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Le Gambit du Renard / Le Stratagème du corbeau de Yoon Ha Lee

Titre : Le Gambit du Renard / Le Stratagème du corbeau

Auteur : Yoon Ha Lee

Editeur vf : Denoël (grand format) / Folio SF (poche)

Année de parution vf : Depuis 2018 (grand format) / Depuis 2020 (poche)

Nombre de tomes vf : 2 / 3 (en cours)

Histoire : Le capitaine Kel Cheris tombe en disgrâce après avoir utilisé des armes non conventionnelles lors de sa dernière affectation.
À sa grande surprise, elle est promue général à titre temporaire par le commandement Kel qui lui confie une mission d’une importance vitale pour l’Hexarcat, le système des six factions : mater une hérésie en cours dans la forteresse des Aiguilles Diffuses. Seulement cette promotion est assortie d’une terrible condition : ancrer en elle l’esprit du général Shuos Jedao, ancien traître et fou sanguinaire mort depuis des siècles, mais stratège de génie qui n’a jamais perdu une bataille.
Que cachent les six factions à Kel Cheris? Que sait exactement Jedao et, surtout, qui fut-il réellement ?

Mon avis :

Tome 1 : Le Gambit du Renard

C’est sa superbe couverture, son auteur d’origine coréenne et les prix qu’il a remportés ou presque (vainqueur du prix Locus du premier roman finaliste des prestigieux prix Nebula et Hugo), qui m’ont donné envie de lire ce space opera militaire d’abord paru chez Denoël avant d’arriver dans la collection poche Folio SF.

J’étais assez impatiente de découvrir comment le capitaine Kel Cheris tombée en disgrâce après avoir utilisé des armes non conventionnelles allait être promue générale à titre temporaire pour une mission d’une importance vitale : mater une hérésie en cours, avec pour terrible condition d’ancrer en elle l’esprit du général Shuos Jedao, ancien traître et fou sanguinaire mort depuis des siècles. Le titre promettait de beaux mystères, de la politique, des complots et des batailles spatiales, du moins le croyais-je.

Vous connaissez ce sentiment qu’on ressent quand quelqu’un cherche à vous expliquer à l’oral un jeu que vous ne connaissez pas et que vous finissez par lui dire : « Attends, je comprendrai mieux en jouant. » ? Eh bien, je l’ai ressenti pendant toute ma lecture et ce ne fut pas très agréable.

Avec Le Gambit du Renard, je m’attendais à découvrir un univers de SF qui me ferait voyager et me questionner, je l’ai eu. Mais ce à quoi je ne m’attendais pas, c’est à n’y rien comprendre du début à la fin ou presqueL’auteur nous plonge dans un univers dont lui a les clés, mais pas nous, et à aucun moment il ne nous les donne. On est donc noyés sous des termes et des concepts qu’on ne connait pas, ne comprend pas et qu’on ne nous explique pas. C’est très frustrant parce que ça donne le sentiment d’être sciemment écarté d’un jeu qui pourtant pourrait être très sympa… Il y a également beaucoup (trop ?) de personnages, souvent déshumanisés derrière le nom de leur faction. Je n’en pouvais plus de voir des Kel-ceci, Kel-cela ! Ce fut donc très dur voire impossible de s’attacher à quiconque en dehors du duo phare du titre.

Je regrette vraiment ce blocage parce que si on débroussaille tout ça, derrière il y a de la bonne SF version space opera militaire mais sans trop de batailles spatiales plutôt avec des batailles intérieures, ce que j’ai peu eu l’occasion de lire avant. Il y a également beaucoup d’intrigues et complots en sous-main, de la stratégie, des batailles (mais de trop loin). On s’interroge énormément sur le monde dans lequel on est plongé : lHexarcat, un système reposant sur six factions reposant sur leur puissance militaire qui semble un brin totalitaire puisque pour eux la démocratie est une hérésie. Le titre développe aussi des thèmes intéressants : la démocratie, la liberté, la liberté d’opinion, avoir sa personnalité ou appartenir à un groupe, l’unité vs le groupe, la question de la personnalité/l’identité individuelle, l’immortalité… C’est très riche et les réponses apportées font réfléchir.

