Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Stand Up! d’Aiji Yamakawa

Titre : Stand Up!

Auteur : Aiji Yamakawa

Éditeur vf : Akata (Feel good)

Année de parution vf : 2023-2024

Nombre de tomes vf : 4 (série terminée)

Résumé : Utako Furuya vient d’entrer au lycée. D’un caractère réservé, elle complexe à cause de son mètre soixante-douze qui la fait sortir du lot par rapport aux autres adolescentes de son âge. Elle a pour voisin de classe Naoyuki Harada, un garçon très sympathique qui attise sa curiosité. Contrairement à elle, il est franc et direct. Un jour, ce dernier lui dit sans détour qu’il souhaiterait apprendre à la connaître. Tout d’abord décontenancée par la spontanéité de ce garçon, elle va finir par accepter de passer du temps avec lui… Et si c’était le début d’une belle histoire d’amour ?

Mon avis :

Tome 1

Grande amatrice de shojo lycéens à mes heures perdues, j’en ai lu tout plein, donc forcément vu mon grand âge, une petite lassitude se fait sentir parfois et j’ai besoin de titres avec un petit quelque chose qui m’aide à les remarquer. C’est le cas de Stand Up!, que j’avais repéré dès sa sortie japonaise, grâce à son héroïne plus grande que les autres, ce qui tranche avec ce modèle de la petite japonaise fragile qu’ils aiment bien souvent.

Aiji Yamakawa, Akata nous avait déjà fait le plaisir de la rencontrer lors d’un oneshot qui tournait autour du thème de l’amitié : Le secret de l’amitié où elle n’était en revanche là que pour les dessins, mais déjà il se dégageait quelque chose d’eux qui donnait envie. Je suis donc ravie de cette politique d’auteur que revendique Akata, ce qui est tout à son honneur, et qui nous permet ainsi de la retrouver dans cette série courte, en 4 tomes, où elle exécute dessins comme scénario.

Sur le papier, Stand Up! est une romance lycéenne comme tant d’autres où l’on suit Utako, une héroïne gentille mais timide et un peu effacée, qui cherche à vivre de beaux jours au lycée et à s’habituer à son nouvel environnement, elle qui est à deux stations de train de chez elle. Son voisin de classe, Harada, va se montrer particulièrement sympa avec elle, sous ses airs de joyeux trublion qui attire la sympathie de tous. Et une jolie relation va ainsi peu à peu naître entre eux.

Ce qui distingue Stand Up!, c’est la particularité de l’héroïne, à savoir sa grande taille qui la fait sortir du lot et la complexe énormément, ainsi que ses oreilles « de singe » comme dit Harada. Nous avions déjà eu dans le shojo ce cas d’une héroïne assez grande, il s’agissait de Risa Koizumi dans Lovely Complex que l’on devait déjà à Akata qui travaillait avec Delcourt à l’époque. Ces premiers ont bien compris qu’il y avait ici un manque de représentativité qui ne demandait qu’à être comblé et le titre choisi est une petite pépite dans le genre.

En effet, le complexe de l’héroïne aurait pu être maladroitement mis en scène pour aboutir à quelque chose de caricatural et contre-productif comme ce fut le cas parfois au cinéma, mais ici c’est tout le contraire. L’autrice prend extrêmement bien soin de son héroïne et ne cherche pas à la cantonner à cette taille qui détonne. Elle en fait une vraie gentille, une fille bosseuse qui essaie d’avancer malgré ses complexes, qui parfois se laisse submerger, mais avance tout de même, notamment grâce à l’aide de ses amis. Ceux-ci sont mon petit coup de coeur ici. J’ai adoré l’ambiance lycéenne bonne enfant mise en scène sous forme d’élèves hyper copains, qui se chambrent, chahutent, s’amusent ensemble, mais se soutiennent. C’est hyper chaleureux et cela ravive bien des souvenirs chez moi. En plus, ils sont tous extrêmement gentils au fond même si certains sont parfois maladroit. Utako a ainsi une super amie en la personne de Maika et son voisin, Harada, est un modèle du genre, dans le style type solaire.

