Livres - Mangas / Manhwa / Manhua

Paradise Kiss d’Ai Yazawa

Titre : Paradise Kiss

Auteur : Ai Yazawa

Editeur vf : Kana (shojo)

Année de parution vf : 2004-2005 (première édition)

Nombre de tomes : 5 (série terminée) – Existe aussi en format intégrale

Histoire : La très sérieuse lycéenne Yukari n’a qu’une obsession: réussir son entrée à l’université. Son assiduité aux études n’a d’égale que sa phobie excessive des gens. Aussi, quand un garçon tente de l’aborder, puis qu’un travesti lui barre la route, elle s’effraie au point qu’elle s’évanouit! Lorsqu’elle se réveille au « Paradise Kiss », une sorte de bar tenant lieu d’atelier de couture, elle apprend que ses « agresseurs » sont des étudiants d’une école de mode qui travaillent à leur création de fin d’année. Isabella, le travesti, Arashi, le garçon, et Miwako, sa copine, s’activent à réaliser une robe dessinée par leur ami Georges. En raison de sa taille et de sa minceur, Yukari est pour eux le mannequin idéal pour présenter ce modèle. Quels sacrifices devra-t-elle faire pour entrer dans ce monde bizarre qui l’attire pourtant ?

Mon avis :

Tome 1

Ayant terminé avec succès ma relecture du génial Gokinjo, j’ai logiquement enchaîné avec une petite relecture de Paradise Kiss, spin-off de la saga qui reprend le même univers mais avec la soeur de Mikako, le fils de Risa et celui de Hiroyuki.

L’histoire de ce titre est assez particulière. Série 5 tomes à l’origine mais existant aussi sous forme d’un volume unique chez nous, dont on aimerait bien une réimpression au passage, la série est sortie au Japon non pas dans un magazine de prépublication comme d’habitude mais dans un magazine de mode, le Zipper, entre 2000 et 2003. Il est arrivé ensuite très rapidement chez nous, en 2004, alors que le tome 1 de Gokinjo venait tout juste de sortir lui aussi un mois plus tôt. J’ai donc en fait, à l’époque, découvert les deux titres en parallèle ^^!

Ainsi, comme Gokinjo la série est forcément très orientée mode, peut-être même encore plus, ce qui n’est pas pour me déplaire. La parution dans le Zipper a d’autres incidence du côté de la narration avec des chapitres un peu plus décousus les uns par rapport aux autres au début, plus courts aussi, un air plus mature et surtout un format plus grand, inhabituel chez l’autrice, mais parfait pour admirer ses superbes dessins. D’ailleurs, je préfère largement la première édition de Kana pour cela à l’intégrale version pavé sortie ensuite… Dans la première édition, on a des couvertures qui font gravure de mode et chaque tome s’ouvre sur une des créations de George sur son mannequin (l’objet) avec un papier calque du meilleur effet. J’adore !

Mais venons-en à l’histoire. Celle-ci se passe donc longtemps après la fin de Gokinjo, on y retrouve la petite soeur de Mikako, Miwako, qui va désormais elle aussi à Yaz’Art, l’école de mode où a été sa soeur. Mais ce n’est pas elle l’héroïne, c’est Yukari, aka Caroline, une lycéenne banale qui tente de passer les concours des grandes universités pour assurer son avenir. Elle n’a rien à voir avec la mode mais le hasard va changer les choses quand Arashi (fils de Risa) va tomber sur elle et même flasher sur elle, voyant en elle, le mannequin parfait pour leur défilé de fin d’année. Le styliste de ce défilé, c’est l’excentrique George, un gentleman aux cheveux bleus complètement farfelu. La vie de Yukari va prendre un tournant à 180°.

Au début, j’ai eu du mal à m’habituer au changement de ton de Paradise Kiss par rapport à son aîné. Celle-ci était plus farfelue, plus décousue, mais sa maturité m’a convaincue au fur et à mesure. J’ai beaucoup aimé la présence bien plus importante que dans la première série de la mode et de la création artistique. L’autrice fait un excellent choix en situant son histoire dans le même cadre mais en n’en faisant pas une copie. Elle choisit un angle différent en se centrant sur le futur défilé de nos élèves et en choisissant des héros qui n’ont rien à avoir avec Gokinjo, les enfants et soeurs de la première série étant plutôt les personnages secondaires. Bref, elle fait du neuf avec du vieux et c’est très réussi.

Les personnages sont vraiment typés et donc accrocheurs. Yukari est l’exemple même de la jeune lycéenne japonaise typique mais elle cache une beauté froide et intemporelle que nos apprentis artistes vont révéler. C’est une jeune fille attachante car peu sûre d’elle. Elle ne sait pas encore ce qu’elle veut faire dans la vie. Elle est gentille et maladroite également aussi bien en amitié qu’en amour et ça la rend particulièrement touchante. George, lui, est aux antipodes. Il affiche une assurance à toute épreuve. C’est le styliste farfelu et racé par excellence. Il a aussi un côté très mystérieux. Il n’a aucune gêne à s’avouer bi ou à faire du rentre dedans à l’héroïne, mais le styliste est SA grande passion.

A côté d’eux, nous avons un quatuor de personnages tout aussi marquants et travaillés, et ce dès le premier tome. Miwako et Arashi, les rejetons de la première série, sont l’autre couple de l’histoire mais leur romance n’a rien de simple. L’autrice l’avait déjà esquissé à la fin de Gokinjo. Il y a en effet un triangle amoureux complexe autour de Miwako, cette jeune fille qui souffre depuis toujours de terribles angoisses. Arashi, derrière son look grunge, est adorable mais très possessif envers elle. Miwako lui cache pas mal de choses. C’est donc une relation potentiellement explosive. La cinquième roue du carrosse, c’est Hiroyuki, le fils de l’ancien patron du bar qu’ils ont transformé en atelier, lui aussi connait Miwako depuis toujours et a / a eu (?) des sentiments pour elle. C’est le beau gosse premier de la classe typique et on le découvre ici à travers le regard de Yukari avec qui il va au lycée. Reste Isabella, homme ou femme, on ne sait au début, mais iel impressionne par son look très excentrique mais superbe, on dirait le/la grand(e) frère/soeur de la troupe.

Il y a une excellente alchimie entre eux. Les camarades de Yaz’Art bossent dans un bel esprit de camaraderie sur les pièces de leur défilé et plus. En effet, ils ont déjà créé leur propre marque et en vise la vente dans des boutiques de mode. L’autrice glisse également beaucoup d’humour dans leurs échanges, des blagues parfois même en-dessous de la ceinture qui m’ont bien amusée, c’est super agréable. Ça crée un cocon plein de bonne entente comme dans Gokinjo. La seule différence, c’est qu’ici on sent aussi qu’il y a des turpitudes cachées en chacun et entre certains qui pourraient faire tout exploser à un moment donné.

L’arrivée de Yukari va bouleverser un peu l’équilibre du groupe. Miwako va tout de suite l’adopter et la rebaptiser (lol), ce qui lui fait enfin une amie proche fille, ce dont elle avait besoin. Quant à George, il semble pour le moment se plaire à la titiller, la tester et il y a des étincelles entre eux. Mais tout va un peu vite à mon goût, Yukari se précipitant un peu tellement elle tombe sous son charme mystérieux et ravageur.

Ravageurs, les dessins le sont également. L’autrice a encore gagné en profondeur et en finesse depuis Gokinjo qui avait bien 5 ans de plus. Le découpage des cases est vif et percutant, le rythme est d’emblée rapide même si l’autrice se réserve des petites poses humoristiques ou romantiques. Le design des looks des différents personnages est juste sublime aussi bien les pièces de modes que les looks plus casual. Je suis complètement sous le charme. Le trait d’Ai Yazawa est toujours aussi expressif et varié, notamment dans les visages des personnages. Ils font toujours autant grandes gigues mais c’est mieux proportionné que dans Gokinjo. J’ai juste du mal avec la tête de George, son cou est parfois bien trop épais et l’implantation de ses cheveux trop haute, ça me perturbe. Pour le reste, c’est sublime et l’édition de Kana est à la hauteur.

