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Happiness de Shûzô Oshimi

Titre : Happiness

Auteur : Shûzô Oshimi

Éditeur vf : Pika (seinen)

Années de parution vf : 2018 – 2020

Nombre de tomes vf : 10 (série terminée)

Résumé du tome 1 : Makoto, souffre-douleur de sa classe, fait la connaissance d’une fille en haillons : après lui avoir sucé le sang et grièvement blessé, elle lui laisse le choix entre mourir et devenir comme elle. Le jeune homme choisit de vivre et, de cette façon, ne subit plus ses camarades. Mais il réalise bientôt qu’il a quitté un enfer pour un autre.

Mon avis :

Tome 1

J’ai hésité à essayer ce titre parce que même si je les trouve sympa, je ne suis pas non plus une énorme fan des autres titres de l’auteur (Dans l’intimité de Marie, Les Fleurs du Mal). Mais j’ai trouvé Happiness très intéressant et surtout très vite addictif. Ce premier tome se lit très vite et le dessin est vraiment dynamique.

Nous suivons l’histoire de Makoto, souffre-douleur de son état, qui au détour d’une rue sombre va faire une drôle de rencontre qui va bouleverser sa vie. Il va grâce à cela gagner en confiance et se révéler. Il va devenir plus courageux, moins timide. Il va oser approcher les filles, aider les autres et surtout voir le monde différemment.

La façon dont Shûzô Oshimi aborde le sujet du vampirisme n’est pas forcément hyper original. C’est encore une énième métaphore de la métamorphose, de l’adolescence et du désir. Cependant, il le fait bien et sait rendre son récit beau et dynamique.

Les passages où Makoto est pris de vertige et voit tout sous le prisme du vampirisme ont des faux airs des tableaux de Van Gogh, c’est magnifique. En plus, avec le crayonné du mangaka, ça donne un petit plus très spécial aux dessins que j’aime beaucoup.

L’histoire est facilement addictive, les pages défilent sans qu’on s’en rendent compte. Il y a peu de texte et pourtant tout est limpide. C’est intéressant de découvrir le quotidien banal de Makoto puis de le voir changer petit à petit. J’aime la façon sobre dont on parle du harcèlement scolaire, ce n’est pas lourd et plein de pathos comme tant de fois. Et puis, on voit un héros qui ne va pas non plus déraper juste parce qu’il a changé et semble avoir certaines capacités. Tout se fait de manière simple et naturelle.

J’ai vraiment beaucoup aimé ce premier tome et il me tarde de voir les prochains changements de Makoto dans le prochain tome aussi bien intimement que dans ses relations avec les autres.

Tome 2

Je me suis encore régalée en lisant ce deuxième tome. Graphiquement, c’est une superbe expérience. Shûzô Oshimi fait des tas d’expérimentations graphiques sous acide et ça rend très bien. Cela donne une côté fou, côté psychédélique qui correspond à merveille à l’histoire, rien que pour ça, ça vaut le coup.

Parce que l’histoire, elle, reste assez banale. Après avoir aidé Yuki la dernière fois, Makoto se retrouve dans ses bonnes grâces. Yuki l’invite donc à le suivre partout comme s’ils étaient potes depuis toujours sauf que ça ne plaît pas beaucoup à sa copine. Rien que du vu et revu ici avec cette ambiance de petit loubard qui fait sa crise d’ado. Honnêtement, ça ne m’intéresse pas du tout.

Par contre, quand Makoto se fait lourder par les voyous de la dernière fois et que ça dégénère complètement, là c’est vraiment bon. Un nouveau vampire, Saku, apparait et il a l’air complètement déglingué. Il dynamite complètement la fin de ce tome et ouvre plein de possibilités avec notamment l’arrivée de la créatrice de Makoto dans les dernières pages. Ça ne peut que donne envie de se jeter sur la suite rien que pour suivre la suite des aventures de nos chers vampires.

