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Les Dieux Sauvages de Lionel Davoust

Titre : Les Dieux Sauvages

Auteur : Lionel Davoust

Éditeurs : Critic / Folio SF

Années de parution : Depuis 2017 (Grand format) / 2020 (Poche)

Nombre de tomes : 4 (en cours) / 5 (en cours)

Histoire : Mériane est une trappeuse, une paria, une femme. Autant de bonnes raisons d’en vouloir aux Dieux qui ont puni le peuple de la Rhovelle pour les fautes de ses aïeux. Car depuis la chute du glorieux Empire d’Asrethia, le monde est parcouru de zones instables qui provoquent des mutations terrifiantes, les gens ont faim, et une religion austère qui prêche la haine des femmes soutient un système féodal.
Pourtant, quand les Dieux décident de vider leur querelle par l’intermédiaire des humains, un rôle crucial échoit à Mériane. Pour elle débute une quête qui la verra devenir chef de guerre et incarner l’espoir de tout un peuple.

Mon avis :

Tome 1 : La Messagère du Ciel

Il y a 3 ans, je découvrais avec plaisir la plume de Lionel Davoust dans Port d’âmes, un titre où son style m’avait ravie, notamment grâce à un univers original, mais où je n’avais pas du tout été emportée par l’histoire qui est trop renfermée sur elle-même et qui manquait de lyrisme et d’épique pour moi. C’était bien fait, c’était sombre, c’était dangereux, mais ce n’était pas ce que j’attendais et j’étais ressortie un peu déçue surtout que l’univers antérieur était prometteur, lui. Je ne voulais donc pas rester sur une défaite.

La Messagère du Ciel, premier tome de la quadrulogie des Dieux sauvages était parfaite pour me remettre le pied à l’étrier, puisque se déroulant dans le même univers, l’Evanégyre, imaginé par l’auteur et qu’on retrouve dans chacun (ou presque) de ses titres. La Messagère du Ciel se déroule près de 500 ans avant Port d’âmes dans l’ancien Empire d’Asrethia, après la chute de ce dernier, tandis que deux divinités se livrent à un affrontement sans pitié en utilisant les hommes et autres créatures à leur service pour les départager.

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La plongée dans l’univers des Dieux sauvages ne fut pas simple. J’ai trouvé les cent premières pages environ très touffues et parfois confuses, remplies de nom et de concepts pas toujours explicités. En plus, je n’ai remarqué que très tardivement la présence en fin de tome d’une toute toute légère aide… Parfois, je me dis qu’il serait bien de rappeler au début justement que cela existe, mais ce n’est qu’un détail. Bref, l’entrée en matière ne fut pas simple. Pour autant, j’ai très vite saisi que j’étais en présence d’un univers qui allait me fasciner.

En effet, Lionel Davoust nous propose un titre de fantasy épique dans un cadre moyenâgeux encore barbare par bien des aspects, où la politique mais surtout la religion sont très présents et saisissants. Peut-être est-ce l’influence des premières couvertures du titre chez Critic mais j’avais presque le sentiment de me retrouver dans quelque chose de vraiment primitif et c’est assez rare dans mes lectures pour me dépayser.

Pour porter ce récit, l’auteur offre une ribambelle de voix à suivre. Au début, le changement très fréquent de narrateur me perdait. On passait d’une jeune femme un peu sauvage vivant en lie de la société, à un jeune héritier qui ne veut pas l’être, ou encore au frère d’un roi dément, à la femme de celui-ci ou encore à un noble rebelle, sans parler d’un chef de guerre ennemis dans une société mi-bestiale mi-zombie fort étrange. J’avais du mal à suivre. Mais petit à petit, je me suis laissée enivrer par leurs aventures très immersives.

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Il faut dire que pour nous faire entrer dans son univers complexe, l’auteur, chose rare, offre un début de saga extrêmement rythmé. Passé ces premières pages assez denses, l’action monte et monte jusqu’à un pic épique dès le milieu de ce premier tome. J’ai trouvé ça surprenant et culotté ! J’ai adoré. Il repose ensuite le rythme avant de repartir à l’assaut pour les dernières pages. Un sens du rythme que j’ai rarement trouvé et que je salue tant il m’a fascinée, associé en plus à un sens de la mise en scène excellent, comme lors de la scène représentée en couverture. C’était palpitant à suivre.

