Livres - Jeunesse / Young Adult

Panier d’Albums #3 : Voleur d’anniversaires / Nasha

Deuxième numéro du rendez-vous « Panier d’albums » que j’ai emprunté à Ma petite médiathèque avec deux titres qui m’ont fait craquer par leurs dessins : Nasha de Justine Brax et Voleur d’anniversaire de Frédéric Pillot.

Titre : Voleur d’anniversaires

Auteurs : Laurent Souillé et Olivier Souillé (Histoire) – Frédéric Pillot (Dessins)

Éditeur vf : Daniel Maghen

Date de parution : 2023

Nombre de pages : 32

Résumé : Dans une sombre grotte, vivait Victor, un monstre pas vraiment méchant et sentant bon la rose. Mais, son pouvoir était terrible : il volait les anniversaires des enfants et il adorait ça !
Une fois qu’il était passé chez l’un ou l’autre, tout le monde oubliait l’anniversaire – adieu fêtes, bonbons, cotillons et cadeaux ; et malheur, les enfants ne grandissaient plus. Ils étaient condamnés à avoir toujours le même âge, à ne jamais devenir adultes… et devaient aller à l’école toute leur vie. Jusqu’à cette nuit où Victor voulut voler l’anniversaire de Bastien, un garçon de huit ans qui n’avait peur de rien… Une fable enlevée de Olivier et Laurent Souillé où pointent la peur, l’humour, la force des rencontres, la beauté des promesses et l’incroyable magie de la tendresse…

Mon avis :

Depuis que j’ai découvert leur trio lors des aventures de la Sorcière Crabibi, je suis fan du travail des trois jeunes hommes et tout particulièrement des dessins foisonnants de Frédéric Pillot. Alors quel bonheur pour cette rentrée de les voir revisiter un mythe enfant : celui du monstre qui se glisse sous les lits et dans les chambres !

Comme à chaque fois, j’ai trouvé les auteurs terriblement imaginatifs et amusants, leur croque-mitaine : un voleur d’anniversaire en mode super-héros qui a dérapé. C’est gentil, c’est loufoque et c’est touchant. Les auteurs ont un imaginaire incroyable qu’ils mettent bien joliment au service des peurs de bien de enfants, ici : celle de grandir.

Avec ce Peter Pan d’un tout nouveau tonneau, les auteurs s’amusent à écrire un conte un peu sombre au début où on perçoit parfaitement toute la tristesse de ce monstre malgré lui qui prive les enfants de leurs anniversaires comme lui en fut privé par ses parents défaillants. Mais notre monstre, Victor, va tomber sur un os et de sa rencontre avec Bastien va naître une psychothérapie d’un genre tout à fait nouveau !

J’ai bien sûr encore une fois adoré le travail des frères Souillé dont l’humour tendre coule des pages et des mots choisis pour décrire le mal être de ce monstre et le courage candide de ce petit garçon qui le confronte. Ils ont eu de sacrées idées avec ce monstre mi-croquemitaine, mi-anti-superhéros, cette revisite de Peter Pan et de Monstre & Co. de Pixar, avec une touche de L’étrange Noël de Mister Jack, je trouve. Le final est notamment particulièrement savoureux quand le maléfice s’en va et qu’on voit ce que sont devenus les adulescents.

Leur trio avec Frédéric Pillot était donc tout trouvé ici. Ce dernier a un imaginaire vraiment truculent et foisonnant avec lequel il adore remplir et remplir les pages autant qu’il peut de détails avec sa palette si colorée et lumineuse. Ici, le clair-obscur qu’offre la situation de Victor est magnifique pour rehausser encore son imaginaire graphique. Il se joue en plus du lecteur avec son dessin très rond, le gigantisme de Victor ou encore ses références. Il y a du Marvel, dans cet anti-héros masqué, il y a du King Kong aussi dans sa manière de se déplacer et de prendre d’assaut les chambres des enfants. Mais on sent aussi l’influence de Pixar et des films d’animation français de ces dernières décennies dans le dessin très rond des enfants, leur nez patate et leur tête à la Hé ! Arnold ! que j’adore ! On sent que chaque détail a son importance avec lui, du cotillon, au calendrier qui traîne, jusqu’à la pile de jouets bousculée et bien sûr le design de Victor et ses 4 bougies qui brûlent sur sa tête. Cela virevolte de partout, c’est chatoyant et magique, le cotillon chassant la tristesse d’une enfance malheureuse. Et quel humour dans les dernières pages !

Pour cette nouvelle édition, les auteurs m’ont dit avoir ajouté quelques pages autour du trauma de Victor pour expliciter celui-ci. Je trouve cela lumineux ! Et ceux-ci ainsi que Frédéric s’en sont donné à coeur joie, on le sent, tant les scènes sont tour à tour monstrueuses (cet imaginaire des monstres !) et émouvantes (la transformation du petit Victor en monstre Voleur d’anniversaires). Je suis fan !

