Titre : Mers mortes
Auteur : Aurélie Wellenstein
Editeur : Pocket Imaginaire
Année de parution : 2021
Nombre de pages : 416
Histoire : Les humains ont massacré les mers et les océans. L’eau s’est évaporée ; les animaux sont morts. Quelques années plus tard, les mers et les océans reviennent. Ils déferlent sur le monde sous la forme de marées fantômes et déplacent des vagues de poissons spectraux, tous avides de vengeance. Les fantômes arrachent leurs âmes aux hommes et les dévorent. Bientôt, les humains eux aussi seront éteints… Leur dernier rempart face à la mort : les exorcistes. Caste indispensable à l’humanité, les exorcistes sont bien entendu très convoités. L’un d’eux, Oural, va se faire kidnapper par une bande de pirates qui navigue sur les mers mortes à bord d’un bateau fantôme. Voilà notre héros embarqué de force dans une quête sanglante et obligé, tôt ou tard, de se salir les mains…
Mon avis :
Aurélie Wellenstein est une autrice que j’ai découvert l’an dernier et chaque roman est une nouvelle aventure très particulière avec elle. J’aime les ambiances fortes et dérangeantes de ses histoires mais je sais qu’elles peuvent être particulièrement clivantes et même au sein de ceux qui aiment ses textes, nous n’aimons pas tout et tous les mêmes.
Mers Mortes est son avant-dernier titre à ce jour chez ScriNeo, son éditeur historique, mais plus pour longtemps puisque est annoncé pour mai Le désert des couleurs. En tout cas, c’est le dernier titre qui nous arrive en poche chez Pocket et ça tombait bien puisque c’était celui qu’il me restait à découvrir !
Comme souvent avec l’autrice, je suis bien en peine de vous dire de quel genre de récit il s’agit. L’histoire se déroule dans notre futur, il pourrait donc s’agir d’un roman de science-fiction, mais il y a également tous les codes d’un récit initiatique de Fantasy, avec ce héros enlevé qui va se révéler à ses pouvoirs au cours de sa détention. Ou alors sommes-nous dans un récit fantastique avec un quotidien qui bascule d’un coup dans le surnaturel lors de la disparition de nos océans remplacés par des marées d’esprits ? J’avoue avoir du mal à trancher mais qu’importe tant que le plaisir de lecture est là et il le fut !
Aurélie Wellenstein nous invite donc à un nouveau voyage fort singulier, un voyage très âpre également comme elle sait les écrire. Dans un univers futuriste donc, nous découvrons le jeune Oural, sorte de sorcier / exorciste / télépathe, qui par la force de son esprit protège le bastion où il habite contre les marées d’esprits de créatures marines en colère depuis la disparition des océans à cause des méfaits des hommes. Dans ce monde post-apocalyptique notre héros vit en vase clôt et s’ennuie même jusqu’au jour où débarquent des pirates qui vont l’enlever et mettre sa vie sans dessus dessous.
Le paradigme de départ est assez simple. L’univers m’a d’ailleurs pas mal fait penser à celui des Enfants de la baleine d’Abi Umeda, série en cours chez Glénat. Le monde a été du jour au lendemain ravagé à cause de la bêtise humaine et les quelques survivants doivent trouver comment lutter contre les forces de la nature qui souhaitent prendre leur revanche. Ils sont aidés pour cela pour des exorcistes dont les pouvoirs sont miraculeusement apparus à temps pour cela. Cependant, le désespoir s’est installé partout, les survivants sont de moins en moins nombreux et la lutte de plus en plus difficile. C’est un monde en fin de vie d’où l’espoir s’échappe comme l’ont fait les océans. J’ai d’emblée été fascinée par cet univers. La dénonciation écologique y est évidente et je regrette au final que l’autrice ne s’appuie pas assez là-dessus dans son scénario, préférant n’en faire qu’une mince toile de fond avec très très peu d’explication voire aucune…
Elle préfère en effet préserver le mystère pour se concentrer sur la dimension humaine du récit, élément qu’elle se fait fort de développer comme dans chacun de ses romans. Je trouve en effet qu’à chaque fois la force de l’autrice est d’imaginer des univers dramatiques que ses jeunes héros vont devoir tout faire pour traverser au cours de terribles épreuves qui sont autant de métaphores pour notre vie à nous. C’est toujours très réussi, vraiment marquant et on se souvient à chaque d’un ou deux personnages dont le parcours était vraiment fort et chamboulant.
