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Back In Time #4: Planètes de Makoto Yukimura

Voici un nouveau numéro de Back in Time, un rendez-vous où je parle d’un ancien manga que je ne vous ai pas encore présenté ici et que j’ai déjà lu il y a quelques années. Je vous en présenterai le tome 1 à chaque fois et pas forcément plus. Il peut s’agir aussi bien d’un coup de coeur à l’époque que d’une lecture mitigée à qui j’ai envie de redonner une chance. Back In Time est donc l’occasion de remettre en avant des vieux titres parfois oubliés. J’espère que ça vous plaira ^-^

Pour ce quatrième rendez-vous, je vous propose de revenir sur Planètes de Makoto Yukimura, le titre qui m’a fait découvrir le mangaka bien avant le cultissime Vinland Saga !

Titre : Planètes

Auteur : Makoto Yukimura

Éditeur vf : Panini Manga

Année de parution vf : 2004-2005

Nombre de tomes : 4 (série terminée)

Histoire : 21ème siècle les hommes ont conquis l’espace. La lune a été colonisée pour ses ressources minières et se sera bientôt le tour de Jupiter. Mais cette colonisation à un inconvénient, débris et détritus divers ont envahis l’espace et le polluent. D’où l’apparition d’un nouveau métier celui d’éboueur de l’espace. L’équipage du « Toy box » vaque à cette peu reluisante besogne. A son bord : Fi (américaine), Hachi (japonais) et Yuri (russe)…

Mon avis :

Tome 1

En bonne fan de science-fiction et de manga, j’avais acheté ce tome à sa sortie en 2004, mais à l’époque le côté un peu calme et contemplatif de l’histoire ne m’avait pas emballée et je m’étais arrêtée là. Aujourd’hui, 15 ans plus tard, mes goûts ont changé et j’ai eu un vrai coup de coeur pour le premier manga de Makoto Yukimura.

Planètes relate l’histoire d’une équipe de nettoyeurs de débris spatiaux qui ont tous des aspirations différentes. A travers eux, on va vivre des aventures dans l’espace mais surtout on va passer par bien des émotions. Vous avez peut-être l’impression de voir ici un précurseur du film Gravity, vous n’avez pas tout à fait tort, mais le titre se rapproche aussi beaucoup de La Cité Saturne d’Hisae Iwaoka que j’avais découvert il y a quelques années.

C’est en effet également un titre lent, un peu contemplatif avec de nombreuses tranches de vie. Ainsi, l’histoire s’ouvre sur un chapitre magistral relatant comment un astronaute a perdu sa femme lors d’un accident. C’est poignant et percutant et ça met de suite dans l’ambiance. On sait que ce titre nous tirera quelques larmes. Les drames humains vécus par les personnages sont forts et ils ne font que renforcer leur amour aussi bien pour la Terre que pour les étoiles. Plus qu’un drame, ce titre est une ode à la vie et à l’amour. C’est très émouvant.

Les trois personnages que l’on suit sont très différents. Il y a le mature et taciturne Yuri qui tente de refaire sa vie et de se retrouver un but. Puis vient la chef Fi, qui a une très forte personnalité mais qui vieille sur eux comme une mère. Et enfin, le petit jeune, Hachimaki qui est là un peu en dilettante au début mais qui va peu à peu vivre des choses qui vont l’obliger à mûrir et s’affirmer.

Avec eux, on découvre la vie dans l’espace, sur la Lune, loin de la Terre. L’auteur en profite pour nous parler écologie et science, faisant briller nos yeux et peinant nos coeurs sensibles. La critique de la surconsommation et de l’abus des richesses terrestres n’est jamais bien loin, tout comme celle de la pollution de l’espace et du manque de responsabilisation des habitants et des gouvernements. Le message est fort et clairement intelligible. J’aime l’engagement dont fait preuve l’auteur. Il permet de sentir tout son amour pour notre planète et sa passion pour ce qu’il y a au-delà.