Du coup, même si elle est on ne peut plus classique, la romance passe très bien. On ne se retrouve pas dans la caricature de la fille trop grande avec le mec plus petit comme dans Lovely Complex, on a deux héros de même taille à peu près. Tout se passe de manière trop mignonne et gentille. Ils sont d’abord voisin de table, puis petit à petit ami, un rapprochement qui leur donne à chacun envie d’en savoir plus pour l’autre et cette attirance se concrétise naturellement. On est bien sûr dans le cliché de la romance japonaise très douce et fleur bleue où il ne se passe pas grand-chose pour le moment à part le fait de rentrer ensemble et se parler au téléphone, mais ça fait du bien à l’âme. J’aime suivre ces héros sans prise de tête, qui prennent leur temps, qui ne parlent pas de passion sans se connaître, qui n’en font pas des caisses et qui font leur âge, sans jouer aux petits-adultes. Je les trouve touchants en plus chacun dans leur maladroite adolescente.

Il faut dire aussi que la science du découpage d’Aiji Yamakawa avec son héroïne ancienne membre du club d’athlétisme fait souffler un vent de fraîcheur, comme si le souffle de sa course transperçait les pages. J’aime beaucoup son découpage typique inspiré d’autrices comme Ryu Ikuemi ou Ichigo Takano. J’aime énormément l’attention portée à la variation des cadrages, rendant la lecture tellement dynamique, transmettant parfaitement l’ambiance « lycée ». Le design des personnages est mignon, que ce soit les yeux de chat et le look loose d’Harada, ou encore la grâce maladroite d’Utako et ses yeux ronds comme des billes et bien sûr ses rougeurs se propageant à ses oreilles. C’est adorable et très frais pour les nostalgiques des années lycée.

C’est donc avec un vif plaisir que j’ai plongé dans cette nouvelle petite romance feel good positive mettant en scène une héroïne de grande taille dans un petit lycée tranquille où ça fleure bon l’adolescence. Les valeurs positives véhiculées par l’autrice font un bien fou et même si c’est très classique dans le fond, la forme séduit avec ce dessin assez personnel au découpage poussant à la nostalgie de ces années là où on croyait tout possible. Une très jolie surprise dans un milieu compétitif.

 > N’hésitez pas à lire aussi l’avis de : L’Apprenti Otaku, Vous ?

Tome 2

Quand on a besoin d’un moment doux et lumineux, la collection « Feel Good » d’Akata est parfaite pour cela. Stand Up qui en fait partie fut donc comme une évidence après plusieurs lectures un peu rudes. J’avais besoin de sa douceur, de son optimisme, de sa naïveté adolescente.

Pourtant l’oeuvre est fort simple. Nous sommes encore et toujours dans une romance adolescente où on vit les premières fois de nos héros à leurs côtés. L’un est LE garçon populaire de la classe, gentil et lumineux. L’autre est une fille banale, plus réservée, avec qui on n’a pas toujours été gentil ce qui lui a fait perdre confiance en soi. Mais le premier l’a remarquée et elle évolue doucement à son contact. C’est mignon tout plein.

Ce tome est donc l’occasion de suivre leur tout premier rendez-vous et comment vous dire que ce fut adorable de marcher à leur côté. Ce fut attendrissant de bout en bout, du moment où Furuya stressée par ce rdv avec Harada cherche une tenue, jusqu’à celui où il la raccompagne maladroitement chez elle, ses sentiments en bandoulière. Et entre les deux, il n’y a eu que des moments qui ont doucement mis des papillons dans leur ventre et le mien. J’ai trouvé ce premier rendez-vous dans un aquarium très doux. L’autrice nous montre avec bienveillance toutes les hésitations et les peurs de Furuya, liées à son physique, son caractère discret mais aussi aux méchancetés qu’on lui a dit autrefois. Mais elle nous montre aussi la façon simple et positive dont Harada, un garçon banal de son âge malgré le regard particulier qu’elle pose sur lui, y répond. C’est superbe !

L’autrice est vraiment très douée pour célébrer ce quotidien et mettre en valeur des moments banals grâce à son filtre de douceur et de bienveillance, mais aussi l’énergie qu’elle insuffle qui rappelle notre propre adolescence. On revit ce moment avec eux ! Alors oui, elle tombe dans quelques pièges : on sent venir pour le prochain tome les rivaux, ex-, qui vont venir compliquer la donne de cette relation naissance pourtant si bien partie. Je trouve ça dommage qu’on est sans cesse recours à cela pour dynamiser et relancer l’histoire dans les romances, mais bon. Je vais plutôt garder en tête ces beaux moments de vie chaleureux qu’elle nous a offerts ici comme quand Furuya se rend chez Harada et tombe sur ses copains qui discutent maladroitement avec elle. C’est ça le coeur de la série pour moi : les maladresses et les joies de l’adolescence, les rencontres et les amours, et ça me fait chaud au coeur !

