.

Elin et sa famille d’ôju doivent désormais se rendre à la capitale d’après les ordres reçus par la nouvelle Yojeh, qui est complètement manipulée par son oncle. Pas simple, alors qu’Elin déjà n’est pas remise de sa terrible confrontation avec Lilian, mais qu’en plus elle se retrouve en plein coeur de manoeuvres politiques terrifiantes.

J’ai trouvé ce nouveau tome particulièrement difficile à lire, dans le sens où vraiment mes sentiments ont été mis à mal. Tout comme l’héroïne, j’ai senti le poids et la pression qui l’accablaient à cause de ce que Damiya prépare. Ce fut donc une lecture pesante et malaisante mais pourtant très forte et puissante aussi. Les autrices maîtrisent parfaitement l’univers de fiction qu’elles ont créé et cela ne cesse de me surprendre quand je me rappelle de quel tout petit bout nous étions partis. Jamais alors je n’aurais deviné que je me retrouverais prises entre le feu de la guerre couvant entre deux factions, celle de la Yojeh et des ôju contre celle d’Arhan et ses tôda. L’histoire a pris un radical tournant politique qui fait froid dans le dos.

C’est en grande partie autour de Damiya que l’intrigue va désormais tourner. Celui-ci est la pièce qui va mettre en branle tout le système. Je ne sais pas comment l’appréhender. Par moment, il me dégoûte, me révulse et me révolte, mais à d’autres je le trouve au contraire nécessaire et honnête d’une certaine façon, un vrai politicien qui s’appuie sur du concret. Les autrices ont vraiment été fortes pour créer et mettre en scène un personnage aussi ambigu et, soyons honnête, terriblement fascinant également.

Ce tome est donc particulièrement axé sur la politique, mais on n’oublie pas pour autant notre petite Elin, héroïne qui se retrouve malgré elle coincée au milieu de tout ça. Elle a toutes les peines du monde à se remettre de sa dernière confrontation, ce qui est particulièrement triste. Je l’ai trouvé presque éteinte dans ce tome, tant elle est ravagée par la perte de la relation qu’elle croyait avoir établi avec Lilan. Cependant, c’est un bon rappel que les animaux restent des êtres à part, qui ne sont pas humains, et sur lesquels on ne peut apposer sans conséquences notre façon de penser. Cependant, malgré tout Elin, avec la persévérance qui la caractérise, résiste pour son idéal et je l’ai trouvé superbe pour ça ! C’est une âme pacifiste et elle cherchera toujours comment préserver tout le monde de la guerre. Elle est l’anti-thèse de Damiya qu’elle affronte dans ce tome.

Enfin, la couverture l’annonçait clairement mais nous assistons dans ce marasme et cette adversité à un beau rapprochement entre Elin et Ialu, ces deux êtres qui ont sacrifié leur vie à leurs idéaux. J’aime beaucoup l’idée de les voir ensemble, de les voir puiser de la force l’un dans l’autre, même si pour le moment c’est surtout Ialu qui a besoin de l’aide d’Elin. Lui aussi n’est pas dupe de ce qui se passe et lutte à sa façon contre la dictature qu’est en train d’essayer d’instaurer Damiya.

Ce neuvième tome, très riche malgré son ambiance lente et pesante, propose donc d’agencer les nouveaux pions en vue de la confrontation finale. C’est un tome de transition de haut vol où les tensions politiques, humaines et personnelles culminent malgré la douceur de l’illustration de couverture. On en ressort chamboulé, mal à l’aise mais plein d’une envie d’en découdre. Allez, Elin !

Tome 10

Dur dur cet avant-dernier tome, l’autrice ne fait pas dans la dentelle et propose vraiment une oeuvre dure et forte, qui fait mal là où elle passe et pousse à réfléchir sur nos relations aux animaux et à la politique.

J’ai été frappée par la lente noyade d’Elin au fil de ces quelques chapitres. On la sent de plus en plus sûre de ses convictions et pourtant de plus en plus perdue face à ce qu’il se passe autour d’elle. C’est tragique ! Une tragédie superbement mise en scène par l’autrice qui est une conteuse née. Elle emmène lentement mais sûrement les derniers personnages clés vers le lieu et le moment de la tragédie.

