Livres - Histoire

La Maison des intentions particulières de John Boyne

Titre : La maison des intentions particulières

Auteur : John Boyne

Traduction : Laurent Bury

Éditeur : Pocket

Année de parution : 2016

Nombre de pages  : 540

Histoire : De Saint-Saint-Pétersbourg en 1917 à Londres de nos jours, la trajectoire tumultueuse de deux êtres unis par l’amour, les secrets, et la folie de l’Histoire.
Pour Gueorgui Yachmenev, petit paysan russe, tout débute comme un conte de fées : engagé afin de protéger le tsarévitch Alexeï Romanov, il se retrouve dans le fastueux palais impérial. Le rêve se poursuit lorsqu’il rencontre les quatre soeurs d’Alexeï, les princesses Romanov, parmi lesquelles la belle Anastasia. Mais la révolution va éclater, balayant tout sur son passage…
1981, Londres : Gueorgui veille Zoïa, sa femme, qui est mourante. Ensemble, grâce à un amour infaillible, ils ont supporté l’exil et le poids d’incroyables secrets.
Qu’est-il arrivé en Russie ? Pourquoi Zoïa vit-elle toujours dans la peur ? Quels fantômes du passé la poursuivent encore ?

Mon avis :  

Depuis toute petite j’adore l’Histoire et je suis fascinée par certaines figures historiques mythique comme c’est le cas pour Anastasia, fille du dernier tsar dont la mère porte en plus mon prénom. J’ai lu et vu nombre de romans et reportages sur sa famille mais face à l’enthousiasme de Steven concernant ce roman, alors qu’il est dans le même cas que moi, ça m’a donné très envie de le découvrir à mon tour !

Le titre déjà interpelle : La maison des intentions particulières, il est la traduction la plus proche du titre originel mais d’anciennes parutions l’avaient remplacé par La maison Ipatiev ou Ne m’appelle plus Anastasia, qui sont encore plus parlant, Ipatiev étant la dernière demeure des Romanov. La couverture, elle aussi, m’a interpellée avec cette femme vêtue de rouge au milieu de cette allée enneigée avec ce cheval prêt à faire demi-tour pour s’enfuir au galop. C’est une très belle composition.

Cependant ma lecture fut plus complexe que ce à quoi je m’attendais. J’ai d’abord eu beaucoup de mal à pleinement apprécier ce roman car j’en attendais autre chose. Connaissant plutôt bien l’histoire de la fin du règne de Nicolas II, je pensais vivre ces années / mois-là au plus près. Ce ne fut pas le cas. J’ai donc été perturbée en étant une spectatrice plus lointaine que prévu et qui plus est avec des trous assez importants dans la chronologie, ainsi que des libertés assez flagrantes.

Malgré tout j’ai passé un très bon moment. Pourquoi ? Parce que l’auteur fait vraiment oeuvre de romancier. Il nous propose une histoire inédite qui se traduit par une double temporalité que j’ai adoré, en mode « Malgré Tout » (la BD) où le temps s’écoule à reculons jusqu’au moment clé d’un côté, et en mode je m’introduis dans la grande Histoire à l’aide d’un petit personnage de l’autre. C’est une belle idée pour revisiter un mythe déjà connu et rebattu.

Le narrateur de cette histoire, celui grâce à qui celle-ci vaudra le coup, c’est Gueorgui Yachmenev, un jeune paysan russe, qui suite à un concours de circonstance va se retrouver parmi les très proches de la famille impériale pour assister à leur chute. A ses côtés, nous allons découvrir la vie de la paysannerie en Russie au début du XXe siècle, puis la vie des domestiques à la cour impériale, et enfin la vie intime de cette famille si éloignée de nous : les Romanov, dont les époux se surnomment entre Nicky et Sunny, et dont les enfants aiment bien faire des frasques dans le dos de ceux qui les surveillent et protègent. L’auteur nous propose une vraie incursion dans les coulisses de cette grande Histoire.

