Le Marchand de Sable de Gaïa Alexia

Titre : Le Marchand de Sable

Auteur : Gaïa Alexia

Éditeur : Hugo Romance (Poche)

Année de parution : 2021

Nombre de tomes : 2 (série terminée)

Histoire : Nola Nott a tellement dû croire à la légende du Marchand de Sable lorsqu’elle était enfant que, des années plus tard, il hante ses cauchemars. Précédé de papillons rouge sang et semant du sable derrière lui, Nola le sent, il n’attend qu’une chose : s’en prendre à elle.
Pour l’éviter, elle se plonge dans ses cours jusque tard dans la nuit, notamment dans ceux de mythologie nordique, cette matière qui lui donne tant de fil à retordre.
Tant qu’elle est éveillée, tout va bien pour Nola, mais que se passerait-il si rêve et réalité se confondaient et que l’homme de ses cauchemars apparaissait au détour d’une rue ?
Aux heures les plus sombres, se joue une course poursuite digne de la cavalcade de la lune en pleine nuit.

Mon avis :

Tome 1 : Quand l’homme de ses cauchemars surgit dans sa vie

J’ai déjà testé cette année, mais pas avec une franche réussite, l’une des incursions d’Hugo Roman dans les romances fantastiques et mythologique avec Hadès et Perséphone, qui ne m’avait pas entièrement convaincu. J’avais donc quelques appréhensions vis-à-vis du Marchand de sable malgré les excellents retours que j’en entendais, appréhensions que je n’aurais pas dû avoir car nous sommes sur un tout autre type de texte !

L’autrice, Gaia Alexia, est déjà connue pour plusieurs succès en new romance : Adopted Love et Baby Random. Reprenant ces codes, elle imagine ici une histoire qui flirte avec les codes de la romance estudiantine et les codes des romances paranormales, mais avec en prime une petite touchante mythologique fort appréciable qui nous embarque dans le Nord aux côtés d’Odin, Loki et leurs Valkyries, pour les personnages les plus connus.

Dans Hadès et Perséphone, j’avais trouvé un déséquilibre entre la romance et la mythologie, et c’est ce qui m’avait gênée. Ici, les deux sont inextricablement mélangés, l’un ne va pas sans l’autre, et comme dans Le Livre perdu des sortilèges, on suit un schéma avec une jeune étudiante naïve, qui a des problèmes qu’elle cache, et que le fantastique va bientôt percuter pour l’emmener dans un monde qu’elle n’imaginait pas. Classique mais toujours efficace sur moi quand c’est bien écrit.

J’ai beaucoup aimé découvrir le personnage de Nola, jeune étudiante en master en Histoire, qui n’ose plus dormir car dans ses rêves, fort réalistes, elle est poursuivi par un homme aussi séduisant qu’effrayant. Avec elle, j’ai beaucoup aimé me replonger dans l’ambiance de mes années d’études en Histoire, ayant moi-même suivi ce cursus, même si l’emploi du temps décrit ressemble plus à celui d’une étudiante en licence qu’en master, notre héroïne ne préparant pas de mémoire… Peut-être une petite erreur factuelle de l’autrice, ce qui est dommage parce que le reste est très juste. On y retrouve la charge de travail que ça exige, la fatigue que ça procure, les longs moments à travailler à la bibliothèque mais aussi en dehors les petits apparts pouilleux qu’on pouvait avoir, les rencontres qu’on faisait dans les résidences, les rendez-vous au café le matin, les soirées avec les potes pour se détendre un peu et les histoires de garçons bien sûr. C’est très réaliste.

Du coup, quand le fantastique vient se glisser inéluctablement dans l’histoire, on ne le voit pas forcément venir. Tout semble « normal » dans la vie de Nola, en dehors de ses cauchemars et ses insomnies. D’accord, sa prof de mythologie nordique est étrangement familière, d’accord le bar où elle va prendre un verre lui fait entrevoir quelque chose de singulier, d’accord il lui semble avoir vu dans la rue l’homme de ses cauchemars, mais quand même. Ah, quelle héroïne naïve ! J’ai adoré la façon dont l’autrice construit peu à peu le piège qui va faire basculer son héroïne, car c’était impossible pour elle d’échapper aux filets du destin.