Un dernier mot sur celle-ci, dans ma première édition, il y a pas mal de coquilles, textes inversés dans les bulles ou entre les bulles et les pensées hors bulles des personnages, erreurs de noms, petites fautes d’orthographe. Pour que je les note, il faut vraiment que ça fasse tache, parce que souvent j’y suis insensible et je ne les vois pas ^^!

Avec un premier tome vraiment dynamique et percutant, Paradise Kiss offre une belle suite à Gokinjo, une suite qui propose vraiment quelque chose de plus avec ses personnages plus matures, ses propos plus diversifiés et sa mode bien plus présente sûrement grâce au choix du magazine de publication. Le grand format lui convient à merveille. On s’amuse énormément mais on ressent aussi de belles bouffées d’émotion et on sent que le drame et les questions existentielles ne sont jamais bien loin. J’ai hâte de relire également la suite !

Tome 2

Comme avec Gokinjo, décidément l’écriture de ParaKiss est très fine et cache bien des choses derrière les traits d’humour où l’autrice s’amuse à interpeler ses lecteurs et sa romance un brin précipitée et flamboyante.

Dans ce deuxième tome, tout s’accélère. Yukari qui s’est nouée d’amitié avec les élèves de la Yazawa school est de plus en plus perdue face à ses choix de vie au point d’en devenir insupportable. Il lui faut un bon coup de pied aux fesses pour enfin se décider à bouger et faire quelque chose d’autre que chouiner.

Ai Yazawa a le chic pour écrire des personnages que j’aurais détesté ailleurs. Dans ce tome, Yukari est une jeune fille peu sûre d’elle qui passe son temps à geindre et à faire des reproches aux autres au lieu de se remettre en question. C’est très agaçant. Elle est aussi totalement dépendante des autres. Elle n’arrive pas à exister sans eux. Elle travaille pour faire plaisir à sa mère, a rejoint le groupe par amitié pour Miwako et est totalement accroc à George au bout de quelques jours à peine. Sa dépendance la rend agaçante mais touchante également.

Alors que la romance va bien trop vite à mon goût et pourrait avoir un côté artificiel et peu sincère, en fait, elle se révèle être le moteur du changement de l’héroïne. George la pousse dans ses retranchements. Il n’est pas prêt à accepter quelqu’un de dépendant et de geignard et il a le courage de lui dire. Alors il est détestable à ce moment-là car il n’y met aucune pincette, mais c’est puissant ! J’ai beaucoup aimé cette transformation que j’ai senti alors s’opérer sous le marivaudage.

L’autrice se joue de nous. Elle brosse le portrait d’une romance légère mais plein de drame où tout est un peu grandiloquent et théâtral, mais derrière elle décide de faire un portrait assez fin de la jeunesse. Elle nous montre comment poussés par la pression de leur parent certains pourraient craquer et se rebeller. J’aime beaucoup ce qu’elle dénonce du manque de communication entre les parents et les enfants, dans le cas de Yukari, mais aussi de la dépendance de certains parents envers leurs enfants, dans le cas de George. D’ailleurs la découverte du bagage familial de celui-ci est l’un des grands moments de ce tome. On le découvre enfin plus humain, moins étrange et plus réel. Il se dévoile être vraiment complexe et à fleur de peau.

Les autres personnages sont pour le coup un peu laissé de côté. Les anciens de Gokinjo viennent servir de caméo de luxe apportant leur douceur et leur excentricité. J’ai été ravie de voir la fille de Mikako et Tsutomu et de croiser ses derniers, de voir ce qu’ils sont devenus. Le reste de la bande de Yaz’art est toujours aussi sensass. Je m’amuse beaucoup des échanges pimentés entre Arashi et George. Je suis touchée par la romance entre Arashi et Miwako et j’aime bien Isabella, même si c’est le personnage le moins développé avec Hiroyuki. Mais on les aperçoit trop peu dans ce tome à part pour venir faire des traits d’humour et soutenir l’héroïne, car l’autrice centre tout sur sa métamorphose.

Cependant, j’ai vraiment été charmée par l’évolution de l’histoire, qui a un beau souffle de rébellion. Alors oui, ça braille et ça s’agite beaucoup. Tout va très vite. C’est tout feu tout flamme avec un petit côté théâtral surprenant. Les héros sont parfois agaçants mais c’est pour mieux ruer dans les brancards et c’est jouissif jusqu’à la fin ! Quelle belle troupe de rebelles !

Tome 3

C’est toujours aussi intensément dramatique mais tellement puissant que ça me prend à la gorge et me serre vraiment le coeur.

Comme dans sa série mère, Gokinjo, l’autrice fait virevolter les sentiments de ses personnages de manière fulgurante et dévastatrice, avec un côté très dramaqueen qui peut surprendre mais que j’adore personnellement. Elle joue encore une fois énormément avec son lecture créant une vraie fausse sensation d’échange entre nous très immersive. J’adore. Et cette fois, les clins d’oeil à Gokinjo et ses anciens personnages sont vraiment nombreux.

Yukari semble avoir trouvé sa voie après avoir posé pour Mikako et Happy Berry, finit les études, place au mannequinat, mais ce n’est pas facile quand on est mineure et qu’on a fugué de chez soi. Ai Yazawa sous couvert d’une histoire ma foi assez rocambolesque évoque avec sensibilité les drames de l’adolescence ou quand les enfants ont le sentiment de ne plus parvenir à communiquer avec leurs parents et se sentent rejetés par eux.

Yukari est en pleine détresse émotionnelle ce qui la rend particulièrement instable. On pourrait détester ce trait de caractère qui la rend extrêmement volatile et changeante, qui la fait beaucoup pleurer et pas mal accuser les autres des moindres maux, mais Yukari sait aussi se montrer très honnête envers elle-même et vraiment fonceuse. Du coup, j’aime vraiment l’évolution de ce personnage très humain et à fleur de peau.

Son couple avec George est étrange. Il fonctionne sur un mode parfois à la limite du toxique si on le prend au premier degré, mais quand on creuse on découvre une force rare chez de tels personnages. L’autrice nous révèle de plus en plus de choses sur le passé de George et ce qui a fait de lui cet être si étrange et si intransigeant envers les femmes. La rencontre avec sa mère explique bien des choses à Yukari, ce qui lui fait prendre conscience de ce qui se passe entre eux et des raisons de leurs fréquents déchirements. J’ai beaucoup aimé cette complexité non dite mais si bien montrée. George et elle se motivent ainsi l’un l’autre, comblant les vides de leurs coeurs. C’est poignant et déchirant.

Les autres personnages ne sont pas en reste. Bien que vivotant autour d’eux, on voit un Hiroyuki qui s’inquiète de plus en plus pour Yukari et agit en conséquence, venant troubler le couple à l’équilibre instable formé par Miwako et Arashi. Ces derniers m’émeuvent beaucoup. On sent un immense amour chez Arashi et une maturité bien cachée lui donnant envie de protéger et aider tout le monde, mais il est mis à mal par ses sentiments pour Miwako car celle-ci hésite toujours entre lui et Hiroyuki, ce qui ne fait souffrir. Alors qu’ils ont l’air du couple fusionnel parfait les failles sont belles et bien là et font mal.

Cerise sur le gâteau, alors que les romances et drames divers occupent pas mal d’espace, l’autrice ne perd pas de vue cette fois l’univers créatif de sa série. Alors entre deux parties de jambes en l’air (bien plus présentes que dans Gokinjo, on sent l’évolution du public 😉 ), nous avons droit à de bons développements autour du défilé de nos artistes, des créations de George, du travail de Mikako et Tsutomu que l’on découvre, et du lancement de Yukari dans le mannequinat. Cela permet de recroiser des anciens de Gokinjo pour mon plus grand bonheur et de voir ainsi ce qu’ils ont devenu et comment la marque Happy Berry évolue, ce qui m’avait un peu manqué à un moment dans la série précédente.

