Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Vinland Saga de Makoto Yukimura

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Titre : Vinland Saga

Auteur : Makoto Yukimura

Éditeur vf : Kurokawa

Années de parution vf : Depuis 2009

Nombre de tomes vf : 27 (en cours)

Résumé du tome 1 : Depuis qu’Askeladd, un chef de guerre fourbe et sans honneur, a tué son père lorsqu’il était enfant, Thorfinn le suit partout dans le but de se venger. Mais bien qu’il soit devenu un guerrier redoutable, il ne parvient toujours pas à vaincre son ennemi. Au fil des ans, enchaînant missions périlleuses et combats afin d’obtenir des duels contre l’homme qu’il hait plus que tout, le gentil Thorfinn est devenu froid et solitaire, prisonnier de son passé et incapable d’aller de l’avant. Jusqu’à ce que la vie le force à regarder le Monde différemment…

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Mon avis sur la série à ce jour (jusqu’au tome 13) :

Voici une série « historique » qui m’a de suite fait de l’oeil, forcément avec un sujet comme les Vikings, c’était obligé. J’y ai retrouvé au début tout ce que je pouvais espérer : des combats sans concession, des trahisons, des complots politiques, des hommes forts et rudes mais avec parfois de la compassion et surtout un magnifique trait pour retranscrire le tout. Il faut dire que depuis le 1e tome, la progression de l’auteur est fulgurante. Il a énormément gagné  en détails, aussi bien dans les visages des personnages, que dans leur habillement, ou les décors. Même les scènes de combat sont époustouflantes de vivacités.

Parce que bien sûr, Vinland Saga, du moins dans sa première partie est avant tout un concentré de combats et d’affrontements pendant lesquels on suit Thorfinn, jeune garçon en quête de vengeance qui a l’idée bien originale de s’attacher au meurtrier de son père, de le suivre partout, de vivre avec lui, pour mieux pouvoir le tuer. C’est ce parti pris qui m’a de suite fait accrocher à l’histoire. Voir un jeune garçon aussi fragile psychologiquement chercher à devenir plus fort pour se venger, sans véritablement comprendre le sens de sa démarche, m’a énormément plu. De même que celle du dit méchant : Askeladd qui est vraiment très très charismatique et n’a rien du méchant qu’on pourrait croire. C’est avant tout un homme politique et un guerrier dans toute sa splendeur, retord à souhait et fascinant du coup. Puis vient ensuite, le tout faible prince Knut, fils du roi Sven (un homme barbare et cruel), mais qui se révèle bien plus fort qu’on le croyait. Bref que des personnages pour qui les apparences sont trompeuses.

Et l’on suit tout ce petit monde vers une conclusion inévitable au tome 8. Une véritable apothéose qui aurait presque pu être la conclusion de la série, tant elle a été bien amenée et a réuni tous les fils conducteurs. Mais l’auteur n’a pas voulu s’arrêter là, sur une conclusion aussi sombre, et a décidé de faire une 2e partie sous le signe de la rédemption. Une 2e partie que je trouve pour le moment bien plus faible que la 1e, bien moins accrocheuse, avec des thèmes moins porteurs et trop de morale à mon goût. Si je devais résumer, je dirais que la 1e partie est vraiment de haute volée car sans concession, alors que la 2e est pour le moment un peu molle.

Dans cette 2e partie, Thorfinn est encore trop amorphe, trop épuisé par tout ce qu’il a vécu et vient tout juste de se réveiller et de se trouver une but (cf. le tome 13). Mais les personnages qui l’entourent sont bien fade en comparaison à Askeladd et ses compagnons. Heureusement, Knut le nouveau roi est là pour relever la donne et annoncer le retour de ce qui m’avait plu dans la 1e partie (violence, combats, complots politiques), du moins je l’espère. Mais pour le moment, cette partie bien que scénaristiquement réussie, m’ennuie. J’espère qu’il saura me donner tort et retrouver la dureté et franchise des débuts.

Une série à suivre.

