Livres - Science-Fiction

Jour zéro de C. Robert Cargill

Titre : Jour zéro

Auteur : C. Robert Cargill

Traduction : Florence Dolici

Éditeur vf : Albin Michel Imaginaire

Année de parution vf : 2023

Nombre de pages vf : 277

Histoire : Hopi est un tigre en peluche anthropomorphisé, un robot-nounou comme il en existe tant d’autres. Il n’en avait pas vraiment conscience avant de découvrir une boîte rangée dans le grenier. Celle dans laquelle il est arrivé lorsqu’il a été acheté des années auparavant, celle dans laquelle il sera jeté une fois que l’enfant dont il s’occupe, Ezra Reinhart, huit ans, n’aura plus besoin de nounou. Tandis que Hopi réfléchit à son avenir soudain incertain, les robots commencent à se révolter, bien décidés à éradiquer l’Humanité qui les tient en esclavage. Pour les parents d’Ezra, qui se croient à l’abri dans leur petite communauté fermée, cette rébellion n’est qu’un spectacle de plus à la télé. Pour Hopi, elle le met face à la plus difficile des alternatives : rejoindre le camp des robots et se battre pour sa propre liberté… ou escorter Ezra en lieu sûr, à travers le paysage infernal d’un monde en guerre.
Mon avis :

J’ai beau lire de la SF depuis un bout de temps, j’en ai rarement lu avec des héros comme héros et protagonistes principaux. La promesse d’un récit mettant ceux-ci à l’honneur le jour même de leur prise de pouvoir dans un monde futuriste a eu de quoi attirer mon attention et la carrière de C. Robert Cargill comme scénariste de cinéma a fait le reste.

Avant toute chose, il est bon de savoir un peu l’historique de ce roman. L’auteur a publié chez nous, en 2020, un premier roman Un Océan de rouille qui est le récit quinze ans après l’assassinat du dernier humain, de ces Intelligence-Mondes et de leurs armées de facettes qui se livrent un combat sans merci pour la domination totale de la planète. Je ne l’ai malheureusement pas lu, mais c’est désormais au programme, et Jour Zéro en est la préquelle, racontant ce qui s’est passé le jour du basculement.

Je n’ai pas lu beaucoup de récit avec des robots narrateurs, comme je le disais en introduction, en revanche j’ai lu et vu un certain nombre d’oeuvres se déroulant dans un univers post-apocalyptique / post-révolution comme c’est le cas ici et j’attendais une certaine originalité de la part de l’auteur, qui ne fut malheureusement pas au rendez-vous. Bien que très bien écrit, addictif et prenant, le récit est également assez simple et prévisible, l’empêchant de vraiment se dénoter des autres, mais lui conférant aussi une dimension rassurante et presque doudou.

Le choix de C. Robert Cargill de prendre Hopi, un robot – nounou, comme narrateur donne de suite la couleur de l’histoire. Certes nous sommes dans un moment d’une grande violence où les robots qui en ont assez de l’esclavagisme dans lequel ils vivent vont prendre le pouvoir, mais tout ne va pas être que violence et de belles réflexions sur la cohabitation humains-robots et le libre arbitre des robots vont également être développées. J’ai beaucoup aimé ce héros, atypique, qui n’a pas été parfois sans me rappeler celui de la saga de novellas robotiques de Becky Chambers : Histoires de moine et de robot. Hopi est une nounou dans l’âme et renversement des valeurs ou pas, lui, il reste attaché à son petit maître. Un duo qui va nous offrir de très beaux moments et une belle quête, teintant le récit de survie de l’histoire d’une aura bienveillante.

Cependant, c’est clairement avec les dimensions philosophiques et sociétales de l’histoire que j’ai pris le plus de plaisir même si celles-ci sont assez simples, rappelant dans ses mécanismes le célébrissime Planète des singes de Pierre Boulle avec des robots à la place des singes. Mais comme je lisais le roman pour découvrir pourquoi et comment cela avait basculé, cela m’a plu de découvrir le monde d’avant, notamment à travers la famille d’Hopi, mais également ensuite à travers les impressions des autres robots qu’il croise, avec ses parallèles avec l’esclavagisme d’antan. L’auteur rend très bien la diversité complexe des relations humains-robots dans cet univers, n’en faisant rien de linéaire et manichéen. On comprend qu’une frange des robots se soient révoltés en brisant leurs chaînes. On comprend qu’une autre ait eu plus de scrupules et ne soit pas pour ce déchaînement de violence que cela occasionne. Les interrogations sur la part entre le libre-arbitre et la programmation, notamment, sont fascinantes dans leur expression et leur développement.

D’ailleurs, même si je ne suis pas fan de cela, j’ai trouvé que le caractère de scénariste de l’auteur se retrouvait parfaitement dans sa façon de séquencer l’histoire et notamment de nous proposer dans la seconde partie une histoire de survie haletante. Pour les amateurs du genre, tout y est et la tension est palpable, de même que les craintes pour la vie de chacun. C’est tendu, percutant, violent mais aussi émouvant. Comme dans la série The Last of us, on suit notre duo adulte (robot)-enfant dans des décors où tout va mal et où ils doivent faire très attention à leur vie. Comme dans la série, ce binôme a une quête : celle d’un endroit sûr et ça fonctionne très bien. On se sent presque devant notre petit écran en les suivant ce qui est fort agréable et immersif.

Le jour zéro a donc très bien tenu ses promesses de divertissement brûlant où la crainte d’une révolte des robots est palpable. Je regrette un peu qu’on ait passé aussi vite sur ma partie préférée (les raisons de la révolte des robots et ce moment charnière), mais je reconnais que si on est fan, le récit de survie est particulièrement bien écrit, notamment grâce à un duo des plus attachants. C’est juste que ce n’est pas un de mes motifs préférés en SF… Il ne me reste plus qu’une chose à faire désormais, lire son suite : Océan de rouille, en espérant retrouver des robots qui me feront trembler.

(Merci à Albin Michel Imaginaire pour m’avoir envie de lire plus de titres avec des robots-narrateurs)

-> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : L’épaule d’Orion, Maki, Le nocher des livres, Yvan, Vous ?

 

6 commentaires sur “Jour zéro de C. Robert Cargill

  1. J’ai fini par lire « un océan de rouille »… et c’est vraiment génial !
    C’est palpitant. Les allées et retour entre le présent et le passé sont vraiment passionnantes. C’est bien mené, aucunement perturbant, bien au contraire.
    La question des robots me passionne depuis l’adolescence et les animés japonais principalement le cyber punk avec par exemple Armitage (mais il y en a tellement d’autres).
    Quand commencent-ils à penser par eux-même ? Pourquoi créons-nous des esclaves ? Pourquoi ne voulons-nous pas leur accorder une existence propre ?
    Mais là, ce qui est intéressant dans « un océan de rouille » est que nous sommes après la fin de la guerre, après l’extermination de l’humanité par les robots. Que se passent-ils ? Qu’adviennent-ils ? Leur quête de sens prend-elle fin ?
    Vraiment passionnant ! J’ai donc hâte de lire « Jour zéro » !

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    1. Ah tu ravives mon envie de le lire car moi aussi ce sont des questions qui me passionnent mais qui parfois peinent à être renouvelées. Ton enthousiasme me fait penser que c’est réussi ici.
      PS/ j’ai aussi beaucoup aimé Armitage que j’ai revu il y a quelques mois 😉

      Aimé par 1 personne

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