Arrivée à la moitié de la série, je ne peux que continuer à clamer mon amour pour celle-ci. Certes elle n’est pas sans défaut. Son personnage phare LGBT est totalement sous-exploité, l’autrice en fait parfois des caisses côtés humour grinçant, le drame est également ultra présent et poussé au bout du bout par moment, mais il se dégage quelque chose de tellement fort des drames romantico-personnels des héros que je suis emportée à chaque fois dans le tourbillon de leurs émotions d’artistes.

Tome 4

Malgré une trame dramatico-romantique toujours aussi passionnante et des dessins de plus en plus beau, ce tome marque un peu le pas et je ne suis pas forcément fan de tous les noix narratifs de l’autrice.

La partie centrale consacrée à la quête d’indépendance de Yukari est très bien gérée, là je n’ai rien à redire, vraiment j’aime beaucoup. On ressent très bien la force qu’elle a réussi à puiser de ses nouvelles relations. Elle ose s’affirmer, elle devient plus indépendante, elle commence à se trouver. Alors certes cela ne s’est pas fait sans heurt, elle est ultra émotive, elle hésite beaucoup. J’ai du mal parfois avec sa relation avec George qui a un je ne sais quoi qui me dérange, comme si on frôlait la relation toxique. Pourtant quand on y regarde bien, certes celui-ci est étrange et mystérieux à l’extrême, limite cassant, la poussant toujours dans ses retranchements, mais je ne pense pas qu’il lui veuille du mal ni qu’il cherche à la dominer en aucune façon, au contraire il cherche à la faire grandir et assumer ses désirs.

Dans ce tome, j’ai aimé la confrontation de Yukari à sa mère, les avancées dans son devenir pro et perso. Ses choix sont crédibles en dépit de ses hésitations bien humaines. Mais à la pousser en avant, l’autrice éclipse totalement les autres. J’ai trouvé toute la troupe de Yaz’art bien en retrait, encore plus que d’habitude, même si l’autrice a essayé de développé un peu Isabella, la grande oubliée de l’histoire, avec le récit d’un épisode clé de son enfance, mais c’est surtout parce que ça a un lien avec George. La mangaka pousse plutôt le personnage d’Hiroyuki qu’on découvre un peu plus parce qu’elle est en train de mettre en place une nouvelle dynamique j’ai l’impression autour de Yukari et de George. J’apprécie moyennement, de 1/ parce que je ne vois pas l’intérêt de tout le chambardement autour du trio Miwako-Arashi-Hiroyuki pour accoucher d’une telle souris, de 2/ parce que ça m’agace de revoir l’éternel schéma du rival amoureux avec Hiroyuki d’un côté et Aso de l’autre…

L’arrivée de cette dernière est vraiment le gros point noir pour moi pour l’instant. Apporter encore une couche de drame et d’incertitude avec une fille qui a un certain vécu avec George est clairement de trop. Ça donne l’impression que l’autrice cherche un nouveau moyen de relancer son intrigue après avoir amené celle-ci à sa fin logique mais inaboutie avec le défilé. En effet, celui-ci est le point d’orgue dans ce tome mais il arrive bien trop vite dans l’histoire et beaucoup de pans de l’intrigues sont inachevés, il faut trouver comment rallonger la sauce, ce que je ne trouve pas hyper judicieux.

