Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Home Far Away de Teki Yatsuda

Titre : Home Far Away

Auteur : Teki Yatsuda

Éditeur vf : IDP – Boys Love (Hana Collection)

Année de parution vf :  2023

Nombre de pages : 280

Résumé : Dans les années 1990 aux États-Unis, le jeune Alain est en profonde dépression à cause de ses parents surprotecteurs. C’est alors qu’il rencontre Hayden, un voyageur itinérant dont il tombe éperdument amoureux. Pour rester à ses côtés, Alain décide de quitter la maison de ses parents, mais ce choix revient à faire de Hayden son kidnappeur aux yeux de la police. Pourtant, Hayden est prêt à tout pour Alain et l’aide à se libérer de ses démons. Même si le chemin qu’ils empruntent n’est tracé que par la fuite. Pour eux, ils représentent le chemin du retour vers « un monde qui n’appartient qu’à eux ».

Mon avis :

Avec sa couverture aux tonalités et allures très américaine, Teki Tatsuda fait une très belle première incursion dans l’univers du Boys Love grâce à son Home far away, un road trip aux allures de thérapie.

 C’est le trait assez mature de l’autrice en couverture qui m’a de suite attirée. Je me suis dit que j’allais lire une histoire qui serait différente des autres. Je n’avais pas tort car celle-ci s’inscrit dans une ligne assez âpre et sombre du Boys Love, rappelant en cela Keiko Ichiguchi (America, 1945, Les cerisiers fleurissent malgré tout…), même si celle-ci n’a jamais écrit de BL. Ici, pas de belle bluette adolescente, non, place à la rencontre entre un jeune homme de 17 ans malade dont les parents se sont réfugiés dans une foi extrême et un jeune adulte dont la mère est morte d’une overdose. 

J’ai de suite apprécié le côté très sombre de la psychologie des personnages et surtout leur lent rapprochement qui va les pousser à travers l’un chez l’autre la lumière qu’il manque dans leur vie. Alain, ce jeune homme presque adulte, est déprimé par une vie sans saveur auprès de parents qui ne lui témoignent pas d’affection et se réfugient dans la foi à la place, se comportant à la fois avec distance et de manière étouffante avec lui, paradoxalement. Hayden, lui, passe d’une ville à l’autre, d’un état à l’autre, sans s’attacher à rien et sous ses dehors solaires, c’est quelqu’un de très seul et mal dans sa peau suite à l’enfance pourrie qu’il a vécue avec sa mère toxico. Mais le destin les met sur la route l’un de l’autre.

Et justement, comme une version moderne de Thelma et Louise, ils partent sur les routes pour tenter de soigner leur mal être. On découvre peu à peu ce qui ronge chacun et c’est sombre. Pour autant, la profondeur de la relation qu’ils nouent et des sentiments qu’ils éprouvent fait naître un espoir bref et éphémère mais ô combien brillant. Ces garçons nous font de la peine et on a envie de les soutenir et les aider dans leur démarche, mais la dépression n’est jamais bien loin. C’est donc une lecture assez particulière qui oscille sans cesse entre deux extrêmes et garde profondément enfouie en elle une grande mélancolie. 

J’ai eu du mal avec le côté très dramatique de l’oeuvre où on plonge toujours plus loin dans l’horreur. Entre le passé familial d’Hayden, le traumatisme d’Alain, sa maladie, la réaction de ses parents, ce qu’ils vivent et font pour survivre au cours de leur voyage sans retour, c’est quand même assez pesant. J’ai eu beau trouver un certain apaisement quand ils sont tombés dans les bras l’un de l’autre et être touchée par leurs sentiments, leur profondeur et leur richesse, ainsi que le bonheur qu’ils éprouvent ensemble, ce ne fut pas suffisant pour sortir de ce marasme ambiant.

Je reconnais cependant un belle richesse chez l’autrice pour rendre ces années 90 aux États-Unis, que ce soit par ses portraits de villes et de routes qu’ils empruntent, par les tenues, les attitudes et même les discours. J’avais l’impression d’être dans un Hartley coeur à vif réécrit. Son dessin avait aussi ce je ne sais quoi qui faisait dire que ça se passait dans un pays occident et non oriental, comme dans un vieux polar ou film noir de ces années-là avec des jeunes premiers à la Brad Pitt. Mais surtout, j’ai trouvé très intéressant qu’on parle d’un certain problème récurrent dans l’Eglise ainsi que des problèmes d’une foi sans borne dans laquelle on trouve refuge quand la science nous fait défaut ou qu’on la rejette. C’était puissant et fort intéressant.

Lecture riche et complexe, Home Far Away est un premier texte ambitieux qui pose de solides bases pour une future carrière de mangaka. J’espère que l’autrice continuera d’explorer les tréfonds de l’âme humain dans toutes ses nuances comme elle l’a fait ici et qu’elle nous parlera encore de sujets de société porteurs et émouvants. Ici, ce fut dur, ce fut âpre, ce fut sans concession, et j’ai aimé cette audace mélancolique !

> N’hésitez pas à lire aussi l’avis de : Vous ?

Ce diaporama nécessite JavaScript.

6 commentaires sur “Home Far Away de Teki Yatsuda

  1. Si le côté dramatique me fait un peu peur, j’apprécie les road trip et les rencontres qui permettent à chacun de trouver un peu de lumière. Quant à cette question de la foi sans borne, elle m’interesse beaucoup… Et puis, j’avoue que tu as titillé ma curiosité avec « un Hartley coeur à vif réécrit ».

    J’aime

    1. C’est toujours un plaisir. C’est une belle écriture, un peu trop âpre pour moi, mais c’est mon côté sensible… En tout cas, il y a une véritable intention et ça me donne envie de suivre l’autrice.
      J’espère que tu auras l’occasion de le découvrir !

      Aimé par 1 personne

      1. Merci j’espère aussi je suis toujours un peu frileux avec les BL je n’ose pas tenter sans lire des avis positif ahah.
        C’est toujours agréable de découvrir des artistes avec une véritable intention au travers de leur oeuvre.

        Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire