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Raspoutine le patriote de Takashi Nagasaki et Junji Ito

Titre : Raspoutine le patriote

Auteurs : Takashi Nagasaki et Junji Ito

Traduction : Studio Charon

Éditeur vf : Delcourt-Tonkam

Année de parution vf :  2022-2024

Nombre de tomes vf : 6 (série terminée)

Résumé : Celui qu’on appelle le Raspoutine du ministère des affaires étrangères a été arrêté par la brigade spéciale du ministère public de Tokyo. Pourquoi ce diplomate semble-t-il impliqué dans la rétrocession des îles du nord de Hokkaido par la Russie? Basé sur l’expérience personnelle de l’ancien diplomate Masaru Satô, ce récit présente son combat contre un procureur de la brigade spéciale au cours de ses interrogatoires quotidiens…

Mon avis :

Tome 1

En cette époque où la Russie se retrouve au coeur de toutes les conversations, je n’ai pas été surprise qu’un éditeur surfe sur la vague pour nous proposer un titre mettant en scène l’une de ses plus grandes figures historiques : Raspoutine. Pourtant, ce que propose Junji Ito dans ce seinen, ce n’est pas une Histoire de la Russie mais avant tout une histoire très japonaise. Une belle surprise.

Junji Ito, je l’ai d’abord découvert à travers ses récits horrifiques, tellement marquants, où il a su imprimer sa patte dès les premières cases. Mais j’ai découvert ensuite une autre production de l’auteur, plus classique et historique à l’image de la Déchéance d’un Homme et maintenant de Raspoutine. Il y fait là oeuvre d’auteur de thriller et met sa capacité à nous faire frissonner au service d’histoires tendues et stressantes.

Quand j’ai découvert l’arrivée de ce titre, j’étais persuadée que nous allions plonger dans les arcanes de la Russie tsariste. Quelle surprise se fut de me retrouver plutôt dans le Japon des années 90 à suivre la politique diplomatique de ce pays en URSS au moment du basculement de celui-ci et des premières années post-chute du communisme. J’ai trouvé passionnant de suivre avec Yuki, notre héros diplomate pour le Japon, les entrelacs de cette politique agitée qu’il y a alors en URSS / Russie avec des figures historiques telles que Gorbatchev et Eltsine. C’était fascinant.

Cependant le récit prend rapidement une toute autre tournure. Notre héros se retrouve attaqué par la justice de son pays, soupçonné d’abus de confiance et autres charges de plus en plus lourde dont il va devoir se défendre. Avec lui, nous allons découvrir tout le terrible engrenage judiciaire que subissent les présumés coupables au Japon et qui a entendu parler de l’affaire Carlos Ghosn y verra un certain écho, qu’on apprécie ou non le personnage.

Ce fut alors passionnant d’entrer dans les arcanes de ces mécanismes. Avec la froideur et l’horreur dont on le sait capable, Junji Ito met en scène l’incarcération de Yuki, puis ses premiers jours en prison et surtout la dynamique effroyable qui s’installe entre lui et le procureur qui instruit son affaire et qui cherche à tout pris à le coincer. Là où Nogizaki (Pour le pire) plante un décor grinçant et amusant, Ito se glisse au plus près de ce que doit subir un présumé coupable et c’est terrifiant. La tension vécue est palpable. On vit les interrogatoires ultra serrés et orientés aux côtés du héros comme si on y était. Le trait que l’auteur a développé dans ses mangas horrifiques lui sert à nous terrifier avec les portraits des membres de cette implacable mécanique judiciaire japonaise. Ils sont glaçants.

Ce premier tome nous happe et immerge d’emblée et une fois entamé, il est impossible de lâcher sa lecture, même si parfois celle-ci se révèle un peu dense avec l’ensemble des noms mis en scène dans cette affaire aux nombreuses ramifications, dates, noms et époques. Mais l’auteur jongle entre elles avec brio, passant régulièrement du passé au présent, du Japon à la Russie et c’est passionnant à lire.

Un peu refroidie mais fascinée aussi par la production de l’auteur, il parvient ici à allier les qualités des deux pans de son oeuvre pour développer une histoire prenante et fascinante qui vient dénoncer un système judiciaire japonais implacable qui instruit à charge et cherche à démolir les présumés coupables avec les histoires qu’il a lui-même imaginées sans parfois tenir compte de la vérité. C’est un récit puissant, criant et terrifiant qui ne peut pas laisser indifférent.