Mes notes : 18 / 20 (1e partie) ; 17 / 20 (2e partie)

Note : 1e partie = Tomes 1 à 8 ; 2e partie = Tomes 9 à 23 (en cours)

Mes avis par tome :

Tome 14

Je pense qu’avec ce tome, on conclut enfin la 2e partie de cette série et ce n’est pas trop tôt. J’ai trouvé cette partie particulièrement lassante et bien en-dessous de la 1e. Ici, la rencontre tant attendue entre Thorfinn et Sven a tenu toutes ses promesses et a grandement relevé le niveau, même si les idéaux du premier semblent bien naïfs et me laissent un brin incrédule. Mais cela a le mérite de relancer la série dans une nouvelle direction. En ce sens, j’ai adoré le retour de Thorfinn dans son village et sa famille, tout en humour et bons sentiments, un vrai plaisir. Sa soeur est vraiment un personnage ! Je me demande quand même ce que la suite va donner maintenant et j’espère qu’on ne va pas perdre de vue les menées politiques de Sven.

Tome 15

On poursuit sur la nouvelle lancée annoncée dans le tome précédent, à savoir la recherche et la colonisation du Vinland. J’avais peur qu’on reste un peu trop chez Thorfinn et que ça devienne ennuyeux, mais pas du tout. On repart très vite vers de nouvelles aventures. Il est amusant de voir à quel point le fils de Thor a changé quand il rencontre un visage qu’il a déjà croisé enfant. J’ai beaucoup aimé voir les relations qui se nouent ici entre la bande de Thorfinn et Halfdan, ça nous apprend plein de choses. Par contre, il faut vraiment que l’auteur soit plus rigoureux, notamment dans les choix de noms, il part trop dans tous les sens et c’est brouillon. Le nouveau personnage que l’on découvre : Gudrid, me plaît déjà énormément. C’est un personnage comme on en voit souvent dans les mangas, en opposition complète avec le monde dans lequel elle vit et avec un côté très moderne. Anachronisme ou pas, elle me plaît. J’aime sa fougue, sa passion pour la mer et l’aventure. J’espère qu’elle va se joindre à la petite troupe pour leurs prochaines aventures. Il est d’ailleurs très plaisant de voir que l’auteur continue à nous surprendre en leur faisant prendre encore un chemin de traverse avant d’atteindre leur but. Je découvre une facette complètement nouvelle à la série et j’adore cela.

Tome 16

On repart complètement dans de nouvelles aventures avec ce tome et ça change tellement que j’ai du mal à faire le lien avec l’ambiance des premiers tomes, ça a l’air tellement loin maintenant. Je me suis amusée de la petite équipe qui part à la recherche de la Méditerranée. J’ai aimé que Thorfinn joue les chefs et impose ses décisions, notamment celle d’emporter Gudrid avec elle. Celle-ci est une vraie bouffée de fraicheur dans l’histoire tellement elle est gaffeuse et naïve. Elle est vraiment très drôle à suivre. Mais l’auteur sait passer de ce registre humoristique à un registre plus sérieux en un clin d’oeil comme le montre l’arrivée de la fine équipe sur le lieu du massacre d’une famille que connaissait Leif. C’est vraiment très violent, d’autant plus que ça surprend à ce moment-là de l’histoire. Ça nous permet de ne pas oublier la violence du monde dans lequel ils vivent. Mais leur voyage avance en tout cas, même avec ce petit retard et le nouveau membre de l’équipe qu’ils récupèrent. Il est plaisant de les voir naviguer et il est amusant de voir Thorfinn s’occuper de leur nouvelle recrue. J’ai aussi aimé que le passé ne soit pas oublié aussi bien avec la poursuite du fiancé de Gudrid (ils sont aussi bête l’un que l’autre mais la tante de Gudrid et les parents de son fiancé sont super eux !), ou avec la jeune fille qu’ils croisent dans les dernières pages et qui a maille à partir avec l’ancien Thorfinn. Résultat, je ne sais pas trop vers quoi on se dirige pour la suite et il me tarde de la lire !

Tome 17

Ce tome 17 est tout en tension. Il est centré sur l’affrontement entre Thorfinn et Hild et nous permet ainsi de refaire une incursion dans le terrible passé du premier. J’aimais beaucoup cette période de la saga et j’ai été ravie de revoir le Thorfinn impitoyable des débuts. Cela permet d’autant mieux de voir combien il a changé et muri depuis. Il a vraiment cherché à faire table rase du passé, à se débarrasser de sa colère, de son désir de vengeance. En cela, je le retrouve énormément chez Hild et j’espère qu’elle aura la même évolution parce que c’est un personnage qui me plaît déjà beaucoup. J’aime que ce soit une femme et j’aime que ce soit un inventeur de génie. C’est une dimension (l’évolution technique) qu’il manquait un peu à l’histoire et qui est parfaitement comblée ici. J’espère donc qu’on continuera à voir le personnage. Concernant son affrontement dans la neige avec Thorfinn, je n’ai pu m’empêcher de penser à The Revenant tellement il y avait de ressemblances même si c’était moins intense tout de même. Il en reste que le décor était très beau et s’accordait à merveille avec l’ambiance de ce duel. L’issue, elle, était inéluctable, Thorfinn n’a jamais vraiment été en danger et c’est justement ce qui manque ici, c’était un peu trop lisse, prévisible.