Mais paradoxalement, ce n’est pas la partie de l’histoire que j’ai préféré. Non, moi ce que j’ai aimé, c’est le récit de Gueorgui adulte qui raconte à reculons son exil avec sa femme Zoïa, de leurs vieilles années à l’heure actuelle, jusqu’au tout début de cet exil en 1918. A travers ce récit, nous allons voir comment ce couple si soudé va surmonter ou pas au fil des décennies les traumatismes de cette Révolution qui va arriver peu à peu sur l’autre ligne temporelle. Nous allons les découvrir dans le Londres présent avec une Zoïa malade, avant de remonter peu à peu dans le temps tandis que leur couple affronte bien des souffrances : tromperie, deuil, perte d’enfants, tentative de suicide, perte d’amis, etc. C’est une vie bien rude qui nous est contée dans un contexte historique riche puisqu’ils ont également connu la Guerre froide, la chute de Lénine, la Seconde Guerre Mondiale et l’ostracisme des Russes, mais aussi la montée de l’extrême-droite en Europe. Leur histoire devient au fil des chapitres aussi riche qu’émouvante avec un Gueorgui pierre angulaire de celui-ci, alors on lui pardonne ses débuts peu crédible et leur fuite improbable.

Cependant, à vouloir raconter tout cela, l’auteur a dû faire des choix, des impasses et c’est notamment dans le récit passé de ce qu’ils ont vécu que cela pêche le plus, l’autre fil scénaristique n’en souffrant pas vu que conçu comme ça avec ces bonds dans le temps. Ainsi si j’ai ressenti de l’attachement pour le couple Gueorgui-Zoïa adultes, ce ne fut pas du tout le cas avec leurs pendant jeunes, ni avec la famille du Tsar. A force de ne nous raconter que quelques instantanés de vie, je n’ai pas ressenti d’attachement particulier pour ceux-ci et je n’ai pas vraiment perçu ça comme un drame que la Révolution les renverse. Il y a même un certain parti pris historiographique pas forcément très juste, ni honnête, envers Nicolas et Alexandra qui m’a agacée, celle-ci étant transformée en la Marie-Antoinette russe, ce qui ne fut pas forcément le cas…

La maison des intentions particulières fut donc une riche lecture mais pas sans défaut. J’en ai aimé l’audace narrative avec cette double ligne temporelle dans l’avancement et le recul se croisent. J’ai été profondément émue par le narrateur âgé et sa femme et leur parcours de vie après le grand drame de l’Histoire. Mais, ce fut justement la partie historique qui a pêché pour moi, manquant de détails, manquant de justesse, ayant trop de parties pris et prenant trop de libertés malheureusement sur un sujet que je connais. Ce ne fut donc pas la pleine réussite que j’attendais mais tout de même un très joli moment.

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Steven, Millina, Bianca, 5th avenue, Pages insolites, Vous ?

13 commentaires sur “La Maison des intentions particulières de John Boyne

  1. Comme toi j’ai été un peu déçue qu’on ne parle pas plus de l’enfance d’anastasia et de sa potentielle fuite. Par contre leur exil est intéressant aussi. Je n’ai pas trop vu le parti pris mais en même temps je n’ai pas lu beaucoup de roman sur cette époque.
    J’ai lu Sashenka de Simon Montefiore qui fait un peu écho à ce roman mais peut-être un peu plus riche historiquement.

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  2. Comme quoi ça que lecteur à son propre ressenti et même si tu ne partages pas mon coup de cœur, je suis plus que ravi que tu aies pu être touchée de la sorte !
    Je m’attendais à un avis bien plus tranché donc je suis content d’avoir pu te faire vivre de tels moments 😉

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  3. Mais oui ! J’avais déjà un doute en lisant la chronique de Steven mais tu confirmes : j’ai déjà lu ce roman, sous le titre Ne m’appelez plus Anastasia, il y a des années de ça !
    Sur le moment, je l’avais apprécié davantage que ce à quoi je m’attendais.

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