Livres - BD / Illustrations

Siegfried d’Alex Alice

Titre : Siegfried

Auteur : Alex Alice

Editeur vf :  Dargaud

Année de parution vf : 1e édition 2007-2011 / réédition 2020-2021

Nombre de tomes vf : 3 (réédition terminée)

Histoire : Librement adapté de la légende des Nibelungen qui a inspiré à Wagner l’un de ses plus beaux opéras, Siegfried est un sommet de l’heroic-fantasy, une bande dessinée fascinante qui renoue avec les mythes fondateurs des plus belles légendes. L’enfance de Siegfried, fils des hommes et des dieux, élevé parmi les loups par Nime. Le Nibelungen forme le premier tome d’une extraordinaire trilogie signée par Alex Alice, le génial créateur du Troisième Testament. Une série événement qui prend place, dès aujourd’hui, parmi les chefs-d’oeuvre du Neuvième art.

Mon avis :

Tome 1

J’ai découvert Alex Alice avec sa très belle série du Château des étoiles mais je n’étais jamais allée voir plus loin dans sa bibliographie. Ce fut donc une réelle surprise de découvrir qu’il y a des années de ça, il avait scénarisé et mis en image la légende de Siegfried et que Dargaud allait rééditer cette série avec le premier tome sortant pour la rentrée littéraire.

Tout d’abord, je dois dire que je suis ravie de cet objet livre. Il a été pensé pour s’accorder avec la série actuelle de l’auteur. Elle en reprend la bordure et le dos un peu « tissu » ainsi qu’une police qui s’accorde bien. Et cela alors que pourtant elle n’est pas chez le même éditeur. Merci Dargaud !

Siegfried est un personnage connu de la mythologie nordique, que pour ma part j’avais découvert enfant dans les Chevaliers du Zodiaque. Ayant toujours aimé les décors mythologiques, je ne pouvais donc qu’être séduite par ce titre. En plus, très tôt dans l’album, j’ai réalisé que cette histoire allait nous rapprocher également de la genèse du Seigneur des anneaux, puisque le héros Siegfried va devoir affronter Nibelung, Fafnir, sorte de Gollum et que leur histoire avait énormément de point commun. C’est donc prête à partir à l’aventure et curieuse de découvrir cette histoire que j’ai entamée ma lecture.

Celle-ci fut une vaste introduction à l’univers. Tout le tome 1 est consacré à l’exposition du décor mythologique, la découverte des différents camps / peuples, la rencontre du héros, le récit de ses origines et de sa destinée. C’est donc un tome à la lecture assez dense, qui repose plus sur le récit que l’action. Pour autant, je l’ai lu avec passion.

J’ai beaucoup aimé l’ambiance nordique froide, âpre, solitaire, naturelle et sauvage du titre. J’ai trouvé le rythme maîtrisé. La narration est astucieuse car elle passe sans cesse du récit présent, aux découvertes passées ainsi qu’au regard d’entités supérieures. C’est donc très dynamique. La mythologie est parfaitement utilisée et sera bien sûr le coeur de l’histoire.

Celle-ci repose sur une intrigue classique, la destinée et le voyage initiatique d’un jeune héros, né d’une fille d’Odin et d’un mortel, qui ignore tout de ses origines. Pour le moment, nous faisons juste la connaissance avec ce dernier et ce qu’on attend de lui. Siegfried est d’abord un charmant bambin aventureux et affectueux, qui s’est lié d’amitié avec les loups de la forêt, tandis qu’il travaille à la forge de Mime, un exilé Nibelung qui en veut énormément à Fafnir et ne rêve que de se venger et mettre la main sur son trésor. On voit Siegfried grandir, prendre ses marques, réaliser les mystères qui l’entourent et les différences qu’il y a entre lui et son gardien. Il devient vite désireux de connaitre ses origines et ce sera le point de départ pour que Mime l’embauche dans la quête qu’il s’est assigné et dans laquelle Odin va également le pousser. Mais cette aventure ne démarrera qu’au prochain tome.

L’aventure promise m’intéresse énormément, mais j’ai déjà beaucoup aimé faire connaissance avec Siegfried, dont j’ai aimé le lien avec la nature et les loups. C’est l’image type du héros mythologique : gentil, candide mais fort et courageux. Les scènes, où il se déplace dans la forêt et où on l’y voit gagner en force, sont magiques.

D’ailleurs, même s’il est à mille lieues de celui du Château des étoiles, j’ai beaucoup aimé le trait d’Alex Alice. Je l’ai trouvé varié, dynamique, plein de force et avec l’ampleur nécessaire à ce type de récit où on parle de mythes et de légendes, et où on met en scène des divinités. On y ressent toute la mystérieuse magie nécessaire à cette ambiance et l’auteur est vraiment talentueux pour mettre en image la nature froide et sauvage qui entoure le héros, ainsi que les brumes mystérieuses entourant les divinités ou encore les profondes cavernes terrifiantes de Nibelungs. Je regrette juste ces contours noirs un peu trop présents et insistants sur certaines pages.

