Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

The Summer Hikaru Died de Mokumokuren

Titre : The Summer Hikaru Died

Auteur : Mokumokuren

Traduction : Manon Debienne & Sayaka Okada

Éditeur vf : Pika (seinen)

Année de parution vf : Depuis 2023

Nombre de tomes vf  : 3 (en cours)

Résumé : Hikaru et Yoshiki sont deux amis d’enfance qui ont grandi ensemble dans un hameau reculé. Mais un jour, les doutes qu’éprouvait Yoshiki depuis quelque temps se confirment : depuis sa disparition en forêt, six mois plus tôt, Hikaru a été remplacé par… “autre chose”. Malgré cet effroyable constat, Yoshiki refuse d’être séparé de son ami. Il fait alors le choix de poursuivre son quotidien aux côtés de cet “être” à l’image parfaite de Hikaru. Mais au même moment, d’étranges incidents se produisent çà et là dans le village…

Mon avis :

Tome 1

La semaine dernière, j’ai trouvé ma BD à l’ambiance spooky parfaite pour Halloween avec Paix à mon âme, voici maintenant avec L’abomination de Dunwich le manga parfait pour la saison avec ses angoisses et frissons garantis !

Petit phénomène au Japon, The summer Hikaru Died ne compte pourtant que 3 tomes à l’heure actuelle mais l’auteur Mokumokuren s’est fait remarquer d’entrée de jeu lors de la publication de ses dessins sur Twitter et depuis a vendu 200 000 exemplaires de son premier tome en trois mois. Impressionnant ! Il a aussi reçu le prix Kono Manga ga Sugoi 2023 du meilleur « manga pour garçons » et les volumes de sa série sont régulièrement classés parmi les meilleures ventes manga du Top Oricon. Un phénomène que nous attendions donc !

C’était quand même avec quelques pincettes que je m’avançais car avec ses couvertures hyper sobres, je ne voyais pas trop pourquoi un tel succès, si ce n’est un dessin semi-réaliste plutôt réussi. Mais dès les premières pages, j’ai découvert une ambiance fantastique rétro et moderne à la fois qui m’a filé les chocottes, avec des airs de mix entre l’horreur à la Parasite et le thriller à la 20th Century Boys, où on sent que quelque chose de terrible va inéluctablement arriver dans ce calme avant la tempête.

Que se passe-t-il concrètement ? Nous suivons le jeune Yoshiki, très proche de son ami Hikaru, qui se rend compte que quelque chose cloche depuis qu’il est revenu de la montagne. Quand il lui pose la question, celui-ci lui avoue être un démon qui occupe le corps de son ami et voudrait rester près de lui pour découvrir la vie d’un lycéen japonais.

Stupeur et effroi lors de ce premier chapitre où l’annonce sonne comme un coup de glas, mais que ce fut jouissif ensuite de rester au contact de ces deux adolescents et d’explorer avec eux les thématiques de la monstruosité et de l’adolescence et ses sentiments. J’ai l’impression d’un mix entre du fantastique horrifique à la japonaise avec ce bestiaires de créatures étranges et organiques tellement loin des nôtres, et des émois de l’adolescence entre deux garçons peut-être encore plus proche que ce qu’on croyait. L’auteur y va vraiment avec des pincettes pour traiter de ces questions. D’un côté, nous avons un Hikaru forcément des plus singuliers dont l’étrangeté fait réfléchir et dont on attend le dérapage, car ce démon qu’il est ne peut être « gentil » selon la définition qu’on en a et l’apparence qu’il montre. Peut-être est-ce que ce sera l’occasion de s’interroger sur notre rapport à cette apparence monstrueuse. De l’autre, nous avons Yoshiki terriblement perturbé par les changements de son meilleur ami et qui ressentait probablement pour lui plus que de l’amitié. Ce sont les prémices d’une relation amoureuse et de désir contenu que je vois poindre ici, mais qui vont être bien perturbé par sa nouvelle apparence et entité. Voilà, une série qui a de quoi remuer et interpeler.