Nouvelle lecture fabuleuse réalisée grâce à ce trio, cet album permet d’aborder de nouvelles frayeurs enfantines : celle de grandir mais aussi les traumas liées à des parents maltraitants ou maladroits. Ce ne sont pas des sujets faciles mais avec l’humour et la bonhommie des auteurs, nous avons l’album parfait pour cela entre humour enfantin et chatoyance des dessins. Personnellement, j’ai adoré !

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Vous ?

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Titre : Nasha

Auteurs : Cécile Roumiguière et Justine Brax

Éditeur vf : Albin Michel Jeunesse

Date de parution : 2023

Nombre de pages  : 40

Résumé : La maman de Nasha a perdu son sourire. Sa fille aimerait tant l’aider à le retrouver ! Sur le chemin de l’école, alors qu’elle fait la connaissance d’un mystérieux homme-ombre, elle découvre tout un pan de son histoire familiale et de celle des peuples autochtones d’Amérique du Nord… Serait-ce l’occasion de renouer avec ses origines ?

Mon avis :

Comment dire qu’ici aussi, c’est le nom de l’illustratrice, Justine Brax, qui m’a fait acheter cet album à la promesse si engageante de cri du coeur d’une minorité pour défendre sa culture.

A travers lui, je découvre enfin, j’ai envie de dire, la plume de Cécile Roumiguière, alors que j’ai deux de ses albums dans ma PAL depuis leur sortie : Peau d’âne et Les sorcières. J’ai beaucoup aimé son texte très ciselé et en mode coup de poing. Il n’y a pas de fioriture, on va à l’essentiel et en même temps ça reste poétique, ce qui se marie à merveille avec l’onirisme du peuple mis en scène ici : les Amérindiens.

De Justine Brax, j’ai aimé retrouvé la palette bleue-rouge que je lui connais avec ses multiples nuances tirant vers l’ocre ici. J’ai aimé voir son dessin prendre des allures de plus en plus tribales et son pointillisme, son travail du trait et du motif, prendre sens ici avec la culture autochtone dont il s’inspirait depuis toujours. C’est vraiment une pure merveille et ce même lorsque c’est profondément vide et triste. Elle nous conte superbement dans ses images le drame de ce peuple mais aussi sa force et sa résilience.

Les deux femmes se rejoignent donc dans un texte puissant qui évoque une famille, celle de Nasha, et en particulier sa mère, qui vit très mal l’effacement de la culture de son peuple. Mais Nasha n’est pas de cet avis, à travers ses escapades, elle va retrouver l’âme de son peuple et partager le désir de la faire (re)vivre et de la transmettre. C’est donc un texte très amer-doux, avec un cheminement douloureux, solitaire et intime, qui pousse son héroïne à regarder au plus profond d’elle-même. Cela réveillera parfois des souvenirs douloureux comme ce que les colons ont fait autrefois aux autochtones pour les pousser à être intégrés, mais c’est toujours fait avec beaucoup de finesse ici, sans notes criardes.

Par contre, même si j’ai été touchée, je n’ai pas réussi à ressentir un coup de coeur. J’ai parfois trouvé le texte et le dessin trop rigides pour parvenir à m’emporter. Il m’a manqué quelque chose dans la poésie et l’évasion peut-être que j’attendais, l’aventure étant au final très terre à terre, et pendant longtemps très solitaire et pesante également. Cela a aussi pesé sur moi.

Je salue cependant l’engagement des autrices dans ce superbe album qui est une ode à la protection et la transmission de chaque culture, même et surtout celles qu’on essaie d’occulter. Le courage de cette enfant et de sa mère sont à saluer et les autrices leur rendent très bien hommage dans un texte aux mots fins et forts, et des dessins chargés d’émotion grâce au superbe univers graphique de Justine Brax. Définitivement l’un des albums sur la culture américaine à lire !

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : Marinette, Vous ?

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9 commentaires sur “Panier d’Albums #3 : Voleur d’anniversaires / Nasha

  1. En commençant à lire ton avis sur Le voleur d’anniversaire, je me suis fait la même remarque que toi c’est un peu le Jack Skellington des anniversaires. J’aime beaucoup l’idée. 😊
    Pour Nasha, je trouve ça bien de parler des autochtones et de ce qu’a subi leur peuple à l’arrivée des colons, c’est un morceau de l’histoire du monde pas franchement rose mais c’est important d’en parler pour (espérons-le) que l’homme arrête de reproduire ces erreurs cruelles. Les dessins ont l’air sublimes, dommage que le texte ait fini par te peser parfois.
    Merci pour ces deux beaux retours !

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