Titre parfait pour passer un doux moment de détente en compagnie d’un petit couple qui fait ses premiers pas. C’est doux, c’est tendre, c’est mignon, c’est gentiment drôle. Ça fleure bon l’adolescence positive, la confiance en soi qu’on gagne en étant avec la bonne personne qui nous encourage et ainsi on repousse les ondes négatives. C’est parfait !

Tome 3

Que s’est-il passé dans ce tome ? L’autrice a-t-elle été malade ? A-t-elle dû interrompre sa série à un moment ? J’ai senti une rupture brutale qui m’a fortement déplu alors que ça démarrait si bien.

Tel un élastique qui craque, la série a implosé dans cet avant-dernier tome et ce sans prévenir. Après un début dans la lignée des tomes précédents, c’est-à-dire des plus doux et touchant avec ce côté éphémère mais important de l’adolescence, il y a d’un coup une rupture narrative forte qui s’en ressent jusque dans les planches qui se retrouve alors totalement ou quasiment vide de dessins avec également très peu de parole, et je ne pense pas que ce soit un effet de style. Mais aucune explication n’est fournie, ce qui rend la lecture des plus étrange et déstabilisante… J’ai besoin d’éclaircissement et je n’ai vu l’éditeur en fournir aucun. Etrange.

Pour en revenir à l’histoire, elle débute ici sur le passé d’Utako et cet amour de collège qui l’a tellement mise à mal, elle si fragile dans son estime de soi. Alors qu’attendre du fait qu’elle recroise par hasard ce garçon qui a changé physiquement mais lui lance toujours les mêmes piques ? Elle-même a changé, est-elle prête à aller de l’avant aussi avec son ancienne elle ? Etant sensible aux portraits adolescents, la sensibilité toute en retenue de l’autrice m’a beaucoup plu ici. C’était mignon de voir cette ancienne Utako tellement mal dans sa peau, en recherche d’amitié et d’acceptation, face à des moments difficiles où elle a dû travailler sur elle, ce par quoi on est tous passé. Cela met d’autant plus en lumière celle qu’elle est devenue et le courage qu’il lui a fallu pour arriver là. J’ai trouvé cela très beau.

L’autrice a vraiment un don pour capture finement ces portraits d’adolescents. Elle nous fait ressentir la bêtise de ce garçon mal à l’aise dans son corps qui se venge sur la fille qui cristallise son mal être. Elle nous amuse avec la fébrilité d’Harada face à ces premiers émois amoureux, ce qui le fait courir et courir partout, l’agitation étant son exutoire. Elle capture aussi subrepticement chacun de leurs camarades de classe, leur donnant bien vie dans leurs dynamiques et leur recherche individuelle de soi à chacun. C’est simple mais c’est beau, c’est simple mais c’est pur, et ce jusque dans le trait.

Et puis, alors qu’on pensait être parti sur ce thème, il y a une rupture, brutale, qui nous emmène dans une autre direction avec bien plus de maladresse, des pages vides, des mots un peu creux également et un manque de prise de pouvoir évident par rapport à avant. J’ai été totalement déstabilisée par ce revirement soudain.

Je n’ai pas aimé que l’autrice change de braqué, oublie ce qu’elle avait précédemment travaillé, pour s’intéresser d’un coup à un personnage sorti quasiment de nulle part qui prend bien trop de place. Son sujet, la rupture scolaire, aurait pu être intéressant, mais c’est écrit sans l’inspiration des autres chapitres, trop calqué sur une espèce de cahier des charges, enlevant l’âme de la série. J’ai trouvé cela maladroit, trop évident, et surtout trop déconnecté du reste. J’ai été touchée par le personnage de Jun mais pas autant que cela aurait été le cas dans de bonnes circonstances. Là tout est fait précipitamment, à la va-vite, sans réflexion et ça se sent. On sent une autrice qui balance vite ces idées sur la page mais ne prend pas le temps de les modeler pour en faire une oeuvre, son oeuvre. C’est fort dommage.

Tome extrêmement bancal. J’ai aimé les réflexions et la finesse des débuts sur la perte puis le regain de confiance en soi. J’ai été déstabilisée et perdue avec la rupture brutale qui arrive en cours de route et fait perdre de son âme à la série. S’il y a eu un accident de parcours de l’autrice, il aurait été bon de le mentionner en postface, là en l’état des choses, j’y vois une grosse catastrophe fort maladroitement rattrapée et je me questionne. J’espère que le prochain et dernier tome saura redresser la barre sinon ce sera une amère déception T.T

Tome 4 – Fin

C’est malheureusement la déception et la douche froide annoncée. J’ai été très déçue au final par l’absence de développement de l’oeuvre, par sa manière de prendre la clé des champs au lieu d’affronter ses problèmes et par sa narration qui va au-delà de l’épuré pour nous offrir du vide. Comment cela a-t-il pu tourner ainsi ?