J’ai donc beaucoup aimé l’ambiance douce, poétique et philosophique même parfois de ce titre. L’auteur n’en oublie pas non plus de faire de l’humour. La séquence sur l’envie irrépressible de fumer de Fi est un passage d’anthologie tellement c’est burlesque. Les dessins du mangaka se prêtent aussi bien à cela, il sait faire des têtes hilarantes à ses personnages avec ces yeux sortants de leurs orbites (qu’on retrouvera plus tard dans Vinland Saga aussi). Il sait passer habilement d’un ton à l’autre en fonction des situations, nous faisant tantôt rire, tantôt sourire, tantôt pleurer. Toutefois, les dessins sont un peu maladroits par moment, normal pour une première oeuvre, mais on sent peu à peu qu’il progresse pour s’approcher du superbe niveau qu’il a désormais dans Vinland Saga. Mon seul reproche de ce côté-là, c’est le changement de couleur de cheveux du héros en plein milieu du tome, c’est assez perturbant et je n’en vois pas l’utilité ou du moins ça aurait pu être corrigé pour ne pas se voir.

Planètes est donc pour moi un coup de coeur surprise lors de cette relecture. J’aime énormément l’ambiance poétique, douce, triste et un brin amère qui s’en dégage. Je suis fan de la peinture de l’espace qui est faite, ainsi que de celle de ses ramasseurs de débris auxquels je me suis si vite attachée. C’est une histoire simple pour le moment mais qui se densifie au fil des chapitres, des rencontres et des événements qui croisent le chemin de la vie des héros. Une très belle lecture que je poursuivrai.

Tome 2

Ce tome 2 continue à creuser l’univers mis en place par Makoto Yukimura, entre espace, politique et intime. C’est moins puissant émotionnellement que les débuts mais tout aussi intéressant parce qu’il prend vraiment le temps de développer son héros et ceux qui l’entourent.

Hachimaki s’est mis en tête de participer à l’expédition qui doit aller sur Jupiter. Il s’entraîne donc pour pouvoir être sélectionné parmi les membres de l’équipage. Mais en faisant cela, il commence à oublier ce que c’est d’être humain et il faut une rencontre importante pour lui pour le remettre dans le droit chemin.

J’ai beaucoup aimé l’évolution de l’histoire ici. C’est très intéressant de suivre la mise en route de cette expédition de différents points de vue. On découvre l’un des scientifiques derrière qui est prêt à tous les sacrifices pour y parvenir. Il y a également le père d’Hachimaki qu’on veut embarquer dans le projet mais qui fuit. Hachimaki bien sûr qui veut en être et fait des efforts monstres pour ça, physiques et autres. Puis les activistes qui s’y opposent non seulement après les morts qu’il y a eu lors des tests mais aussi parce qu’ils voient bien quel sera l’avenir du projet après les ravages qu’il y a déjà eu sur Terre. Cela donne un mélange très réaliste avec des réflexions intéressantes sur notre société et notre désir d’aller dans l’espace.

L’ensemble est vraiment très prenant. Il n’y a pas de temps morts. Les moments plus scientifiques, se marient bien avec ceux plus politiques où plus intimes où l’on parle des sentiments et du quotidien des personnages. On retrouve d’ailleurs les collègues d’Hachimaki du premier tome mais on fait aussi des rencontres. Makoto Yukimura montre encore à quel point il maîtrise bien sa narration, alternant moments drôles et sérieux avec moments plein d’émotions. Ses dessins évoluent aussi au fils des chapitres, se faisant plus fins, précis et réguliers. Après, je me demande un peu dans quel voyage on s’embarque, je n’arrive pas trop à prédire, mais c’est aussi ce qu’il y a de bon ici.