Tome 18

Mon dieu, que c’est bien écrit ! Le tome commence tout doucement avec le rétablissement de Thorfinn et les pitreries de son équipe, puis peu à peu on sent la tension monter au fur et à mesure que son passé le rattrape une nouvelle fois. J’adore comment l’auteur nous balade. On pense que ça y est on est partie dans une grande intrigue maritime mais non on revient encore sur le passé guerrier de Thorfinn dont il ne peut décidément pas se défaire. C’est tellement bien fait. J’ai adoré voir le retour d’une intrigue politique avec la guerre de succession de Jomsvikings cette fois. C’est classiquement mais tellement bien raconté et mis en scène. Ça permet de revoir Thorfinn au milieu des autres guerriers vikings et de voir combien il a changé. J’ai aimé qu’on le compare à son père et qu’on voit un bref instant celui-ci. C’est aussi intéressant de voir les manoeuvres des uns et des autres et de revenir sur des personnages de la première partie de la série. On voit que Makoto Yukimura n’oublie personne et sait utiliser tout ce qu’il a créé auparavant. J’ai aimé revoir Thorkell, brut de décoffrage comme toujours, et Floki, une fois de plus sournois. Le duo formé par Thorfinn et Hild fonctionne bien tant ils se ressemblent. J’ai vraiment passé un super moment et il me tarde de voir où le mangaka va nous embarquer.

Tome 19

Une nouvelle fois, je n’ai pas vu le temps passer et j’ai eu un réel plaisir à retrouver toutes ces personnes du passé de Thorfinn. Franchement, c’est une excellente idée de Makoto Yukimura de réintroduire un peu de politique dans l’histoire somme toute une peu trop pacifiste qu’était devenue celle de Thorfinn surtout avec un passé comme le sien. On est donc plongé dans les luttes d’influence des Vikings. C’est amusant de voir comment les camps se dessinent et se redessinent sans cesse, le tout sous les yeux de spectateur de Thorfinn qui ne veut surtout pas y être mêlé. Et pourtant comme il le dit lui-même, le violence gronde encore en lui et ne demande pas grand-chose pour exploser. Le moment où il apprend pour son père est d’ailleurs terrifiant. Je suis partagée entre l’envie de retrouver la violence des débuts et de le voir réussir dans sa démarche d’apaisement et de nouvelle voie. Son combat contre Garm en est l’exemple parfait. Il ne peut pas y couper parce qu’il vit dans un monde fait de violence mais en même temps il cherche et propose une autre alternative. J’aime l’équilibre que l’auteur parvient à trouver entre les deux pour le moment même si ça ne me déplaît pas de retrouver un petit peu de la fureur des débuts. Ce tome s’est donc lu en un rien de temps et il nous laisse cruellement en plan dans l’attente du suivant.

Côté dessins, c’est toujours aussi beau et précis. Que ce soit les décors, les costumes, les expressions des personnages où les scènes de combat, tout est réussi pour moi. C’est détaillé, c’est beau, c’est riche. C’est un vrai régal pour les yeux.

Tome 20

Dans la lignée des tomes précédents, je retrouve de plus en plus ce que j’avais aimé dans les premiers temps de Vinland saga, c’est à dire la vie et les combats de ces vikings. Certes, Thorfinn s’est engagée sur une voie utopique de non violence et de recherche d’un monde où porter ses idéaux, mais la réalité est bien là et le rattrape douloureusement une fois de plus. On le voit alors déchiré entre son passé, son présent et ses aspirations futures.

Makoto Yukimura parvient avec grand talent à peindre une vaste saga qui allie aussi bien réflexions morales sur la vie que combats et disputes sanglants pour contrôler des territoires. Dans ce tome, on voit en sous-main tout ce que le Roi Knut a préparé, orchestré pour aboutir à ses fins, ce qui a amené la situation actuelle.