Mais venons-en un peu au cadre de cette histoire. La Messagère du Ciel se déroule dans un ancien Empire qui a chuté, désormais partagé en plusieurs unités géographiques tantôt alliées tantôt en conflit. Au coeur de tout ça, la maison royale de Rhovelle, dont le roi Eoel II est souffrant depuis des années, tandis que sa femme Izara dirige à travers un conseil de régence où siègent plusieurs puissants dont Luhac, le frère du roi, et le jeune Juhel, duc de Magnésie qui vient d’hériter du titre. Depuis plusieurs décennies, ils vivent dans la crainte d’un phénomène contre lequel ils ne parviennent pas à lutter : les Anomalie, des sortes de trous spatio-temporels qui se déplacent et transforment la plupart des êtres qui y pénètrent en leur conférant des « difformités » diverses et variées. Ils doivent également affronter les forces voisines des Mortes-Couronnes l’Armée de la Nuit, dirigée par Ganner, le prophète du dieu rival au leur, prend les armes et se lance à l’assaut de leur pays. Le tout pendant que des Ducs rebelles remettent en cause l’autorité de la famille royale. Bref, beaucoup de mouvements en perspective.

Mais de tout cela, Lionel Davoust fait une histoire parfaitement cohérente, simple et passionnante à suivre. La complexité apparente de l’univers s’éclaire au fil des chapitres pour mettre à jour des rouages parfaitement détaillés par l’auteur et qui se mettent en branle à la perfection. C’est juste passionnant et fascinant de voir comment tout s’imbrique.

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Mais l’histoire ne serait rien, comme bien souvent, sans ses personnages et c’est là que j’ai pris le plus de plaisir. Car au delà de la politique du royaume, des complots des Ducs, des assauts lancés par les ennemis et du mystère de ses anomalies, c’est dans l’utilisation de la religion dans cet univers que j’ai trouvé que l’auteur s’accomplissait. 

En effet, l’héroïne de son récit n’est ni plus ni moins qu’une nouvelle Jeanne d’Arc, sauf qu’à la différence de celle-ci, Mériane n’est pas du tout croyante, bien au contraire et qu’elle remet fortement en question l’ordre de la société dans laquelle elle vit, établi par une religion on ne peut plus patriarcale. Elle est fascinante. J’ai adoré suivre une héroïne qui lutte contre ce destin que les dieux tentent de lui imposer. Elle se retrouve d’un coup, sans l’avoir demandé, à entendre directement dans sa tête la voix d’un dieu qu’elle méprise et dont elle ne veut pas. Celui-ci veut faire d’elle son Hérault, elle refuse ce titre masculin pour s’auto-proclamer plutôt Messagère. J’adore cette femme ! C’est une féministe avant l’heure.

Et les aventures qu’elle va vivre ne sont ni plus ni moins qu’une réinterprétation de celles de notre Jeanne d’Arc nationale. Elle va d’abord ne pas être cru, bien sûr, par l’Eglise du grand dieu Wer, qui va la rejeter. Embarquée de force dans cette histoire, elle va donc devoir se trouver des alliés de circonstance et elle profitera de ce nouveau statut non seulement pour aider le peuple de Rhovelle mais aussi pour aider ceux plus petits et plus proches d’elle. Toute la dernière partie du roman est assez fascinant dans sa construction en miroir avec ce qu’on sait de l’épopée de Jeanne et qui nous est promis pour la suite de l’histoire dans les prochains tomes. Ça donne hâte de les découvrir !

Mais en plus de cette si belle héroïne, l’auteur n’a pas fini d’inventer des personnages solides et charismatiques dans chacun des camps. J’ai été fascinée par la figure de Ganner, le Chef du clan adverse, qui règne sur un peuple d’espèce de zombie créer par son Dieu, Aska. Les Dieux eux-même qu’on entend lors de bref interludes sont plein de nuances et fascinent. Je serais bien en peine de dire lequel je soutiens tant je le trouves fourbes tous les deux dans leurs échanges et actions.

Du côté des alliés, comment ne pas succomber pour le doux et timbré Darèn, qui accompagne notre Elue. J’aime qu’un auteur mettent délibérément en avant quelqu’un souffrant de troubles mentaux comme lui, sans le nier et sans le dénigrer. J’ai aussi apprécié frère Leopol, un croisé, dont l’évolution est peut-être prévisible mais intéressante et surtout dont le passé lui donne une autre envergure que ce qu’on pouvait croire au début.

Je suis plus réservée pour ce qui est des nobles de ce cher royaume. Si la reine est un personnage comme je les aime, une femme forte, maligne, qui ne se laisse pas dicter sa conduite tout en restant aimante. J’apprécie moins les Ducs autour d’elle et leurs rejetons. J’ai l’impression d’y voir des figures plus classique, du frère blasé par la vie qui se laisse porter, au duc rebelle qui prend les armes mais échoue lamentablement. J’attends de voir et mes espoirs reposent notamment sur la nouvelle génération.

Enfin, il y a le mystérieux duo Chunsène – Nehyr, la première étant une vagabonde originaire de Mandre et la seconde une éclaireuse et archère. Elles avancent au milieu de ce monde en pleine agitation, traversant les conflits pour … faire je ne sais trop quoi. J’ai l’impression d’avoir manqué d’attention avec elles et j’ai juste retenue que Nehyr était la seule à voir Chunsène, ce qui est fort mystérieux.

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Ainsi, ce premier tome fut un franc succès pour moi. J’ai adoré le cadre brutal et mystérieux imaginé par l’auteur, mais également l’héroïne forte et féministe, porteuse d’un vrai message, qu’il a imaginée. J’ai trouvé ce premier tome original aussi bien de par sa construction, avec ce point culminant dès la première moitié, que par ses propos, avec cette revisite maligne de la figure de Jeanne d’Arc et de sa quête. Lionel Davoust m’a alpaguée pour de bon et je ne suis pas près de lâcher l’affaire !

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Tome 2 : Le verrou du fleuve

Suite directe de La messagère du ciel, Le verrou du fleuve est tout aussi épique et poursuit sa déconstruction / reconstruction du mythe de Jeanne d’Arc à la sauce fantasy – steampunk – post-apocalyptique assez surprenante.

Si je parle en pur plaisir de lecture, je dois avouer que pendant longtemps j’ai moins aimé ce tome que le précédent. Il souffre du syndrome d’être le deuxième d’une quadrilogie. Il n’a plus la surprise du premier tome et peine un peu par moment à insuffler le souffle épique entêtant qu’il y aura probablement dans les derniers moments. Ainsi, il a un rythme un peu en dents de scie et s’il décolle d’abord très vite, il se calme tout aussi rapidement, avant de ne repartir vraiment que dans la toute fin… Cependant, il recèle tellement d’éléments ultra prometteurs pour la suite que je n’ai pu que réviser mon jugement à la fin et le considérer comme une très très bonne lecture frôlant le coup de coeur.

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Dans ce nouveau tome, très simple en apparence car il n’est qu’une longue lutte entre Mériane et ses alliés, et Ganner, le représentant d’Aska et ses créatures mi-droguées mi-machines, on découvre au fil des pages quelque chose de bien plus complexe. La bataille rangée à laquelle ils se livrent n’est ainsi qu’un une de fumée aux multiples rebondissements et aux nombreuses parties. Il y a un premier moment épique très vite quand une grosse nuée d’espion s’échappe de Loered (le fameux Verrou) au nez et à la barbe de Ganner et son armée. Un deuxième intervient lorsque Mériane et ses troupes parviennent par miracle à rejoindre Loered pour les aider à tenir. Puis cela continue lors d’une tentative d’infiltration ratée, suivie d’une rude bataille où tout est permis. Les combats sont vraiment au coeur de ce tome et l’auteur sait parfaitement en raconter le déroulement, enfin jusqu’au dénouement, qui a chaque fois est tombé un peu à plat pour moi. Je ne sais pas si c’est dû à un moment d’attention de ma part, mais j’ai eu à chaque l’impression que les scènes étaient coupées en pleine action et qu’on sautait par-dessus la conclusion à l’aide d’un beau Deus-ex machina souvent même pas raconté… Bref, il m’a manqué des pages…

Mais le tome n’est pas que combats militaires, il est également combats d’idées et là aussi, si j’ai beaucoup aimé le côté militant féministe et presque athée de l’héroïne, j’ai été très frustrée de voir son rôle autant minimisé la plupart du temps. Cependant cela rentre dans la déconstruction du mythe de la Pucelle que l’auteur développe. Il montre au lecteur la façon dont l’Église et les politiques utilisent des événements qu’elle n’a pas commis pour les présenter comme des miracles de sa part et ainsi galvaniser les foules à la porter aux nues pour garder espoir dans la pire adversité. C’est très intéressant à voir mettre en oeuvre. De la même façon, j’ai apprécié de voir l’héroïne toujours en butte avec le Dieu qui envahit ses pensées. C’est agréable de suivre une femme forte, qui ne s’en laisse pas compter et se méfie de ce qu’il y a au-dessus d’elle car elle sent bien qu’on lui cache des choses et qu’il faut qu’elle pense par elle-même.

En face, l’autre femme de cette histoire, Izara ne reste pas inactive, mais malheureusement l’auteur la montre très peu. J’ai donc ici aussi éprouvée une certaine frustration. Le tome était avant tout guerrier, du moins les combats ont occupé tellement de pages que les confrontations politiques sont un peu passées en arrière-plan alors qu’elles sont très intéressantes aussi. Assister aux manoeuvres de cette ancienne Reine pour protéger à la fois sa fille, sa patrie et son nouveau Roi, ce n’est pas rien. C’est elle qui travaille en coulisse à réunir d’autres troupes pour aller aider Loered (la clé de voûte du pays) à tenir, quitte à négocier comme elle peut avec les pays voisins ou les nobles à l’intérieur du royaume. J’espère donc qu’on lui accordera plus de pages la prochaine fois.

Ainsi Lionel Davoust a développé une galerie de personnages féminins fort intéressants et marquants qui tout en restant dans les codes de la fantasy chevaleresque en sortent également. Les hommes, eux, s’ils sont nombreux n’ont pas le même charisme à mes yeux. Il y a l’ami fidèle dont on découvre les pouvoirs mystérieux mais qui semble perdre la parole qu’il avait dans le tome 1. Il y a le fidèle écuyer, autrefois aveuglé par sa foi, qui peine à trouver sa place. Il y a le jeune roi nouvellement nommé qui peine à s’affirmer face aux vieux briscards misogynes autour de lui. Puis justement, il y a ces figures tutélaires masculines peuplant les lieux où l’on se rend. Ils sont le cliché des conseillers à l’ancienne, qui méprisent les femmes, les jeunes, et pensent tout mieux savoir que les autres. Je sais que c’est fait exprès mais ils m’ont un peu horripilée, heureusement que le déroulé de l’histoire les remet à leur place.

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Enfin, autre gros morceau passionnant dans ce tome, c’est le développement univers. En effet, en parallèle des affrontements qui ont lieu, voir à l’intérieur même de ceux-ci, Lionel Davoust trouve astucieusement le temps d’enrichir le vaste univers de cette histoire. Cela va de la mythologie autour des deux Dieux qui s’affrontent ici, jusqu’au mystère incarné par un nouveau personnage qui va rejoindre le sérail de Mériane et qui semble connaître plein de choses sur le passé de ce monde. L’auteur nous distille ainsi à petite dose des informations sur le monde d’avant, sur ce qui y existait et qu’on peut encore trouver et utiliser peut-être pour contrecarrer les plans des dieux. C’est assez jouissif même si ça intervient fort tardivement dans le tome, peut-être trop…

En tout cas, j’ai savouré l’arrivée de cette ambiance mystérieuse mélangeant steampunk et monde post-apocalyptique, le tout dans un univers de fantasy, ce qui est quand même assez surprenant. D’après ce que j’ai compris, tout cela prend racine dans l’univers fictif inventé par l’auteur : l’Evanégyre, et franchement cela donne très envie de plonger dans les racines de celui-ci, notamment la tout première période présentée dans le bonus en fin de tome.