Tome 2

Emballée par le tome 1 de ce thriller policito-financier au cadre judiciaire fort, j’étais prête à revivre la même expérience glaçante dans ce deuxième tome. Si les auteurs nous y décrive à nouveau une justice japonaise effrayante, ils s’embarquent en revanche dans trop de détails et pas assez de décors géopolitiques à la fois pour me séduire à nouveau…

Est-ce la faute de la fatigue au moment de ma lecture ou de l’oeuvre elle-même ? J’ai vraiment eu le sentiment, comme le héros, de m’embourber au cours de ce récit. Dans le premier tome, les auteurs offraient un mélange de description du terrifiant système judiciaire japonais et des relations diplomatiques avec la Russie. Celles-ci disparaissent de trop dans cette suite et avec seulement l’affaire nippono-japonaise, je me suis ennuyée.

Pour bâtir une telle histoire, il faut une relation forte entre le prévenu et le procureur qui instruit son dossier et mène les interrogatoires, car c’est de leur opposition que doit naître la tension narrative. Or ici, bien qu’on sente que chacun essaie de se jouer de l’autre, il manque quelque chose. Le procureur est trop caricatural pour vraiment être crédible et faire peur, malgré les intentions des auteurs qu’on sent bien dans le dessin d’inspiration horrifique de Junji Ito. Le prévenu, lui, est trop sûr de lui et à ne le voir douter à aucun moment, on perd également en tension. C’est trop lisse.

De plus, l’affaire est assez technique et les auteurs en ne se concentrant presque que sur le volet japonais de celle-ci enchaînent les chefs d’accusation, les citations d’autres prévenus et les méfaits qu’ils auraient commis. Cela a un petit effet catalogue qui a tendance à me perdre. Et si dans le précédent tome, la description des relations diplomatiques avec la Russie permettait d’atténuer cela, ce n’est plus le cas. On ne parle plus de celle-ci que pour l’affaire des îles Kouriles, ce qui ne m’a pas donné le sentiment d’apprendre quoi que ce soit…

Après pour qui serait fan de séries judiciaires pures et dures, cela peut être intéressant de voir comment fonctionne le système japonais à travers cette dénonciation de l’injustice de celui-ci. Si on s’intéresse de prêt aux faits divers japonais, cette affaire peut être intéressante à suivre par le menu car elle a de nombreux rebondissements et que de nouveaux faits viennent sans cesse remettre en question les précédents et interroger sur l’honnêteté de tous ces hommes.

Malheureusement pour moi, après un excellent début, j’ai eu l’impression que les auteurs se perdaient dans le canevas qu’ils avaient voulu s’imposer et la narration trop classique de ce tome n’a pas aidé. Les dessins sont pourtant toujours aussi effrayant, tout comme le portrait de cette justice japonaise inique. Le titre a des qualités pour les fans de séries judiciaires. Ce tome n’était juste pas pour moi.

Tome 3

Après un tome 2 qui m’avait laissée un peu perplexe tant il semblait fait uniquement pour des lecteurs japonais au fait de leur système judiciaire et de leurs affaires, j’ai renoué ici avec ce qui m’avait séduit dans les débuts de la série, à savoir une double narration avec une confrontation diplomate-procureur et le récit du travail diplomatique des Japonais avec les Russes. Bien plus motivant !

Le récit de l’emprisonnement et surtout des interrogatoires de notre héros Yuki sont toujours au coeur de notre récit mais on se plaît plus dans ce tome à suivre ces moments de tension avec le procureur car Junji Ito va moins dans la caricature. Celle-ci est toujours un peu présente, notamment dans le côté très théâtral de la représentation physique de chacun et dans ses mimiques, héritage d’une façon de faire les mangas autrefois, mais on l’accepte plus. L’auteur nous livre plus d’explications sur les liens entre la justice et les médias et ainsi on comprend mieux ce qui se trame, ce qui donne un second souffle à cette partie de l’histoire. L’accusation portée est pourtant bien rude mais il est intéressant de voir un auteur avec un tel recul.