C’est d’ailleurs un tome un peu d’attente encore pour moi, puisqu’on nous explique les prémices et que tout se met en place pour le retour de Thorfinn dans leur univers. Sous quelle forme, ça on ne le sait pas encore vraiment, on ne peut que supposer et peut-être être surpris au final. D’ailleurs, pour le moment, on voit juste d’un côté Thorkell tout faire pour se battre contre les Joms parce qu’il en meurt d’envie, et ces derniers essayer d’y échapper mais échouer. La bataille a donc lieu mais on ne la voit que d’un oeil extérieur vu que ce n’est clairement pas le coeur de l’histoire que veut nous raconter le mangaka.

Ce qui l’intéresse, lui, c’est la décision que va prendre Thorfinn et le destin qu’il va ainsi se choisir : la violence en étant à la tête des Joms ou la paix en poursuivant son voyage. Mais avant d’arriver à cela, il va devoir affronter ses vieux démons et je bous d’impatience à l’idée de voir ça dans le prochain tome.

Tome 21

Comme je le pressentais, avec ce nouveau tome, j’ai eu tout ce que j’aimais dans la série. Makoto Yukimura a réussi à allier ce qui m’avait plus dans la première partie de la série (la quête de vengeance, la violence, la politique Vikings) avec ce qui fait la force de la suite (l’amitié et la volonté de paix de Thorfinn), ce qui un tome très équilibré et parfaitement réussi.

Thorfinn et ses amis sont en conflits avec l’armée de Floki et c’est bien tendu. Gudrid est prisonnière. Il va donc s’agir d’envoyer une mission commando pour la libérer. Entre moments humoristiques et moments sérieux, cela ne va pas être une partie de plaisir. La tension est à son comble. On se demande comment ils vont sortir de ce guêpier et avec quelles pertes. C’est très difficile pour Thorfinn parce qu’il va se retrouver face à ses démons intérieurs, mais heureusement il a ses amis pour l’épauler et lui faire reprendre raison. Ça montre bien tout le chemin qu’il a parcouru. De mon point de vue de lectrice, j’ai apprécié de le voir trouver l’équilibre entre son pacifisme extérieur et sa violence intérieure. J’en avais un peu marre du Thorfinn qui veut jamais se battre et qui tend la joue, là au moins il se défend et défend les autres, et il montre qu’il n’a rien perdu de son talent, ce qui donne des scènes très énergiques.

Ce nouvel opus fut donc une lecture très agréable, dynamique, énergique, avec de l’humour (Baldur et sa fine équipe) mais aussi de vraie réflexion. Vivement le prochain tome !

Tome 22

Quel petit bijou ce tome ! On y touche la substantifique moelle de toutes les idées que l’auteur a voulu développer depuis le début et c’est magique !

J’ai tout d’abord été soufflée par la mise en scène de cette longue bataille. L’auteur varie les rythmes et les points de vue comme jamais, pour mettre en image une fresque magistrale, sanglante et violence à souhait, comme je peux en voir en image dans la série Vikings que je viens justement de reprendre.

Ensuite, j’ai adoré le rôle de Thorfinn dans ce tome. Il met en branle dans son duel puis dans sa prise de parole tout ce qui bouillonnait en lui depuis des années. Ainsi il gagne encore en charisme et en carrure à mes yeux. Les propos qu’il tient et les actions qu’il entreprend ne peuvent que marquer le lecteur. Le rappel de son premier mentor, puis de son père, m’ont presque fait verser une petite larme. Trop d’émotions !

Les autres personnages autour de lui ne sont pas en reste, que ce soit Garm dont on découvre le passé, Sigurd qui fait vraiment preuve de bravoure, Thorkell qui amuse toujours autant la galerie mais joue un rôle crucial au bon moment, Baldur qui si jeune a déjà tout compris, ou même ses inconnus qui nous montre l’absurdité de cette bataille. Tous livrent de très beaux moments. Je retiendrai la mort de l’un de ces inconnus et le partage du petit déjeuner entre ces deux ennemis alors que le soleil se lève.

Après tous ces moments intenses qui permettent de voir enfin un peu l’aboutissement des réflexions de Thorfinn sur la vie, la guerre et les puissants, il fallait de la légèreté et même ça, Makoto Yukimura a su le faire grâce à Gudrid qui m’a permis de relâcher le souffle que je retenais depuis un moment pour bien rire. Magique !

Ce tome aura vraiment été parfait de bout en bout. Le mangaka a su synthétiser ses idées et les mettre en action dans un tome où la réflexion se mélange à la perfection avec la violence de la guerre. Chapeau !