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Même si ma lecture n’a pas eu la surprise du premier tome et que plus de peittes  choses m’ont irritée dans ce tome, Le verrou du fleuve fait tout de même partie des lectures les plus solides que j’ai eu en Fantasy depuis que j’en lis. L’auteur a une vraie science du story-telling. Il manie les influences et références comme un chef pour créer un univers mystérieux et inattendu, où il sait placer une accélération au bon moment pour mieux nous surprendre. J’aime la place qu’il y accorde aux femmes. J’aime son détournement des codes des récits chevaleresque. J’aime ses récits de bataille. J’aime les surprises qu’il nous réserve et ce qu’il nous annonce de sombre et tortueux pour la suite. Une excellente série !

Tome 3 : La Fureur de la Terre

Quel tome, quelle série, quel souffle mais quel pavé ! xD

Que ce troisième tome fut long et douloureux à lire, non pas parce qu’il souffre de la comparaison avec les premiers mais parce qu’il nous plonge vraiment au coeur de la guerre qui se joue et du siège du Verrou du Fleuve, moment clé de la série, et ce fut douloureux. L’auteur ne nous a rien épargné tout au long de ces plus de 1000 pages ! Mais il aurait peut-être pu justement prendre quelques chemins de traverses pour élaguer un peu son récit qui en devient presque par trop copieux.

J’ai beaucoup aimé suivre le parcours de Mériane à nouveau dans ce tome, cette Jeanne d’Arc à la sauce Lionel Davoust, dans un monde d’inspiration médiévale où magies et machines se côtoient. C’est fascinant de voir cet étendard qu’elle est devenue et le rôle que cela joue dans sa construction mais aussi dans le déroulement de la bataille. Tout le développement de l’auteur autour de la figure du « Messager » est fascinant car il montre bien la façon dont la foi des fidèles peut être dévoyée par ce biais et combien les puissants humains et divins manipulent cette image. C’est fascinant.

Cependant le grand défaut de ce tome aussi, c’est son côté statique. Celui se passe majoritairement dans un seul lieu : le Verrou du Fleuve où certes on assiste à de nombreuses batailles qui vont nous faire vibrer mais où les forces sont dans un espèce de statu quo également. Elles ne gagnent pas et ne reculent pas véritablement. Il n’y a pas de victoire décisive pendant longtemps et c’est long justement d’attendre. Alors oui, on patiente avec pas mal d’éléments mis en place par l’auteur pour faire le job. J’ai notamment été fascinée par l’armure à la Berserker de Mériane (on dirait celle de Guts dans Berserk avec une pointe de mécha en plus). La description de la nature de celle-ci, de son utilisation ravageuse et des conséquences cruelles sur son hôte étaient excellentes ! Je me suis également régalée des récits de bataille, car l’auteur en faisant appel à des spécialistes, nous décrit celles-ci comme s’il y était et nous aussi. On sent donc le souffle de la bataille, la saleté de la terre qui s’éparpille, l’odeur du sang de tous ces blessés et ces morts. C’est extrêmement saisissant. Mais je me répète l’intrigue peine à avancer.

Alors l’auteur tente de dynamiser quand même son récit. Il alterne les voix des personnages qui prennent la parole. Il nous fait voyager aux côtés de ceux hors du Verrou qui cherchent des renforts pour aider Mériane et Loered. Il nous intrigue toujours avec ces découvertes sur la mythologie opposant Wer et Aska qui est à l’origine de tout ce qui se passe. Il nous fait trembler en nous montrant de l’intérieur le camp de l’antagoniste, être pas si éloigné du camp du bien au final quand on voit les manigances de ces derniers également et alliances et trahisons qui se jouent. Le prince héritier gagne en maturité et connaît bien des péripéties. Il découvre son royaume et ses pairs. La jeune Chunsène et coéquipière Nehyr sont confrontées à la réalité de ce royaume en guerre et vont des découvertes qui vont les éloigner. Quant à Leopol, il voit sa foi soumis à rude épreuve. L’auteur semble semer plein de germes pour la suite de son récit en nous embarquant dans ce vaste voyage pour nous faire patienter le temps que se règle la question du Verrou du Fleuve, c’est intéressant mais parfois encore un peu obscur.

Je me suis donc laissée embarquer dans ce long récit qui n’en finissait plus. Même si chaque morceau est bien écrit grâce à la plume détaillée et riche de l’auteur, je me suis parfois quand même un peu ennuyée, rongeant mon frein en voyant qu’on faisait du sur place. J’aime beaucoup cependant son écriture réaliste des batailles et des guerres. J’aime encore plus son développement de la thématique de la « Messagère » de dieu et de la foi. Je n’ai qu’une hâte maintenant que chacun germe éclose et qu’on ait un final encore plus rude et épique !

