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Shinobi Gataki de Nikiichi Tobita

Titre : Shinobi Gataki

Auteur : Nikiichi Tobita

Éditeur vf : Kurokawa

Année de parution vf : 2019-2020

Nombre de tomes : 5 (série terminée)

Histoire : Ils utilisent des techniques inconnues. Une force puissante et mystérieuse parcourt leur corps et ils n’ont plus rien d’humain ! Ce sont les Ninjas !!
Réputés pour avoir subi des entraînements terribles, utilisant un sabre qui ne fait qu’un avec leur esprit et possédant une puissance physique exceptionnelle ! Ce sont les Samouraïs !!
Plongez-vous dans l’univers de Toranosuke, le « Chasseur de Ninjas » et de sa quête de vengeance !

Mon avis :

Tome 1

J’ai tardé à découvrir cette nouvelle série seinen de Kurokawa alors que pourtant l’univers m’intéressait, parce que j’avais peur qu’elle ne supporte la comparaison avec l’Habitant de l’infini que j’ai lu cette année et qui est un must dans le genre seinen en costumes d’époque avec combats de samouraïs.

Comme je le pressentais, Shinobu Gataki ne soutient pas la comparaison, cependant c’est un bon et honnête divertissement fait avec un certain talent. On y découvre un univers assez original où samouraïs et ninjas s’affrontent à coup de techniques d’un autre monde. Notre héros est un exterminateur de ninja lui-même samouraï qui mène en parallèle une quête de vengeance vis-à-vis de celui qui a exterminé sa famille.

Le premier chapitre est vraiment très bon. Il est bien rythmé et plante rapidement le décor et les enjeux, donnant très envie de lire la suite. Le mystère est au rendez-vous, tout comme l’action dont l’auteur nous livre des scènes très dynamiques et bien mises en scène. C’est classique voire déjà vu mais efficace.

Les chapitres suivants sont moins intenses, plus courts et avec parfois un humour inapproprié ou du moins qui me dérange dans l’ambiance sérieuse voulue ici, mais ils participent bien au développement de l’univers et des personnages, donnant à nouveau envie de lire la suite.

Les dessins sont comme l’ensemble du titre, fins et précis mais manquant un peu de personnalité avec leur côté assez lisse ou plutôt attendu. Ils sont en effet sans surprise dans la norme de ce qu’on trouve dans la nouvelle vague du seinen à cadre historique. Mais pour autant, ils sont très plaisants à voir et l’auteur sait parfaitement en jouer pour nous livrer de belles scènes de combat.

Pour conclure, même si le titre manque encore de carrure, de personnalité et souffre de la comparaison facile avec l’Habitant de l’infini, il reste un bon divertissement bien fichu et prometteur que je me plairai à suivre.

Tome 2

Shinobi Gataki continue sur sa lancée à être une bonne surprise pour moi. Alors non, je ne retrouverai jamais la profondeur de l’intrigue de l’Habitant de l’infini, ni le sens de l’esthétisme de Hiroaki Samura dans les dessins de Nikiichi Tobita, mais nous avons de tout de même un très bon divertissement bien pêchu.

Dans ce deuxième tome, nous continuons à suivre les envies de vengeance du héros qui s’est acoquiné de toute une bande de guerriers comme lui afin de répondre au plan d’un mystérieux bonhomme qui veut éliminer Nobukage Onaga, le maître de celui qu’il cherche, ce qui est parfait pour lui !

L’auteur livre une belle et classique histoire de vengeance mais pour accrocher le lecteur un peu plus adulte, il n’oublie pas d’ajouter de bons twists. Ainsi, le « big boss » n’est peut-être pas exactement celui que l’on croit. Il accorde aussi une belle place à la politique faisant tout de même un peu écho à l’histoire passée japonaise où il y avait bien une rivalité entre le shogun et les autres seigneurs de guerre, et entre le shogun et l’empereur. Il suffit de bien lire entre les lignes.

Cela donne un univers vraiment bien exploité avec des combats, des plans de vengeance, des sauvetages, etc. L’ensemble est bien rythmé et on s’ennuie nullement. De plus, les personnages évoluent et l’équipe que l’on suit s’agrandit au fil des chapitres. Ils sont bien définis et chacun apporte quelque chose à l’intrigue. Même si c’est classique cela reste donc très agréable à suivre et on est surpris à plusieurs reprises.