Tome 23

Décidément Makoto Yukimura n’en finit pas de me surprendre dans cette série. Alors que je pensais avoir affaire à un tome de transition tranquille, sans grande envergure qui serait sympa mais loin des précédents qui m’avaient fait vibrer, j’ai en fait trouvé plein de bonnes raisons d’être détrompée.

Thorfinn est allé au bout de ses idées et a pu ainsi tourner la page de son héritage violent viking pour embrasser celui plus pacifiste de son père. Il peut désormais partir réaliser son rêve de fonder ce Vinland prospère et pacifiste où il ferait du commerce et accueillerait ceux qui veulent bien travailler en paix. L’auteur peut donc tourner son regard vers un autre personnage qui était resté pas mal dans l’ombre jusqu’à présent : Sigurd.

Quelle surprise de me retrouver à suivre ce personnage, pour l’instant assez peu sympathique malgré l’humour dont il fait preuve à ses dépens. C’est le « mari » forcé de Gutrid, celui partir à sa recherche pour la forcer à revenir auprès de lui, mais surtout c’est un homme, qui comme Thorfinn, a vu ses valeurs remises en question après toutes les épreuves qu’il a vécu : voyage, esclavage, blessures, batailles… Il est donc une autre belle figure de son temps.

J’ai beaucoup aimé le suivre et le découvrir bien plus subtile que sa tête patibulaire le laisser penser. C’est un homme qui désormais ne veut plus vivre dans l’ombre de son père. Il veut s’affirmer et prouver sa valeur, mais également trouver sa voie. Pour cela, il peut compter sur ses amis et son bref retour chez son père est une belle occasion de le prouver. C’est un moment, qui pourrait être banal, que l’auteur narre avec beaucoup d’humour, aussi bien à cause des bourdes de Sig Sig, de la rencontre rocambolesque avec Ylva ou de l’affrontement exagéré avec son père, mais qui grâce au talent de l’auteur est hautement émouvant et symbolique. Il représente le passage de témoin entre l’ancienne génération guerrière et la nouvelle qui se veut commerçante et pacifiste. Très fort !

Après ce moment assez inattendu, le mangaka poursuit sa belle époque et nous embarque dans un saut dans le temps de 2 ans, nous permettant de retrouver la bande de Thorfinn pour voir ce qu’elle est devenue. Toujours avec humour et légèreté mais sans aucune banalité, on revoit notre fine équipe, revenue de son voyage et prête à fonder sa patrie. Ils font le tour de leurs soutiens, ce qui donne lieu à des moments vraiment savoureux. L’accueil d’Ylva m’a beaucoup fait rire. J’ai adoré le contraste entre la réaction attendue par Gutrid face à Halfdan et celle effective. Mais surtout, j’ai été emportée par l’émotion de voir nos héros si heureux après tout ce qu’ils avaient traversé et ayant enfin concrétisé leur rêve. Thorfinn s’est trouvé une belle famille. Son « fils » est adorable quand il défend son papa ^^ Il est désormais bien entouré et n’a plus rien à voir avec la boule de colère bouillonnante qu’il était au début. Superbe !

Ce tome clôt un chapitre important de la série, d’une façon très simple et pourtant incroyablement réussie. Comme quoi, même dans la simplicité, quand on est doué, on insuffler quelque chose de grand. C’est ce que fait Makoto Yukimura ici. C’est surprenant mais terriblement convaincant et surtout émouvant.

Maintenant, pour finir, un petit mot sur le oneshot qui conclut ce volume et n’a rien à voir avec notre série : « Bientôt viendra le temps des adieux ». Magistral ! C’est le premier mot qui me vient après l’avoir lu. Ecrit avant Vinland Saga, on y retrouve les valeurs chères à l’auteur : le pacifisme et l’envie de vivre. Se déroulant à une époque charnière de l’époque japonaise (merci le Pavillon des hommes pour me permettre de mieux la comprendre), on découvre un ancien samouraï sur le point de mourir de maladie, qui réfléchit sur le sens de la vie et du combat que se mènent à ce moment-là l’Empereur et le Shogun. Avec un déroulé, très lent et introspectif, cette courte histoire frappe fort. J’ai de suite fait un parallèle avec la terrible histoire du XXe du Japon. Cela fait vraiment réfléchir. Makoto Yukimura est vraiment fort pour nous faire ressentir ça en une quarantaine de pages. Chapeau !