Ainsi, même si le titre date et que le style d’Alex Alice est différent de ce à quoi je m’attendais, l’histoire se suffit à elle-même pour me donner très envie de découvrir la suite. Elle est certes classique dans ses thèmes, ses sujets, ses personnages, mais la mise en scène me plait et la mise en place de ce premier tome est prometteuse. C’est une belle interprétation du mythe de Siegfried.

Tome 2

Avec une série aussi courte, seulement 3 tomes, l’auteur est obligé de mettre les bouchées doubles dans ce tome du milieu et il le fait avec panache !

Si vous avez aimé le tome 1, vous aimerez ce tome 2 encore plus épique qui manie avec talent les mythes nordiques autour d’Odin et de sa famille. Les références sont riches et parfaitement intégrées à une trame narrative énergique qui se veut épique.

On est cependant dans un titre à la mise en forme très classique pour une BD de ce type. Je n’ai pas ressenti de surprise ni dans le déroulé de l’histoire, qui suit son court, comme lors de toute quête héroïque, ni dans la mise en scène graphique, où les nombreuses ellipses pour faire avancer l’histoire, figent un peu celle-ci pour quelqu’un habitué à la narration cinématographique des mangas. Ainsi même si j’ai à nouveau passé un très beau moment de lecture, je suis quand même un peu restée sur ma faim. J’aurais aimé retrouver quelque chose de plus surprenant, de plus détonnant.

Heureusement les aventures de Siegfried et de Mime ont su contenter mes envies de récit aventureux. Les suivre dans leur périple qui début enfin est intéressant, car l’auteur varie les lieux et les actions. Les deux s’entendent toujours aussi bien, ce qui donne lieu à de jolies chicaneries. Le tout se déroule dans un univers toujours plus que bercé par la mythologie nordique. L’épisode de la Sorcière est magique, c’est le cas de le dire. L’auteur joue à merveille sur les différente temporalité autour de Siegfried et de la Valkyrie pour nous pondre une histoire vraiment poignante. Cependant, je trouve les enjeux un peu légers. Tuer le dragon, ok, mais après ? J’espère que l’auteur aura pensé à proposer plus et autre chose, mais je crains qu’en un tome il manque de temps…

Cette lecture de la suite de Siegfried reste une lecture vraiment plaisante, car j’aime le trait d’Alex Alice et l’univers qu’il a choisi d’exploiter et qu’il maîtrise plutôt bien dans son médium de prédilection. Cependant cela reste un peu trop classique pour moi et j’aurais aimé ressentir le petit truc en plus que je ressens quand je lis son titre en cours.

Tome 3

Les dernières notes de l’opéra de Wagner s’égrènent autour de moi et c’est avec de nouvelles planches à couper le souffler que sonne l’heure de la conclusion tragique et épique de l’épopée de Siegfried, le tueur de dragon, un crépuscule des dieux qui aura tenu toutes ses promesses.

J’ai encore une fois était époustouflée par les compositions d’Alex Alice dans une style tellement différent du Château des étoiles avec lequel je l’ai découvert, mais correspond si bien à la noirceur et au drame de cette époque mythologique. La découverte de la cité des Nibelungen m’a émerveillée. La mise en scène ultra dynamique du combat contre Fafnir m’a scotchée. L’auteur a un superbe sens du rythme et de la mise jusque dans les ultimes notes concluant ce chapitre.

Malgré un rythme que j’ai cru un peu trop soutenu dans un premier temps, ce tome referme à merveille l’histoire de cette saga nordique, offrant à la fois une conclusion à la quête de Siegfried et à ses relations avec ses pères spirituels. C’est très bien tourné.

La première partie consacrée à Fafnir fait froid dans le dos avec cette angoisse montant qui contraste avec le calme intérieur du héros sûr de ce qu’il doit accomplir. Le combat tient toutes ses promesses avec des rebondissements à chaque fois juste au bon moment et une longue ni trop courte ni trop longue, alors que j’appréhendais.

Puis le basculement de paradigme pour s’intéresser ensuite à Odin et à la quête subsidiaire de Siegfried qui recherche sa Valkyrie est trop bien négocié. L’auteur en dit juste assez pour que l’on saisisse l’ensemble des tenants de l’histoire. Il joue même une dernière fois avec nous pour nous rendre confus avant la révélation finale fort à propos, qui tombe tel un dernier coup de lame. C’est magistral.

Ayant parfaitement cerné l’essence de ce qui fait le mystère, le souffle mais aussi l’émotion des sagas nordiques, Alex Alice nous a livré ici en seulement 3 tomes, et on en aurait voulu plus, une très belle interprétation de l’histoire du héros Siegfried. J’ai adoré l’ambiance mythique, le ton tragique et les dessins vertigineux de l’auteur. J’aimerais beaucoup le retrouver dans ce registre !

Ce diaporama nécessite JavaScript.

©Dargaud 2020

9 commentaires sur “Siegfried d’Alex Alice

  1. Siegfried est pour moi de loin la meilleure série d’Alice, surtout qu’il officie sur dessins et scénario. on le sent grandement inspiré et le projet de film d’animation (apparemment mort) confirme cette ambition. L’adaptation est superbe. Un must have!

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire