Titre : Le Portrait de Dorian Gray
Auteur : Oscar Wilde
Traduction : Michèle Zachayus
Éditeur vf : Le Chant du Cygne
Année de parution vf : 2023
Nombre de pages vf : 263
Histoire : Dorian Gray pose pour le peintre Basil Hallward, qui souhaite immortaliser son éblouissante beauté et la fraîcheur de sa jeunesse. Une fois l’œuvre terminée, le modèle formule le vœu que ce soit son portrait, et non lui, qui subisse les outrages du temps et de la vieillesse. Hélas, sous l’influence de son ami Lord Henry Wotton et sa philosophie hédoniste, Dorian s’abandonne à ses penchants les plus sombres et se laisse emporter dans un tourbillon de plaisirs et d’excès. Au fil de sa déchéance, le tableau se métamorphose pour refléter sa véritable nature.
Découvrez ou redécouvrez Le Portrait de Dorian Gray, un chef-d’œuvre intemporel qui explore avec finesse et audace le Londres vibrant, opulent et décadent du XIXe siècle, dans une traduction inédite et commentée qui restaure les passages censurés à l’époque.
Entre esthétisme exquis et explorations philosophiques ou psychologiques, l’unique roman d’Oscar Wilde interroge les limites de la moralité, les conséquences de nos choix et l’essence même de la beauté.
Mon avis :
Notre trio de Vils Tentateurs est de retour pour vous donner envie de vous lancer dans un classique qu’Audrey, Steven et moi avons totalement redécouvert ce weekend au profit de la nouvelle superbe traduction commise par Michèle Zachayus pour Le Chant du Cygne. Dorian Gray est une histoire que beaucoup croient connaître, que certains ont même déjà lue, mais qu’on peut totalement redécouvrir et apprécier encore plus grâce à ce travail dépoussiérant !
Pour commencer, je salue une fois de plus le travail éditorial du Chant du Cygne, qui nous offre dans sa version papier un très bel objet respectant la charte graphique de l’éditeur, et qui dans sa version numérique offre celle-ci à un prix libre sur le net. Une initiative rare à saluer vu le travail de qualité qui a été fait ! En effet, l’éditeur s’est pris de passion pour ce texte et a fait appel à une traductrice dont il connaissait la belle plume pour l’épauler dans ce superbe projet : redonner son lustre original à un texte qui s’était un peu encroûté dans la version française mais surtout qui avait été censurée à l’époque de la sortie de sa 2e édition en Angleterre et qui était celle que beaucoup d’entre nous avions lu dans sa traduction ensuite. Ici entre restauration des mots utiles enlevés mais suppressions relevant d’un vrai travail éditorial et ajout pour enrichir l’oeuvre, l’éditeur et sa traductrice ont fait un travail d’orfèvre !
Pour m’immerger au mieux dans cette expérience de relecture, Dorian Gray étant un de mes classiques préférés, j’ai pris avec moi à la fois le texte original censuré donc et la dernière traduction que j’avais achetée qui était superbement illustrée par Enrique Corominas, dont vous retrouvez ici les illustrations (absentes de la version du Chant du Cygne, je précise au cas où). J’étais donc parée pour relire en mettant cette nouvelle traduction à l’essai face au texte d’origine et à sa précédente traduction. Verdict ? Qu’est-ce que j’ai aimé le travail de Michèle Zachayus et d’Ivan Kwiatkowski. Comme celui-ci l’explique dans sa Postface en ligne, ils ont non seulement dépoussiéré le texte pour le rendre plus actuel tout en lui gardant son lustre, mais en plus ils ont restauré les parties censurées à l’époque pour éliminer les allusions homosexuelles pourtant forts intéressantes, et ils ont enrichit encore l’expérience avec de nombreuses notes de bas de pages creusant le contexte. Une merveille !