Tome 24

Encore un excellent tome pour monsieur Makoto Yukimura, quel chef ! Il se débrouille pour continuer à nous séduire avec une histoire désormais basée sur la quête du bonheur par la paix et non par les armes et c’est fantastique.

J’ai ressenti une grande force dans ce nouveau tome. Pourtant le thème central développé est bien loin des conflits et batailles des débuts, puisque c’est l’utopie dont rêve Thorfinn et ses amis. Mais l’auteur a l’art et la manière de nous montrer les difficultés et le nouveau défi que cela représente, défi encore plus élevé que tout ce qu’ils ont connu.

Cependant le passé n’est jamais loin et dans la quête d’une nouvelle vie de Thorfinn, il est impossible d’oublier celui-ci puisqu’il est à la base de tout. D’ailleurs Thorfinn est encore rongé par son passé comme le montre ses cauchemars qui ouvrent le tome. Heureusement, l’auteur sait nous montrer que la nouvelle vie qu’il s’est constitué l’aide à changer, que ce soit sa relation avec Gutrid et son fils qui lui offre le cadre familial qui lui manquait, ou ses échanges avec ses voisins qui lui permettent de mettre au clair ses idéaux avant de se lancer. Tout cela confère à la série un climat de douce sérénité et de chaleur humaine fort appréciable.

En plus, Makoto Yukimura a vraiment un don pour mettre en scène des moments du quotidien qui peuvent sembler ultra banal mais qui recèle plein d’émotion et autres petits éléments super riches pour montrer la belle évolution des personnages. Ainsi, j’ai été touchée par ce qu’ont montré aussi bien Thorfinn, qu’Einar, Gutrid, Hilde, Gros Yeux ou encore Ylva. Puis il y a l’arrivée dans la bande de la surprenante Cordélia qui vient ajouter une touche supplémentaire pour prôner cette tolérance également au coeur du projet de Thorfinn.

Ce projet, on commence sérieusement à en voir l’aboutissement ici avec non seulement l’annonce auprès de ses voisins pour recruter des volontaires mais également la mise en place d’un projet plus concret. Et quel projet ! Certes l’auteur force un peu les choses mais il pousse Thorfinn vers une superbe définition de celui-ci au fil de ses rencontres et discussion. C’est superbe comme chemin parcouru de la vengeance à la volonté de bâtir un paix sans épée. J’ai vraiment été prise d’une bouffée d’amour pour le héros et son évolution dans ce tome.

Avec encore une fois une histoire très riche sous ses dehors ultra simples, Makoto Yukimura m’a charmée et bouleversée. Mélangeant scènes du quotidien et rencontres significative, il concrétise petit à petit le projet de son héros asseyant encore un peu la transformation de celui-ci et bon sang que ça fait du bien de lire un titre aussi pacifiste !

Tome 25

La série n’aura jamais aussi bien porté son nom que dans ce tome. C’est incroyable de voir tout le chemin accompli par les héros de Yukimura, des premiers volumes bestiaux et sanglants à ces derniers lumineux de vie.

Il est loin le temps des batailles pour Thorfinn, celui-ci adulte est désormais empli de son désir de se rendre au Vinland pour créer son petit paradis terrestre. C’est donc un vrai bonheur de le suivre dans ces nouvelles aventures. Et pour nous montrer à quel point il a évolué, l’auteur nous offre un chapitre d’ouverture magistral et émouvant où l’on retrouve notre héros au côté de l’un de ses modèles : Leif, qui a bien vieilli. Séquence émotion réussie, entre tendresse et humour, leur discussion en dit long sur l’évolution de l’histoire et les aspirations de chacun. C’est beau.

Puis, il est temps pour l’aventure de reprendre et c’est alors un voyage en mer parfaitement crédible et réaliste qui nous est conté par le mangaka. Il y adjoint les mythes nordiques aux connaissances des hommes de ce temps-là en navigation, astronomie et sciences au sens large. C’est passionnant et fascinant. J’ai aimé qu’il pense à nous montrer les peurs et croyances de ces hommes et femmes. J’ai aimé voir un Thorfinn parfois fébrile, il fait tellement plus humain ainsi. Cela m’a amusée que ce soit Hilda qui ait le plus de connaissance sur notre terre et qu’elle les partage avec sagacité avec la nouvelle génération. Cela crée un climat vraiment propice et serein pour ces nouvelles découvertes où les craintes sont entendues et nécessaires pour aller de l’avant.