Le gros point fort du titre, c’est clairement la relation Cheris-Jedao imposée par l’Hexarcat mais qui se développe dans une direction à laquelle il ne s’attendait pas. J’aime beaucoup leurs « discussions » qui amènent Cheris à se demander ce que les six factions lui cachent, ce que sait exactement Jedao et pourquoi il en a été réduit à ça. Ce dernier est LE personnage le plus charismatique de l’histoire. Il est juste fascinant et l’auteur le met très bien en scène en ne disséminant des indices qu’au compte goutte, dévoilant petit à petit sa grande ruse et sa grande intelligence. C’est assez fascinant. Le retournement dernier quart est en ce sens passionnant quand on découvre qui il était. Ça j’ai adoré ! Mais ça fait bien chiche au milieu de tout ce que je n’ai pas compris…

Le Gambit du Renard fut donc une lecture vraiment étrange, où j’ai eu l’impression de me retrouver au milieu d’un univers que je ne comprenais pas et qui parlait une langue étrangère pour moi. Cependant, j’ai beaucoup aimé les mystère qu’il refermait. Du coup, je suis partagée. Je n’ai pas envie de revivre un tel malaise, c’est dur de lire un récit sans presque rien comprendre. Mais je suis aussi curieuse de connaitre la suite du plan de Jedao et la réaction de l’Hexarcat dans les deux prochains tomes. Je n’ai donc pas encore pris ma décision…

Pour lire d’autres avis de blogueurs qui eux ont beaucoup aimé et qui permettent de mieux comprendre l’univers, allez visiter les sites de : Apophis, Lutin82, BlackWolf, Sophie, Lutin Rêveur

Tome 2 : Le stratagème du corbeau

Si vous vous rappelez, j’avais été pas mal déstabilisée par ma découverte de l’univers ou plutôt ma lecture du premier tome des aventures de Jedao et Cheris, et j’avais hésité à continuer, mais le charme des couverture de Chris Moore a encore agi et j’ai cédé. Malheureusement, c’est encore le même verdict ^^!

Je continue à trouver l’univers de ces aventures fascinants. J’aime beaucoup la façon dont l’auteur nous dépeint les méandres des affaires politiques de l’Hexercat et de ses dirigeants les Hexarques. Je suis fascinée par le mode de vie de cette société qui fonctionne en suivant les principes d’un certain Calendrier. C’est fumeux mais intrigant. Dans ce tome, en plus l’auteur se concentre beaucoup là-dessus et nous avons des discussions qui nous en apprennent plus sur les différents corps de la société et notamment les Kel et leur endoctrinement appelé « instinct de formation ». J’ai beaucoup aimé tout ce cadre mais, mais, mais, j’y viens, j’ai longtemps cherché l’intrigue…

En effet, dans cette saga, chaque tome a sa propre conclusion et on n’est pas obligé de continuer après l’avoir terminé, cependant si on en a envie, mieux vaut les lire dans l’ordre pour suivre. Du coup, dans ce tome qui reprend quelques temps après les événements du précédents, on retrouve Jedao qui a réussi à s’échapper après le massacre de la Forteresse des Aiguilles Diffuses en s’emparant du corps du capitaine Kel Cheris avec qui il partageait l’esprit. Pour sécuriser ses bases, il s’est donc emparé d’un essaim de guerre qui passait par là et qui avait été envoyé en urgence pour repousse une incursion des ennemis de l’Hexercat : les Hafn.

Pendant longtemps, les trois quarts du tome en fait, nous suivons parallèlement Jedao qui prend le pouvoir dans cet essaim pour aller combattre contre les Hafn, et des agents de l’Hexercat qui enquêtent sur lui et cherchent à l’éliminer, tandis que les Hexarques se tirent dans les pattes. C’est extrêmement vague, flou. On saisit plein de bribes de conversations sans en comprendre toute la teneur. On voit bien des complots se mettre en place mais sans bien les comprendre. Du côté de Jedao même punition, on est dans de la pure SF militaire donc ça parle sans cesse de manoeuvres sans qu’il y ait vraiment de grosses batailles hyper visuelles qui nous scotcherait, c’est plus comme une bataille navale et moi ça ne m’a jamais passionnée, donc je me suis longtemps ennuyée et je me suis perdue dans leurs discussions.