Ainsi avec ses dessins plus que sympathiques qui dynamisent bien l’histoire et restent très lisibles lors des scènes de combat, ainsi que son intrigue qui gagne en profondeur avec un héros qui se dévoile et devient plus complexe, et une pointe d’humour bienvenue au milieu de toute cette violence, Shinobi Gataki confirme être vraiment une bonne surprise.

Tome 3

Reprise de la série après une pause obligée à cause du Covid. C’est un plaisir de retrouver cet univers, surtout avec un tome qui passe la seconde vu qu’on est désormais à mi-chemin. La narration a beau être classique, c’est vraiment une lecture très dynamique et donc jouissive.

Notre héros a réuni une fine équipe autour de lui pour s’en prendre à Nobunaga mais ça ne tourne pas du tout comme prévu et le voilà à devoir affronter son ancien ami ainsi que les acolytes de ce dernier, des ninjas modifiés par Nobunaga. Dans un enchainement très classique, nous nous retrouvons vite dans une mise en scène de tournoi typique des shonens où les membres de chaque groupe vont devoir affronter leur équivalent en face à terrain découvert.

Je n’avais pas vu venir cette évolution du récit, où les héros vont devoir se débarrasser de leurs adversaires pour affronter ensuite le big boss, mais je n’en suis pas déçue pour autant. Au contraire, maintenant que je me suis mise dans la tête que c’était différent des autres titres sur les samouraïs que j’ai lu avec un côté plus fantastique et classique, j’aime assez ce choix et je le trouve très frais. En effet, les combats s’enchainent bien. Ils permettent de mettre en valeur les qualités et la forte de personnalités de chacun des samouraïs ayant rejoint Toranosuke. On les voit enfin à l’oeuvre et leurs pouvoirs sont souvent explosifs et surprenant. Format court oblige, en plus cela va vite et ça ne traine ni en longueur ni en palabre, on va à l’essentiel : de la baston bien assumée et spectaculaire avec des techniques qui en jettent. J’ai beaucoup aimé cet aspect décomplexé du titre !

Pas de nouveauté sinon du côté des personnages en soi. Le héros est assez discret dans ce tome, ce sont ces collaborateurs que l’on voit surtout à l’oeuvre. J’imagine que l’auteur le réserve pour les guerriers les plus forts qui viendront à la fin. C’était sympa du coup de découvrir les autres en situation de combat extrême. Place d’abord à Kinji et sa lance face à l’homme en acier, on le découvre l’héritier d’une technique terrible venant des fins fonds des mythes de la série. Je suis plus réservée concernant le combat d’Ayako et son pseudo discours féministe tandis qu’elle se bat inutilement à poil… Certains trouveront peut-être ça drôle ou symbolique, mais j’ai trouvé ça malheureusement trop cliché pour ne pas dire pire. Mais sa technique était impressionnante. Place ensuite à celui très rapide de Tenshin face à Api que j’ai trouvé un peu redondant avec les précédents et trop nonchalant. On termine avec une forme plus originale avec 2 duos qui commencent à s’affronter Erin et Onima côté ninjas, contre Kabuto et Akari chez les samouraïs, l’occasion de découvrir le passé de notre homme masqué.

L’histoire continue donc d’avancer d’un bon pas, pas forcément dans la direction et la forme que j’attendais mais le résultat me plaît. C’est à la fois drôle et sérieux, avec des combats bien orchestrés qui ne trainent pas en longueur et font à l’essentiel, offrant de belles scènes d’affrontements. Je n’en demande pas plus !

Tome 4

Tome clé pour l’histoire, cette avant-dernière lecture avant la conclusion a su tenir toutes ses promesses avec une actions à tous les coins de pages et des révélations qui font mal !

Shinobi Gataki est désormais la série la plus longue de l’auteur, bravo à lui. Dans cette suite, il reprend les ingrédients de la fois précédente : combats aux sommets avec attaques intenses et révélations sur le passé des personnages expliquant pourquoi ils en sont là. C’est classique mais terriblement efficace surtout dans un univers aussi sombre peint sous le trait fin et ciselé mais rempli de noirceur de Nikiichi Tobita.

L’aventure reprend sur une note on ne peut plus tragique avec le combat à mort de Kabuto, personnage représentant à merveille la figure du protecteur que j’aime tant dans ce genre de récit. Il nous quitte bien trop tôt mais aura su honorer son personnage. Ses amis sont alors un peu abattus et pensent même renoncer, c’est sans compter sur Kazemaru qui reçoit enfin l’ordre d’aller affronter sur rival de toujours : Toranosuke.