C’est ainsi fascinant de suivre, ce qui est ma foi assez banal, un voyage en mer à la recherche de nouvelles terres avec les inquiétudes et espérances que cela engendre. L’auteur trouve le bon rythme et bon équilibre. Il ne s’attarde pas trop en mer mais suffisamment pour assister aux différentes étapes. Il embraye ensuite rapidement sur le premier abordage de la terre ferme qui parfois n’est pas ce qu’on attend. Mais on découvre alors un Thorfinn très avisé en tant que chef d’expédition, qui sait entendre les désirs de chacun et utiliser sa formation militaire à bon escient comme le comprend Hilda qui l’observe très bien.

C’est plaisant alors de suivre leurs premiers pas tâtonnant, de voir l’expédition se scinder, chacun trouver les terres qui lui conviennent, puis s’y installer. J’adore le discours pacifiste de Thorfinn et Einar après ce qu’ils ont vécu. J’aime ce désir de cohabitation et non de guerre avec les autochtones qu’il y a en eux. Ainsi, j’ai apprécié de découvrir comment leur groupe s’installait, affichait ses ambitions, commençait à préparer la terre, à construire leur village et leur nouvelle vie sous le regard bienveillant d’une figure qu’on aurait aimé voir encore en vie. C’est plein d’émotion.

Ce quotidien et cette histoire peuvent sembler banals. Après tout ce n’est que l’histoire d’une première colonisation de Vikings en Amérique du nord, mais le chemin de vie de chacun des personnages est tel que c’est une vraie bouffée d’émotion. Voir Thorfinn en arriver là après tout ce qu’il a vécu est lumineux. D’ailleurs, l’auteur ne s’y trompe pas en affichant clairement cela dans son dessin. Fini le Thorfinn qui se cache derrière ses cheveux, désormais repoussés en arrière son regard peut se porter au loin sur l’avenir et c’est magnifique !

Tome 26

Je vais me répéter mais chaque tome est véritablement un coup de maître sous ses dehors fort simples. C’est émouvant, pertinent et tellement bien écrit. Thorfinn a eu un superbe parcours de vie d’enfant soldat à fondateur pacifique d’une communauté, c’est un très bel exemple à suivre.

Le récit de cette époque épopée historique n’en finit pas de me toucher et m’émouvoir. C’est encore le cas dans ce tome décidément très riche sous couvert d’une banale histoire d’installation d’une colonie. L’auteur plante énormément de graines qu’il commence à faire germer, ce qui rend la lecture puissante et émouvante.

J’ai beaucoup aimé ici tout ce qui a tourné autour des natifs et la relation que Thorfinn tente d’établir avec eux malgré la barrière de la langue, les croyances et les us et coutumes différents. C’est important et Makoto Yukimura raconte cela avec toute la subtilité qu’on lui a connu dans les précédents tomes et ses autres oeuvres. C’est ainsi à la fin et gentiment cocasse, surtout quand Gros-Yeux est désigné comme interprète-diplomate.

Cette ambiance bonne enfant et chaleureuse, on la retrouve partout au-delà de ses relations que la héros tente d’instaurer avec les natifs. Il en fait de même avec ses compagnons de voyage. On découvre avec délice comment il a réussi à convaincre les anciens Jomsvikings / pirates de travailler pour lui au ravitaillement de cette colonie. On découvre avec bonheur aussi comment il dirige avec délicatesse et intelligence son groupe de colon, privilégiant le dialogue mais ne s’imposant jamais et surtout montrant l’exemple, même s’il y a toujours des hommes et femmes pour ne pas être d’accord avec lui. Ce n’est pas grave, il continue à avancer sur la voie qu’il s’est tracé inconsciemment.

Et ainsi Thorfinn continue de gagner en épaisseur l’air de rien. On ne le voit pas faire grand-chose quand on y réfléchit mais ce pas grand-chose est beaucoup. On le découvre ainsi en chef à l’écoute, en père aimant et en bon mari, même si ce dernier point mériterait d’être plus développé tant l’auteur semble pudique avec. J’adore sa relation avec son fils adoptif, ça me bouleverse à chaque fois qu’on suit leurs interactions. L’Apprenti Otaku en parle d’ailleurs très bien dans son article que je vous invite à lire. Cela montre tout le cheminement de ce personnage, qui a su dépasser la violence de son époque pour retrouver la figure parentale et paternelle qu’il avait lui-même connu et la transmettre. Que d’émotion !