Il n’y avait pas la même vivacité que celle portait par les échanges du duo Cheris-Jedao dans le premier tome. Celui-ci a beau entrer en relation duelle d’abord avec Khiruev, qui est sur le même vaisseau et qu’il doit convaincre pour prendre le commandement, puis avec Brezan, qui enquête sur lui, cela n’a pas du tout la même saveur. Même si c’est brillamment écrit, parce que clairement on adore la fluidité et le piquant de la plume de Yoon Ha Lee, je me suis empêtrée dans les palabres des uns et des autres.

Je le regrette d’autant plus que les discussions autour de l’endoctrinement, du libre-arbitre, de la sexualité, des enfants et des relations en général dans cette drôle de société m’ont passionnée. Tout le récit sur ce que subissent les Kel, pour pouvoir ainsi être capable d’obéir efficacement et rapidement sans hésiter, est fascinant et terrifiant à la fois. L’idée d’enquêter également sur le passé de Jedao pour déterminer s’il était vraiment fou et essayer de deviner ce qu’il projette est passionnant également. Malheureusement tous ces développements ne prennent que très peu de pages et sont noyés sous le reste.

Pour moi, l’intrigue n’a donc vraiment décollé que dans les cent dernières pages quand tout fait enfin sens après une révélation fracassante, que je n’avais pas vu venir personnellement. Là, tous les coups fourrés politiques, les mystérieuses enquêtes, les décisions alambiqués et les discussions révolutionnaires prennent sens. SPOILER : J’ai adoré découvrir que Cheris n’était pas ou plutôt plus Jedao mais juste Cheris et que celle-ci préparait une remise à zéro du calendrier pour mettre fin à toutes les injustices et horreur qu’on a pu voir développées dans le tome. C’était d’un coup beaucoup plus vif, plus rapide et consistant. Enfin, j’avais l’intrigue que je cherchais désespérément. L’auteur réutilise alors tous les concepts vus précédemment tels que le Gambit, le Calendrier, l’Instinct de formation dans le seul but d’une expérience sociale et politique révolutionnaire. C’est passionnant mais il est dommage d’avoir dû attendre autant pour en arriver là…

Ce deuxième tome a donc souffert pour moi des mêmes limites que le premier. Je n’accroche décidément pas aux choix narratifs de l’auteur alors que j’adore sa plume. Mais cette volonté de nous passer à la centrifugeuse pour ne nous en sortir que dans les ultimes pages pour qu’alors toutes les bribes qu’on a entendues et les flashs qu’on a vus prennent un peu sens, me frustre énormément. Et si le lecteur n’a pas beaucoup de patience, je crains qu’il ne s’arrête avant d’en arriver là, ce qui serait dommage parce que l’auteur a de belles choses à raconter en termes de fausse société utopique et de révolution. Je serai malgré tout au rendez-vous pour le dernier s’il finit par sortir car je veux voir les effets des derniers événements, je veux voir la nouvelle société qui a été créée à son issue.

3 commentaires sur “Le Gambit du Renard / Le Stratagème du corbeau de Yoon Ha Lee

  1. Sur ma liste à lire impérativement. Me fait très envie et ta chronique maintient mon envie! C’est bien une trilogie? Mes dernières lectures des prix sf ont été des séminaires déceptions, notamment le problème à trois corps que je n’ai pas continué. Le Gambit du renard semble moins tarabiscoté dans sa structure…

    Aimé par 1 personne

    1. Tant mieux si tu as encore envie, je pense que chacun doit s’y frotter pour voir.
      Effectivement c’est une trilogie.
      Et personnellement, j’ai lu et adoré Le problème à trois corps que j’ai trouvé bien plus simple lol

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