Ici, c’est donc Oural qui est le héros de son histoire. Exorciste de génie, il est pourtant allé contre les règles de son ordre en se liant avec l’esprit d’un dauphin, et lorsqu’il est enlevé par des pirates, il va très vite adhérer à leur aventure. Ce n’est pas un personnage facile à aimer au premier abord. Il est jeune, imbus de lui-même voire un peu pédant, mais c’est dans ses relations avec les autres qu’il va s’épanouir et devenir un très beau personnage. J’ai tout d’abord adoré sa très belle amitié avec Trellia, le dauphin. C’est de l’ordre de Belle et Sébastien et autre relation iconique entre animal et humain, mais avec une dimension vraiment profondément tragique ici. Superbe ! Puis, il y a également la relation fort ambigüe qui va naître entre lui et son kidnappeur, au point qu’il s’interroge lui-même se demandant s’il ne souffre pas du syndrome de Stockholm. Bengale, pour ne pas le citer, est en effet un homme fascinant à la quête non moins forte de sens, qui bien sûr chamboulera profondément le jeune Oural.
L’autrice est vraiment très douée pour écrire des relations qui deviennent de plus en plus émouvantes et chargées en potentiel dramatique au fil des chapitres. C’est ce qui fait vivre ses histoires. Ici, la quête de nos pirates, sur leur bateau ressuscité grâce aux pouvoirs de Bengale et de la marée a quelque chose de captivant, non tant par chaque individus qui compose l’équipage mais pas l’unité qu’ils vont peu à peu former autour de Bengale et Oural. Au passage, je salue cette revisite du thème des pirates que fait l’écrivaine. Elle en utilise tous les codes juste comme il faut au service de son récit qui pourtant est dans un univers tellement éloigné de ce type d’aventure et ça marche à merveille. On se croirait dans un mélange d’Ulysse et d’Île au trésor, le tout dans un monde post-apocalyptique avec des personnages qui ont tous des noms de cours d’eau. Surprenant et intelligent !
C’est visuellement un récit très marquant également. On imagine difficilement et pourtant totalement cette planète devenue déserte d’océans, de mers et de cours d’eau. L’autrice explore quelque chose de surprenant pour moi mais qui fonctionne à merveille grâce à ses descriptions simples mais efficaces. Peut-être aussi que la superbe couverture d’Aurélien Police m’y a aidé, ainsi que les visions du récit d’Abi Umeda (Les Enfants de la baleine). Toujours est-il que je rêve maintenant de voir cette histoire adaptée au cinéma pour assister à ces marées gigantesques et terrifiantes de créatures marines s’en prenant aux hommes, ainsi qu’à ce bateau se déplaçant à ces marées fantômes. C’est quelque chose d’assez envoûtant.
Cependant malgré toutes ces belles qualités, l’histoire n’est pas parfaite. Il lui manque un je ne sais quoi, peut-être un souffle épique pour définitivement nous emporter de bout en bout. J’ai souvent trouvé la narration poussive. Le début est mollasson et alors qu’on pourrait se dire que ça va démarrer avec l’enlèvement d’Oural et la rencontre de Bengale, l’histoire peine encore à trouver son rythme. Elle se répète également au gré des indécisions des personnages et ce malgré leur quête qui semble géographiquement avancer. Au passage, l’absence de carte m’a gênée pour visualiser ce fameux voyage et le temps qu’il prenait, c’était peut-être volontaire pour nous perdre, mais j’aurais souhaité vivre la chose autrement. A aucun moment, je n’ai eu le sentiment de suivre une histoire qui me tenait à bout de souffle. C’est mon seul regret ici.
Mers mortes fut donc une lecture originale, qui m’a remuée par le message qu’elle envoie sur ce que nous faisons de notre planète et de nos océans, mais surtout qui m’a envoûtée par son rythme lent et insidieux. Tout comme le héros, j’ai eu l’impression de souffrir du syndrome de Stockholm pour avoir petit à petit envie d’apprécier et de suivre Bengale, LE personnage marquant de l’histoire, avec le fantôme du dauphin. C’est un récit ambigu, ambivalent et perturbant, mais n’est-ce pas là la force des meilleurs récits ?
Je remercie Pocket Imaginaire pour leur confiance et cet envoi.
>>> N’hésitez pas à aller également lire les avis d’autres blogueurs comme : Saiwhisper, Les Fantasy d’Amanda, Les mots de Mahault, Blackwolf, L’ours bibliophile, …
Une chronique travaillée qui me donne encore plus envie de découvrir cette auteure. J’ai Le Dieu Oiseau dans ma WL, il serait peut-être temps que je tente l’aventure !
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Merci beaucoup, tu me flattes.
Le Dieu Oiseau est l’un de mes préférés, alors j’espère fort fort que tu l’en sortiras vite !