Tout ce cheminement nous conduit alors avec justesse jusqu’à l’un des plus grands moments de la série, la conclusion de l’arc d’Hild, qui elle aussi trouve sa voie et la paix, enfin, après toute ces épreuves et cette colère. Le mangaka nous y conduit avec une belle poésie presque faulknérienne (de l’écrivain américain Faulkner) où la nature joue un rôle central dans la transformation du personnage. J’ai été frappée en plein coeur pour les dernières pages la mettant en scène avec Thorfinn et j’ai retrouvé là, en quelques pages, toute la puissance du message pacifiste et de pardon de l’auteur. Parfait !

Même si la série s’étire, Vinland Saga reste un véritable petit bijou. Fresque historique sur le dépassement de la violence et le courage de travailler pour ses idéaux, sa lecture fait chaud au coeur à chaque fois. C’est avec un énorme plaisir qu’on voit Thorfinn continuer sa métamorphose et devenir un grand homme probe, aimant, pacifiste et à l’écoute. L’une des plus belles figures et trajectoires de vie que j’ai pu rencontrer.

Tome 27

C’est une véritable leçon de pacifisme que notre offre Makoto Yukimura en nous montrant combien il est dur de tenir pour la paix quand on est entouré de va-t’en guerre. Un sujet brûlant d’actualité !

J’ai pris une nouvelle claque en lisant ce tome devant la maestria du maître. Ce que propose Makoto Yukimura ici est de haute voltige tant dans le propos que dans la forme. Il parvient à nous tenir un discours puissant sans qu’il soit assené lourdement car il est inséré dans un contexte crédible, bâti de longue date, qui fait sens. On en prend donc plein les yeux et plein les oreilles, et ça nous fait réfléchir également que l’on soit d’accord ou pas avec lui, car il laisse la parole à tous.

J’ai beaucoup aimé la façon dont l’auteur décrit la façon dont la peur de l’autre va peu à peu gagner le village de Thorfinn et ses habitants. C’est réaliste, crédible et très bien raconté. Ça avance comme un rouleau compresseur qu’on peine à arrêter. Pourtant un homme et des femmes vont se poser devant : Thorfinn, Gutrid et Hild. Chacun va nous offrir un grand moment et nous prendre aux tripes. Ils ont chacun eu une vision de la guerre de l’intérieur, une vision différente, qui les rend juste quand ils parlent de leur désir de ne pas la faire. Ils proposent ainsi des alternatives qui devraient être la base de toute société : la confiance et le dialogue comme pré-requis à toute relation. Ça semble basique mais c’est dur et donc essentiel.

Avec brio, l’auteur met en scène cela au sein même de la vie de la colonie. Cela part de la disparition de leurs frères du Markland, point de départ crédible, et on voit vite l’ampleur que cela prend chez les hommes à l’aide de quelques agitateurs, mais aussi bien du côté Vinland que du côté Natif. L’auteur décrit très bien les mécanismes en cours et montre la similitude qu’il y a des deux côtés : un ou deux hommes cherchant à déclencher quelque chose pour pousser les autres à les suivre dans leur désir de guerre et victoire sur celui qu’ils considèrent comme l’ennemi. C’est d’une tristesse ! Mais le mangaka le décrit terriblement bien au point de me faire ronger mon frein devant ces imprécations à la guerre.

Il n’oublie pas cependant les pacifistes et le chemin parcouru par Thorfinn est splendide quand on réalise, mais ce n’est pas le seul. C’est le fer de lance de l’histoire mais l’auteur donne aussi la parole à d’autres. J’ai trouvé important et intéressant de voir les femmes parler à travers Gutrid, ou d’entendre aussi la voix timide des enfants et de découvrir les mécanismes par lesquels ils reproduisent les actes de leurs aînés. Sans parler d’Hild qui elle représente cette fraction de la population tellement effrayée par la guerre qu’elle est prête à tout, même au sacrifice, pour éviter un plus grand drame. C’est poignant.

Avec une science de la narration rare, une émotion intense et une superbe maîtrise du débat argumentatif, Makoto Yukimura nous offre encore une fois un chef d’oeuvre ici sur le thème de : Pourquoi faire la guerre et ne pas pratiquer la paix avec ses voisins ? Je suis fascinée par sa maîtrise, émue par les émotions suscitées par ceux à qui il a donné la parole et estomaquée par cette violence qui vient nous percuter alors qu’on était en train de prendre plaisir à voir une relation de co-existence se nouer. On devrait offrir ce tome aux femmes et hommes d’état actuels.