C’est un chemin inéluctable et bien triste qu’ils empruntent et qui nous met face à nous-même, comme Elin met sa dirigeante face à ses responsabilité en lui révélant les derniers secrets encore méconnus de tous et qui sont essentiels pour comprendre la situation. C’est rude mais nécessaire et ô combien bien mené par la mangaka, qui telle une légende, conte ces événements d’un temps reculé avec beaucoup de sobriété mais d’émotions. Mais ce n’est pas la seule révélation, Elin va plus loin et ose parler de la situation actuelle, ouvrant les yeux à sa souveraine, une manoeuvre risquée et compliquée. J’ai été frappée par la subtilité et la force avec laquelle c’est mené, le temps d’une simple discussion à coeur ouvert entre deux femmes. Deux femmes que j’ai trouvé très fortes, j’en suis la première surprise tant je croyais la Yojeh bien plus faible. Magnifique !

Les dessins très poétiques de Nahoko Uehashi subliment encore cela, en apportant une touche subtile et ancienne qui convient à merveille à ce conte légendaire d’un autre temps. Cela confère vraiment une dimension à part au récit et cela démarque ce shonen de toute la production formatée actuelle. Souvent, je trouve les titres de fantasy dans les mangas, un peu trop lisses et classiques, sans originalité. Ce n’est pas le cas ici. On sent une forte influence d’un certain folklore asiatique parfaitement maîtrisée et orchestrée ici pour mettre en scène une histoire puissante avec de vrais messages. Des messages sur l’instrumentalité politique, sur la souffrance animale, etc, qui me parlent.

Avec cet avant-dernier tome, qui se termine bien trop tôt, à un moment très frustrant, l’autrice me confirme dans mon coup de coeur pour cette série, qui change de l’ensemble de la production actuelle et propose quelque chose de plus fort, plus subtil et plus marquant. Un excellent shonen d’aventure politique dans un univers de fantasy !

Tome 11

Ultime opus d’une grande série qui aura commencé comme un coup de poing avant de subir un léger revers et de remonter lentement mais sûrement jusqu’à devenir un vrai coup de coeur pour moi !

Ce n’était pas simple de dire au revoir à cette série terriblement belle et poignante mais les autrices y sont parvenues grâce à un final épique, prenant, émouvant et révoltant. Les différents chapitres sont plein de tensions avec le conflit interne qui ronge l’univers d’Elin où s’affrontent les deux plus puissants clans en utilisant des bêtes de légende effrayantes sans aucun scrupule. Ainsi, on a vraiment peur pour tous et on se demande comment cela va finir.

En s’inspirant avec intelligence des romans de fantasy d’aventures classiques, les autrices offrent une intrigue bien ficelée où tensions, jeux de dupes, trahisons, pièges et retournements de situation sont bien présents pour dynamiser la lecture de bout en bout. Tout au cours du récit, il y avait une montée en puissance des enjeux politiques qui explosent ici, tout comme les personnages qui les portent dont la présence explosent dans les pages, la Yojeh en tête !

Tout cela pour nous amener à un final splendide bien évidemment centré sur la relation Elin – Lilan, les deux messies de cette histoire, avec des propos durs mais très beaux sur la peur de l’autre, la confiance, l’importance de communiquer, d’accepter la différence et bien sûr la liberté. Ce fut un titre vraiment marquant, très beau, émouvant porté par des dessins toujours aussi sublimes et subtiles, percutant de vie et de terreur, de noirceur et d’espoir. Ils contribuèrent beaucoup à ce que la série devienne si marquante pour moi et les dernières pages quasi muettes les mettant en scène ne peuvent que renforcer ce sentiment.