Tome 4 : L’héritage de l’Empire – Partie 1

La guerre, la guerre, la guerre mais aussi un peu beaucoup la politique et la religion. Avec la fin, enfin, de la bataille du Verrou du Fleuve la voie est libre pour que les clergés et les nobles viennent encore plus nous compliquer les choses mais que c’est savoureux !

Cette saga médiévalo-technique de Lionel Davoust a vraiment le chic pour m’entraîner là où je ne l’attends pas. Avec la fin de la bataille du Verrou, je pensais qu’on allait reparler origines des Dieux, ambitions de Ganner, disputes pour le trône de Loerel, mystification de la Messagère, etc. J’ai eu un peu de tout ça mais j’ai encore et surtout eu beaucoup de guerre, celle-ci n’en finissant plus. Et c’est au final plutôt dans ses interstices quand l’auteur nous parle d’autre chose que j’ai pris le plus de plaisir même si à nouveau les pages où il livre bataille nous donnent l’impression d’y être nous aussi au premier plan.

Qu’on soit clair, j’aime beaucoup la dimension militaire de cette saga, mais je trouve souvent qu’elle empiète un peu trop sur le reste. Je trouve par exemple la figure de Mériane de plus en plus dévoyée et réduite à ce statut de combattante sur patte dans une armure de la mort qui tue ! Alors certes son nouveau revêtement est fascinant, plein de nuances aussi et assez cruel, mais on en vient à oublier le rôle qu’on lui a attribué dans cette histoire et je trouve que l’auteur ne la fait plus trop évoluer en tant que « Messagère »… Il y a juste en fin de tome une évolution en tant que « femme » que j’ai trouvé percutante et moderne puisqu’on y rediscute de ce qu’on attend de ces dernières dans une société tellement patriarcale.

Cependant, Mériane se fait au fil des pages un peu voler la vedette par les autres personnages à mes yeux. J’ai ainsi beaucoup aimé la dynamique d’Erwel qui grandit de plus en plus sous nos yeux et s’affirme en chef de guerre et de royaume, même si celui-ci part un peu à vau l’eau et qu’il aura un sérieux travail de reconstruction et de recadrage à faire ensuite quand on voit ce que ses nobles et son clergé se permettent dans son dos. J’ai été encore plus fan de l’inattendu duo Izara – Thadéus qui m’a vraiment emmené à l’aventure et a redistribué les cartes, me présentant une ancienne reine bien plus attachant que la marâtre que j’avais imaginée au début. Autour de Mériane, j’ai adoré le rôle joué par Nehyr avec tous ses secrets et les grosses révélations qu’on a eu dans les dernières pages ainsi que sa posture d’aide puis de déclencheur auprès de celle qu’elle sert. J’ai aussi apprécié ce cher Leopol avec ce désir qui le trouble et le ronge. En fait, tout ceux qui tourne autour de notre appelée de dieu en viennent presque à avoir plus d’envergure qu’elle pour moi tant elle se retrouve cantonnée d’un côté à sa relation trouble avec Wer et de l’autre à sa posture d’arme de guerre. Un peu décevant, je dois dire.

Heureusement, je dois dire que l’histoire, elle, ne l’est pas. Avec le Verrou du fleuve levé, c’est l’histoire elle-même qui est libérée et repart à l’aventure. On se retrouve à suivre les héros et leurs antagonistes sur plusieurs fronts. Cette fois, ce ne sont pas des récits sur les dieux mais des échanges de courriers entre ecclésiastiques qui rythment les pauses entre chapitre. On nous fait aller d’un coin à l’autre du royaume. On nous fait bien entendre que rien n’est gagné et chaque camp se glorifie d’une victoire pour galvaniser le peuple et préparer l’affrontement final. On a d’ailleurs un avant-goût avec le duel Mériane – Arcis qui est sanglant et haletant. L’auteur encore une fois nous fait bien sentir combien la guerre est rude, sale, violente, vaine parfois et terrible pour le peuple. J’ai aimé suivre les différents groupes de personnages et leurs motivations différentes dans ce monde en guerre avec des divinités qui les utilisent pour des motifs qui les dépassent.