C’est cependant le versant plus diplomatique de l’histoire qui m’a passionnée. J’ai aimé découvrir la politique japonaise et surtout la diplomatie japonaise à travers les yeux de Yuki. Bien sûr le regard est biaisé mais il est assez fascinant de revivre des événements de son enfance qu’on trouvait éloignés comme si on y était. Ainsi le récit des années Eltsine et de sa politique des saunas fut passionnante, tout comme ses relations avec les différents Premiers ministres japonais qui se sont succédé, ou encore les petites guéguerres internes hyper violentes pour décider de qui va lui succéder. On plonge en plein coeur de l’histoire politique cachée de la Russie et on voit le rôle que jouent les Japonais avec leur question des territoires en ballottage entre les deux nations. C’est juste passionnant.

Après, je dois reconnaître que c’est une lecture exigeante. Je prends plaisir à lire chaque tome mais je doute, avec le rythme de parution actuel, de me rappeler de tous les tenants et aboutissements lors de la sortie du prochain tome… Cela ne gêne pas ma lecture mais cela nécessitera une relecture complète de l’histoire une fois celle-ci terminée pour bien tout suivre et voir l’ensemble des pièces s’emboîter ou pas. Pour l’instant, je suis juste fascinée par cette politique complexe que je vois s’écrire sous mes yeux et j’aime voir le courage de notre héros qui résiste à toutes les pressions pour préserver la vérité mais aussi ses collègues et ceux avec qui il a travaillé. Quel homme !

Récit courageux d’une incarcération injuste, on suit le coeur vaillant la défense sans faille d’un Mamoru Yuki extrêmement solide qui parvient à ne pas vaciller même lorsque la pression est grande. C’est fort. Les mangakas font une belle oeuvre de restitution, n’hésitant pas à égratigner leur pays et sa relation justice-médias au passage, tout en capturant aussi un portrait fidèle de cette Russie des années 90. J’ai l’impression de re-découvrir tout un pan de notre histoire mondiale par un petit bout de lorgnette très intime. J’adore !

Tome 4

Quelle drôle de mise en scène d’Ito et Nagasaki dans ce Raspoutine patriote, qui effectivement regroupe les deux faces de la pièce mais nous offre un spectacle des plus déroutant et compliqué à suivre.

Les tomes se suivent et ne se ressemblent pas. En alternant les focus entre histoire présente et passée, histoire japonaise et russe, les auteurs nous perdent et de nous reperdent dans les méandres de ce scénario alambiqué auquel il faut vraiment s’accrocher. Et je dois avouer une nouvelle fois m’être sentie perdue à plusieurs reprises dans ce tome qui enchaîne des sortes de mini-chapitres de la vie du prisonnier qui semblent essentiels pour comprendre ce qu’il vit et a vécu mais qui ne s’imbriquent tellement pas ensemble que j’ai du mal à voir le tableau général et que je me sens perdue…

J’ai pourtant aimé chacun des tableaux parce qu’il apportait un éclairage intéressant sur l’histoire du Japon et/ou de la Russie, que ce soit dans un premier temps avec le trouble Comité du rouble sur des malversations financières où on nous explique par le menu comment des diplomates japonais usent et abusent du système pour blanchir de l’argent et s’enrichir. Mais étant peu au fait de telles manoeuvres, j’ai dû m’accrocher pour tout comprendre et suivre, et je ne suis pas sûre d’y avoir pleinement réussi. La narration assez absconse n’a pas aidé… Puis dans un second temps l’attaque faite à l’idéologie du néolibéralisme incarné par M Koizumi (premier ministre entre 2001 et 2006) fut cinglante, mais dans quel but par rapport à notre histoire ? Je cherche. Enfin, l’histoire d’Alberto, un étudiant du héros qui souffre de PTSD m’a permis de découvrir la guerre qu’il y avait eu entre l’URSS et l’Afghanistan entre 1979 et 1989. Pour finir, les auteurs reviennent à la questions des Territoires du nord, qui là sont l’objet de la série, ce qui m’a remis sur les rails, mais sans bien comprendre le lien avec tout ce qu’il y avait eu avant…

J’ai donc eu l’impression de suivre une suite de tableaux intéressants sur le passé des deux pays, sur l’état de ceux-ci, sur les idées et pensées qui les agitent, mais sans en comprendre le but réel ni la toile d’ensemble, tout me semblant assez disparate, ce qui est assez perturbant, je dois le dire. Connaissant très mal cette histoire récente, il m’a fallu également ingurgiter pas mal d’informations transmises par les auteurs de manière fort rébarbative, ce qui n’a pas rendu la lecture du plus agréables même si je suis quelqu’un de curieux. Cela m’amène donc à m’interroger sur l’intérêt des auteurs à avoir fait cela à part à montrer pour le Comité des roubles, un fonctionnement de la diplomatie, idem pour le chapitre sur les Territoires du nord, mais le reste…