En plus, Mokumokuren a un dessin des plus happant. Il appartient à cette veine d’artistes semi-réalistes dont je trouve le trait saisissant. Et ici dans une ambiance fantastique des plus glauques parfois, c’est juste parfait pour nous filer la frousse. Je pense à une scène où Yoshiki explore l’intérieur d’Hikaru, c’était dégoûtant, angoissant et flippant à souhait. J’ai adoré ! Voici du fantastique judicieusement écrit et mis en scène, où la banalité et la tranquillité du quotidien des héros est parfaitement rendue par une ambiance rétro nostalgique, ce qui permet encore plus la bascule vers ce fantastique qui vient nous bousculer, nous déranger et nous couvrir d’effroi. Excellent !

Je comprends donc pourquoi ce titre est un phénomène. C’est un mélange des genres des plus surprenants, une ambiance fantastique horrifique savamment travaillée, avec en prime une réflexion qui promet d’être pertinente sur la monstruosité et les désirs adolescents. J’espère que la suite tiendra ses promesses mais pour l’instant ce premier tome m’a happée, angoissée, glacée d’effroi et bousculée comme il faut. Et en plus, c’est beau ! Que demander de plus ?

> N’hésitez pas à lire aussi les avis de : L’Apprenti Otaku, Vous ?

Tome 2

La série va paraître trop lentement m’a-t-on dit la dernière fois. Qu’importe ! Quand une série est aussi bonne à suivre, on se moque de son rythme de parution !

J’ai en effet pris encore une petite claque avec ce tome grâce à l’expérience fournie par Mokumokuren. Entre ses compositions graphiques, son atmosphère étrange et ses messages prépubères cryptés, c’est un régal ! Dans ce petit village rempli de secret, le duo Hikaru-Yoshiki détonne et c’est un bonheur de les suivre. J’adore l’ambiance dans laquelle ça nous plonge avec ce fantastique qui nous pénètre peu à peu à nous donner des frissons et se mélange avec un message bien plus terre à terre sur les désirs et sentiments enfouis. Merveilleux.

L’auteur est vraiment en plein milieu des histoires fantastiques s’accrochant au folklore japonais avec ses esprits cachés dont on ne sait pas trop s’ils sont bons ou mauvais tant ils sont secrets et ambigus. Il est également en plein milieu de ses histoires sociétales où on suit des personnages en quête d’eux-même qui ont trop peur de la société et ses carcans pour s’affirmer réellement. La rencontre des deux est fabuleuse.

Le rythme de l’histoire est étrange mais lui correspond très bien. Entre présent et flashback, entre réalité et rêves et souvenirs, les héros nous perdent dans les méandres de leurs pensées, mais c’est assez émouvant. Yoshiki réalise combien le nouveau Hikaru est jeune et ce que cela signifie. Hikaru, lui, met peu à peu des mots sur l’importance que Yoshiki revêt pour lui. Les deux se rapprochent donc sur des motifs différents que l’auteur met en scène fur fond de ce fantastique pénétrant, fluide et visqueux qui peut rappeler une certaine matérialisation des désirs et sentiments en construction à l’adolescence. Je vois vraiment dans cette relation, mise en scène sous le prisme de la créature fantastique, le récit d’un désir amoureux envers l’autre qu’ils ont du mal à assumer car il va à l’encontre des désirs de la société pour des couples hétérosexuels. Cette retenue de chacun mais cette difficulté à ne pas l’exprimer donne une sorte de valse macabre et effrayante où on est sans cesse sur le fil, entre émotion et moment dérangeant. C’est excellent !

Il se dégage vraiment quelque chose de la mise en scène de l’auteur et des messages qu’il semble cacher dans son oeuvre. Il y a les mystères des anciens de ce village et des abords avec cette forêt typique japonaise, peuplée de sombres créatures ancestrale qui ne demande qu’à surgir et interpénétrer avec les habitants pas assez prudents. Il y a les problèmes personnels de chaque famille et le poids du regard de la société, à l’image de la petite soeur de Yoshiki qui ne va pas à l’école, ou de ce que représentait et vivait l’ancien Hikaru, qu’on découvre peu à peu au fil des réminiscences. Cela a crée une atmosphère très particulière que l’auteur exploite à fois dans sa mise en scène très oniriquement glauque, fluide et visqueuse. Les compositions sont à la fois terrifiantes, malaisantes et fascinantes. J’adore personnellement !