Tome 3

Je trouve l’histoire de plus en plus addictive au fil des pages. Graphiquement c’est un voyage intense à chaque page dont je savoure chaque recoin. Je suis vraiment fan du travail de Shûzô Oshimi sur ce titre. Il revisite le vampirisme avec beaucoup de tact et de modernité.

Dans ce tome, Makoto court un peu dans tous les sens. Il va d’abord devoir aller sauver Yûki qu’il a lui même mis en danger. Puis, il va devoir veiller sur lui, en voyant ce qu’il est en train de devenir. Il reçoit également une proposition intéressante de Nora, sa créatrice. Et enfin, il se met à intéresser de mystérieux hommes en costumes dont il est sauvé in-extremis par Yûki avec qui il forme un joli duo finalement.

Tout s’accélère dans ce tome. On continue à voir Makoto lutter contre sa condition de vampire, en complète opposition avec une Nora et un Yûki qui l’ont acceptée, eux. Leurs camarades de classe commencent à être impliquées dans tous ça, de même que leurs parents. L’intrigue s’élargit ainsi et prend plus d’ampleur. Je suis curieuse de voir la direction que cela va prendre.

Tome 4

L’histoire continue à se lire à une vitesse folle alors qu’on n’avance pas vraiment au final. Dans ce tome, l’ambiance commence à changer un peu. Le fantastique est toujours bien présent, complété par une bonne dose de gore par moment, mais en plus vient s’y greffer un petit côté thriller bienvenu.

Makoto prend sa décision concernant l’offre de Nora, qui a rencontré Yuki et perçu la dimension sombre qu’il y a en lui. Ce dernier a beaucoup de mal à gérer son vampirisme et quand il va rejoindre Nao, ça dégénère. J’ai du mal avec le côté très cru des différentes scènes avec lui. Je trouve dommage que l’auteur tombe aussi dans le cliché du vampirisme métaphore pour le sexe, ça manque de subtilité. Par contre, j’aime que tout le monde ne réagisse pas comme Makoto et qu’il y en ait un pour qui ça se passe mal. Du coup, je suis impatiente de voir ce qu’il pouvoir faire d’autre encore.

Enfin, l’arrivée dans l’histoire de Sakurane est une bonne chose. Il va sûrement épauler Gosho dans sa recherche de la vérité et apporter une touche en plus pour contrebalancer tout ce fantastique. D’ailleurs, la dernière scène semble aller dans ce sens avec l’intervention de la police contre Makoto et Nora après les différents meurtres qui ont eu lieu. J’aime.

Tome 5

Nouveau tome tout aussi passionnant que les précédents et là je commence à mieux voir où se dirige l’histoire.

Ça s’ouvre sur un chapitre intense avec l’attaque des forces armée contre Makoto et Nora, le temps d’un duel très violent parfaitement mis en scène par le mangaka. L’issue était imprévisible jusqu’au bout et les conséquences seront très importantes pour la suite, je parie. C’est en tout cas, l’une des raisons qui me poussent à avoir très envie de me jeter sur les prochains tomes.

Puis, nous comprenons dans les chapitres qui suivent la raison de l’introduction de Sakurane. Après que Yuki ait appelé Gosho à l’aide parce qu’il ne sait plus quoi faire après sa dernière grosse connerie, c’est Sakurane qui lui propose une voie de sortie. Celle-ci n’est pas aussi inattendue qu’on pourrait le penser, vu que j’avais assez vite deviner que ce type allait être un fanatique. Par contre, la violence avec laquelle il traite Gosho m’a surprise, de même que la réaction plus mesurée que prévue de Yuki. Leur duo promet.

L’auteur conclut son tome par un chapitre qui fait un bond dans le temps intéressant. Les promesses sont là pour une suite encore nerveuse et peut-être plus politique, complotiste qu’au début. Ça me plaît. En plus, les dessins sont toujours top. Il y a une vraie intention derrière chaque trait et ça se sent !