Ce destin, c’est le beau et émouvant Mane ou Marchand de sable comme l’appelait sa femme autrefois, la déesse de la nuit : Nott. Et qui est Nott ? L’incarnation précédente de Nola qui en a perdu tout souvenir. Mane est donc terriblement malheureux et après s’être échappé de l’Enfer nordique où on l’avait enfermé, bien décidé à récupérer sa femme. Avec un tel décor, on aurait pu s’attendre à un héros implacable, un brin autoritaire ou tyrannique, sur le modèle qu’on trouve souvent dans la mythologie mais ce n’est absolument pas le cas. L’autrice fait preuve de bien plus de finesse quand elle écrit son héros. Elle lui donne ainsi une double facette, celle de quelqu’un d’implacable et un peu effrayant, ça c’est aux yeux de la jeune Nola au courant de rien et qui a peur, puis celle d’un ancien époux malheureux, prêt à tout pour regagner le coeur de son aimée, et là la lectrice fond forcément.

La romance est cependant peu présente à ce stade de l’histoire. Elle ne débarque vraiment que dans le dernier tiers ou quart de ce premier tome, le reste ayant été consacré à la construction de cet univers entre rêve et réalité, mais pour une fois, cela ne m’a nullement gênée, car l’immersion progressive est fort réussie. L’autrice profite de ce temps qu’elle prend pour planter son décor pour nous distiller petit à petit les éléments de la mythologie nordique qui nous seront nécessaires afin de comprendre la suite. Elle évoque ainsi les 9 mondes en lesquels serait divisé l’univers dont Midgard dans lequel on vit, Asgard où vivent les dieux et Helheim dont aurait réchappé Mane. Elle utilise également non pas les divinités que tout le monde connaît désormais mais des divinités plus annexes autour desquelles elle bâtit judicieusement son histoire, ainsi elle enrichit notre culture sur cet univers. J’ai aimé croiser Meili le dieu de l’oubli, m’amuser du charme de Kvasir divinité chargée de transmettre ses connaissances et la sagesse aux hommes, rencontrer la tout feu tout flamme Sol déesse du soleil, et bien sûr le ténébreux Mane divinité de la Lune. On découvre aussi progressivement leurs pouvoirs et l’ensemble fascine vraiment.

Dans une ambiance fantastique fort réussie, l’autrice nous plonge totalement dans la découverte de cette version moderne et revisité de la mythologie nordique, avec des divinités qui aiment aller d’un monde à l’autre et notamment visiter le nôtre. Il est fascinant de voir comment ils font usages de leurs pouvoirs chez nous, du monde des rêves et des papillons de Mane, jusqu’aux pouvoirs mal maîtrisés de Nola/Nott où elle fait tomber la nuit, en passant par la tornade Sol. J’ai vraiment beaucoup aimé l’adduction des deux dans notre monde. Cela ouvre une bien jolie porte sur une aventure en plus riche en émotion, car au-delà de cette introduction du paranormal dans son petit quotidien, c’est l’introduction d’une grande histoire d’amour contrariée qui attend notre héroïne Nola et nous n’en sommes qu’au tout début. La romance est cependant déjà électrisante dans la dernière partie de l’oeuvre. Elle se sera fait attendre mais nous aura bien récompensés avec de belles émotions à fleur de peau mais aussi beaucoup de taquinerie de la part d’un Mane vraiment charmeur. Et c’est tout ce mélange : mythologie, quotidien étudiant, romance sexy et pétillante en devenir, qui m’a fait passer un excellent moment !

Gaia Alexia floute les codes entre la romance paranormale et la romance new adult à la fac dans cette courte saga en 2 tomes. Elle accroche son lecteur avec une ambiance étrange et immersive, qui tout comme pour son héroïne, plonge peu à peu le lecteur dans cet univers merveilleux et irréel qu’il peine à réaliser, le tout pour ensuite mieux nous servir une romance contrariée tragique, qui comme le phénix renaît de ses cendre pour mieux nous consumer. C’est sombrement envoûtant !

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Tome 2 : Quand la femme de sa vie ressurgit de la nuit – Fin

Après un premier tome d’exposition déjà bien riche et très immersif à lire, Gaia Alexia remet le couvert avec un second encore plus explosif où la romance prend son envol et l’action encore plus. Peut-être un peu trop rapide, elle n’en demeure pas moins fort séduisante dans cette façon de se réapproprier new romance et mythologie.