Cependant, la fin, malgré la bouffée d’émotion qu’elle me fit ressentir, fut également une énorme frustration tant elle fut brutale. Il manque clairement un épilogue ici car on reste bien trop sur notre faim quant aux destins d’Elin, Lilan, Ialu, Yojeh, Shunan, etc, malgré les quelques bribes d’informations sur la suite que l’on trouve dans l’interview finale, intelligemment glissée ici. Mais pour ma part, j’aurais préféré voir la suite adaptée en manga ou avoir accès aux romans en vf, parce que là, j’ai juste le sentiment d’avoir été flouée de la seconde saison en quelque sorte…

L’histoire n’occupant pas tout le volume, l’autrice nous offre une histoire annexe, interprétation d’une nouvelle issue d’un recueil de conte chinois. C’est une histoire funeste sur une chanteuse maudite. C’est beau, terrible et poétique, court mais complet, un beau conte mis en image avec talent.

Ainsi se termine la belle aventure d’Elin, cette enfant appelée à devenir une légendaire charmeuse de bêtes, mais surtout le récit de la très belle amitié entre une femme et une bête. Ce fut souvent poignant, parfois épique, mais toujours terriblement humain.

Ma note : 16 / 20

25 commentaires sur “Elin : La charmeuse de Bêtes d’Itoe Takemoto et Nahoko Uehashi

  1. Je suis assez d’accord avec toi ! la première partie est très prenante, mais après ça se calme un peu trop. Mais je pense que son aventure démarre vraiment là.
    Après, pour le fait que le gars veuille lui redonner le sourire, je trouve que c’est quand même sympa, vu ce qu’elle vient de subir, heureusement qu’il l’accueille pas à coup de pieds xD
    Ce qui serait pas mal, serait qu’il lui arrive des trucs à lui. genre il l’a recueilli, mais on remonte jusqu’à lui, et pour la couvrir il en meurt *-*

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  2. Haaa je croyais que tu parlais du roman ! J’avais déniché le premier tome en médiathèque il y a quelques années, et si c’était plutôt intéressant, je n’avais pas été surprise voire un peu confuse parce que tooonne d’informations XD Mais le dessin est vraiment adorable, et peut-être que délayé sur onze tome ça passera mieux ^^,

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    1. J’avoue que je suis passée complètement à côté du roman. Le positionnement de la couverture et de l’éditeur faisait que je pensais que c’était pour les enfants et je ne m’y suis pas intéressée à l’époque. Je ne regrette pas puisque ça me permet de découvrir le manga d’un oeil neuf.
      Si pour toi, ce fut une lecture mitigée, ça te permettra peut-être effectivement de mieux l’apprécier ainsi 😉

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      1. Je pense ! Et je pense que ça serait une belle ouverture pour les loulous. Enfin. Va surtout falloir leur trouver des trucs vraiment dans leurs goûts, ils en ont marre de la découverte. Mais pas Boruto XD #sauvezmoideboruto XD

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      2. Mdr c’est sûr que ça les dépayserait mais je ne sais pas si ce serait leur trip vu leur passion pour un fameux ninja lol
        J’ai du mal avec les goûts de la génération actuelle. J’ai l’impression qu’à leur âge j’étais beaucoup plus ouverte d’esprit et moins focalisée sur un seul titre ^^!

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    1. Ouf, ça me rassure ce que tu dis, pour une fois, j’ai essayé de ne pas trop en révéler mais ce n’était pas facile.
      Effectivement, je pense que c’est le tome 2 qui va tout déterminer. Soit on reste sur l’histoire pleine d’aventures sombres des débuts, soit on part sur du tranche de vie gnian gnian comme à la fin et là ce sera sans moi ^^!
      Merci pour ton passage qui me fait moi aussi plaisir à chaque fois 🙂

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  3. « Elle doit revenir sur son passé, confier ses secrets, s’opposer à des gens très puissants et risquer sa vie, mais son amour pour les animaux est plus fort que tout. Je l’admire ! » +1
    oh oui, je suis ravie qu’elle te conquiert autant que moi ❤

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  4. Tome 9
    « J’ai trouvé ce nouveau tome particulièrement difficile à lire, dans le sens où vraiment mes sentiments ont été mis à mal. Tout comme l’héroïne, j’ai senti le poids et la pression qui l’accablaient à cause de ce que Damiya prépare. Ce fut donc une lecture pesante et malaisante mais pourtant très forte et puissante aussi » +1

    Fight-Oh Elin !!!!

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