En revanche, l’éditeur a divisé ce tome en deux pour le format poche, ce que j’apprécie moyennement même s’il a sorti les deux le même jour et avec des couvertures qui se complètent, car après avoir terminé ce demi-tome, je ne peux qu’avoir de grandes ambitions et envies pour la suite que j’espère voir comblées.

Nouveau tome lu avec intensité. Même si j’ai été moins en apnée que dans le précédent, j’ai à nouveau senti la rudesse et la violence de la guerre ce que Lionel Davoust n’a pas son pareil pour décrire. Je suis plus partagée pour l’évolution qu’il propose de son héroïne, qui a un peu perdu de son charme et de son intérêt depuis un tome, par rapport à l’ambition première de l’auteur. Je suis surtout toujours très intriguée par ce que les dieux viennent faire dans cette histoire et j’espère vraiment ne pas être déçue par le final les concernant. Un univers mécanico-médiéval vraiment séduisant par son ambiance et unique en cela à mes yeux que je recommande à tous les amateurs de récits de guerre. Le souffle est là mais aussi la poussière, le sang et la sueur ainsi que la morale trouble.

Tome 4 : L’héritage de l’Empire – Partie 2

En commençant ma lecture des tomes 3 à 5 de cette édition poche pendant mes vacances de Noël, j’avais l’ambition de terminer une série. J’aurais dû mieux me renseigner parce que j’ai découvert en refermant ce tome qu’il restait en fait un tome (ou 2 en édition poche) à Lionel Davoust à écrire pour conclure sa saga. Zut !

Pour autant ai-je pris mon pied en lisant ce nouveau tome ? Oui. Clairement le monsieur sait raconter une histoire et la rendre prenante et épique. Est-elle dépourvue de défauts pour autant ? Loin de là et ceux-ci m’ont parfois pas mal freiné dans ma lecture. En effet, le fait d’avoir enchaîné les tomes me fait dire qu’il y aurait quand même besoin de pas mal élaguer les tomes qui sont fort longs pas toujours à raison. Il y a aussi parfois des soucis de rythmes avec des fébrilité et de petits moments d’ennuis. Et surtout, je ne suis pas totalement satisfaite de la manière dont l’auteur traite et écrit ses personnages, je trouve qu’ils passent trop au second plan par rapport au développement de son univers et aux scènes de batailles, qui elles sont bien plus riches. Dommage.

Les idées sont pourtant diablement intéressantes avant et après LE gros combat de ce tome, car après Arcis, place à Ganner. Mais ce que j’ai préféré, ce n’est justement pas ce combat annoncé et prévisible au final, mais tout ce qui y a conduit et surtout ce qui en a résulté. L’auteur a vraiment bâti quelque chose d’intéressant autour de ces deux « Dieux » qui se battent par l’intermédiaire de leurs prophètes et enfin il nous révèle qui ils sont ici ou du moins nous met assurément sur la voie. La petite touche « SF » que cela a me fait trouver cela hyper savoureux et je me pose encore 1000 questions sur ces personnages qui sont les vrais antagonistes de l’histoire et possèdent tellement de nuances. Du coup, le reste semble un peu fade à côté de leurs manipulations et des artefacts qu’ils ont laissé derrière eux.

Tandis que la scène Loerienne a un certain potentiel, elle est peu trop laissée de côté et pas assez mise en avant à mon goût. J’ai aimé découvrir les plans qu’Izara avait tracé pour l’héritier de son mari et découvrir combien cela mettait des bâtons dans les roues de la vie sentimentale de ce dernier, l’obligeant encore à des choix difficile, mais c’est peut-être un peu classique. J’ai aimé suivre les relations difficiles entre elle et sa fille, mais on ne voit pas où ça mène. De la même façon, j’ai longtemps trouvé l’intrigue autour du clergé potentiellement intéressante mais par trop absente. J’ai donc été ravie de voir un sursaut la concernant dans les dernières pages qui est une jolie référence à l’histoire de Jeanne d’Arc alors qu’on s’en était pas mal éloigné depuis un certain temps. Toutes ces intrigues de complots et manigances me plaisent au plus haut point mais n’occupent pas assez de place à mon goût et j’ai du mal à croire que l’auteur leur donnera la place que j’aimerais dans le dernier tome. J’ai peur de rester sur ma faim si ça reste comme jusqu’à présent.