Tome 6

Oshimi nous embarque dans un nouvel arc de son histoire. Pour l’introduire, il nous propose un tome plus calme et moins psychédélique que les précédents, dans lequel on suit la nouvelle vie de Gosho. Les premières pages ont un petit côté tranche de vie assez surprenant ici. Mais petit à petit, on sent remonter les terreurs de Gosho et on sent bien que ça va nous exploser au visage à un moment donné.

J’ai beaucoup aimé le changement de ton introduit par le changement de personnage principal ici. C’était touchant de voir Gosho dans sa vie quotidienne. C’était comme suivre quelqu’un en rééducation, mais une rééducation à la vie en société, et Oshimi nous montre que c’est très difficile et qu’il peut y avoir des rechutes. L’intervention de son collègue de travail est alors très significative. C’est vraiment un chic type !

J’ai trouvé la dynamique bonne, que ce soit lors du rapprochement entre les deux personnages, où lorsque le passé de Gosho commence à la rattraper. L’équilibre est parfait. L’auteur nous emmène tranquillement là où il le veut sans qu’on le remarque. Ainsi les derniers chapitres se lisent à toute vitesse quand on sent poindre le retour de notre intrigue sur les vampires avec le retour aux sources d’une Gosho qui se sent enfin suffisamment forte pour ça, et surtout la quête dans laquelle elle se lance pour enfin trouver la paix. Je suis très impatiente de poursuivre.

Tome 7

La série a marqué un coup d’arrêt pour moi avec ce tome. Je n’avais pas du tout pensé que l’histoire prendrait cette voie et j’ai vraiment eu le sentiment d’un manque de cohérence ou du moins d’une série dont l’histoire s’éparpille un peu trop parce que l’auteur n’avait peut-être pas une vision globale de son cheminement.

Si je comprends le besoin de Gosho de partir à la recherche de ses amis disparus – même s’il lui a fallu beaucoup de temps pour ça… -, je suis plus surprise par ce qu’elle trouve. En effet, la voir tomber sur une secte dont le gourou est comme par hasard Sakurane, celui qui lui a fait du mal, est un peu gros. On plonge de plus en plus dans la facilité et les grosses ficelles. Il n’y a plus l’ambiance fantastique des débuts où c’était inquiétant parce qu’on ne comprenait pas trop et parce qu’on ne voyait pas trop. Maintenant, on est dans une banale histoire de vampire et de secte. Très peu pour moi… Alors oui, c’est glauque, sombre, violent. On sent bien le désespoir de chacun mais j’ai de plus en plus de mal à voir où l’auteur veut nous emmener.

Ce tome qui s’est lu très rapidement fut une petite déception pour moi, surtout dans une série que je trouvais si intéressante jusqu’à présent parce qu’elle n’était pas faite du même moule que les autres. J’espère que la suite me donnera tort.

Tome 8

Il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis, je reviens sur ce que je disais la dernière fois, l’auteur sait parfaitement où il va et c’est terriblement sombre mais sombre, au point que c’en est effrayant !

En tentant de sauver Yuki, Gosho a réveillé la bête en Sakurane qui passe à l’action. Ce type est juste complètement fou. L’auteur nous propose avec lui une vraie plongée dans le psyché d’un malade mental et c’est terrible. J’ai adoré la façon dont c’est fait. Le mangaka y va tranquillement mais nous assène de vraies horreurs sur le passé de celui-ci. Retracer son parcours soulève le coeur, mais on voit combien Oshimi avait tout calculé et finalement Gosho se retrouve l’outil du but ultime de Sakurane, puisque c’est à cause d’elle que tout dérape à la fin. Je plains ce pauvre Yuki qui s’était enfin réveillé mais son appel à l’aide va peut-être enfin permettre de retrouver les personnages qui nous manquent encore.

En tout cas, j’ai complètement raccroché les wagons avec ce tome de haut vol. Il se lit peut-être rapidement une fois de plus et est moins marquant que d’autres du point de vue graphique, il n’y a pas cette touche de folie à la Van Gogh qu’on avait pu voir parfois, mais bon sang que l’intrigue est sombre, glauque et dérangeante. J’adore ! Cette plongée dans la folie de Sakurane me marquera.