En revanche, j’ai trouvé l’écriture de l’évolution de la relation entre notre héros détenu en prison et le procureur en charge de son affaire et de son interrogatoire intéressante et fine, derrière les effets un lourd de dramaturgie des dessins d’Ito, qui en fait des tonnes. Cela m’a amusé de voir utiliser pour cela des éléments du folklore japonais tel que les chats et les yokai dans des histoires fantastiques reposant sur le pouvoir des rêves. Les voir ensuite collaborer pour établir un procès verbal résultat d’un compromis de chacun est très intéressant pour témoigner du fonctionnement de la justice japonaise. Je suis donc assez curieuse de voir sur quoi cela va déboucher.

Sans cette narration qui cherche à forcer des informations historiques, politiques et géo-stratégiques pas toujours utiles à l’histoire, j’aurais passé un bon moment de lecture à en apprendre plus sur l’Histoire et le présent du Japon et de la Russie. En l’état, ce fut surtout lourd, alambiqué et pas toujours limpide, avec un but que je cherche encore sur certaines parties. C’est dommage parce que les informations délivrées, elles, sont fort intéressantes prises séparément, cela manque juste de clarté narrative dans le cadre de cette histoire présente.

Tome 5

Voilà décidément une lecture riche et complexe qui résonne avec notre actualité avec le récit de ces relations diplomatiques troubles entre Japon et Russie. C’est passionnant mais pas simple à suivre.

Le procès approche et les derniers échanges entre M Yuki et son procureur s’intensifient encore mais d’une manière différente de ce qu’on pourrait s’attendre. Les deux hommes ont vraiment noué une relation singulière parfaitement mise en image et en scène par Junji Ito qui trouve en quelque sorte son dénouement dans ce tome dans les derniers instants avant le procès qui devrait occuper le dernier tome.

J’ai encore beaucoup aimé voir les deux hommes se livrer à une partie de ping pong verbale complexe où chacun cache ses intentions et tentent de faire dévoiler son jeu à l’autre. Chacun a appris à respecter l’autre à sa façon et ça peut être émouvant, malgré un trait très dur et opaque chez Ito, qui accentue un peu trop les émotions factices de chacun. Mais ce ballet de vrai – faux les a conduits à une relation assez singulière que j’ai aimé voire se déployer au fil des tomes et dont je suis curieuse de voir l’aboutissement dans le dénouement.

Politiquement, cette lecture fut à nouveau riche et complexe, avec une mise en abîmes des relations entre Japon et Russie, mais surtout de la manière de travailler des ambassadeurs et des fonctionnaires de l’ambassade. Ils fascinent autant qu’ils font froid dans le dos par leurs manoeuvres. On découvre encore de nouveaux visages et de nouvelles facettes de certains déjà connus. Ça parle également richement de politique interne russe, avec ses grands noms, leurs rivalités, leur façon de s’éliminer ou se mettre en avant. On assiste en direct à une certaine bascule du pouvoir qui aura des conséquences jusqu’à nos jours, avec l’arrivée de Poutine et ses alliés. Mais cela va encore plus loin puisque ça parle également du rôle d’autres pays et groupuscule dans ce mouvement de fond qui se veut international, avec une sorte d’échiquier géant où chacun avance ses pions et agit ainsi sur ceux des autres. Les Israéliens et les Américains ne sont pas en reste dans ce tome par exemple.

Mais la politique japonaise est également richement évoquée et l’auteur n’hésite pas à se montrer critique envers celle-ci, tout comme envers les médias qui fabriquent des histoires et la justice qui les suit de manière complaisante. Il n’y va pas avec le dos de la cuillère. D’ailleurs, on voit à nouveau combien nos propres politiques sont protégés quand ils sont mis en accusation, par rapport aux Japonais pour qui le système est bien plus sévère. Chez nous, bien trop de politiques sont épargnés et chez les Japonais la méthode est bien trop rude et brise des vies. Aucun des deux systèmes n’est donc parfait et ça donne matière à réflexion.

Série politico-policière rude, Raspoutine le patriote en arrive à ses ultimes rebondissements dans ce tome encore riche qui ouvre la voie à un procès qui s’annonce tendu, avec cette figure de M Yuki, éternel défenseur de son pays. C’était âpre, c’est passionnant mais que c’est complexe à suivre quand on ne connaît pas bien l’histoire contemporaine des pays évoqués. C’est donc une lecture plus exigeante que plaisir, mais ça fait du bien de temps en temps.