Heureusement, le défilé est un grand moment, aussi bien dans sa préparation avec des petits moments drôles et savoureux, d’autres plein d’émotions, que pendant qu’il y a lieu où il nous bluffe vraiment en faisant éclater aux yeux de tous le génie créatif de George et la majesté de Yukari sur scène. C’est un moment majeur dans l’histoire et l’autrice le met parfaitement en scène du début à la fin, fin surprenante d’ailleurs 😉

Alors même si j’adore toujours l’ambiance de cette série et que je me suis énormément attachée aux personnages, je trouve ce tome un peu en-dessous à la fois à cause du choix de tout centrer sur Yukari, mais également parce que le moment clé de l’histoire arrive trop tôt et oblige l’autrice à faire un choix hasardeux, pour le moment, pour relancer l’intrigue. Je vais donc entamer la lecture du dernier tome en prenant quelques pincettes…

Arrête de juger les autres d’après tes propres critères !

Tome 5

Je suis bien embêtée parce que j’ai autant adoré qu’été gênée par ce dernier tome de Paradise Kiss, mais ce qui est sûre c’est que l’autrice m’a soufflé par la force des émotions de ses personnages. C’est la grande force de son écriture dans chacun de ses titres, je trouve.

Le tournant pris dans la dernière partie du précédent tome m’avait déjà un peu gênée avec l’arrivée d’une potentielle rivale pour Yukari, et effectivement ça ne se passe pas très bien. Ai Yazawa joue la carte de la jalousie qui vient tout dérégler pour provoquer le déraillement du train du groupe ParaKiss. On aime ou on déteste mais on ne peut pas y rester insensible. Elle porte à son paroxysme les relations compliquées de chacun des couples et des amis pour un final très riche et puissant de ce côté-là, mais elle ne fait pas cela sans maladresses.

Je vais d’abord revenir sur LE point qui m’a le plus gênée : la relation Miwako – Arashi. On découvre que celle-ci a débuté par un viol et celui-ci est complètement oblitéré, sous-estimé, retourné pour en faire un accident de parcours. Je dis non ! Quand je lis, « elle ne te disait pas non à toi mais à ta violence, c’est pour ça qu’elle t’a pardonné », je ne peux pas m’empêcher de trouver ça hyper malsain et dérangeant. Ainsi, cette relation qui depuis le début me semblait bancale, l’est même plus que ça, et je trouve ça désolant que l’autrice normalise le viol, l’emprise et autres relations toxiques…

A l’inverse, entre Yukari et George même si ça semble compliqué, étrange et pas très normal, en fait, c’est LA relation la mieux construite. L’autrice nous explique à merveille la limite floue entre muse et amant(e) dans le milieu de l’art, la souffrance que l’on peut ressentir quand on s’en compte, la complexité des sentiments alors en jeu. La relation entre George et Yukari est on ne peut plus réelle. Ils ont chacun leurs cadavres dans leur placard mais j’ai trouvé superbe la façon dont ils réalisent tristement la limite de leur relation et en tirent les conséquences. C’est sublime et poignant !

Du côté de la mode, j’ai eu ce que je voulais, un discours honnête et réaliste. Yukari se lance vraiment dans le mannequinat et on découvre les joies et les limites de ce métier tranquillement, subrepticement, avec elle. George, lui, n’est pas un styliste pour le prêt-à-porter et il en tire toutes les conséquences même si parfois c’est un peu flou et compliqué pour lui. J’ai adoré suivre son parcours avec ses choix chaotiques, mais également sa confrontation enfin avec son père. Finalement Aso fut vraiment utile à l’histoire et sa relation avec George est elle aussi plus compliquée qu’on aurait pu le croire au premier abord.

Graphiquement, j’ai encore vécu des moments sublimes avec un trait vraiment parfaitement maîtrisé, l’autrice assoit encore ce qui est SA touche. Ce mélange de décors photographiques incrustés avec en premier plan des personnages filiformes aux jambes interminables ultra stylés. Elle a une richesse expressive folle aussi bien pour montrer le drame des personnages, leurs émotions à vif, mais aussi pour nous faire rire. Ses personnages sont tous ultra looké du premier au dernier, et la multitude de tenues qu’elle a inventée est incroyable, un vrai régal pour les yeux. C’est sans parler du découpage et de la mise en scène qu’elle élabore qui font de ce titre une lecture vraiment marquante.