Tome 9

Des mois plus tard, après avoir fait une longue pause, je reviens pour terminer cette étrange série. Ce fut encore une lecture intense, dérangeante, malaisante. On replonge dedans même des mois plus tard sans la moindre difficulté. Un plaisir fascinant et dérangeant est toujours là grâce à la plume étrange d’Oshimi, qui marque autant qu’il perturbe.

Tout va très vite dans ce tome. D’entrée de jeu, le rythme est effréné, la tension omniprésente, le glauque partout au point d’être étouffant. L’auteur nous attrape et ne nous lâche pas un instant.

J’ai trouvé la première partie surprenante mais libératoire. On y retrouve Makoto qui se réveille après un sommeil de plusieurs années. Il fait alors des découvertes surprenantes mais qu’on a peu le temps d’appréhender car l’auteur nous embarque rapidement ailleurs. C’est cependant le moment de retrouvailles et d’au revoir marquants !

Au revoir et retrouvailles qui se poursuivent dans une seconde partie dérangeante et malsaine au possible finissant de manière haletante, dans laquelle Goto est au coeur de l’intrigue. La secte est toujours là et son chef est encore plus barré qu’avant après ce qui est arrivé à Yuki. Cela donne lieu à des scènes justes terrifiantes qui vont longtemps me marquer je pense tant on atteint un degré d’horreur élevé.

Cependant tout cela reste très flou et je me demande vraiment ce que l’auteur nous réserve à la fin ?

Tome 10

Comme je m’y attendais, je n’ai pas eu de réponse à ma question. Au final, je ne sais pas trop quel était le message de l’oeuvre, c’était vraiment très emberlificoté dans ce dernier tome mais que c’était intense. Alors peu importe, le voyage valait le détour !

La transformation finale de Makoto est superbement mise en scène, le temps d’un chapitre juste dantesque où l’auteur fait éclater tout son génie graphique, poétique et métaphorique. On ne comprend pas grand-chose et bien ce n’est pas grave. Ce moment restera juste l’un des plus marquants que j’ai pu lire avec une intensité rarement atteinte.

Après cela, je pensais presque voir la série s’achever là-dessus. Après tout, Makoto avait atteint son but, libérer l’âme de Yuki et sauver Goto. J’ai donc trouvé les chapitres suivants un peu faibles, un peu vivotant, un peu fades même. C’était mal connaître Oshimi qui y a instillé à chaque fois des petits moments bouleversants.

Et tout prend sens (ou presque) dans l’ultime chapitre de cette vaste et pourtant si intime histoire où l’on voit tout le monde vieillir à travers les années sauf… Makoto et celle qui est restée avec lui. C’est bouleversant.

Alors oui, je reste frustrée de ne pas avoir vu la partie scientifique avec ses expériences et tout ça développer. Oui, j’ai trouvé que certains développements (la secte notamment) sortaient de nulle part, mais le titre fut tellement époustouflant graphiquement, tellement étrange et déstabilisant, que je ne peux qu’en ressortir marquée.

Quelle folie ! Quelle intensité ! Quelle virtuosité ! Un graphisme de malade. Une montée en tension de fou. Une transformation bouleversante. Une série complexe mais qui restera dans les mémoires !

8 commentaires sur “Happiness de Shûzô Oshimi

  1. Je partage ton avis sur le tome 4
    « J’ai du mal avec le côté très cru des différentes scènes avec lui. Je trouve dommage que l’auteur tombe aussi dans le cliché du vampirisme métaphore pour le sexe, ça manque de subtilité. Par contre, j’aime que tout le monde ne réagisse pas comme Makoto et qu’il y en ait un pour qui ça se passe mal. Du coup, je suis impatiente de voir ce qu’il pouvoir faire d’autre encore. »
    +1
    Le côté bestial de Yuki met mal à l’aise et nous voyons le résultat en plus …

    Aimé par 1 personne

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