Sorte de récit entre deux rives, celle du fantastique et celle des sentiments contenus et cachés, le manga se détache facilement des autres en 2 tomes avec sa mystérieuse atmosphère et ses riches compositions bien sombres jouant des codes du fantastique glauque japonais. Je me régale de ces messages cachés, de ce rythme insidieux, de ces personnages fragiles et pleins de failles les rendant émouvants et surtout de cette expérience graphique aussi immersive que malaisante. Un petit coup de coeur à nouveau !

Tome 3

Que cette série est géniale ! C’est vraiment l’une dont l’ambiance me marque le plus et me file les chocottes alors que pourtant c’est assez doux en matière d’horreur et de fantastique, mais ça touche tellement à l’intime que je ne peux m’en empêcher.

Cette fois, en mode « Bateau de Thésée », l’auteur nous interroge sur ce qui fait notre être, celui que nous sommes ou le souvenir de celui qu’on était, et c’est fait avec beaucoup de finesse. Mêlant habillement philosophie et adolescence, il fait preuve d’un réel talent dans la dimension psychologique de son récit qui s’intègre en plus à merveille à une douce ambiance horrifique, façon body horror qui nous glace le sang et nous retourne l’estomac, et à une ambiance adolescente des plus réussies. J’ai tout aimé.

J’ai aimé les moments tout tranquilles où on les voit profiter de la vie avec leurs amis, sans drame, avec juste le plaisir d’être ensemble, de se retrouver, de jouer, de se charrier. J’ai aimé la façon dont la bascule les percute quand l’étrange bulle où ils sont éclate parce que l’une de leurs camarades, qui a des pouvoirs extrasensoriels, se rend compte de quelque chose et ose parler. C’est violent et improbable et les frissons nous gagnent alors, nous rappelant quel être étrange est parmi nous.

Une quête alors semble se profiler. Les héros ne veulent et ne peuvent plus être passif. Ça tombe bien car l’auteur était aussi en train de préparer quelque chose du côté des adultes qui se rendent compte que quelque chose cloche dans la montagne. La course-poursuite semble enclenchée. L’être qui vit en « Hikaru » ne va plus pouvoir rester cacher et vivre sa belle vie d’ado, une menace arrive. J’aime beaucoup la façon toute tranquille dont cela s’annonce tel un nuage qui monte, qui monte et dont on sent la pression peser sur nous avec la crainte de le voir lâcher un torrent d’eau ou pire sur nous. C’est assez saisissant.

L’auteur est vraiment doué pour créer et soutenir ses ambiances. Cela a l’air si simple quand on le lit alors que ça ne l’est pas. C’est ainsi une lecture tranquille et pourtant terrifiante. Une lecture très psychologique qui décortique bien les sentiments confus de l’adolescence, mais qui nous emmène aussi aux portes de l’horreur et du fantastique dans une belle ambiance de campagne japonaise actuelle et pourtant proche de ses racines ancestrales. Je reste fascinée par le duo de héros et je suis ravie de voir des nouveaux s’y greffer pour enrichir l’histoire dans les tomes à venir. La petite vie tranquille, c’est terminé !

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10 commentaires sur “The Summer Hikaru Died de Mokumokuren

    1. Parfois les couvertures sont clairement trompeuses, heureusement que les amis blogueurs sont là pour aider à passer outre 😉
      J’espère que tu te laisseras tenter car le côté « ancien film pour ado » (Souviens-toi l’été dernier) a tout pour te plaire, je crois ^^

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  1. Je ne l’ai pas acheté, je l’ai juste feuilleté en rayon, mais effectivement certaines planches m’ont mises mal à l’aise dans le sens elles m(ont fait frissonner et dégageaient une ambiance très noire.

    Aimé par 1 personne

  2. Je n’ai toujours pas testé ce manga qui me tentais peu au vu de la couverture et d’un rapide feuilletage en librairie mais l’ambiance horrifique mêlée à l’histoire des deux garçons que tu décris me donne envie de passer le pas!

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    1. C’est vrai que la couverture est surprenamment très (trop ?) simple pour attirer l’oeil.
      Si tu aimes les ambiances estivales étranges et pouvant vite glisser, ça pourrait te plaire ! N’hésite pas à lire le premier chapitre qui est déjà pas mal évocateur.

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