Si vous cherchez une bluette passez votre chemin, mais si vous êtes prêts à vibrer avec ses artistes, à faire malmener votre petit coeur et à lire des romances qui prennent aux trippes et ne vous confortent pas, n’hésitez pas à entrer dans la danse et à venir découvrir le sublime univers de ParaKiss.

Les plus belles réussites commencent souvent par des débuts modestes.

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27 commentaires sur “Paradise Kiss d’Ai Yazawa

  1. Hé bien ça donne fort envie d’aller les emprunter ! Tu fais bien de resituer la série car pour les gens comme moi qui ne connaissent pas du tout la mangaka, ça peut être utile. Par exemple je pensais la lire en premier mais je vais peut-être quand même lire Gojinko d’abord.

    Enfin, ce sera quand je pourrai aller en médiathèque faire la razzia !

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    1. Ravie de te donner envie de lire cette petite. Quand tu auras mis la main dessus, je pense que tu pourras te faire plaisir à psychanalyser tout ça et y a de quoi faire ><
      Oui, j'ai l'impression que Paradise Kiss est plus connu que Gokinjo et tu ne dois pas être le seul à ignorer qu'il faut lire celui-ci en premier ^^! Contente de t'éviter cette erreur 😉
      Bonne future découverte, je croise les doigts que ça se débloque avec tes média.

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      1. Snif ils pourraient quand même être clair et vous dire ce qu’il en est, navette ou pas navette et jusqu’à quand, même si je me doute que ça doit pas être facile pour eux ^^!

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      2. Oui, je les pardonne car je sais ce que c’est l’organisation actuellement dans les structures municipales, et comme là c’est un réseau, ça doit être encore pire.

        Eet comme j’ai appris que j’étais cas contact et possiblement contaminé (on vient de faire le test,bébé l’a mieux vécu que moi !), je suis privé de médiathèques quelques temps. Et on peut pas acheter de manga en drive 😅

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      3. Oui, j’ai de quoi lire ! Rien que Level E de Togashi, j’ai feuilleté et vu la quantité de texte j’en ai pour une journée à lire les 3 tomes 🤣
        Et puis j’ai du CLAMP, quelques réceptions de chez Kana (ils m’ont pas envoyé & – And, mais je l’achèterai de mon côté).

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    1. J’avais adoré la bande son de l’anime à l’époque. C’est clairement une histoire vraiment marquante, c’est bien pour ça que j’ai voulu commencer par ce diptyque quand je me suis lancée dans la relecture de cette autrice 😊

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  2. J’avais lu la série sans savoir que c’était un spin-off !
    En tout cas, j’avais bien aimé, mais sans plus, je pense que l’univers de la mode, qui ne me parle pas du tout, y est pour beaucoup. Et je dois avouer que je suis beaucoup plus réservée que toi quant aux graphismes…
    Mais à la lecture de ton avis, je me rend compte que d’une part, j’ai oublié beaucoup de choses, dont cette histoire de viol ! Et que d’autre part, rebutée par l’esthétique, je n’ai probablement pas accordé toute l’attention que cette série riche et complexe méritait, d’autant que je l’ai lue au début de mon initiation aux mangas…

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    1. C’est vraiment le drame, c’est les éditeurs avaient fait leur taf, les lecteurs n’ignoreraient pas cela V.V
      Effectivement, ma sensibilité au monde de la monde a grandement joué ici et je peux comprendre que ce ne soit pas ton cas, idem pour les dessins.
      Ça me fait dire que peut-être que Je ne suis pas un ange, que je suis aussi en train de relire, pourrait mieux te convenir. Le titre est plus ancien et elle a un trait assez différent, plus doux, que j’adore. L’histoire est également adorable avec des personnages super positifs. J’en reparlerai bientôt 😉

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  3. Bel article! Je suis en train de découvrir Nana depuis quelques semaines (enfin) et j’ai vraiment envie de découvrir plus l’œuvre de Ai Yazawa et ton avis me donne envie de foncer sur Paradise Kiss ahah. Mais peut être qu’il vaux mieux que je commence par Gokinjo?

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