J’ai apprécié de retrouver à peine refermé le tome 1 la plume franche et directe de l’autrice qui ne s’embarrasse pas de détails et va à l’essentiel. Pas de déclaration énamourée qui ferait grincer des dents, ou du moins parcimonieusement, pas de plume ampoulée pour faire « antique », non elle s’adresse à nous de manière fort moderne. Ce fut fort appréciable même si parfois, elle s’est également perdue dans ce qui est devenu des tics de la new romance. Ainsi les premiers chapitres sont assez agaçants avec des personnages très égocentriques et boudeurs à qui on voudrait donner de bons coups de pieds au fesse pour qu’ils arrêtent de regarder leur nombril. Je me serai bien passée de ce passage obligé du genre…

Heureusement pour moi, la suite est d’un tout autre niveau. L’autrice fait prendre une nouvelle dimension à la romance qui noue la Lune et le Soleil. J’ai aimé me lancer à leur côté sur les traces laissées par cette malédiction qui les condamne. C’était superbe de les voir aussi uni, aussi bien dans le présent que le passé, acceptant chacun toutes les facettes de l’autre. C’est vraiment un couple comme je les aime où chacun sait que l’autre est suffisamment fort pour être indépendant, mais où chacun sait aussi qu’il tient terriblement à l’autre et n’a pas peur de montrer sa peur de le / la perdre. Le côté amants maudits est plutôt bien écrit avec un joli apport mythologique de ce côté-là et la romance fut également sexy à souhait avec des héros qui n’hésite pas à montrer leur désir mais aussi plus classiquement leur attachement par leur besoin de juste être en contact avec l’autre parfois. J’ai adoré.

Mais en plus de cette romance, c’est vraiment toute l’aventure autour qui m’a faite vibrer. J’ai vraiment apprécié que l’autrice nous plonge encore plus profondément dans des aspects méconnus pour moi de cette mythologie nordique. J’ai ainsi découvert d’autres mondes parmi les 9 (ou plutôt 10) qui composent leur univers. J’ai rencontré la version nordique des Parques, non sans humour. J’ai croisé d’autres dieux et j’ai aimé leurs interactions souvent retorses offrant de jolies surprises. J’ai adoré voir notre héroïne, Nola, prendre possession de ses pouvoirs et en jouer mais également en user pour se défendre et attaquer. J’ai enfin apprécié de redécouvrir les facettes de personnages plus connus comme Odin, Loki ou Thor, qui ont su apporter un beau dynamisme à l’intrigue.

Celle-ci ne manque pas de rythme. C’est simple, passés les premiers chapitres chiants où les héros se séparent et se retrouvent de manière assez maladroite (l’autrice ici a fait un peu n’importe quoi en terme d’écriture et de cohérence…), le reste ne fut que pur bonheur. Je me suis totalement laissée emporter par les vas-et-viens de nos héros entre les différents mondes, leur quête, leurs trouvailles, leurs interactions avec leurs amis et familles, les attaques subies et données, la vengeance donnée. C’était mené tambours battants avec juste quelques respirations romantiques ou humoristiques avec leurs amis au milieu pour insuffler une pause tout aussi pétillante. Très chouette.

Après, il me faut reconnaître qu’à vouloir aller aussi vite l’autrice rate un peu le coche pour ce qui est de la tension et de la pression qu’on aurait dû ressentir. Il n’y a pas de montée en puissance comme je l’aurais souhaitée mais quelque chose d’assez prévisible à la place. L’ensemble manque de tension narrative, de chausse-trappe, de développement pour approfondir l’ensemble des personnages. L’autrice se contente de ce qu’elle a énoncé au début sans aller plus loin et ce pour chacun d’eux, et le manque se fait ressentir. Elle a de l’or entre les mains et ne réussit pas la transformation malheureusement. On sent vraiment qu’elle reste trop en surface, ce qui est dommage vu le potentiel de Sol, dont la relation explosive avec son frère et hyper proche et taquine avec Nola, aurait pu me faire hurler de rire. Il en va de même pour Kvasir et son amour contrarié avec une mortelle très mal exploité pour ne pas dire abandonné. Et je ne parle pas des antagonistes aux motivations très minces quand on y réfléchit. Ça donne l’impression, un peu, d’une Sarah J.Maas au rabais, alors que tous les éléments étaient là.

Je n’ai pas boudé mon plaisir dans ce second tome. J’ai eu une belle romance profonde, émouvante et sexy comme j’aime, avec un Marchand de sable qui m’a fait rêver et une héroïne qui a su s’affranchir de son côté petite fille sage. J’ai eu de l’aventure à n’en plus finir, une jolie quête rondement menée et une vengeance bien trouvée qui a permis aux gentils de triompher. Mais bien que très pétillant, j’ai trouvé l’ensemble un peu léger. Beaucoup de belles idées, un chouette univers, mais une plume un peu pauvre et surtout un réel manque de développement à tous les étages. La duologie aurait vraiment gagné à avoir des tomes plus épais car tout était là pour en faire une lecture aussi marquante qu’ACOTAR, ma référence en la matière, et là, j’ai eu l’impression d’un dérivé un peu fade en comparaison, même si je n’ai pas boudé mon plaisir.

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