Je connaissais l’histoire, je connaissais le texte et pourtant je l’ai totalement redécouvert ici, mes camarades de même ! J’ai adoré la plume plus moderne que ses prédécesseurs de Michèle. Elle parvient à rendre le texte moins ampoulé, tant en lui conservant sa malice, sa noirceur et sa saveur de l’époque. Elle le simplifie et en garde la richesse, comme dans une certaine phrase où tout simplement elle remplace « restaurant » par « estaminet », ça a quand même une autre gueule ! ou encore lorsqu’elle évoque les boîtes à vinaigrettes (une totale découverte pour moi !). J’ai adoré ! Grâce à elle, j’ai eu l’impression de tout redécouvrir mais sous un éclairage plus vif et je crois que Steven, notamment, l’a ressenti tout comme moi. Je me rappelais avoir beaucoup aimé les premières pages qui étaient un superbe plaidoyer pour l’art, mais je m’étais un peu ennuyée et perdue ensuite dans ce que je pensais être des élucubrations de l’auteur sur la vie dans les salons mondains et autres lieux de mondanités. Sous la plume de Michèle, j’ai au contraire retrouvé le lustre de ces lieux, j’ai eu l’impression d’en sentir les odeurs, d’en palper les ambiances, et j’ai revécu avec passion les conversations artistiques et philosophiques qui y avaient lieu, Audrey de même ! Pourquoi cela ? Parce que la traductrice recontextualise tout grâce à des notes forts intéressantes, ce qui aide énormément le lecteur.
J’ai ainsi découvert un Wilde bien plus proche que dans mon souvenir du Fantôme de Canterbury, mon texte préféré de l’auteur. J’y ai retrouvé sa malice, sa noirceur, sa capacité à nous faire basculer peu à peu dans un fantastique sordide qui en a inspiré tant d’autres après, n’est-ce pas monsieur l’auteur de Blackwater. L’ambiance poisse et malaisante de Dorian est magnifique ici. C’est vraiment un anti-héros superbement écrit dont l’évolution fait frissonner et interpelle sur le rapport des hommes aux femmes, à leur sexualité, à leurs amis et entourage également. Je m’interroge beaucoup sur ces hommes dans les textes anglais du XIXe qui ont des relations troubles à l’autre sexe et qui ne veulent soit pas grandir, soit pas vieillir, cela semble cacher de sérieux traumas qui émergent ici à travers la littérature et c’est fascinant à lire.
J‘ai aussi redécouvert toute la dimension artistique, littéraire et philosophique de l’oeuvre à travers cette nouvelle traduction, qui en renforçant tout le contexte grâce à ces notes m’a permis de voir les choses autrement. Audrey avec qui j’ai pas mal échangé sur le sujet a aussi aimé cette utilisation bénéfique des notes de la nouvelle traductrice. J’ai beaucoup aimé suivre l’évolution des arts et des lettres dans les échanges des personnages et leur vie artistique. J’ai trouvé très intéressant de voir leurs multiples influences modernes et passées, anglaises et étrangères. Tout le discours philosophique sur l’art et le beau et notre rapport à eux est fascinant, de même que celui sur la création et l’inspiration qui laisse songeur. L’auteur remue ainsi son lecteur et le pousse à lui-même s’interroger sur ces questions à travers ses personnages et leur évolution.
Il y a également une dimension sociétale évidente ici, qui est encore plus criante avec cette nouvelle traduction. Hormis la dimension homosexuelle qui est ainsi restaurée, ce qui permet de mieux cerner la relation entre Dorian et son ami peintre Basil, il y a aussi des lignes passionnantes et fascinantes sur les relations entre ces hommes privilégiés et les femmes. J’ai beaucoup aimé retrouver l’ambiguïté de la relation des deux hommes et les sentiments de Basil qui rejaillissent dans sa peinture et perturbent l’air de rien Dorian par ricochet. Mais j’ai encore plus aimé la façon très sombre dont Dorian voit ses relations aux femmes, l’auteur n’hésitant à dénoncer cette « utilisation » de celle-ci : actrice, cocotte, prostituée ou épouse, aucun homme ne brille ici, tous ont des choses à se faire pardonner et les femmes ne sont pas des victimes consentantes mais des victimes que le lecteur doit bien noter pour ne pas reproduire cela. L’auteur dresse ainsi un portrait assez juste des lieux de plaisir et de divertissement de ces messieurs et de leurs mésusages à revoir.
Je pourrais encore écrire sur le plaisir que j’ai pris à suivre le basculement du protagoniste principal dans la folie à travers un Wilde qui use du fantastique gothique à la mode avec beaucoup de modernité et d’urbanité dans le secret de ces demeures victoriennes et ces lieux de perdition, mais je vais m’arrêter là pour ne pas vous gâcher le plaisir de la découverte !
Sachez en tout cas que vous tenez là, à mes yeux, la traduction la plus fidèle à l’esprit de l’oeuvre d’origine. Cette nouvelle traduction vous permet de toucher toute la richesse des différentes dimensions de l’oeuvre et vous aurez rarement un tel accompagnement contextuel accessible aussi facilement en cours de lecture. Si en plus, vous avez la chance comme moi de pouvoir accompagner ce moment privilégié, au milieu des mots sombrement magiques de Wilde, des illustrations de Corominas, ce sera une lecture inoubliable.
Merci encore à Steven et Audrey de m’avoir accompagnée ici 😀
(Merci au Chant du Cygne pour ce merveilleux moment)
-> N’hésitez pas à lire les avis de mes compagnons de lecture pour parachever de vous convaincre : Audrey et Steven.
Magnifique, mille mercis pour la découverte !
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Avec très très grand plaisir tant cette relecture m’est allée droit au cœur ! ❤️
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Quelle magnifique chronique qui retranscrit toute la richesse de cette nouvelle traduction et la force d’un roman qui cache en son sein de multiples qualités ! Tu as su aussi bien mettre en avant le travail de la ME et de la traductrice que le talent de l’auteur. Bravo !
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Merci beaucoup ! J’avoue que ça me tenait à coeur tant leur travail à tous m’a transportée, alors je suis ravie d’avoir réussi et merci de m’avoir accompagnée ❤️
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J’avoue que c’est un classique qui ne m’a jamais vraiment attirée (surtout que j’ai l’impression de déjà connaître l’intrigue), mais ce que tu en dis réveille mon intérêt 😉
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On est tous plus ou moins sensible selon les sujets mais ravie d’avoir suscité ton intérêt ici 😁
Je croise les doigts, c’est vraiment la meilleure version pour se lancer 😉
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Magnifique chronique ! Je viens de decouvrir Le fantôme de Canterville que j’ai adoré alors je vais devoir me procurer cette traduction, la précédente ne m’ayant pas transportée.
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Merci du compliment !
C’est tellement savoureux le Fantôme de Canterville
Ravie de te tenter avec cette version. J’espère qu’elle te plaira autant qu’à moi 🙂
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Une nouvelle traduction du portrait de Dorian Gray, voilà qui est intéressant. Et tu en parles tellement bien. J’ai hâte de lire les retours de tes deux complices sur ce coup !
Merci Tachan 😊😋😘
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Merci ! J’ai aussi hâte de lire leur avis complet.
En tout cas, je suis la première surprise de telles différences entre les traductions.
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Oui c’est étonnant cela !
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Rien à dire, tu donnes follement envie de découvrir ce texte ! J’ai lu Dorian Gray dans sa version française il y a quelques années maintenant, et clairement, en découvrir une traduction plus fidèle me motive bien ! Je le note !
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Ça me fait très plaisir ! Je pense vraiment que le lire avec cette traduction dépoussiérée permet de totalement redécouvrir le texte, alors j’espère que tu oseras franchir le pas 🙂
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D’après la description que tu en fais, je trouve que le film du même titre, de Olivier Parker, s’en rapproche beaucoup plus que de la version censurée. L’as-tu vu ? Je crois que je le recommande, malgré les libertés prises par le réalisateur 🙂
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Non, je ne savais pas que le roman avait été adapté donc ça m’intéresse beaucoup. Je prends note et je vais voir si je le trouve. Merci 😀
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Et bien quel avis pour une telle œuvre ! A l’image de ce classique, percutant, vif et vil !
J’ai adoré redécouvrir ce roman grâce au merveilleux travail réalisé par la maison d’édition qui redonne vie et âme au travail d’Oscar Wilde.
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Merci beaucoup. J’avais à coeur de leur rendre hommage car j’ai vraiment adoré cette relecture. Y a plus qu’à tenter le max de monde avec nos avis 😉
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Lu il y a quelques années, je n’en garde pas un souvenir déplaisant. Mais cette nouvelle traduction plus actuelle me tente.
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Je n’en gardais pas un mauvais souvenir non plus, mais pas un fantastique non plus, contrairement aux thèmes véhiculés. Ici, ça prend une toute autre couleur alors j’espère que tu te laisseras tenter ^-^
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