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Très chouette chronique pour un roman qui m’avait profondément marquée…
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Merci, c’est effectivement une histoire qu’on n’oublie pas comme ça
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Même si mon avis est beaucoup plus négatif que le tien, il ne diverge pas tant que ça sur certains points (l’idée général, le « personnage » du dauphin, …). Le manque de souffle a vraiment été « fatal » pour moi, ainsi que le manque d’approfondissement de la dimension écologique – après peut-être aussi que je n’accroche simplement pas au style de l’autrice.
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Après on a tous des goûts différents. J’ai aimé ce faux rythme et je ne sais pas si j’aurais accroché si la dimension écolo avait été plus poussée parce que ce n’était pas ce que j’attendais de sa part. On a tous nos curseurs. Mais je peux comprendre ta frustration si tu attendais plus.
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Je n’ai pas ressenti les défauts que tu mentionnes, mais je te rejoins complètement sur les atouts de ce roman qui m’a marquée et touchée : la dimension humaine, la relation entre Oural et Trellia, Bengale et le fait que ce soit LE personnage fort du roman…
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C’est en tout cas un titre qui reste longtemps en mémoire !
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En effet et je dois dire que je ne m’attendais pas à être aussi marquée…
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j’ai trouvé le message écologique vraiment beau dans ce roman… il y a juste la fin que j’ai moyennement appréciée
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Elle est un peu précipitée par rapport au reste notamment ^^!
Mais le message d’avertissement est clair et marquant
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Un coup de coeur pour moi. J’avais adoré. Une excellente chronique en tout cas 😊
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Merci beaucoup, tu me flattes. Je comprends très bien ton coup de coeur vu tout ce qu’Aurélie y a mis dedans ^-^
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Je l’ai lu il y a deux ans je crois, et j’avais bien aimé, mais j’avais trouvé ça un peu lent et répétitif, et un tantinet trop écolo à mon goût.
Mais c’était sympa 😁
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Je m’attendais à tellement plus côté écolo, que c’est passé crème. Je reconnais la lenteur et la répétition dont tu parles mais ça ne m’a pas gêné, c’est un peu une composante de l’autrice ^^
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Ah ben c’est ce que j’ai cru comprendre pour la lenteur et répétition, du coup, j’ai pas osé tenter d’autres livres 😅
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Je ne connais pas du tout cette auteure, mais le décor de ce roman donne envie. Ta chronique est vraiment complète, je suis curieuse de voir ce que peux donner la relation entre le kidnappeur et sa victime, mais le côté lent et répétitif me tente beaucoup moins 😇
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C’est clair que c’est assez particulier. Je pense déjà que si ce que j’en ai dit te rend curieuse, tu devrais pouvoir surmonter sa lenteur, qui est surtout assez insidieuse et correspond bien au final à cette drôle de relation entre le kidnappeur et sa victime ^^!
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Oh tu sais attiser la curiosité des lecteurs 🤭 je me le note alors, ce décor asséché m’intrigue beaucoup 😉 merci !
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Ahhhhh ! ❤ Trop contente. Je suis tellement d'accord avec toi sur les messages, la dureté de ces derniers, l'ambiance et ton affection pour Bengale… Clairement THE perso ! ❤ Merci du lien !
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Avec grand plaisir !
Tu es l’une de celles qui m’a permis de vite foncer vers ce titre, même si reconnaissons-le, je pense que je lirai chaque roman d’Aurélie Wellenstein maintenant tant j’aime sa plume, son style, ses thèmes, ses univers.
J’ai hyper hâte de lire celui de ce mois-ci 😀
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Oh, merci beaucoup ! ❤ Idem, le nouveau me tente. Amanda a beaucoup aimé, apparemment. Presque un coup de coeur. J'espère qu'il en sera de même pour nous !
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J’ai vu ça, je croise les doigts aussi ^^
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Qu’on adhère ou non à ses romans, on ne peut pas enlever à Aurélie Wellenstein une originalité hors du commun. Chaque histoire est un dépaysement total.
J’avoue que Mers mortes a su me toucher par ses thématiques fortes, voire me bouleverser complètement puisque j’ai du sauté certains passages, trop durs à encaisser…
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C’est tout à fait ça, elle fait vraiment preuve d’imagination et sait bien de renouveler à chaque roman.
Même si j’ai tout lu, je peux comprendre que certains passages t’aient bouleversée, c’était aussi le cas pour moi dans le Dieu Oiseau notamment…
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Il faudrait peut-être intégrer des trigger warning au début de ses romans ^^.
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Pas faux franchement. Après quand on s’est fait piéger une fois, on commence à la connaitre et on sait à quoi s’attendre heureusement ^^
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Ah ah, c’est exact mener ça ! ^^
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