Livres - Fantasy / Fantastique

Le Trône de Jasmin de Tasha Suri

Titre : Le Trône de Jasmin

Auteurs : Tasha Suri

Traduction : Thibaud Eliroff

Éditeur vf : Hachette Heores (Le rayon de l’imaginaire)

Année de parution vf : 2023

Nombre de tomes vf : 1 (en cours)

Histoire : Au royaume d’Ahiranya, l’Ère des Fleurs s’est achevée par la domination du cruel Parijat. Le temple sacré détruit, les Eaux immortelles disparues, la nation n’est plus qu’ombres et sortilèges. Des fleurs poussent sous la peau, des feuilles dans les yeux ; et la sève des arbres se change en sang. Les yakshas de la magie ancienne se sont réfugiés dans la forêt, et la rébellion couve.
Au coeur de ce chaos, Malini, la princesse parijati captive, droguée à la fleur-aiguille, et Priya, une servante ahiranyi aux pouvoirs oubliés, créent des liens tissés d’intérêts contradictoires, d’attirance interdite et, d’enjeux de pouvoir secrets. Des choix difficiles sont à venir, qui explorent les méandres de leurs âmes – alors que l’espoir d’une nation se lève.

Mon avis :

Voici une lecture avec laquelle je ne vais peut-être pas me faire des ami(e)s ^^! car après la mode de la dystopie place à celle de la romantasy, et dans les deux cas j’ai l’impression de lire des ouvrages plus destinés à un public de jeunes adultes dans lequel je ne me retrouve pas. Je pensais que ce ne serait pas le cas ici avec Le Trône de Jasmin malheureusement arrivé à la fin du premier tiers, j’en ai retrouvé tous les mécanismes…

J’étais pourtant enthousiaste, suite à de belles chroniques sur la version anglo-saxonne, à l’idée de découvrir l‘une de mes premières fantasy d’inspiration indienne, ayant adoré les univers du Moyen-Orient et de l’Asie. L’éditeur en plus nous offre le choix entre deux très belles éditions aux teintes rappelant les sari indiens. J’ai opté pour ma part pour le broché ayant du mal avec le rose déjà, mais encore plus avec son association au orange… Qu’importe ! L’objet est qualitatif et l’éditeur s’amuse, comme Monsieur Toussaint Louverture, à rendre hommage aux acteurs du livre en fin de volume, ce qui me plaît énormément.

Ma lecture, elle, fut plus compliquée. Non pas que la plume soit complexe, loin de là, elle est simple et facile à suivre. Mais je n’ai pas adhéré au découpage et mécanismes induits dans ce volume. L’éditeur ne le précise pas mais voici le premier tome d’une saga qui en présente 2 en VO, et dans ce premier volume, l’introduction à l’univers fut riche et immersive. En revanche, l’arrivée de la romance, en mode Young/New Adult m’a totalement  cassé mon rythme de lecture, et le final en mode : « ah oui, on a une rébellion à raconter », m’a semblé un peu précipité et survolé. Ouille.

Je vais cependant commencer en vous présentant ici ce qui m’a plu. Ce fut dépaysant de plonger dans cet univers d’inspiration indienne. L’autrice nous noie d’abord dans un monde dont on n’a pas les codes et nous révèle ensuite ceux-ci progressivement et avec parcimonie, un procédé qui m’a plu, surtout que l’éditeur avait eu la riche idée de l’accompagner de cartes. Essentiel pour visualiser ce type de récit. J’ai donc aimé sentir les odeurs des épices, éprouver la moiteur des lieux, sentir l’omniprésence de la nature et me faire frôler par leurs tissus bariolés. L’autrice nous transporte vraiment mais elle le fait subtilement. Elle n’oublie pas non plus de réutiliser le côté très hiérarchisé de cette société pour le transposer dans son histoire avec une forme de lutte des classes/des castes reposant sur un peuple en ayant colonisé et presque exterminé un autre, sans parler de la question de la place des femmes, celles-ci étant reléguée à des poules pondeuses, des mères de substitutions ou des sacrifices, avec ce roi fou qui les brûle sur le bûcher pour ses croyances. Non, l’univers m’a vraiment charmée.

 J’ai aussi beaucoup apprécié la magie invoquée dans cette histoire. Celle-ci repose sur une dimension naturelle et minérale vraiment envoûtante et un peu effrayante en même temps. Elle est à la fois nourricière et menaçante. J’ai aimé découvrir aux côtés de l’héroïne, son histoire, son passé, ses ramifications, ses utilisations et ses mystères. Le récit de ce passé magique rattaché au pays colonisé était mystérieux et entraînant. Celui de la mise en situation avec les scènes où l’héroïne utilise maladroitement ses pouvoirs et les développe était fascinant. Ce sont vraiment de bonnes bases surtout quand c’est couplé comme ici avec un récit de revendications plus politiques et sociétales.