Le jusqu’à présent, c’est une grosse grosse présence encore de la guerre. Certes, c’est plaisant d’avoir quelques pages sur les conséquences de celle-ci sur le peuple. J’ai aimé la voir à leurs côtés, à leur hauteur. J’ai également apprécié le talent de l’auteur lors des scènes de batailles qui sont une nouvelle fois totalement immersive mais gagnent en plus ici un côté vertigineux avec le dernier duel titanesque qui s’offre à nous dans un décor incroyable. Il n’y a pas à dire Lionel Davoust se fait plaisir et nous fait plaisir dans ces moments-là. Sauf que le revers de la médaille, c’est que ça occupe bien trop de pages par rapport au reste selon moi. Et personnellement, je préférerais qu’on utilise cet espace pour développer les personnages. Ils en auraient grand besoin.

Car au final, les héros de cette histoire sont assez monolithique depuis 3-4 tomes et je commence à m’en lasser. On dirait que l’auteur leur a défini une personnalité et des caractéristiques et qu’il n’en varie pas. C’est dommage parce qu’au contraire dans un contexte de guerre, c’est là justement qu’il faut changer. Mais encore faut-il écrire des scènes pour bien le décrire et démontrer cette évolution, juste les propulser avec un petit changement ne suffit pas. Et clairement pour moi, l’écriture des personnages pêche énormément contrairement à l’action surtout du côté de Mériane en fait, celle qui est la plus mise en avant. C’est à nouveau dommage parce qu’en tant que figure prophétique et messagère, elle a un énorme potentiel et que dans le premier tome cette revisite de la figure de Jeanne d’Arc était très bien écrite. Ici, par contre, j’ai espoir pour le dernier tome que l’auteur se re-focalise dessus à la vue des dernières pages. Hourra !

Les Dieux Sauvages est donc l’une de ces sagas à laquelle je trouve beaucoup de qualités sur le fond mais des défauts formels agaçants également, ce qui rend la lecture à la fois challengeante et pénible, et comme les tomes sont longs, ça s’en ressent d’autant plus. J’ai autant de craintes que d’ambition pour ce dernier tome qui se profile et que les lecteurs du grand format attendent depuis 2 ans maintenant. L’auteur a toutes les cartes en main pour un final épique et tortueux autour de la question de la religion, la foi et les saints. J’ai très hâte de voir ça !

15 commentaires sur “Les Dieux Sauvages de Lionel Davoust

  1. Maintenant que j’ai lu ton avis, je comprends ton enthousiasme pour ce roman.
    L’univers a l’air génial, l’utilisation de la religion intéressante, mais j’avoue que c’est ce que tu dis de l’héroïne qui me donne le plus envie ! Quant au duo féminin dont on ne sait pas trop à quoi il sert, ça m’en rappelle un autre 🙂 Peut-être que parfois à trop multiplier les personnages, certains pâtissent d’un manque d’attention non pas du lecteur, mais de l’auteur(e).
    En tout cas, le roman est tentant.

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    1. Haha oui on est là dans le haut haut du panier et avec une écriture vraiment adulte, c’est pour que notre LC même si j’ai beaucoup aimé fait quand même un peu pâle figure en comparaison ^^!
      Je suis bien d’accord avec toi, plus on multiplie les personnages plus c’est dur de leur donner à tous la place qu’ils méritent…

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  2. C’est vrai que le début n’est pas simple. Pour tout dire je l’avais abandonné vers la page 50 lors de mon premier essai, n’arrivait pas à m’intéresser à ce qui s’y passait xD
    Mais j’en ai juste conclu que ça n’était juste pas le bon moment pour le tenter et je l’ai remis dans ma PAL.

    Contente de voir que ça t’as plu 🙂

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  3. Je regarde à chaque fois dans chaque roman fantasy et sf s’il n’y a pas un glossaire ou autre aide à la fin du livre, c’est vrai que ça pourrait être dit en début de livre.
    Je ne connaissais pas du tout mais tu me donnes très très envie de le lire. Je vais vraiment m’y intéresser.

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