Tome 3

Le virage entrepris chez Hachimaki se concrétise dans ce nouveau tome qui peut être un déstabilisant pour le lecteur. En effet, l’ensemble est assez calme, hors du temps, je dirais même en apesanteur si je voulais faire un jeu de mots, tandis que notre héros prend le temps de réfléchir sur lui-même. Cela donne quelque chose de très philosophique, donc un peu mou pour le lecteur en recherche de sensations fortes ou juste d’action. Non, ce tome est avant tout introspectif et contemplatif avec de belles réflexion sur la vie, la famille ou l’amour. J’ai aimé mais j’ai parfois trouvé ça un peu longuet malgré les tentatives de l’auteur de dynamiser cela en introduisant à la fois les membres de la future mission d’Hachimaki, et la famille de Tanabé.

Au final, la lecture passe vite. Il se passe peu de choses. On suit surtout l’évolution d’Hachimaki qui passe d’apathique au début à homme déterminé et apaisé, qui a trouvé sa voie à la fin. J’ai aimé le rôle qu’a joué sa nouvelle coéquipière, Sally. J’ai aimé la dynamique pleine de camaraderie de leur équipe. J’ai apprécié aussi de découvrir le passé de Tanabé, qui présente un autre modèle familial tout aussi réussi que ceux déjà rencontrés. Maintenant qu’Hachi a tout réglé, la mission va pouvoir se mettre en branle dans le dernier tome.

Tome 4

Déjà le dernier tome de cette belle série sur l’espace et l’humanité. Ce dernier opus est long, très long mais la lecture passe à toute vitesse mais l’épaisseur des 330 pages qui le composent. Je m’attendais à un récit axé sur le voyage d’Hachimaki mais ce fut avant tout un récit axé sur l’humanité et son devenir qu’on nous livre ici.

Pour cela, on revient d’abord longuement sur les anciens camarades ramasseurs de débris d’Hachimaki. On suit leur quotidien, les rencontres qu’ils font, comment ils vivent depuis qu’Hachi est parti, et surtout le devenir de leur métier au milieu de ce monde qui se livre encore et toujours à la guerre au détriment de ses habitants et de l’espace (=la nature) qui n’ont rien demandé. C’est un message un peu triste et fataliste qu’on nous délivre. Et pourtant, on a envie de croire que ce ne sera pas toujours comme ça. Le personnage de Fee est vraiment porteur d’espoir. Elle montre que même adulte, il ne faut pas se départir de la fougue de sa jeunesse et de ses rêves, qu’il faut se battre pour eux encore et toujours. J’ai beaucoup aimé qu’on s’attarde sur ce personnage et sa famille, qui montre que la vie n’est qu’un éternel recommencement mais qu’il ne faut pas perdre espoir pour autant. Oui, les politiques sont souvent pourris, mais c’est à nous, le peuple, d’agir en contre pouvoir. C’est un joli message qui est délivré ici par Makoto Yukimura avec ce personnage fort charismatique.

Ainsi, au final, le voyage d’Hachi n’est pas le point d’orgue de ce tome. On ne le retrouve que tardivement et encore sur un mode très léger pour nous montrer le quotidien de sa mission, mais aussi pour alléger le sérieux qu’on aurait pu lui attribuer. J’ai beaucoup aimé cela. Il faut parfois savoir ne pas trop en faire et le mangaka a parfaitement réussi ici. Oui, la mission est une première mais ses membres sont des gens lambda si on peut dire. C’est pourquoi il faut savoir montrer que les petits riens de la vie de tous les jours, tels que la famille, l’amour, la bonne humeur, l’humour, sont aussi importants pour eux que pour nous, et qu’aucun progrès ne doit prendre le pas sur cela.

J’ai vraiment beaucoup aimé le ton général de cette oeuvre vraiment humaniste. L’auteur sait parler de sujets importants sans trop en faire et pourtant son message passe. La composition des pages, le rythme donné à l’histoire, les références (ici la chanson de Louis Armstrong « What a wonderful world« ) sont parfaits et me font rêver ! Le mangaka dans cette oeuvre courte montre déjà tout son talent et une partie des thèmes qu’il reprendra dans la seconde partie de Vinland Saga, sa série fleuve en cours. C’est un très beau voyage.

Ma note : 16 / 20

 

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