Tome 6 – Fin

Depuis que j’ai commencé cette série, je me demande quand même comment elle a atterri chez nous, car vraiment en dehors du nom du Junji Ito, elle traite d’un sujet tellement pointu concernant la politique japonaise qu’elle est assez absconse à lire, en dehors des quelques fans de diplomatie et histoire internationale qui doivent traîner dans le lectorat et je les crois rare. Ce dernier tome n’aidera d’ailleurs pas vraiment.

Sorte de résumé de l’ensemble de l’enquête, normal puisque nous arrivons au dénouement, il n’éclairera pas plus l’ensemble pour un lecture qui méconnaît totalement ce versant de l’Histoire très récente japonaise. Ce fut donc à nouveau une lecture des plus ardues si on s’en tient au fait et je crois que d’ici quelques jours j’aurai bien vite oublier la majeure partie des faits à part peut-être l’histoire des Territoires du Nord et les relations Russe-Israël parce que c’est d’actualité…

Et ce ne fut malheureusement pas le seul frein. L’auteur offre une narration assez décousue sous forme d’épisodes qui durent 1 à 2 chapitres avant de passer aussi sec au suivant comme si c’était réglé. Or, il présente ainsi des personnages qui semblent clé dans l’affaire mais il les fait disparaître bien trop rapidement. C’est le cas de l’ami intime de Yûki dans ce tome. C’est donc assez difficile de s’attacher à l’histoire dans ces conditions, c’est-à-dire à l’affaire et au procès.

Heureusement, on peut quand même s’appuyer sur autre chose au cours de ce tome pour avoir un petit plaisir de lecture quand même : la relation entre Yûki et le procureur qui a longtemps traité son dossier. C’est leur duo qui depuis le début sous-tend l’histoire et ça se confirme ici. Même si le dessin d’Ito est un peu grossier et joue à contre-temps parfois sur les émotions exprimées, on sent vraiment qu’il s’est passé quelque chose entre eux, qu’ils ont développé une sorte d’admiration réciproque, qu’ils peuvent désormais reconnaître, dans cet affrontement à fleurons mouchetés qu’ils ont mené. Ce fut vraiment pour moi le seul éclairage intéressant dans toute cette histoire : constater à quel point le système judiciaire japonais était vérolé (et je ne dis pas que le nôtre est mieux, je n’en sais rien).

Cependant en dehors de cette relation, je n’ai pas grand-chose à retenir de ce tome que j’ai trouvé au final assez pauvre et vide en nouveauté. J’ai même eu une énorme frustration à l’annonce de la dernière page qui se termine sur un rebondissement (certes attendu) dont on aurait aimé voir la suite et qui coupe ainsi brutalement l’intrigue quant au devenir de Yûki. Je m’attendais au moins à avoir une postface, quelques mots pour expliquer tout ça, rien du tout. Je termine donc la série sur une note fort amère, avec l’impression que seul le nom d’Ito a permis à ce titre abscons et mal goupillé d’atterrir chez nous alors que tant d’autres, parce que ce n’est pas un homme connu derrière, ne sont pas prêts d’arriver T.T

Beaucoup de questionnements en moi à la fin de cette série qui n’est probablement arrivée chez nous que parce que Junji Ito l’avait dessinée. Quelle est la pertinence de nous offrir une série à l’intrigue aussi obscure pour nous, à la forme aussi maladroite et au dénouement qui prend le lecteur pour un pigeon ? Pourquoi ne pas laisser leur chance à des titres plus qualitatifs, certes sans grand nom derrière, mais avec de réelles qualités. J’en ai marre qu’on publie tout et n’importe quoi sous prétexte qu’un nom est vendeur. C’est le titre de trop pour moi. Et pourtant, j’ai aimé le jeu diplomatique au début, je me suis accrochée à cette histoire contemporaine très nippono-japonaise, mais j’ai vraiment le sentiment qu’on s’est moquée de moi, et quitte à prendre des risques, car il n’a pas dû se vendre beaucoup, j’aurais largement préféré l’un des nombreux titres d’autrices reconnues qu’on ne publie pas « parce que c’est risqué de publier un shojo/josei »… C’était mon petit coup de gueule !

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