Sur le modèle des duels précédents, les deux anciens amis se livrent à une superbe passe d’arme où chacun reste fidèle à ses idéaux, l’un se battant pour les ninjas et l’autre pour les samouraïs. Les supers techniques pleuvent, l’un invoquant les terribles techniques de sa famille et l’autre le pouvoir de ses bêtes protectrices. C’est dantesque à suivre, l’auteur ayant un sacré talent pour montrer l’impact de cet enchaînement de violence pure. La mise en scène est top.

Puis comme les autres fois, on bascule dans le passé pour comprendre ce qui les a menés là. C’est très enrichissant et cela montre bien combien avoir une vision différente d’un même événement peut conduire au pire, surtout quand on est manipulé. C’est terrible. On me dira que c’est vu et revu. Je dirai que ce n’est pas faux mais je trouve cela bien fait ici. On sent parfaitement la tragédie qui se profile. L’auteur ne perd pas de temps en atermoiements pour nous conter tout ça et il va à l’essentiel sans rien dénaturer. Il utilise très bien les ressorts fantastiques de son récit qu’il mélange avec de grandes lignes de l’histoire japonaise (la fin du shogunat). Personnellement, ça me plaît beaucoup.

Ainsi nous abordons la dernière ligne droite de l’histoire de manière fort agréable avec un récit qui se construit de manière parfaitement logique, qui reste prenant, qui offre de beaux combats et quelques belles réflexions. C’est classique, ça ne révolutionnera pas le genre mais c’est bien fait et l’auteur mène bien sa barque, je n’en demande pas plus !

Tome 5

Shinobi Gataki aura été un bon divertissement jusqu’au bout, mais avec un final, qui fut une sorte de course rapide à la démesure, on peut ressentir une certaine frustration et s’interroger sur ce que ça aurait pu donner si l’auteur avait eu plus de pages pour développer ses idées.

J’avais déjà eu ce sentiment lors des précédents tomes mais ici ce fut prégnant. J’ai vraiment eu le sentiment en lisant pourtant ce tome bien épais que l’auteur se précipitait. L’intrigue se découpe en deux parties : tout d’abord l’affrontement confraternel entre Toranosuke et son ancien ami Kazemaru, puis celui titanesque face à Nobukage.

Le premier, qui fut préparé de longue haleine, a su, dans l’ensemble, tenir ses promesses. Ce fut un moment émouvant entre deux hommes qui ont un lourd passif. L’auteur utilise bien la dimension fantastique de son récit. Le seul hic, c’est que cela va bien trop vite et cela rend les revirements peu crédibles malgré l’émotion que souhaite y insuffler l’auteur. J’ai tout de même apprécié ce moment hautement symbolique entre ces deux anciens amis qui étaient comme des frères autrefois.

Le second, lui, m’a bien moins emballée. Avec Nobukage, on est vraiment clairement sur une course à la puissance comme on en trouve dans les shonen de nekketsu. Mais ici, le faible nombre de pages qui y est consacré, rend cela un peu ridicule. Alors oui, son pouvoir est effrayant, mais il est ensuite défait tellement facilement que ça casse toute la crédibilité de ce qui a été raconté précédemment. C’est à nouveau vraiment dommage parce qu’à l’inverse, ici, j’ai beaucoup aimé le jeu qui a été fait autour de ce personne, sorte d’uchronie vivante d’Oda Nobunaga, personnage historique dont je suis les exploits guerriers et politiques dans un autre manga (Le Chef de Nobunaga). Ici, j’ai vraiment eu l’impression que l’auteur détournait sa légende pour nous raconter sa vision sombre de l’oppression qu’il a fait ressentir à certains à l’époque. C’était très bien vu de ce point de vue là. Dommage que la dimension fantastique ne suive pas bien et confère plus de ridicule qu’autre chose au personnage.

Ce dernier tome a donc offert une suite de combats et de prises de conscience plus ou moins bancales où les intentions louables de l’auteur, aussi bien pour apporter de l’émotion que pour faire une critique historique, sont perdues au milieu d’une ridicule montée en puissance concrétisée par un enchaînement d’attaque spéciale. Cela crée une dissonance dont je n’ai pas réussi à me départir. Alors même si ce fut un bon divertissement rempli de bonnes idées, cela ne restera pas une lecture marquante.

(Merci à Sanctuary pour ces lectures)

Ma note : 14 / 20

5 commentaires sur “Shinobi Gataki de Nikiichi Tobita

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