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L’Île entre deux mondes d’Asuka Ishii

Titre : L’Île entre deux mondes

Auteur : Asuka Ishii

Editeur vf : Pika (Graphic)

Année de parution vf : 2021

Nombre de tomes vf  : 2 (série terminée)

Résumé : Aoshima, petite île éloignée des îles principales du Japon.
Caressée par le vent, bercée par les vagues, cette “île bleue” baigne dans la lumière.
Dans ces paysages hors du commun, d’étranges phénomènes happent Tatsumi, jeune professeur nouvellement muté à l’école locale, et le plongent dans un monde à la lisière de la nature et du surnaturel…

Mes avis :

Tome 1

J’ai toujours été sensible aux titres calmes, poétiques et sur le folklore asiatique, alors forcément quand Pika décide d’en sortir un dans sa belle collection Graphic avec une couverture qui a de faux airs d’un titre de Chica Umino (Honey and clover, March comes in like a lion), il est impossible pour moi de résister ><

L’Île entre deux mondes est une courte série en 2 tomes – le suivant sortira au mois de juillet – dont l’autrice Asuka Ishii est également une artiste peintre et illustratrice distinguée par un prix d’Art Contemporain. Cette dernière en plus d’être mangaka expose dans des galeries d’art ou à l’occasion de festivals, et sinon elle publie des titres courts dans l’Afternoon de Kodansha ou le Young Animal Zero de Hakusensha, avec lesquels elle remporte parfois également des prix. C’est décidément une artiste fort douée.

C’est seulement 4 ans après ses débuts comme mangaka qu’elle nous offre le récit que nous allons découvrir en France cette année : L’Île entre deux mondes, une histoire entre poésie, nostalgie et folklore japonais, qui n’a pas été sans me rappeler d’excellents titres comme Underwater de Yuki Urushibara ou Little Yu de Da Xia, des récits qui m’avaient émerveillée à l’époque. On y retrouve la même sensibilité, le même flou volontaire entre le réel et le rêve, le réel et un monde peuplé de créatures fantastiques et le même attachement à la nature, des thèmes que chéris particulièrement.

L’histoire n’a rien d’extraordinaire en soi. C’est un récit tranche de vie banal où l’on suit Tatsumi, un jeune employé de musée, qui va devenir professeur sur l’île d’Aoshima où il a vécu quand il était petit. En y retournant, il va se retrouver plongé dans ses doux mystères.

L’autrice conte cela de manière douce et paisible, chaque chapitre présentant une nouvelle anomalie dans le quotidien du héros qui le plonge un peu plus dans l’étrangeté de cette petite île perdue et éloignées des îles principales du Japon. Aoshima est une île qui vit à son rythme, plus proche des traditions passées que de la course à la modernité actuelle. Celle-ci a d’ailleurs peu touchée l’île qui a peu de véhicules motorisés, préférant la marche à pied ou le vélo, et n’a même pas de librairie mais juste une petite supérette. Les habitants vivent aussi à leur rythme, très proche de la nature et des légendes qui la peuplent. Cela donne une charmante ambiance désuète au titre, comme une bulle au milieu de notre époque si pressée et stressante.

L’ambiance et le cadre sont clairement le gros atout du titre. Le héros redécouvre l’île de son enfance et les quelques souvenirs qu’il en avait, recroisant des personnages d’autrefois et en découvrant de nouveaux, tous un peu farfelus pour lui qui vient d’une grande ville. Ils sont étranges à ses yeux car ils sont pétris de légendes et de folklores et vivent à un autre rythme que le sien. Ils sont étranges aussi car ils le plongent dans des aventures pour lesquelles ses explications rationnelles sont bancales. C’est tout le charme ici ! Les rencontres étranges et mystérieuses de créatures surnaturelles qu’il fait le replongent à la fois dans son passé et dans ses racines. C’est magique.

Le trait extrêmement doux et poétique de l’autrice rendent le récit encore plus sensible, lui conférant un onirisme à la hauteur des titres avec lequel je l’ai comparé plus haut et que j’avais également adoré. Il y a même un petit air, plus doux certes, de Daisuke Igarashi (Les enfants de la mer) avec ses créatures surnaturelles immatérielles à la consistance parfois liquide, parfois vitreuse, parfois vaporeuse, parfois brumeuse,… comme les éléments constitutifs de la nature environnante. C’est mystérieux à souhait et ça bouleverse. Sous des dehors assez purs et modernes également (dans les scènes réalistes du quotidien), l’autrice peut à tout moment nous faire basculer dans le fantastique dès que son trait devient plus enveloppant et donne vie à la nature. C’est magique.

Ainsi, je suis irrémédiablement tombée sous le charme de cette petite histoire banale d’un homme allant enseigner sur une petit île coupée du monde. Le charme de cette nature encore sauvage où les créatures de légende côtoient des habitants vivant encore à un rythme lent et paisible en harmonie avec eux a parfaitement opéré sur moi. Je suis vraiment cliente de ce genre de titres et d’ambiance !

Tome 2

Après mon coup de coeur pour le premier tome, j’avais hâte de replonger dans l’univers onirique de L’île entre deux mondes. Le charme fut intact dans ce second et dernier volume, mais j’ai quand même relativisé un peu cette lecture, la « rétrogradant » au rang de très bonne lecture tout de même.

La recette est pourtant la même, nous assistons à la nouvelle vie du professeur Tatsumi sur l’île d’Aoshima où il a vécu autrefois lorsqu’il était enfant. Le premier tome s’attachait à la découverte des mystères de celle-ci, une île peuplée d’esprits surgissant n’importe quand. Le second, lui, tente d’expliquer un peu ceux-ci, ce n’est donc pas la même dynamique, ce que je regrette un peu.

J’ai eu le plaisir d’assister à d’autres manifestations d’esprits. J’ai été touchée de découvrir leur histoire en lien avec les habitants de l’île. J’ai notamment adoré le dernier chapitre consacré à la vieille Suzu et à son histoire. Mais j’ai trouvé le reste plus conventionnel et prévisible. L’auteur se fait plaisir, comme d’autres avant lui, à jouer sur les mythes et mystères propres aux us et coutumes japonais. Ça parle ainsi d’esprits, de créatures chimériques, de fêtes comme celle d’O-bon et de Tanabata. C’est très onirique et poétique mais à part lors de la dernière histoire, je n’ai pas ressenti véritablement d’implication émotionnelle cette fois. Je suis restée un peu extérieure, admirant plutôt la beauté des planches et des situations.

Les dessins d’Asuka Ishii sont effectivement sublimes. Ils sont plein de douceur, de chaleur et de poésie, jouant sur les codes de l’ésotérisme asiatique en les sublimant, un peu comme on l’habitude de faire les Clamp notamment. Je pense notamment à une page de chapitre qui faisait furieusement penser à XXX Holic pour son travail sur les volutes de fumée. Je suis fan de la représentation toute en transparence des esprits, de la fluidité du trait. On ressent une vraie bouffée de fraicheur comme si on était nous même sur cette île à ressentir l’air marin. Ce sera vraiment une dessinatrice à suivre.

L’île entre deux mondes est ainsi une très jolie histoire estivale, une belle fable pas seulement écologique mais surtout humaine où la chaleur humaine est au coeur de ces belles histoires. L’autrice nous montre l’importance des liens humains à travers les âges. C’est émouvant.

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©2018 Asuka Ishii / © 2021 Pika Editions

3 commentaires sur “L’Île entre deux mondes d’Asuka Ishii

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