Je suis d’autant plus amère que j’avais beaucoup aimé les débuts et que je continue à trouver le découpage d’Aiji Yamakawa intéressant, ainsi que les quelques brèves idées qu’elle glisse par endroit. Mais j’ai eu l’impression d’être face à une autrice qui avait des soucis de santé et qui se perdait dans son oeuvre, voulant la finir vite et la bâclant. Je ne comprends pas comment une direction éditoriale a pu accepter cela…

L’histoire de base s’intéressait au couple Harada-Utako mais celui-ci est totalement abandonné en cours de route pour se tourner vers le cas d’un de leur camarade qui a redoublé et ne vient plus en cours : Inui. Ok, pourquoi pas. Le problème, c’est que l’autrice n’en fait rien. Elle n’exploite pas pleinement l’histoire d’Inui et de son amie du collège qui a drastiquement changé au lycée pour devenir la caricature de celle qu’on traite trop facilement de « salope ». Il y avait ici de quoi faire une histoire à part entière avec le thème très intéressant du rapport à l’apparence, l’identité, la sexualité, à l’entrée au lycée, avec ce besoin de se faire accepter à tout prix et justement le prix à payer. Il y avait une analyse à faire sur l’image qu’on colle aux filles et non aux garçons qui papillonnent, etc. Mais rien, rien n’est fait et c’est terriblement dommage…

De la même façon, on laisse totalement en plan le couple principal et leurs amis. L’autrice suggère ici aussi des thématiques intéressantes par exemple sur les complexes physiques, Utako se trouvant trop grande, son amie Maika trop petite, mais elle n’en fait rien. Elle introduit ici un nouveau garçon, peut-être pour prétexter de la jalousie chez Harada, mais à part une petite phrase tardive pour dire qu’il est possessif (bonjour la confiance !), il n’y a rien. Idem avec Utako qui elle jalouse l’ex (si on peut dire ça d’une amie avec qui on est sorti 2 jours…) d’Harada mais ça ne débouche sur rien tellement Utako reste effacée, soumise et empêchée de parler. Bref, c’est fade et surtout très malaisant.

Il y a vraiment une écriture des personnages qui tombe totalement à côté après des débuts prometteurs et une narration, un découpage qui se veulent moderne, éthéré et poétique. Je pensais vraiment que comme chez ses aînées Ryo Ikuemi ou Mari Okazaki, dont elle reprend pas mal le style, il y allait y avoir une analyse ou un développement psychologique fin des personnages, mais rien. C’est fade, c’est daté, ce n’est pas ce que j’ai envie de conseiller, avec cette toute puissance du garçon électron libre et cette fille qui se soumet sans cesse à toutes ses envies sans oser rien dire. Je suis un peu dégoûtée et triste T.T

Et que dire des planches. Il y en a un nombre incalculable qui sont vides à chaque fin de chapitre. Est-ce normal ? Chaque début est dessiné, bien narré, bien mis en scène, intéressant même de ce point de vu là. Puis patatrac quand on arrive dans le dernier tiers ça s’étiole à chaque fois. Est-ce la pression de la publication trop rapide exigée auprès de l’autrice qui l’a empêchée de rendre quelque chose ? Car si c’est un effet de style, lui, il tombe totalement à côté. Épurer de temps en temps quand cela apporte quelque chose à l’histoire oui. Le faire de manière répétitive à des moments non nécessaires non.

Après des débuts très prometteurs, je finis plutôt amèrement la lecture de cette saga, qui est assurément l’une de mes plus grandes déceptions chez Akata qui a en général des goûts proches des miens. C’est un récit bien trop maladroit, inabouti et à la mise en scène ratée dont j’attendais tellement plus au vu des promesses sensibles faites dans un premier temps. Le résultat me dérange profondément, notamment dans l’écriture de l’héroïne, clichée de la fille soumise qui après avoir essayé de s’émanciper, retombe sans raison dans ses travers de « je me tais et je suis les autres et notamment le garçon que j’aime« . Pas vraiment ce que j’ai envie de lire…

2 commentaires sur “Stand Up! d’Aiji Yamakawa

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