La première partie m’a ainsi beaucoup séduite, de même que le développement de ces deux pans dans la suite de l’histoire. J’ai aimé faire connaissance de ces personnages sous le joug d’un pouvoir qu’ils n’ont pas demandé et qu’ils souhaitent combattre. C’est très classique mais l’autrice nous rendait les personnages attachants, que ce soit la servante Priya au passé d’enfant-soldat magique, la princesse enfermée en mode Raiponce par son frère, l’épouse du général du pays conquérant qui tente de continuer à faire vivre ses racines, ou encore ce petit garçon frappé d’une sorte de malédiction végétale avec pourriture à la clé ou l’ancien camarade de Priya qui tente de retrouver ses sources pour mieux lutter contre l’envahisseur. Tous avaient un je ne sais quoi qui me parlait.

La suite cependant ne m’a pas donné raison. A partir du moment où l’autrice introduit une dynamique romantique entre Priya et sa maîtresse la princesse, tout se casse un peu la figure pour moi. Certains aimeront, je n’en doute pas, car on a une romance saphique qui peut toucher, qu’on tombe dans un schéma de rébellion qui amène des changements et qu’on voit des portraits de femmes fortes qui partent au combat. Moi, malheureusement, je n’y ai vu qu’un énième roman reprenant des poncifs, allez on va dire des tropes pour être gentilles, auxquels je n’accroche pas. Ce schéma de romance entre deux personnages de peuples différents où l’un se sert de l’autre au début, je trouve ça nocif. Ce schéma où la jeunesse, parce que c’est quand même elle qu’on voit ici, par à l’assaut du pouvoir corrompu, c’est vu et revu, aussi bien en SF qu’en fantasy, et surtout dans les romans estampillés « jeunesse / Y.A et N.A » de cette dizaine de dernières années. Et moi, je n’accroche pas hors rares exceptions, ou plutôt je n’accroche pas, j’en ai trop lu, trop vu. Certes, il y a des tropes que j’ai lu mille fois et dont je ne me lasse pas mais celui-ci n’en fait pas partie…

Du coup, passé le plaisir de la découverte de l’univers, je me suis traînée comme un boulet cette romance naissante compliquée, qui sera émouvante pour certains vu la dynamique de tension entre les filles et leurs différents camps, mais que je n’ai pas aimée. Cela fut long très long. On tente de nous faire croire qu’on nous montre la rébellion en marche, mais quand on a pu assister à de vraies comme dans Poudremages où on était réellement aux côtés des instigateurs, en véritable immersion, on se rend compte de l’enfumage. Ici, on survole de très loin. Cela manque de corps, de profondeur pour moi. C’est plein de gentilles idées mais c’est trop léger. En plus, cela se termine extrêmement vite à base de coup de magie et de prophétie qu’on nous oblige à accepter. Ce n’est pas ce que j’attendais. 

L’autrice avait pourtant largement assez de pages pour développer son propos mais elle brode, elle brode, elle se répète, elle se répète et on n’en finit pas de traîner avant qu’il se passe réellement quelque chose pour que les lignes bougent comme elles se doivent. Certes, on en apprend plus sur ce monde d’inspiration indienne, ce qui l’anime, les forces en cours, les relations entre les protagonistes, etc. mais comme c’est en surface, ça prend de la place pour pas grand-chose. Et comme en plus, on voit arriver à grands sabots des mécanismes usés jusqu’à la corde dans d’autres récits de rébellion qu’on connaît bien, il n’y a pas vraiment de surprise ou de pic de tension. Certes cela accélère en terme de tempo, mais l’intensité est plutôt plate 99% de la lecture.

J’étais vraiment emballée à l’idée de découvrir une histoire dans un univers indien. J’ai beaucoup aimé les influences de ce coin de monde, ses odeurs, ses couleurs, sa mythologie, ses thématiques. J’ai beaucoup moins aimé le classicisme du schéma narratif, les facilités du scénario dans l’écriture des personnages et de relations, au point d’en devenir plat et prévisible. Je m’attendais à vibrer, je me suis un peu ennuyée. Je sais que c’est vraiment une question de goût et de lassitude de ma part face à ce genre de tropes. Les amateurs du genre seront conquis par ce titre, qui aura des qualités à leurs yeux, je n’en doute pas. Je regrette un peu mon achat dans ce gros format onéreux ^^!

-> Mais d’autres lecteurs ont bien plus aimé que moi, n’hésitez pas à lire leurs avis : L’Ours Inculte, Dup, Vous ?

 

8 commentaires sur “Le Trône de Jasmin de Tasha Suri

  1. Merci pour ta franchise, Alexandra, et merci d’avoir également mis en avant les points positifs du roman. Comme toi, le cadre me tente énormément, mais la romance risque de me décourager aussi. J’essaierai d’y jeter un coup d’oeil à l’occasion, par curiosité.

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    1. Merci. Ce ne sont jamais les chroniques les plus faciles, surtout quand on n’a eu que des échos de lecteurs convaincus, mais je trouve important de nuancer au cas où pour d’autres lecteurs me ressemblant.
      A voir où chacun place sa limite. Après si l’univers avait été plus étoffé, je pense que la romance m’aurait moins gênée 😅

      Aimé par 1 personne

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